Récapitulatif : Bonus : Ouverture des Danaïdes de Salieri. La parenté avec Don Gio est surprenante, et l’œuvre a été composée avant. (Ce n’est que partie remise, Salieri pompe
Come scoglio dans Falstaff.)
Juste pour mettre un peu de relativité dans les jugement définitfs.
1. La fin du Deuxième Quatuor de Britten, sa chaconne conclusive en ut majeur qui s’achève sur ce martèlement suspendu. On retrouve la chose de façon encore plus extrême dans le Quatuor de Kimmo Hakola. Je pensais que vous trouveriez facilement, c’est tout de même quasiment un tube.
2. Ibert, Persée et Andromède. Vous avez là une magnifique parodie de l’entrée de Bacchus dans Ariane à Naxos, avec un ténor totalement écervelé qui tue l’amant d’Andromède.
3. Françaix, A nous Paris. Le début de cet opéra d’une heure dont l’orchestre est constitué d’un quatuor de saxophones. (Je pensais en intéresser certains ici…) Le texte en est assez amusant, avec la description de Paris par sa superficie, et le chœur féminin qui scande sans cesse la négative.
4. Alma Schindler-Mahler, la fin totalement hallucinante de sa mise en musique du célèbre Waldseligkeit (Dehmel). Extrait de la deuxième de ses trois séries publiées de lieder (1815). C’était un peu vache, j’en conviens. Vous entendez le merveilleux Roland Pöntinen au piano (disque Bis).
5. Méhul, Joseph en Egypte. On a beaucoup présenté Méhul comme le « Beethoven français », et si cette qualification est excessive, elle n’est pas tout à fait trompeuse : les restes de classicismes sont vraiment, chez Méhul, transcendés par une très belle inventivité rythmique. L’étude de cette partition se révèle pleine d’heureuses surprises. Vous entendez ici Didier Henry.
6. Zemlinsky, Quatuor n°1, premier mouvement. Méconnaissable, n’est-ce pas ? On songe plutôt au Brahms folklorique. Quatuor La Salle.
7. Zemlinsky, Symphonie n°1, premier mouvement. Ici, on pense vraiment à Bruckner, mais bien d’autres moments font réellement penser à Brahms et, dans la Symphonie n°2, à Tchaïkovsky. James Conlon. Ces deux Zemlinsky voulaient révéler une face peu connue de ce grand pédagogue qu’on classe peut-être hâtivement parmi l’avant-garde compositionnelle – du moins lorsque c’est de façon univoque.
8. Francoeur & Rebel, Pyrame et Thisbé, fin de l’acte II. Merveilleux moment, avec cette haute-contre à contre-emploi, et la reprise presque ironique du thème du divertissement amoureux en guise de ritournelle. On entendu ici la technique singulière de Jeffrey Thompson, et Daniel Cuiller dirige l’ensemble Stradivaria.
9. Debussy, Le Balcon (dans les Cinq Baudelaire), orchestré façon opérette viennoise des années trente par John Adams. On dirait RVW qui aurait perdu son métier… Dieu merci, ce disque est épuisé depuis belle lurette. Christopher Maltman (fantastiques Don Quichotte à Dulcinée sur le même disque), BBC SO, Thierry Fischer.
10. Britten, A Charm of Lullabies, n°4 (A Charm). Très amusante « berceuse » du XVIIe siècle (Thomas Randolph) – je vous mets le texte à la fin de mon message. Magdalena Kožená, Malcom Martineau, dans le remarquable récital « Songs », chez DGG.
11. Jean-Michel Damase (né en 1925), Colombe. On dirait que le Richard Strauss le plus lyrique a voulu se fondre dans le moule Poulenc. Je trouve ça absolument merveilleux. Et la pièce d’Anouilh (l’opéra ne fait que couper, le texte est l’original, avec l’approbation de son auteur) est redoutable. Chef-d’œuvre (et amusant).
12. Halévy-Bizet, Noé. Cette partie ne saurait être de Halévy. Il s’agit du début de l’acte II, que je trouve incroyablement moderne pour quelque chose qui appartient au Grand Opéra à la Française, fût-il sur la voie de la décadence… On trouve aussi une scène de ménage assez unique à l’acte III…
13. A nouveau Joseph de Méhul, la très poétique romance de Joseph, avec son texte bizarrement perclus de ruptures, le tube de la partition avec « Vainement Pharaon ».
14. Langgaard, Fortabelsen/Antikrist. Dialogue abscons entre l’Esprit de Mystère et l’écho de l’Esprit de Mystère (deuxième tableau de l’œuvre). Le livret est franchement bizarre, mais c’est ici un très beau moment. La seule version en disque (celle de la radio danoise étant épuisée depuis deux décennies…), vraiment moyenne (Niels Muus, Danacord – et transposé en allemand…
) ; mais le DVD Dausgaard semble d’excellente facture, lui, et bel et bien chanté en danois !
15. Myaskovsky, Quatrième Quatuor, deuxième mouvement. On trouve chez Mya des mouvements plus ou moins folkloriques, souvent dans les mouvements lents, mais celui-ci est incontestablement le plus affirmé – et le plus jouissif. D’une façon générale, ce quatuor est le plus beau du lot, sous tous ses aspects. Les quatuors de Myaskovsky sont pour moi l’un des très grands corpus à connaître – exactement entre Tchaïkovsky et Chostakovitch. Ici dans l’interprétation extraordinairement engagée du Quatuor Taneïev.
Plus qu’une curiosité, un petit vivier de chefs-d’œuvres.
16. Rameau, Castor & Pollux (version de 1754). Une ariette virtuose et hors drame comme on en voit fleurir dans la « troisième école » de la tragédie lyrique. Spectaculaire, ici. Tom Raskin, John-Eliot Gardiner.
17. Ralph Vaughan-Williams, Along the Field, huit poèmes de Housman pour violon et voix. Christine Brewer, Michael Davis. Cette formation est relativement rare, sorti des Kafka-Fragmente de Kurtág, là est l’originalité. Mais pour le plaisir de vous piéger, je me doutais bien que personne n’oserait citer le banni. L’œuvrette n’est pas extraordinaire, on y entend certaines facilités dont le compositeur est coutumier, mais elle reste (relativement) sobre et écoutable.
Je vous rassure tout de suite, je me suis procuré le récital de Brewer pour les trois Marx (un peu les Hundley par curiosité), plus que pour les RVW, bien qu’ils aient plus suscité ma curiosité que les (très beaux) tubes de Strauss.
18. Deux extraits d’Oberon de Weber, avec ses très beaux dialogues anglais. (Minkowski/Anvers, Gardiner, Minkowski) On entend Maria-José Trullu en Puck.
19. Cette tragédie lyrique tardive n’est ni pas tragédie à proprement parler, et on est fort proche du XIXe siècle, puisqu’il s’agit de Tarare de Salieri, avec cette méditation dans le goût de Dardanus (en mieux). Plateau de luxe dirigé par Malgoire, on entend ici Nicolas Rivenq puis Howard Crook.
20. Chostakovitch, Satirī. Cinq pièces totalement fantaisistes, et ici interprétées avec un engagement assez hors du commun. Extrait du même disque « Songs » de Magdalena Kožená et Malcom Martineau chez DGG.
21. Damase, Colombe. La représentation d’opéra, qui singe ici Richard Strauss, puis Halévy et les belcantistes (avec des morceaux de Marseillaise dedans). Plus loin, on trouve d’autres compositeurs délicieusement parodiés, dont Gounod. Vraiment amusant, croqué aussi férocement que tendrement.
Voilà pour cette collection d’insolites, en espérant vous avoir amusé ou intéressé, ici ou là.
Texte du 10, comme promis :
Quiet!
Sleep! or I will make
Erinnys whip thee with a snake,
And cruel Rhadamanthus take
Thy body to the boiling lake,
Where fire and brimstones never slake;
Thy heart shall burn, thy head shall ache,
And ev'ry joint about thee quake;
And therefor dare not yet to wake!
Quiet, sleep!
Quiet, sleep!
Quiet!
Quiet!
Sleep! or thou shalt see
The horrid hags of Tartary,
Whose tresses ugly serpants be,
And Cerberus shall bark at thee,
And all the Furies that are three
The worst is called Tisiphone,
Shall lash thee to eternity;
And therefor sleep thou peacefully
Quiet, sleep!
Quiet, sleep!
Quiet!
Je retire les extraits dans deux jours, le temps que vous réécoutiez telle ou telle chose si nécessaire. Commentaires bienvenus, c’est le plus intéressant.