Muffat : Georg et Gottlieb

Amis amateurs de clavecins ce sujet s'adresse à vous.
Georg Muffat (1653-1704) est un compositeur et organiste autrichien qui a étudié à Paris avec Lully qui l'initie à l'art de la composition "à la française". Georg a 9 fils musiciens dont Gottlieb (1690-1770) est le plus célèbre.

J'ai découvert il y a peu de temps Gerog Muffat qui a beaucoup écrit pour clavecin et orgue.
Je trouve son style très léger (surtout pour un autrichien) et assez différent ce que l'on a l'habitude d'entendre en clavecin.
Je ne peux que vous conseiller de vous y pencher sérieusement.

Une petite sélection de CDs :



Ceci est l'intégrale de l'oeuvre pour clavecin et clavicorde de Georg Muffat





L'intégrale de son travail pour orgue en 2 volumes.


Et l'ensemble des pièces de clavecin de Gottlieb édité en 1739 sous le nom de Componimenti Musicali.

Je me suis essentiellement intéressé à Georg Muffat pour son oeuvre orchestrale, sorte de synthèse du style italien et du style français (je ne connais pas ses autres œuvres) La parenté avec Corelli et Lully est en tout cas évidente. Il a d'ailleurs étudié de 1663 à 1669 environ : "... sous le fameux Mr.J. Baptiste de Lully, entre mes autres applications à la Musique J'avais fait autre fois à Paris pendant six ans un assez grand Estude"
Coïncidence amusante, Johann Sigismund Kusser a suivi très exactement le même parcours en étudiant lui aussi six années à Paris auprès du Maître. Petite parenthèse : je recommande très fortement l'écoute des 6 suites de danses de JSK qui subsistent aujourd’hui et qui sont composées dans un style 100% français ("Le Festin des Muses", 2 vol. chez Hungaroton).

Deux disques ont été enregistrés chez Naxos par l'ensemble Musica Aeterna Bratislava. Les musiciens de cet ensemble ont collaboré étroitement avec le Centre de Musique Baroque de Versailles (CMBV) et cela s'entend.



Il existe aussi un disque chez CPO. Il a l'avantage de présenter d'autres oeuvres que celles enregistrées pour Naxos, à l'exception des concerti "Quis hic ?" et "Coronatio Augusta" qui aieux aussi au programme. Je ne le recommanderai pas pour autant. La musique est jouée de manière très carrée, avec une régularité de métronome, et l'ensemble Armonico Tributo est trop souvent poussif, il est difficile de ne pas avoir envie de dormir… Déjà que j’avais trouvé l’ensemble de Peter Zajicek trop prudent ou pas assez énergique lors de l’écoute des disques Naxos... Réflexion faite ça doit aussi venir de la musique de Muffat, volontiers lente, mais ce n'est pas une raison pour en rajouter une couche non plus ! Du disque CPO je préfère le concerto Nobilis Juventus, un parfait décalque du style lullyste.

WoO a écrit:

sorte de synthèse du style italien et du style français : la parenté avec Corelli et Lully est évidente.

Il a d'ailleurs écrit lui même dans la préface de ses concerti grossi

"Voicy la première élite de mes concerts mêlés de sérieux et de gay que je vous offre, mon cher lecteur, intitulée d'une harmonie instrumentale plus exquise, par ce qu'elle contient non seulement la vivacité et la douceur des airs de balets à l'imitation de feu Monsieur Baptiste de Lully en sa pureté; mais aussy certains endroits graves et exquis du pathétique italien..."

Tu connais ceux-là ?

Non, j'ai souvent vu le premier disque en magasin mais je ne l'ai jamais écouté.
Tu le connais ? C'est énergique ?

Pour le deuxième quel est l'ensemble ? (c'est écrit trop petit) J'aurais plutôt tendance à me méfier si c'est un vieil Harmonia Mundi.

Non pas encore. J'ai les 2 mais je ne les ai pas encore écouté.
Pour le deuxième c'est l'ensemble 415, Chiara Banchini et Jesper Christensen

J'ai pas bien compris ce qui était appelé concerti grossi dans les Naxos ...

Parce-que d'après les livrets des disques et internet Armonico Tributo c'est un recueil de ces "sonates pour peu ou beaucoup d'instruments" que Muffat a composé en s'inspirant des concerti grossi de Corelli ...
Alors est-ce que c'est la même chose ?

Armonico tributo, c'est un recueil de 5 sonates à effectif réduit (en principe 2 violons, 2 altos, violoncelle et basse continue).

Les 12 concertos grossos de chez Naxos font partie d'un autre recueil : Exquisitioris Harmoniae. Comme Muffat semblait adorer le latin, tous ont un titre latin, comme les 15 Suites des Suavis Harmoniae.

Après plusieurs écoutes des 2 versions de l'Armonico Tributo je ne sais toujours pas lequel je préfère.
J'aime beaucoup l'oeuvre en tout cas. Tout particulièrement les airs graves que je trouves particulièrement touchant.
Au niveau de l'interprétation l'ensemble Ars Antiqua Austria est un peu plus délicat, l'ensemble 415 est plus contrasté.

L'oeuvre pour orgue de Gottlieb Muffat vaut une oreille, à mon avis.

Il y a quelques disques.

Bon, en fait pour le Gottlieb, je n'arrive pas à rentrer dedans. Je pense que c'est assez creux à part quelques pièces peut-être.
Cette fois-ci, le fils ne semble pas avoir dépassé le père.

Etonnant que personne n'ait posté dans ce Fil depuis un an et demi. Le dernier message émanait d'ailleurs de toi...

Quels disques d'orgue de Gottlieb Muffat as-tu écoutés ?

Par un curieux hasard, j'étais justement en train d'écouter (de Georg) quelques extraits du Florilegium Secundum, joués par les archets de l'Academy of Ancient Music.

Ca nous avait été tellement chaleureusement recommandé par Shushu, nous n'osions pas dire que nous n'aimions pas, on croyait être passés à côté de chefs-d'oeuvre.

Mélomaniac a écrit:

Par un curieux hasard, j'étais justement en train d'écouter (de Georg) quelques extraits du Florilegium Secundum, joués par les archets de l'Academy of Ancient Music.

C'est pas un hasard, c'est de la synchronicité au sens Jungien, ou encore des coincidences parlantes, ou encore des évènements liés autrement que par causalité. Moi pendant les bonnes périodes ça m'arrive 10 fois par jour (j'exagère, disons par semaine). j'en ai un carnet rempli, et les meilleurs sont...hallucinants.

On m'avait recommandé ça (pas ici), mais franchement...non, intérêt documentaire sans doute mais à peine plus. On peut ne pas être d'accord avec moi!

Humm, ton avis ne motive pas à découvrir Gottlieb...

Bien que le répertoire organistique m'intéresse, dans la famille Muffat, j'en étais resté au père...

Chouette découverte, les concertos grossos de Georg Muffat, c'est pas aussi puissant que Händel (c'est assez antérieur en plus), et pas exactement aussi raffiné que Corelli, mais par contre il y a une fusion entre les styles français et italiens qui est vraiment stimulante; il a étudié à Paris avec Lully dans les années 60, puis a voyagé en Italie dans les années 80 et a rencontré Corelli, du coup on ressent vraiment au même degré ces deux influences, fusionnant parfois, s'affrontant souvent...
De la musique singulière et attachante, qui mériterait d'être plus diffusée!
Je précise que Muffat est à la fois le premier compositeur à avoir introduit le genre du concerto grosso en Allemagne, et le seul personnage de toute l'histoire de la Musique à avoir côtoyé personnellement à la fois Lully et Corelli, les symboles respectifs des traditions française et italienne...c'est pas n'importe qui!

A tout seigneur, tout honneur :
Muffat, Georg par Les Muffati - Peter van Heyghen.
Armonico Tributo
Cinq sonates de chambre en forme de concerto grosso

Hidraot a écrit:

Après plusieurs écoutes des 2 versions de l'Armonico Tributo je ne sais toujours pas lequel je préfère.
J'aime beaucoup l'oeuvre en tout cas. Tout particulièrement les airs grave que je trouve particulièrement touchant.
Au niveau de l'interprétation l'ensemble Ars Antiqua Austria  est un peu plus délicat, l'ensemble 415 est plus contrasté.

C'est exactement ce que je me disais, les "grave" sont souvent magnifiques et très prenants. C'est aussi l'impression que je retire du disque de la Holland Baroque Society avec Matthew Halls*. Et puis ensuite, j'ai du mal à accrocher (c'est sûrement la faute à Lully).
Mais je me laisse retenir par ce qui tire du côté "fantasticus", et par l'interprétation des Muffati toute de clarté et finesse.

https://outhere-music.com/fr/albums/armonico-tributo-ram-0502

*:

Sur les rapports de Haendel et Muffat (Gottlieb)

https://classik.forumactif.com/t9462-haendel-les-suites-pour-clavecin#1196049

Avec une chaconne de Muffat à casser les fauteuils. Issue des Componimenti Musicali (cités par Hidraot en début de fil).

• Georg MUFFAT: Apparatus Musico-Organisticus (1690): Douze toccatas pour orgue
René Saorgin (orgue Charles Boisselin, 1712 de Malaucène)
Malaucène, VII.1973
Harmonia Mundi

Très chouette disque (piqué dans la discothèque de mes parents), et une musique qui m’a apporté plus de plaisir que je n’en attendais (je m’imaginais à quelque chose de beaucoup plus melliflu.)

La nature très libre du genre toccata et l’assez ample développement de celles-ci permettent de bien se rendre compte du caractère extrêmement composite du langage de Muffat, probablement un des musiciens les plus cosmopolites de son temps (en fait un Savoyard qui aura étudié à Paris avec LULLY, voyagé dans toute l’Europe centrale habsbourgeoise et en Italie.) De fait, ces pièces frappent par leur grande versatilité: pour l’essentiel, on ressent dans l’écriture l’influence frescobaldienne (le caractère quasi-improvisé des ruptures rythmiques et des modulations combinées à un contrepoint très serré) et la sensibilité LULLYste (l’alliance singulière d’une ornementation qui souligne le hiératisme de lignes mélodiques presque déclamatoires et des «caractères de la danse»), mais avec aussi des traits de virtuosité qui rappellent le stylus phantasticus (par exemple dans les figuralismes de la Toccata n°6) - Muffat a côtoyé Biber à Salzbourg - et peut-être aussi l’influence de la manière sud-allemande d’un Kerll (mais je ne connais pas assez ce dernier point pour me prononcer.)

Une musique certes plutôt démonstrative et virtuose, mais la manière de Saorgin (cette façon vive et droite d’aller de l’avant, son espèce de brusquerie savoureuse et souriante, son goût pour les couleurs instrumentales pittoresques et contrastées) y exalte le caractère impondérable des bifurcations et l’invention timbrale plus que la dimension d’apparat. Les timbres brillants et typés (cette trompette!), très contrastés et par endroits un peu disjoints de l’orgue de Malaucène, son acoustique un peu étroite renforcent encore ce côté plus fantasque que vraiment pompeux (et le tirent vraiment du côté français.)

Du coup, je vais essayer de me procurer la version de Gester à Saint-Antoine l’Abbaye dont parle Mélo un peu plus haut (et qui comprend aussi la Chaconne et la Passacaille qui complètent ce recueil - lesquelles me font à présent très envie!)