Scarlatti - Il primo omicidio (Jacobs/Castellucci) OnP, 2019

Il primo omicidio ovvero Caino
Oratorio à six voix (1707)

Direction musicale René Jacobs
Orchestre B’Rock Orchestra

Mise en scène, décors, costumes & lumières Romeo Castellucci
Collaboration artistique Silvia Costa
Dramaturgie Piersandra Di Matteo, Christian Longchamp

Caino Kristina Hammarström
Abel Olivia Vermeulen
Eva Birgitte Christensen
Adamo Thomas Walker
Voce di Dio Benno Schachtner
Voce di Lucifero Robert Gleadow

Avec la participation de la Maîtrise des Hauts-de-Seine / Chœur d'enfants de l'Opéra national de Paris
(Abele Arthur Viard)

Je suis très intrigué par cette production.
Ma connaissance de Scarlatti se limite aux sonates pour clavier, et j'ignore tout de sa musique vocale.
Jacobs est un esprit rigoureux, qui ne s'aventurerait sans doute pas à monter une œuvre secondaire, et Castellucci est réputé pour sa culture biblique...
Donc intéressé par les commentaires de ceux qui iront.

Belcore

Cet oratorio est d'Alessandro Scarlatti. C'est son fils Domenico qui est connu pour ses sonates pour clavier. (Alessandro n'en a composé qu'une petite poignée, sa seule œuvre pour clavier un peu connue est son recueil de Toccate.)

À mon avis, c'est beaucoup moins réussi que son Moses und Aron.
L'une de ses idées les plus marquantes est de confier, après le meurtre d'Abel, les personnages sur scène à des enfants faisant du play back, tandis que les chanteurs sont dans la fosse (mais bien éclairés et sur une estrade, il ne les dissimule pas et ils continuent d'être expressifs). Voir Dieu (ou sa Voix) enfant a quelque chose d'assez fascinant (j'imagine qu'il s'agit de figurer la lignée d'Adam/Caïn ? En tout cas, la gaucherie des enfants et leur « petitesse » propre, créent un effet singulier, déroutant, dans cette histoire de péché, comme s'ils devenaient des petits pervers polymorphes ou bien des petites choses complètement dérisoires et esseulées - ne laissez jamais vos enfants sans surveillance !).

J'avoue ne pas avoir tout bien saisi (pourquoi les couleurs de l'arc-en-ciel ? et que le VERDE et le BLU écrit ?)... Je ne crois pas que cela appelle une interprétation univoque, mais c'est plastiquement le moins réussi des spectacles de Castellucci que je connaisse.

L'interprétation musicale est très bien, globalement, même si Jacobs fait sonner parfois l'orchestre de manière étrangement épaisse, mais la plupart du temps c'est nerveux et bien articulé. J'ai beaucoup aimé le Kristina Hammarström et Robert Gleadow. J'imagine par contre que le rôle de Dieu devait être à l'époque tenu par un castrat ? Je ne trouve pas le choix d'un falssettiste très pertinent, car la voix manque fatalement d'autorité.

Sur l'œuvre, j'ai trouvé ça inégal, mais c'était une première écoute. Tout le début de la seconde partie est vraiment très beau, avec des effets orchestraux assez originaux et des airs très réussis, jusqu'au retour d'Ève et d'Adam.

J'y étais mercredi soir pour une découverte de l’œuvre.
Beaucoup aimé la musique, tant sur le plan vocal qu'instrumental. Je n'ai pas trouvé les chanteurs extraordinaires, mais ils se sont globalement bien tiré de la partition. Les interventions des 2 trombones sont parfois surprenantes (le second ne m'a pas paru toujours très juste), et cela swingue parfois pas mal !
Autant j'ai pu être parfois éblouie par les mes de Castellucci (Salomé, Moïse et Aron), autant j'ai trouvé celle-ci d'un ennui redoutable, et les costumes parfois très peu flatteurs pour les chanteuses.
Heureusement placée au premier rang d'orchestre, je me suis consolée en regardant les musiciens en fosse pendant toute la représentation : l'énergie de Cecilia Bernardini 1er violon, Julien Barre qui avait de magnifiques parties au violoncelle.
Je me suis même surprise à comparer le manque d'animation et de direction d'acteurs de Castellucci dans la scène finale, une fois passées les scènes où les enfants doublent les chanteurs, avec ce que fait Tcherniakov dans Les Troyens avec chaque individu constituant la foule; ce dernier n'aurait jamais laissé ces enfants livrés à eux-mêmes et répétant des gestes factices.

Suzunosuke a écrit:

Je me suis même surprise à comparer le manque d'animation et de direction d'acteurs de Castellucci dans la scène finale, une fois passées les scènes où les enfants doublent les chanteurs, avec ce que fait Tcherniakov dans Les Troyens avec chaque individu constituant la foule; ce dernier n'aurait jamais laissé ces enfants livrés à eux-mêmes et répétant des gestes factices.

Sans doute parce que Tcherniakov est un (bon) metteur en scène et Castellucci avant tout un plasticien.

(Jusqu'ici, je n'ai été séduit que par son Ouverture de Tannhäuser, qui trouve quelque chose dans l'imaginaire, dans le flux de cette musique aussi… Le reste m'a toujours paru vaguement joli, et assez peu intéressant. Mais je ne suis pas très client de son type de profil – je n'aime pas le théâtre profond / contemplatif.)

DavidLeMarrec a écrit:

Sans doute parce que Tcherniakov est un (bon) metteur en scène et Castellucci avant tout un plasticien.

Oui, il ne fait pas des mises en scène mais des installations ; c'est tout à fait frappant dans toute la première partie de la pseudo-Zauberflöte de Bruxelles, où il se débarrasse de tout le théâtre pour créer des sortes de tableaux (très peu) vivants. L'aspect dramatique d'une oeuvre ne l'intéresse absolument pas, et il n'est pas étonnant qu'il choisisse de préférence d'autres formes (le poème de Dante, les fables d'Esope, les oratorios, les requiems, comme celui de Mozart cet été à Aix...) pour élaborer ses spectacles. Si l'on est sensible à son univers plutôt contemplatif, à son esthétique apocalyptique, ça peut plaire ou intéresser, sinon, on va trouver ça totalement toc et vain (c'est mon cas : pour illustrer mon jugement, je citerais dans Moise et Aaron la façon dont il représente la prolifération perverse du Verbe chez Aaron en enroulant le personnage dans une bande magnétique, ou la souillure du péché en engluant ses acteurs/danseurs dans de la peinture noire, c'est vraiment un symbolisme très rudimentaire !).

Stefano P a écrit:

(c'est mon cas : pour illustrer mon jugement, je citerais dans Moise et Aaron la façon dont il représente la prolifération perverse du Verbe chez Aaron en enroulant le personnage dans une bande magnétique, ou la souillure du péché en engluant ses acteurs/danseurs dans de la peinture noire, c'est vraiment un symbolisme très rudimentaire !).

Ce n'est pas ce qu'il a fait de pire, mais effectivement, passé la beauté plastique de certaines scènes (ok pour le goudron, c'est fort, mais ça dure quand même une heure… on est fasciné le premier quart d'heure, après on finit par avoir envie d'autre chose).

Ce n'est pas tant le côté contemplatif ou déconnecté que le fait que ça se renouvelle peu… Il y aurait beaucoup d'idées, son univers ne me déplairait pas. (Dans l'ouverture de Tannhäuser, justement, les postures changent, ça suit le flux de la musique… et ça ne dure que dix minutes. )

Son Parsifal, dans le genre étale où il n'y a rien, était assez terrible. Mais je sais que beaucoup le considèrent comme un génie, généralement des gens éclairés mais qui apprécient un autre type de théâtre que le mien (je suis un garçon très verbal, j'aime infiniment plus une pièce bas-de-gamme bavarde qu'une pièce profonde silencieuse). Vaudeville avec Tapie >>>> Beckett par Chéreau

Donc il est possiblement fabuleux, mais je ne parviens pas à m'en rendre compte.

DavidLeMarrec a écrit:

Vaudeville avec Tapie >>>> Beckett par Chéreau  

La vastitude des goûts de David ne cessera jamais de me surprendre

Si tu savais…

/watch?v=RkhdzmNkwY8
/watch?v=EBfavYeg5x8
…

C'est bien ce que je disais !
Mais où trouves-tu le temps ?

Personne ne t'a dit que David est un ? Comment penses tu qu'il arrive à être dans plusieurs endroits en même temps ?

Suzunosuke a écrit:

Mais où trouves-tu le temps ?

Petite astuce : abandonner le chien et noyer les enfants aide.

DavidLeMarrec a écrit:

Suzunosuke a écrit:

Mais où trouves-tu le temps ?

Petite astuce : abandonner le chien et noyer les enfants aide.

Mais qu'il est méchant ce David . Allez, assume un peu le fait que tu es un

je vois que David suit les préceptes de W.C Fields...

Pour redevenir un peu sérieux, quid de Castellucci en tant que metteur en scène d'opéra?

Pour les réticents, il reste le pacte faustien ou les potions du comte de Saint-Germain.

(Sinon il y a aussi des Immortalia 30CH, mais je n'ai pas encore essayé.)

luisa miller a écrit:

Pour redevenir un peu sérieux, quid de Castellucci en tant que metteur en scène d'opéra?

C'est ce dont on vient de parler dans la discussion qui précède.

Suzunosuke a écrit:

DavidLeMarrec a écrit:

Vaudeville avec Tapie >>>> Beckett par Chéreau  

La vastitude des goûts de David ne cessera jamais de me surprendre  

Celle ci, je ne te l'ai pas fait dire

Benedictus a écrit:

Cet oratorio est d'Alessandro Scarlatti. C'est son fils Domenico qui est connu pour ses sonates pour clavier. (Alessandro n'en a composé qu'une petite poignée, sa seule œuvre pour clavier un peu connue est son recueil de Toccate.)

Un oratorio mis en scène ?

Mais que fait la police ?