Autour de la musique classique Le but de ce forum est d'être un espace dédié principalement à la musique classique sous toutes ses périodes, mais aussi ouvert à d'autres genres. |
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| Ecoute comparée de la sonate opus 111 | |
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Auteur | Message |
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PrinceIgor Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 43 Date d'inscription : 07/10/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Dim 24 Oct 2010 - 17:22 | |
| Un combat? On ne s'en prend pas aux personnes, que je sache!!! |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Dim 24 Oct 2010 - 17:29 | |
| C'était une image… L'expression employée "ce qu'il ne faut surtout pas faire", en majuscules, étant bien péremptoire…
C'est d'ailleurs une expression qui me surprend toujours. Cette semaine, j'ai eu l'occasion d'écouter deux nouvelles version de l'opus 111 que je ne connaissais pas. Celles de Cherkassky et de Dan Grigore. Je n'ai pas du tout aimé celle de Cherkassky, d'une grande tendresse, très lente (près de 30'), manquant singulièrement d'aspérités. Pourtant, alors même que son interprétation ne me satisfaisait pas, je me disais que cette sonate de Beethoven était vraiment la plus grande car elle résiste, à mon sens, à toutes les interprétations… La matière même est tellement grande qu'aucune version ne peut totalement la défigurer… J'arrive toujours à y prendre du plaisir. |
| | | PrinceIgor Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 43 Date d'inscription : 07/10/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Dim 24 Oct 2010 - 17:56 | |
| Mariefran, quand je dis que telle interpétation est ce qu'il ne faut pas faire, c'est évidemment d'après moi, qui ai une culture très modeste dans le domaine musical!!! Qui peut se vanter de détenir la vérité en matière d'art??? Je lirai avec plaisir tes commentaires sur la version en question, et je réviserai mes jugements si tu m'as convaincu!!! Bien sûr, on peut prendre plaisir à des interprétations "hors normes", et c'est bien tout le problème! J'adore par exemple la version que Gould donne de la Bagatelle op 126 n° 3, qu'il fait durer - montre en main - une fois et demie plus longtemps que celle de Kempff, et à laquelle il donne une profondeur et un pathos insoupçonnables si l'on s'en tient au texte... Mais est-ce encore du Beethoven? |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Dim 24 Oct 2010 - 19:05 | |
| Posons d'abord cela : je ne connais rien en musique, suis incapable de donner du sens à une partition (même si je suis très fière de pouvoir donner désormais un nom aux notes qui y dansent ) et serais donc bien incapable de dire quelle est la vision du compositeur… Avouons que l'opus 111, depuis deux ans, je l'ai beaucoup trop écouté… Je ne sais pas combien de versions, 30, 40 ? En fait c'est un amour assez récent, lié à ma vie privée qui m'interdisait, par complexe, d'écouter de la musique pour piano de façon aussi intensive que ces derniers mois. Beethoven, c'était surtout les quatuors pour moi. Le fait est que je suis tombée dans les sonates et que j'ai du mal à m'en remettre. J'ai découvert mon Beethoven avec Yves Nat et Schnabel, comme beaucoup ici, il y a 30 ans… Il y a eu Barenboim, Arrau, Annie Fischer, le premier de la poule 2 aussi, que j'avais en microsillons. Et, un jour, j'ai rencontré l'école russe (je ne connaissais en vrai que Richter et quelques rares disques des autres). Là, tout a changé. Un monde nouveau s'est ouvert à moi. Des personnalités complètement différentes et à chaque fois des redécouvertes de l'œuvre. Ca bouscule, un nouvel univers qui s'ouvre à vous, qui remet tout en question à chaque fois, alors qu'on croyait l'œuvre tranquillement installée en soi… Si on a le désir de remettre en question ses habitudes d'écoutes, on se promet de merveilleux moments, sinon on se ferme à cette esthétique nouvelle et on la rejette. J'ai un peu l'impression que c'est ce qu'il se passe ici. Je ne souhaite pas défendre l'une ou l'autre version - enfin, si, il y en a une qui me tient particulièrement à cœur et je souffrirai quand je lirai vos critiques sur elle, mais c'est la loi du genre… Je ne suis pas douée pour parler musique et ne me sens aucune autorité, ne marchant, en fait, qu'au feeling… Pour moi, parler des œuvres, c'est aussi parler de moi, c'est pourquoi j'évite d'en parler, car cela n'a pas sa place sur un forum. Mais pour répondre à ta question, PrinceIgor, oui, c'est encore du Beethoven, cette Bagatelle par Gould. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Dim 24 Oct 2010 - 19:15 | |
| - Mariefran a écrit:
- [...] A Scherzian et PrinceIgor : Je vous rappelle que cette écoute comparée n'est pas un combat ! [...]
Je viens de relire les deux pages concernées. C'est vrai que j'ai donné un ton particulièrement désagréable aux débats qui y sont menés. Je ne reviens pas sur le fond du débat, car à mon avis ce ne sont pas du tout des questions secondaires, mais j'ai donné à mes interventions récentes un ton détestable, dépourvu de distance. Je vous présente donc mes excuses : à toi, Mariefran, aux autres participants de l'écoute de l'opus 111, et en particulier à Utnapishtim dont j'espère qu'il ne s'est pas trop senti, par ma faute, comme l'instrument involontaire d'une confrontation étrangère. Hep ! Vous pouvez revenir, le terrain n'est plus miné... |
| | | Utnapištim Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3330 Age : 60 Localisation : Le vendredi soir à Pleyel. Date d'inscription : 13/09/2009
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Dim 24 Oct 2010 - 19:43 | |
| - Scherzian a écrit:
- Mariefran a écrit:
- [...] A Scherzian et PrinceIgor : Je vous rappelle que cette écoute comparée n'est pas un combat ! [...]
Je viens de relire les deux pages concernées. C'est vrai que j'ai donné un ton particulièrement désagréable aux débats qui y sont menés. Je ne reviens pas sur le fond du débat, car à mon avis ce ne sont pas du tout des questions secondaires, mais j'ai donné à mes interventions récentes un ton détestable, dépourvu de distance. Je vous présente donc mes excuses : à toi, Mariefran, aux autres participants de l'écoute de l'opus 111, et en particulier à Utnapishtim dont j'espère qu'il ne s'est pas trop senti, par ma faute, comme l'instrument involontaire d'une confrontation étrangère. Hep ! Vous pouvez revenir, le terrain n'est plus miné... Je ne pense pas qu'il y ait eu un quelconque combat. Il est normal quand on parle d'art que les sensibilités ressortent sans une certaine retenue, d'ailleurs moi-même j'en ai manqué à propos d'Haskil. Mais bon je ne pense pas qu'il y ait sur ce fil une réelle animosité. Et puis comme m'a dit un jour un compositeur, il vaut mieux s'engueuler sur la musique que sur le prix des tomates. En tout cas je me suis pas senti "instrumentalisé".
Dernière édition par Utnapishtim le Lun 25 Oct 2010 - 16:57, édité 1 fois |
| | | PrinceIgor Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 43 Date d'inscription : 07/10/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 25 Oct 2010 - 14:20 | |
| Qu'importe la franchise des propos, pourvu qu'on respecte la personne de ceux qui en sont responsables!!! L'important, sur ce forum, n'est-il pas de parler MUSIQUE??? |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 25 Oct 2010 - 23:14 | |
| Bon, pour le gag, déjà : après une première écoute des trois nouvelles versions, j'ai voulu me repasser, entre autres, le dernier tiers de l'arietta de la première, j'écoute, je trouve ça très différent de ma première écoute, puis vraiment exatraordinaire, je me dis que ce n'est pas possible... ah bah oui, j'avais mis la version 2 de la poule 1. - Spoiler:
Mon vote après quelques hésitations cette fois, car le niveau est nettement plus homogène que dans la première poule. 1. Version 2.1 2. Version 2.2 3. Version 2.3 Tout simplement... mais au départ je penchais plutôt pour 2/1/3, et pour finir j'en venais presque à me demander s'il ne fallait pas laisser sa chance à la 3 contre la 2 (dont certains psychologismes me gênent un peu, notamment dans le I). Le I de la 1 me semble le mieux conduit, surtout à la fin. L'arietta de la 1 ne démarre pas idéalement (trop d'accents) mais se déploie avec finalement plus de logique et de naturel que la 2 - même si celle-ci est quasiment la seule depuis le début à jouer la dernière variation comme un "duetto" à la main droite. Ma version préférée reste la 1.2, je pense, surtout après cette réécoute involontaire.
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| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mar 26 Oct 2010 - 19:49 | |
| - Théo a écrit:
- ah bah oui, j'avais mis la version 2 de la poule 1.
Coucou c'est moi ! Moi aussi, ça m'est arrivé de mélanger les poules , ainsi que les versions à l'intérieur des poules. Je vous proposerai mes commentaires un peu plus tard. Pour l'instant je vous donne mon classement: ......... - Spoiler:
POULE 2 Version II : 4 pts (Y a pas mieux pour l'instant) Version. I : 2 pts Version III : 0 pts (Là, on est sur une planète où il semble difficile de faire de la musique avec un piano)
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| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 13:19 | |
| Je vois qu' Ophanin et PrinceIgor ont eu le même vote que moi... Croyez bien que j'en suis honoré . Je pensais pourtant avoir fait un classement à mettre au pilori, ce dont par expérience je ne m'émouvais pas outre mesure... En effet, pour ce forum, je suis ressortissant d'une lointaine galaxie (d'autres dont j'apprécie la justesse d'esprit m'ont dit aussi "héraclitien"), en bref je correspond à ce qu'on appelle communément un "martien", et par mon vote, un "martien double"... Mais il est vrai pour le mot "double", qu'étant déjà pour vous un martien bien caractérisé, c'est-à-dire un étranger venant de "qui-sait-où", je le suis également dans ma propre planète (comme le suggère mon avatar : j'ai représenté sur ce dessin la faune de ma planète). (Bon.... mais les martiens ne sont pas forcément toujours dénués de bonnes raisons). Je vois par contre que Scherzian et Utnapishtim ont penché pour un podium diamétralement opposé. C'est remarquable... mais inquiétant aussi, car ce sont des gens qui avaient jusqu'ici éclairé ma compréhension de la musique par de puissantes lumières... – hélas ! -, avant de céder aux troubles séductions du côté obscur pour cette poule-ci. (J'espère que vous avez le sens de l'humour…)
Dernière édition par ouatisZemusic le Mer 27 Oct 2010 - 13:25, édité 1 fois |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 13:25 | |
| Voilà mon vote : - Spoiler:
Version 1 : 4 pts Version 3 : 2 pts Version 2 : 0 pt Les trois versions présentées ici me plaisent plus que la 1 et 2 de la 2ère poule. J'ai longuement hésité entre la 1 et la 3 pour la tête, et bien que les choix du 3e pianiste soient magnifiquement assumés (et ont un sens, alors que pour la 2 j'en doute), j'ai privilégié les émotions directes que me procurent la 1ère.
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| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 13:30 | |
| - alexandreg a écrit:
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- Spoiler:
Les trois versions présentées ici me plaisent plus que la 1 et 2 de la 2ère poule. J'ai longuement hésité entre la 1 et la 3 pour la tête, et bien que les choix du 3e pianiste soient magnifiquement assumés (et ont un sens, alors que pour la 2 j'en doute), j'ai privilégié les émotions directes que me procurent la 1ère.
Attention, je crois que tu t'es trompé dans les numéros de poules.... on s'y perd parfois, mais tu peux rectifier... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 13:31 | |
| - ouatisZemusic a écrit:
- alexandreg a écrit:
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- Spoiler:
Les trois versions présentées ici me plaisent plus que la 1 et 2 de la 2ère poule. J'ai longuement hésité entre la 1 et la 3 pour la tête, et bien que les choix du 3e pianiste soient magnifiquement assumés (et ont un sens, alors que pour la 2 j'en doute), j'ai privilégié les émotions directes que me procurent la 1ère.
Attention, je crois que tu t'es trompé dans les numéros de poules.... on s'y perd parfois, mais tu peux rectifier... Oui, oui, bien sûr. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 14:04 | |
| - alexandreg a écrit:
Oui, oui, bien sûr. - Spoiler:
Je crois que ouatisZemusic évoquait le fait que tu as écrit « 2ère » (poule) à la place probablement de « 1ère » (poule). En gros, tu disais que tu préférais les interprétations de la deuxième poule à certaines de la deuxième...
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 18:00 | |
| Mon commentaire pour l'interprétation 2.1. - Spoiler:
Version 2.1. (Deux points.)
Une interprétation minutieuse et rigoureuse, mais j'ai peine à y percevoir beaucoup de personnalité. Je la trouve parfois préméditée, comme si l'inattendu devenait prévisible (des phrases peu habitées, un jeu corseté, un déficit de caractérisation). Ainsi, dans l'introduction, les contrastes entre forte et sforzando (mesures n°1, n°3 et n°5), pourtant présents, ne parviennent guère à imposer un climat maestoso. Les triples croches forte sont pourtant d'une brièveté qui aurait pu être énergique, mais l'introduction semble s'écouler dans un temps indifférent. Les accords piano un peu diffus et les arpèges crescendo assez nébuleux des mesures n°2 et n°4 n'apportent pas beaucoup d'aération. Le long diminuendo des mesures n°6-9 est en revanche très réussi, en particulier les merveilleux paliers de piano à pianissimo et à sempre pianissimo, ensuite le maintien de cette nuance jusqu'au début de la mesure n°10. Mais le crescendo de la mesure n°10 et les quatre accords de croches piqués (ou staccato selon les éditions) sont mous, au contraire des frottements des mesures n°11 et n°13. Les phrasés des mesures n°12 et n°14 (les seuls vrais phrasés de tout le maestoso) restent un peu scolaires, je trouve, mais le second est bien plus émouvant que le premier. En outre, 1'58'' pour le maestoso dans un premier mouvement de 8'44'', cela me semble beaucoup : en proportion, c'est 11\% de plus que dans l'interprétation 2.2 et 27\% de plus que dans l'interprétation 2.3. Cela donne une introduction à mon avis plus proche d'un grave comme celui du premier mouvement de l'opus 13 que du maestoso de l'opus 111.
Pourtant, la caractérisation du thème principal de l'allegro con brio ed appassionato aux mesures n°19-21 ne manque pas d'énergie. Mais dès la mesure n°23, la gradation des phrasés est erronée. En mesure n°22, c'est un staccato (ici réussi). En mesure n°23, il s'agit d'un portamento un peu retenu. L'interprète joue ici ces deux énoncés à peu de choses près de la même manière et le portamento de la mesure n°23 n'a donc pas de relief particulier. Le même problème se produit aux mesures n°29-31, où les phrasés devraient être non legato (n°30) et portamento (n°31) et sont joués pareils, avec mollesse même pour le thème à la mesure n°29. Un pain au sforzando de la mesure n°39 à la main gauche (2'42''), où le pianiste joue do au lieu de ré. Sinon, je trouve que les mesures rapides et énergiques (le a tempo des mesures n°32-33, ensuite le a tempo des mesures n°35-49, enfin le tempo I des mesures n°55-69) passent mieux que les phrasés expressifs ou méditatifs : quelle rudesse au lieu de la retenue et de l'expressivité aux mesures n°34-35, quel déficit de sensibilité et de poésie pour les mesures n°50-55 avec leur diminuendo et le ralentissement général de leur tempo vers un adagio d'une brièveté fantomatique (moins d'une mesure). D'ailleurs, le deuxième temps de la mesure adagio n°55 se fait trop attendre (à 3'19'') si je le rapporte à la teneur poétique que le pianiste donne aux mesures n°50-54. La reprise de l'exposition est de la même eau, sauf que le thème principal y est un peu plus énergique encore (le pain de la mesure n°39 disparaît).
Malgré une mesure n°71 énergique, je trouve le développement fugué pâteux. Si c'est une option qui peut se défendre pour les mesures n°72-75, avec leur présentation monophonique toujours piano, c'est gênant à partir de la mesure n°76, où les voix polyphoniques restent confuses et parfois hésitantes (mesures n°76-85). Je voudrais aussi que l'apogée du crescendo des mesures n°84-85 soit atteint dès le début la mesure n°86, comme indiqué. Dans cette interprétation, les mesures n°86-87 (et peut-être aussi n°88) restent timorées, malgré le crescendo (inventé) des mesures n°86-90. Au retour (mesures n°90-91), je trouve que l'éventail des nuances est raboté par le bas (par exemple le piano des mesures n°94-95, proche du mezzo forte au début). Si les traits d'octaves décalés d'une main à l'autre (mesures n°96-99) et le bref espressivo de la mesure n°99 sont réussis (relief de l'accentuation, intensité des nuances), je trouve que les mesures n°100-113 dévident l'écheveau sans expressivité. Le pianiste n'évite pas des duretés dans l'aigu sforzando des mesures n°114-115 et passe sans se soucier sur la belle phrase piano et de plus en plus ample des mesures n°116-121 (les deux premières mesures semblent précipitées et les deux suivantes mécaniques, tandis que le premier temps de la dernière est aussi dilaté que lors de l'exposition). Mais le « second développement », sur le thème pointé, se montre avec bonheur plus fantaisiste (mesures n°121-127). Après quatre mesures crescendo et stringendo, le petit train fortissimo reprend (mesure n°132 et suivantes). Le premier sforzando de la mesure n°146 est mou (il devrait être le plus vigoureux), mais à mon avis ce sont les quatre mesures n°146-149 qui sont un échec : le diminuendo intervient trop tôt au début de la mesure n°148 et le portamento des mesures n°148-149 est haché, peu différent du staccato des deux mesures qui précèdent. La coda et sa cadence s'écoulent dans une lumière semblable à celle, terne, qui prévaut dans le premier mouvement. Les deux accords au sommet du soufflet crescendo des mesures n°155-156 sont un peu plaqués.
L'Arietta présente en partie les mêmes caractéristiques : expression compassée, couleurs éteintes, textures peu diversifiées. À l'énoncé du thème, les phrasés sont appliqués, les nuances réduites (sauf aux mesures n°13-16, où elles deviennent par trop anguleuses). Le suivi des voix est un peu confus. L'aspect agogique me gêne beaucoup (petit posé didactique à la reprise A' puis au début de la mesure n°13 de B et de B'). Bien que l'on soit passé des croches pointées aux doubles croches, le temps musical de la variation I ne me semble pas différent de celui du thème, du moins dans la première partie (AA') de la variation. Les phrasés se délient un peu, mais les nuances restent timides. Entre l'énoncé B et la reprise B' de la seconde partie (BB'), le rythme s'élève sans crier gare... et sans rien pour le justifier. La variation II introduit un léger changement de mode d'expression : dès la partie AA', les nuances se font plus amples et gagnent en souplesse, tandis que les phrasés acquièrent une direction. Le crescendo de la mesure n°II.12 de la partie BB', joué dans un tempo si strict, confine néanmoins à la raideur. Préparée par des nuances en général assez restreintes, la variation III (partie AA') ne m'enthousiasme guère : le volume sonore est plus important et le rythme plus élevé, mais ce sont toujours la même texture et plus ou moins le même registre d'expressivité. Le hérissement sforzando des mesures n°III.5-III.7 n'est pas très énergique ni même audible. Dans la partie BB', le contraste des nuances forte et piano au premier tiers des mesures n°III.9 et n°III.10 est insuffisant et assez mal géré (il reste des scories mezzo forte et des accents dans la nuance piano). Les ressources limitées de couleurs et de textures sont à mon sens rédhibitoires dans la variation IV. Pour les parties A et A' (imbriquées dans les parties B et B', si je note ABA'B' la variation IV), il n'y a presque aucun grain dans les triples croches de la main gauche et presque aucune pesanteur dans les débris mélodiques sur les temps faibles de la droite. Je n'entends pas non plus les silences (qui ont valeur d'une double croche). Pour les parties B et B' (c'est frappant dès la mesure n°IV.8 de transition entre A et B), il n'y a pas de couleur particulière : c'est plus aigu parce que le jeu se déploie dans un registre plus aigu du clavier, mais c'est tout. Les triples croches de la main droite y ont un aspect mécanique qui confine à l'insensibilité. Pour l'espressivo de la transition vers la variation V (mesures n°IV.40-IV.50), le pianiste déploie un temps musical ductile, qui répond aux mouvances harmoniques et à la ligne mélodique transpercée de silences. C'est un registre d'expressivité univoque (les autres paramètres de jeu ne sont pas sollicités), mais c'est assez réussi. La variation V renoue cependant avec l'ambitus dynamique réduit et la raideur métrique du début. Surtout, le pianiste échoue selon moi à maintenir le sens des lignes mélodiques par-delà le mouvement perpétuel en triples croches à la main gauche et les batteries voire la scansion des voix intermédiaires (les sept dernières mesures de la variation, plutôt plaquées, me sont pénibles). À la variation VI, ni le trémolo issu des parties A et A' de la variation IV (en retrait), ni le trille (trop présent ou presque absent, selon la position de la ligne de chant qui ne le concerne pourtant pas), ni le thème (aux phrasés inégaux) ne me satisfont.
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mer 27 Oct 2010 - 18:01 | |
| - Scherzian a écrit:
- alexandreg a écrit:
Oui, oui, bien sûr. - Spoiler:
Je crois que ouatisZemusic évoquait le fait que tu as écrit « 2ère » (poule) à la place probablement de « 1ère » (poule). En gros, tu disais que tu préférais les interprétations de la deuxième poule à certaines de la deuxième...
Oui, il fallait lire 1ère poule |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Jeu 28 Oct 2010 - 0:14 | |
| Voici mes commentaires et mon vote pour la poule 2 : - Spoiler:
Qu’il est difficile de déterminer un vote cette fois-ci ! Ces trois versions, fort différentes dans leurs approches, sont passionnantes, mais si aucune ne me déplaît farouchement, aucune ne me convainc totalement, pour des raisons diverses. La 2.1 Voilà une version que j’ai aimée de plus en plus en l’écoutant. Dès le début, je suis frappé par l’âpreté de certains accents, par des contrastes très marqués, à la verticale, même si je suis d’abord gêné par des sonorités dures : le Maestoso est superbe, impérieux, très majestueux, le geste est ample, jusque dans le magnifique decrescendo vers le pianissimo, le temps semble près de s’arrêter. Ensuite, la succession des thèmes et la tension entre l’emportement et l’apaisement qui perce sont à mon sens très bien ménagées. La tendance est de ralentir dans les pp et d'accélérer dans les ff, comme dans la 2.3, et pourtant ce 1er mouvement prend sa forme, sa cohérence et sa dimension, comme s’il s’agissait d’ordonner quelque chaos et de rassembler l’épars. Je le trouve très convaincant, engagé et tendu, même si les séries de doubles croches sont parfois un peu brumeuses (la prise de son favorise aussi ce halo), mais cela s’accorde assez avec cette lecture. L’Arietta commence beaucoup moins bien, une raideur domine, la tension demeure mais le chant, comme crispé, peine à surgir. Les couleurs et les nuances sont ternes. La 2e variation se délie un peu mais ça « flotte » un peu jusqu’à la 3e variation, soudain très emballée et un peu brouillonne, beaucoup trop « saloon » à mon goût . Tout change à partir de la 4e variation, très belle, aqueuse, stagnante à souhait, avec des trilles comme une vibration de l’éther. Les deux dernières variations sont magnifiques (malgré un premier trille un peu bancal), suspendues dans une tension continue et de plus en plus aérienne. La 2.2La transparence, c’est le premier mot qui m’est venu. Cette version baigne dans une lumière sans ombre et tout y semble clair et transparent. C’est une lecture possible, mais j’y sens aussi une légèreté, voire un détachement dont je n’arrive pas à savoir si c’est le détachement qui succède à l’ascèse ou celui d’un pianiste un peu... détaché. Je penche pour le second, mais… J’aime beaucoup le Maestoso. Mais curieusement, l’Allegro devient vite, trop vite, plus léger, trop vite transparent, et les séries de doubles croches semblent dès la première exposition du thème comme enjouées . Où est passée la tension initiale ? Il y a une belle articulation, on privilégie la clarté des lignes, mais pour moi cela manque d’engagement, il y a comme une distance nonchalante ou pire : on dirait qu’il y a aussi du « joli » dans l’air. J’ai l’impression que le pianiste n’a pas grand-chose à dire à part jouer cette belle sonate dans la lumière. Avec ce parti pris de clarté, mais aussi quelques petites manières peu fréquentes mais qui sont comme une signature, ainsi cette façon d’attaquer les deux trilles du Maestoso par la note du dessus comme on le fait dans le baroque, c’est beau mais ça sonne comme une affectation un peu vaine, ou encore ces ralentissements alanguis qu’il ménage de temps en temps dans le I, ou cette façon précieuse, comme un petit doigt levé, de jouer deux accords en jouant les notes l'une après l'autre et non ensemble à la fin de la 5e variation. Pourtant, ce parti pris de lumière et de transparence ne manque pas d’intérêt et trouve sa pleine réalisation dans l’exposé superbe du thème de l’Arietta, très cantabile, et jusque dans les trilles éthérés de la fin. L'arietta est d'ailleurs plus convaincante que le I dans cette optique choisie d'une dilution dans la lumière. C’est du beau piano, mais cela me semble très univoque, sans réelle tension, et pour tout dire un peu décoratif. Une très belle réalisation mais sans vision. La 2.3C’est la fièvre ! L’opus 111 comme une question de vie ou de mort. Sans doute la version la plus radicalement et personnellement engagée, à tel point que je me suis demandé si cet emportement ne dépassait pas l’œuvre elle-même. Je suis fort gêné par les tempos rapides. Au premier abord, mais aussi après plusieurs écoutes. Dès le début, ce tempo semble une fuite en avant, d’autant que les premiers trilles du Maestoso sont assourdis et paraissent à tort ou à raison savonnés. Il est vrai que c’est une prise de concert très précaire, mais quand même c’est étrange, comme ça dès le début. C’est un 1er mouvement haletant, mais du coup tout se précipite, on retrouve un peu cette manie d’accélérer dans les f et les crescendos qu’on avait dans la 2.1 mais avec plus de précipitation ici. Et je ne peux , à chaque écoute, m’empêcher de me demander pourquoi il va si vite, cela exagère le volontarisme et rend le discours un peu caricatural, me semble-t-il. Il y a cependant de très belles choses, notamment dans l’exposé du 2e thème. Le Maestoso est plus fiévreux que majestueux, mais pourquoi pas. Je reste impressionné par l’engagement du pianiste et par sa maîtrise, et j’imagine que le public de ce concert a dû être saisi. L’Arietta commence très bien, c’est expressif, grave et intense. Le tempo me semble bien trop rapide (écouté immédiatement, dans la foulée du I ce n’est plus si frappant, car c’est une vraie suite du I, dans la même tension) mais l’intensité du discours, cette tension imprimée aux phrasés, est toujours prenante. Tout se déroule plutôt bien jusqu’aux crescendos ultra appuyés de la 2e variation, qui dramatisent à l’excès, rompent la continuité et dont je ne comprends pas la raison. La 3e variation paraît un peu molle (c’est le comble) après ces coups de boutoir et en comparaison de la suite, mais on entend des orages appuyés à la main gauche, qui rappellent que dans cette arietta le combat du I continue. Mais c’est à partir de là que pour moi rien ne va plus. Le début de la 4e variation est hoquetant, marquant excessivement le contretemps comme une claudication, à la fois asphyxiée et heurtée, presque mortifère, alors que les séries de triples croches qui suivent sont étonnamment dansantes, là le tempo semble irrémédiablement trop emporté et le tableau devient composite, noir et grimaçant, presque délirant, comme un personnage de Dostoïevski. Je trouve la 5e variation insupportable, réduite à une sorte de martèlement dans une accélération pénible qui fait de la 6e variation un soulagement qu’on à peine le temps d’entendre passer. A ce stade, je trouve que l’excès d’expressivité tue l’expressivité. En somme, c’est une lecture ambitieuse et impressionnante, mais qui me laisse fort perplexe. ------------ Si je devais donner un classement en fonction de l’intérêt qu’ont suscité ces versions, je classerais la 3e en premier, car je la trouve en soi vraiment passionnante. Mais dans le cadre de cette écoute comparée, je trouve que la lecture de la version 1 reste la plus convaincante. Quant à la 2, elle est belle mais creuse. Juqu’à présent, la version que je préfère est la 2e de la poule 1, mais j'attends encore beaucoup mieux ! Mon classement, après maintes hésitations : 1. Version 2.1 (4 points) 2. version 2.3 (2 points) 3. version 2.2 (0 point)
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| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Jeu 28 Oct 2010 - 22:32 | |
| Mon commentaire pour la version 2.2. - Spoiler:
Version 2.2. (Zéro point.) S'il n'est sans doute pas possible de réussir son opus 111 grâce au seul premier mouvement, il est en revanche possible d'y échouer à cause de lui, en particulier dans le rapport entre le maestoso et l' allegro con brio ed appassionato. À mon sens, cette exécution est un échec dès le niveau structurel, pour ne rien dire du niveau poétique. Comme d'autres, ce pianiste estime en effet que le maestoso est un grave sur le moule des introductions lentes de certains premiers mouvements de forme sonate, alors qu'il n'en est rien (démonstration par l'absurde : Beethoven, dont les partitions sont en général très précises, n'aurait pas manqué d'indiquer autre chose si le caractère avait dû être autre). Ce n'est peut-être pas un problème en soi, mais cela le devient lorsque la transition entre le maestoso (sa dernière mesure, n°16) et l' allegro (ses deux premières mesures, n°17-18) est mal comprise à ce point, dans sa forme et donc dans le fond. Avec le tempo dilaté donné ici au maestoso, le trille de triples croches de la dernière mesure du maestoso (mesure n°16) devient en effet un lent chevrotement incapable de réaliser la transition au début de la mesure n°17, quand commence l' allegro. Beethoven a noté son trille en triples croches mais sur une seule mesure (n°16) dans le maestoso et il l'a noté en doubles croches mais sur deux mesures (n°17-18) dans l' allegro. Le fait de passer d'une mesure en triples à deux mesures en doubles indique que Beethoven voulait d'une part que le trille ait la même vitesse dans le maestoso que dans l' allegro et d'autre part que le trille ait la même durée dans chacune des deux parties : 1+(2/2)=1+1. Il est difficile de choisir le tempo à donner au maestoso (c'est une indication de caractère plus que de tempo). Mais ce n'est pas un problème : le tempo du maestoso est déterminé par celui de l' allegro (que l'on connaît avec assez de précision), de sorte que le trille de transition soit sans discontinuité de rythme. (Ce qui précède est d'ailleurs bien connu, voir par exemple l'argumentation de Charles Rosen.) Du point de vue poétique, Beethoven fait commencer l' allegro au sein même du maestoso, tout comme il fera commencer l' Arietta au sein même de l' allegro, grâce à la coda qui impose la tonalité de do majeur, une évocation du rythme du thème de l' Arietta (une noire pointée et croche en lieu et place d'une croche et double croche) et une partie des textures qui s'y déploient (seul le trille manque à l'appel, bien sûr). Non content de commencer le trille de la mesure n°16 comme un lent chevrotement, le pianiste accélère le tempo de manière abrupte, au cœur du trille de transition (début de la mesure n°17). Le trille dure 5,8'' dans le maestoso et 3,9'' dans l' allegro, ce qui donne une idée de l'ampleur de l'erreur (32\%). En procédant ainsi, le pianiste rompt l'unité structurelle du premier mouvement et torpille sa cohérence et sa poésie. Sinon, je trouve que c'est une exécution intellectuelle (avec la plus-value de ce genre d'exercice : rigueur digitale, minutie de la mise en place, netteté des attaques et de l'articulation [pas toujours]) et cérébrale (avec ce que cela implique d'ordinaire : de la préméditation, de la préciosité, des chichis, l'envie de faire croire que l'on réinvente la roue). C'est en vain que j'y ai cherché une vision poétique cohérente. Dans ces conditions, autant dresser une liste d'aspects d'exécution qui m'ont irrité : - dans le premier mouvement, le placement du sforzando sur les seules notes du trille aux mesures n°1, n°3 et n°5 : la dissonance y est mise en exergue, mais c'est de la préméditation (même sans cela, on aurait entendu que le pianiste attaque ces trois trilles et d'autres par la note supérieure),
- l'erreur de toucher à la fin de la mesure n°10 et au début de la mesure n°11, où les quatre accords forte et staccato (voire piqués, selon les éditions) sont joués legato, y compris le dernier sforzando,
- la progression insuffisante du toucher (staccato, non legato, portamento et legato) aux mesures n°21-23 et n°29-31. Le portamento de la mesure n°31, en particulier, est trop proche du non legato de la mesure n°30,
- l'association d'un ritenuto inventé au rinforzando noté à la fin de la mesure n°33, alors qu'un petit ritenuto est pourtant noté en mesure n°34 et se poursuit jusqu'au milieu de la mesure suivante,
- le sautillement de l'accentuation des tierces brisées descendantes de la mesure n°56. Cette bouffonnerie est d'ailleurs encore pire à la reprise,
- l'amenuisement de la teneur du développement fugué des mesures n°76-83, joué ici avec académisme, sans drame ni souci des enjeux conflictuels résultant de l'affranchissement de l'harmonie face aux rigueurs du contrepoint mais en y puisant néanmoins toute sa force,
- la joliesse arpégée du deuxième et du troisième temps de la mesure n°95, juste avant le a tempo et crescendo (6'30''),
- l'absence de hiérarchie entre le phrasé staccato des mesures n°146-147 et celui portamento des mesures n°148-149. Pour une exécution si arc-boutée sur la lettre, de tels problèmes de phrasé sont étonnants,
- dans le second mouvement, outre la pauvreté des phrasés, le caractère convenu de nuances comme réglées sur un rhéostat. C'est surtout vrai quand les nuances sont plus longues, dans la partie BB' du thème (mesures n°13-16), de la variation I (mesures n°I.13-I.16) et de la variation II (mesures n°II.13-II.16). Les nuances plus brèves (une mesure ou moins) ne sont pas toujours bien placées (partie BB' de la variation I, mesures n°I.9, n°I.10 et n°I.11),
- le ralentissement injustifié du tempo à la mesure n°II.8.2 assurant la transition entre la première partie de la variation II et la seconde,
- l'absence de différences de couleur et de texture entre les parties A et B (puis A' et B') de la variation IV,
- le sforzando inventé à 12'27,6'' (deuxième temps de la mesure n°IV.36, alors que le sforzando n'arrive qu'au troisième temps),
- l'absence d'espressivo audible durant la transition entre la variation IV et la variation V (mesures n°IV.40-IV.50),
- les deux accords arpégés grotesques à la main droite à la fin de la mesure n°V.27 et au début de la mesure n°V.28 (15'52''-15'53''),
- la dilatation du tempo à la dernière mesure (n°VI.16) de la variation VI et le fait que le dernier accord soit tenu pendant 4,8'' alors que ce n'est qu'une croche (suivie, qui plus est, d'un quart de soupir).
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| | | Hippolyte Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 0:29 | |
| - Scherzian a écrit:
- Spoiler:
Comme d'autres, ce pianiste estime en effet que le maestoso est un grave sur le moule des introductions lentes de certains premiers mouvements de forme sonate, alors qu'il n'en est rien (démonstration par l'absurde : Beethoven, dont les partitions sont en général très précises, n'aurait pas manqué d'indiquer autre chose si le caractère avait dû être autre). Ce n'est peut-être pas un problème en soi, mais cela le devient lorsque la transition entre le maestoso (sa dernière mesure, n°16) et l'allegro (ses deux premières mesures, n°17-18) est mal comprise à ce point, dans sa forme et donc dans le fond. Avec le tempo dilaté donné ici au maestoso, le trille de triples croches de la dernière mesure du maestoso (mesure n°16) devient en effet un lent chevrotement incapable de réaliser la transition au début de la mesure n°17, quand commence l'allegro. Beethoven a noté son trille en triples croches mais sur une seule mesure (n°16) dans le maestoso et il l'a noté en doubles croches mais sur deux mesures (n°17-18) dans l'allegro. Le fait de passer d'une mesure en triples à deux mesures en doubles indique que Beethoven voulait d'une part que le trille ait la même vitesse dans le maestoso que dans l'allegro et d'autre part que le trille ait la même durée dans chacune des deux parties : 1+(2/2)=1+1. Il est difficile de choisir le tempo à donner au maestoso (c'est une indication de caractère plus que de tempo). Mais ce n'est pas un problème : le tempo du maestoso est déterminé par celui de l'allegro (que l'on connaît avec assez de précision), de sorte que le trille de transition soit sans discontinuité de rythme. (Ce qui précède est d'ailleurs bien connu, voir par exemple l'argumentation de Charles Rosen.) Du point de vue poétique, Beethoven fait commencer l'allegro au sein même du maestoso, tout comme il fera commencer l'Arietta au sein même de l'allegro, grâce à la coda qui impose la tonalité de do majeur, une évocation du rythme du thème de l'Arietta (une noire pointée et croche en lieu et place d'une croche et double croche) et une partie des textures qui s'y déploient (seul le trille manque à l'appel, bien sûr).
Non content de commencer le trille de la mesure n°16 comme un lent chevrotement, le pianiste accélère le tempo de manière abrupte, au cœur du trille de transition (début de la mesure n°17). Le trille dure 5,8'' dans le maestoso et 3,9'' dans l'allegro, ce qui donne une idée de l'ampleur de l'erreur (32\%). En procédant ainsi, le pianiste rompt l'unité structurelle du premier mouvement et torpille sa cohérence et sa poésie.
- Spoiler:
Je suis tout à fait d'accord avec ton analyse de la transition entre le Maestoso et l' Allegro, j'ai été très gêné à cet endroit (et à d'autres !) de la version 2.2 mais n'aurais pas su le formuler ainsi ! En revanche, bien que tu dises que ce n'est "pas un problème en soi" je suis plus dubitatif sur ce que tu dis de l'indication " Maestoso" et sur ta "démonstration par l'absurde". Comme tu le dis, " Maestoso" n'est pas une indication de tempo mais de caractère. Ici Beethoven n'indique pas le tempo (tu dis très bien que celui-ci dépend du choix du tempo Allegro qui suit) et se contente de " Maestoso", soit "majestueux", auquel tu opposes " Grave", et là je ne comprends pas bien. Car la gravité est loin d'être étrangère à la majesté : non seulement "Maestoso" en effet n'indique pas un tempo -- on peut avoir un lento maestoso ou un allegro maestoso --, mais il invite plutôt à la gravité. Consultant le TLF à l'entrée "Grave", je lis : "[En parlant d'un mouvement musical] De tempo lent ou modéré et de caractère sérieux ou majestueux." Quoiqu'une définition de dictionnaire ne soit pas parole d'évangile, il est question là de ces indications qui au contraire de se distinguer strictement se superposent et se chevauchent avec des nuances dont les limites sont par nature floues et livrées à la sensibilité qui est la nôtre ; rien de plus vague en soi qu'une indication de caractère. Aussi ai-je du mal à te suivre quand tu dis : "Beethoven, dont les partitions sont en général très précises, n'aurait pas manqué d'indiquer autre chose si le caractère avait dû être autre". Dans cette indication " Maestoso" rien ne dit qu'il n'ait pas voulu de gravité, mais la mention " Grave" aurait invité à la lenteur et à l'austérité (comme dans l'opus 13) tandis que " Maestoso" exige de la grandeur, peu importe qu'elle soit lente ou allante, du moment qu'elle est pondérée... et non dépourvue de gravité ! D'ailleurs il me semble que le problème de cette version 2.2 ici n'est pas vraiment le tempo adopté dans ce Maestoso, qui fonctionne bien à mon sens, mais bien ce ralentissement progressif et incongru aux mesures 14, 15 et 16 qui vise à aborder très lentement le trille de la mesure 17, tel que tu le décris, et là je te rejoins parfaitement dans ta critique.
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 1:49 | |
| Hippolyte, je me permets de faire sortir du spoiler, puisque c'est une discussion générale sur les tempos et leurs rapports. Si tu préfères rester sous spoiler, dis-le moi et j'éditerai ce message (à cette heure-ci, personne ne le verra). En fait, je suis influencé par deux sources différentes, mais je n'en ai cité qu'une : Charles Rosen. Dans son petit livre, ce dernier indique seulement que c'est une croyance fumeuse que de dire que toutes les introductions de premiers mouvements de forme sonate sont lentes. Pour lui, l'introduction maestoso du premier mouvement de l'opus 111 voit son tempo fixé grosso modo à la moitié du tempo de l' allegro. Le tempo de ce dernier est assez bien connu en tant qu'élément des tempi ordinarii sur lesquels il y avait un accord tacite et bien connu à l'époque au niveau des pratiques d'exécution. Beethoven n'est hyperprécis que lorsqu'il s'écarte des tempi ordinarii et qu'il a donc peur de ne pas être compris (cf. son indication de tempo quasi drolatique pour la Messe en ut). Ce qui me gêne un tout petit peu, c'est que Rosen semble faire peu de cas du fait que « maestoso », c'est une indication de caractère. En fait, il court-circuite ça en déduisant (même de façon approximative, bien sûr, ça n'a rien de mathématique ni de rigide) le tempo de l'introduction à partir d'un tempo ordinaire plutôt bien fixé à l'époque. Ma deuxième source, et elle se place uniquement du côté des indications de caractère, c'est Artur Schnabel dans son édition des sonates de Beethoven. Je le cite maintenant, car je trouve que c'est très intéressant (et comme Schnabel est plutôt avare, dans son édition, en commentaires sur la nature de la musique elle-même, profitons-en...). - Artur Schnabel a écrit:
- Les expressions maestoso et grave, que l'on trouve utilisées souvent dans le même sens, sont, à vrai dire, contraires. La vigueur, la certitude, la sévérité, le caractère de solitude sublime du maestoso, expriment la mûre indépendance, la foi universelle et vivante de l'homme libre ; le grave, par contre, est moins libre, plus traînant et plus lourd ; il est terrestre et ne montre que la dignité de la parure. C'est tout au plus le fardeau d'une misère particulière.
Je trouve qu'un caractère de certitude, de sévérité, de vigueur est bien plus facile à exprimer dans un tempo pas trop lent, à la moitié seulement du tempo d'un allegro con brio ed appassionato (ce qui est un tempo assez rapide, en fait), plutôt que dans un des tempos ouvertement lents que l'on adopte assez souvent pour tout le premier mouvement de la sonate qui nous occupe ici. En tout cas, pour Schnabel en tout cas (et je le suis volontiers, je le reconnais), grave s'oppose fermement à maestoso (il dit même qu'au niveau du caractère, ils sont opposés). Durant les deux premiers groupes de cette écoute en aveugle, j'ai beaucoup écouté aussi le premier mouvement de la Pathétique, et je trouve que la différence de caractère est flagrante (quels que soient les interprètes d'ailleurs). Bon, pour résumer : mon idée c'était 1) de fixer le tempo du maestoso à plus ou moins la moitié du tempo de l' allegro (supposé connu avec une certaine précision), pour la simple raison que le trille de transition doit être continu (il ne doit pas démarrer subito presto), et en cela je suivais Charles Rosen, et ensuite 2) de constater qu'effectivement un maestoso n'est pas un grave par le caractère et que le caractère de cette introduction-ci est beaucoup mieux décrit par maestoso que par grave, et en cela je suivais Artur Schnabel. Dans ma soi-disant « démonstration par l'absurde », je voulais dire que Beethoven aurait été inconséquent avec lui-même d'indiquer un grave, par nature plus traînant et plus lourd, pour seize mesures qui sont quand même beaucoup, beaucoup plus sévères et vigoureuses que l'introduction du premier mouvement de la Pathétique. Mais les interprètes sont libres. Je n'ai pas de problème avec un maestoso lent suivi d'un allegro joué comme un moderato, pourvu que cela se tienne. Même en jouant le maestoso lent si l'on y tient, il y a plusieurs solutions : par exemple amener progressivement le tempo vers la fin du maestoso à quelque chose de raisonnable en fonction du tempo choisi pour l' allegro, ou alors accélérer progressivement durant le trille sur la mesure n°16 (c'est-à-dire la dernière du maestoso). Il est même possible de jouer le trille des mesures n°16-18 comme s'il n'était pas noté en toutes lettres (en triples sur une mesure puis en doubles sur deux), mais comme s'il était noté... comme un trille (si j'ose dire). On n'aura simplement pas des triples croches à la mesure n°16 mais des quadruples, des octuples ou je ne sais quoi. La seule chose qu'il faut éviter, à mon sens, c'est de disjoindre l'introduction et le corps du premier mouvement. |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 2:24 | |
| Je suis aussi gêné par ces propos de Rosen, car il contourne la question du caractère et se fixe bien vite sur des données de tempo fixées. Mais quand nous entendons nos versions, nous entendons bien que les Allegro diffèrent grandement, et c'est tant mieux. Se fixer un étalon de tempo soi-disant historique de l'allegro, c'est lier les poignets et les chevilles de l'interprétation. Je me rappelle que Czerny (àmoins que ce ne soit Schindler ?) écrivait quelque part (il faudrait retrouver la citation) que Beethoven était le premier à prendre des libertés avec ses propres indications de tempo dans ses sonates pour piano. Je te suis parfaitement quand tu dis qu'il ne faut pas disjoindre le Maestoso et l' Allegro (et le parallèle avec la fin du I et le début del'Arietta est éclairant) et que le Maestoso doit être maestoso et non grave ! L'un n'équivaut certes pas à l'autre. Cependant, je ne suis pas d'accord avec ce que dit Schnabel, ou plutôt je ne suis pas d'accord quand il dit qu'il y a opposition entre les deux indications de caractère. Je ne dis pas qu'il faut jouer ce Maestoso comme le Grave de l'opus 13, pas du tout, mais il me semble qu'il y a quelque gravité dans le Maestoso et quelque majesté dans le Grave. Donc pas d'opposition, mais plutôt une proximité qui n'est pas identité. Quand Schnabel dit : "La vigueur, la certitude, la sévérité, le caractère de solitude sublime du maestoso, expriment la mûre indépendance, la foi universelle et vivante de l'homme libre ; le grave, par contre, est moins libre, plus traînant et plus lourd ; il est terrestre et ne montre que la dignité de la parure. C'est tout au plus le fardeau d'une misère particulière." Je suis d'accord avec ce qu'il dit du maestoso, mais ne vois pas en quoi une certaine lenteur serait ici contre-indiquée ! Pour le grave, d'accord jusqu'à "terrestre", après c'est vraiment très personnel, et ne ressens pas forcément l'idée de "fardeau d'une misère particulière." Quoi qu'il en soit, on peut suivre Schnabel mais on peut tout aussi bien ne pas le suivre, voici une interprétation acceptable et tout aussi contestable de ces indications. Toutefois, si je comprends bien son propos, la contradiction qu'il voit entre ces deux indications ne peut se fonder que sur son emploi du mot "libre" (car les autres mots des deux définitions ne s'opposent pas) : le maestoso serait l'expression d'un homme libre tandis que le grave serait l'expression d'un homme contraint. Pourquoi pas. Mais cela ne fait que me conforter dans l'idée qu'il y a bien de la gravité dans le maestoso, car, contrairement à ce que Schnabel dit, l'homme qui affirme ainsi, avec vigueur, sa qualité d'homme libre est celui qui connaît la menace de la contrainte et de l'asservissement. Un Maestoso ne peut pas être, si je me fonde sur ce qu'en dit Schnabel, dépourvu de gravité. Et cette vigueur des premières mesures est bien celle d'une libération, ou plutôt de l'affirmation nécessaire d'une liberté conquise ou à conquérir, et non d'une liberté tranquillement assurée qui méconnaîtrait la grave menace de son asservissement... |
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| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 3:46 | |
| - Hippolyte a écrit:
- Je suis aussi gêné par ces propos de Rosen, car il contourne la question du caractère et se fixe bien vite sur des données de tempo fixées.
D'accord, mais je crois que le tempo est, de toute manière, le paramètre dont il voulait parler, tout simplement. Quant au caractère, ne serait-ce qu'avec l'accentuation et le phrasé on peut exprimer tant de choses différentes dans le même tempo ! D'une manière générale, Charles Rosen se refuse à traduire la transcendance de la musique (notamment sa nature) par des mots ou une pseudo-poésie, car il estime (à juste titre) que cela ne la rend pas plus accessible, mais plus banale. - Citation :
- Se fixer un étalon de tempo soi-disant historique de l'allegro, c'est lier les poignets et les chevilles de l'interprétation. Je me rappelle que Czerny écrivait quelque part (il faudrait retrouver la citation) que Beethoven était le premier à ne pas respecter ses propres indications de tempo dans ses sonates pour piano.
Pas si vite, pas si vite, papillon ! Je pense au contraire que les indications de tempo étaient valables et raisonnables, et qu'il les suivait... mais il ne faut surtout pas oublier qu'elles ne valent que pour les premières mesures des mouvements de l'œuvre et qu'ensuite s'établit un temps musical que Beethoven voulait (et jouait, certainement) très libre (ductile) et pas du tout métronomique. À mon avis, on aurait tort de rejeter a priori, d'un revers de la main, les indications de tempo pour ces mouvements de sonates, tout comme on aurait grand tort de croire qu'elles valent de manière rigide pour tout le mouvement considéré comme un bloc. Je pense que Czerny voulait dire que le jeu de Beethoven interprète de lui-même n'avait aucune rigidité métrique et qu'il s'écartait assez vite et assez fort des tempos de base indiqués, mais cela ne veut pas dire qu'il ne les observait pas. - Citation :
- Je ne dis pas qu'il faut jouer ce Maestoso comme le Grave de l'opus 13, pas du tout, mais il me semble qu'il y a quelque gravité dans le Maestoso et quelque majesté dans le Grave. Donc pas d'opposition, mais plutôt une proximité qui n'est pas identité.
Pour le passage que j'ai mis en gras, je n'en suis pas du tout sûr. Si Beethoven avait estimé qu'une telle proximité existait, il aurait à mon avis utilisé des termes non ambigus (d'autant qu'il était complètement paranoïaque à l'idée de ne pas être compris, notamment des interprètes). En tout cas, pour les tempos c'est comme cela qu'il faisait : s'il n'y avait pas d'ambiguïté, il restait laconique ; s'il y en avait une, il précisait. Pourquoi en serait-il autrement pour les indications de caractère qui sont de la même main ? Je ne suis pas sûr non plus qu'il y ait vraiment de la majesté dans le grave. Quand j'écoute l'introduction du premier mouvement de la Pathétique, c'est quand même beaucoup moins dense qu'ici, beaucoup plus accablé. Sinon, je suis d'accord qu'il peut voire qu'il doit y avoir de la gravité dans le maestoso. Mais faire preuve de gravité dans son propos ne veut pas forcément dire être grave. - Citation :
- Je suis d'accord avec ce qu'il [Schnabel] dit du maestoso, mais ne vois pas en quoi une certaine lenteur serait ici contre-indiquée !
À mon sens, une certaine lenteur est plus contre-indiquée à la majesté d'Alexandre le Grand qu'à celle de Titurel... - Citation :
- Toutefois, si je comprends bien son propos, la contradiction qu'il voit entre ces deux indications ne peut se fonder que sur son emploi du mot "libre" (car les autres mots des deux définitions ne s'opposent pas) [...]
Quand même, la vigueur et la certitude, au minimum, me semblent bien plus proches (de l'idée que je me fais) d'un maestoso que (de l'idée que je me fais) d'un grave. Encore une fois, si les termes avaient été ambigus au point où il faut une thèse de doctorat en philologie pour démêler l'écheveau, Beethoven les aurait précisés ou les aurait remplacés par des mots... qui disent clairement ce qu'il voulait dire. Puisqu'il était rigoureux dans tous les autres domaines de l'écriture de ses partitions, je suis partisan de la solution selon laquelle l'indication maestoso diffère suffisamment radicalement, dans son esprit, de celle grave pour qu'il se soit dispensé d'être plus précis. (Pourquoi serait-il laxiste sur les termes de caractère et maniaque sur ceux de tempo ?) |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 4:11 | |
| - Scherzian a écrit:
- Citation :
- Je suis d'accord avec ce qu'il [Schnabel] dit du maestoso, mais ne vois pas en quoi une certaine lenteur serait ici contre-indiquée !
À mon sens, une certaine lenteur est plus contre-indiquée à la majesté d'Alexandre le Grand qu'à celle de Titurel... - Citation :
- Quand même, la vigueur et la certitude, au minimum, me semblent bien plus proches (de l'idée que je me fais) d'un maestoso que (de l'idée que je me fais) d'un grave. Encore une fois, si les termes avaient été ambigus au point où il faut une thèse de doctorat en philologie pour démêler l'écheveau, Beethoven les aurait précisés ou les aurait remplacés par des mots... qui disent clairement ce qu'il voulait dire. Puisqu'il était rigoureux dans tous les autres domaines de l'écriture de ses partitions, je suis partisan de la solution selon laquelle l'indication maestoso diffère suffisamment radicalement, dans son esprit, de celle grave pour qu'il se soit dispensé d'être plus précis. (Pourquoi serait-il laxiste sur les termes de caractère et maniaque sur ceux de tempo ?)
Il ne s'agit pas laxisme, loin de là, mais de sens des mots : même le dictionnaire montre qu'il y a porosité entre les deux notions de gravité et de majesté. Ce que je veux dire enfin, ce n'est évidemment pas qu'il faut jouer un Grave au lieu d'un Maestoso, mais que mettre de la gravité dans ce Maestoso, tout en lui conservant la vigueur de son affirmation, n'est pas un contresens. Je veux bien que Beethoven ait été d'une rigueur tâtillonne dans le choix des termes, mais il n'était pas sans savoir, en inscrivant ce mot, les différentes nuances du "majestueux", que l'on pense à Alexandre le Grand, à Titurel, à Darius ou au vieux Priam. Non pas de laxisme, juste une palette de nuances qui est propre à ce genre de notion et qui laisse une marge de liberté à l'interprète et qui fait qu'on peut sans contresens jouer ce Maestoso avec gravité... mais non sans majesté bien sûr ! Bon, là je vais me coucher... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 4:19 | |
| Oui, bien sûr. Nous sommes d'accord sur tous ces points : il suffit d'ailleurs de voir les interprétations que j'ai placées en n°1 du premier groupe et du deuxième pour constater qu'elles n'ont rien à voir l'une avec l'autre (il m'étonnerait que le grand écart soit plus grand encore au terme de l'écoute, mais sait-on jamais ?), sauf en ce qu'elles sont sûres d'elles. Bonne nuit à toi, Hippolyte. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 19:31 | |
| Un commentaire pour l'interprétation 2.3. - Spoiler:
Version 2.3. (Quatre points.)
La tentation était là de ne rien dire de ce miracle. Ce n'est donc pas un commentaire définitif. Pourtant, en écoutant cette interprétation durant les deux dernières semaines, j'ai eu le sentiment d'un paradoxe selon que je l'écoutais avec ou sans la partition.
En écoutant sans la partition, on ne peut qu'être frappé, je pense, par la liberté que le musicien s'accorde, l'audace de ses phrasés et de ses nuances, le raffinement de ses couleurs (utilisation de la pédale), l'étendue de ses textures, la puissance de son expressivité, la ductilité du temps musical qu'il instaure. Quand on prend la partition, on constate qu'en réalité l'interprète obéit à la moindre de ses inflexions : il n'est pas un aspect, du plus infime au plus vaste, qui ait échappé à sa sensibilité ou résisté à son intelligence. C'est le paradoxe du contrôle et de la retenue dans la démesure. « Obéir », mais pas d'une façon servile : d'une manière consentie, volontaire. En pensant à cette dichotomie, je m'aperçois que c'est l'essence de la relation amoureuse, lorsque l'on dit : « Je t'aime pour ce que tu es et que je suis seul peut-être à comprendre. Par amour pour toi, je veux révéler au monde et à toi-même qui tu es. » On quitte le domaine de la restitution et même de l'interprétation pour celui de la révélation et peut-être de l'incarnation. L'interprète ou l'amoureux comme instrument suprême de la connaissance de soi. L'engagement spirituel de l'interprète et sa concentration sont admirables. C'est incroyable qu'un musicien soit ainsi possédé par l'œuvre qu'il joue.
Le maestoso est ombrageux et volontaire, très intégré à l'allegro. Le premier mouvement est un cyclone traversé de phrasés péremptoires. Mais le musicien ménage de nombreuses éclaircies qui toutes sont associées au second thème, le « thème pointé » lyrique (présentation aux mesures n°50-55, deuxième exposition aux mesures n°116-121, second développement aux mesures n°122-127). Il joue le thème pointé dans la même lumière que celle qu'il donnera à la coda : autant de prémonitions nescientes de l'Arietta.
La cohérence de la première partie de l'Arietta (le thème et ses deux premières variations, aux phrasés immaculés) est assurée par les nuances. Elles sont toutes « normales », sauf celles des mesures névralgiques de latence n°12 des variations I et II (n°I.12 et n°II.12) où l'ampleur de la nuance est en raison inverse de sa durée. La variation III est le sommet de la force, rendu nécessaire par ce qui précède. Par la variété des couleurs et le contraste des textures, la variation IV semble l'expression de la sentence : « Tu sépareras le subtil de l'épais. » Après la cataracte de la variation V inexorable dans son mouvement et par le soutien de ses lignes, la dernière variation s'écoule dans une lumière indescriptible. Par-delà les antagonismes et les émotions contradictoires, la vibration du trémolo, la pensée du chant et la lumière du trille coexistent un bref moment, avant le retour au réel marqué (mesure n°VI.14) par une agogique impressionnante.
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| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Ven 29 Oct 2010 - 21:08 | |
| - ciao a écrit:
- Voici donc mes impressions sur la poule 2.
- Spoiler:
Juste deux précisions avant de te donner mes impressions. D'abord, contrairement à une majorité sur le forum, j'écoute au casque, ne serait-ce que parce que je fais ces écoutes à des heures généralement avancées et que j'ai des voisins. Du coup, tous les défauts sonores, qu'ils soient dûs à la bande ou au pianiste, me sont plus insupportables probablement qu'ils ne le sont aux enceintes. J'ai honnêtement du mal à comprendre qu'on prenne un vrai plaisir à l'écoute de la plupart des extraits que tu as jusqu'ici proposés. D'autre part, contrairement à ce que font certains, je n'écoute qu'une fois, puis j'émets mon avis. Si je réécoute, ce n'est qu'après, car j'estime que cela fausse déjà la comparaison. En fait, j'estime qu'une bonne version s'impose immédiatement. Cela ne veut pas dire qu'une version ne peut pas révéler certains charmes à la longue, mais il ne faut à mon sens pas oublier l'importance de la première écoute. J'aime quand une version s'impose tout de suite. D'ailleurs la première écoute permet aussi de moins tenir compte de petits accidents sonores. Enfin, après chacun fait comme il veut, mais j'aime mieux prévenir quand même : mon appréciation se veut immédiate, comme au concert en somme, même si l'objectivité n'existe jamais. Poule II Version 1 1. Cela commence très bien, beaucoup de majesté (donc réussi) et de maîtrise dans ce début. L'Allegro est un peu moins réussi, il ne s'empêtre pas tout à fait mais semble du coup insuffisamment alerte. Cela reste très joliment fait. 2. C'est un Beethoven très solide, minéral même, mais dans l'exposition c'est un peu monotone... Puis les variations vont se bonifiant je trouve, elles sont très enlevées, imaginatives, et elles se suivent de façon cohérente, bref c'est vraiment construit. De mémoire ça m'évoque Richter dans Beethoven (dans les Diabelli, que je connais mieux que cette sonate). -> 4 points Version 2 1. Bon, forcément, tout de suite, un son potable, ça fait pas la même impression. Maintenant je trouve le début brusqué, je n'aime pas forcément que tout soit à ce point accentué, surarticulé. C'est virtuose, mais mécanique, et d'ailleurs on n'entend que les petites imperfections, du coup. Cette articulation est carrément insupportable par moments (sur la partition, à partir de la dernière mesure p. 3), il faudrait apprendre à phraser un peu. C'est plus adapté au fugato mais la fin est pour moi un calvaire, c'est une suite de maniérismes, d'inflexions gratuites, et toujours l'impression d'un piano mécanique. Je suppose que cet enregistrement est vraiment une référence, mais personnellement ça me hérisse. 2. Joué comme ça, l'arietta a un côté schubertien, du coup ça m'évoque Kempff, ce qui est plutôt un compliment. Mais ça reste souvent mécanique, avec l'impression que le type est vraiment emmerdé d'avoir à chaque fois une reprise à faire. Il s'amuse nettement plus passé les 2-3 premières variations, même si bizarrement puisque l'allure générale est plutôt modéré, je trouve qu'il presse un peu par moments. Ou bien c'est un peu sec (bas de la page 16), mais cela reste extrêmement écoutable. Contraste complet me concernant entre le 1er et le 2e mouvement dans cette interprétation. -> 2 points Version 3 1. Retour aux vieilles cires, on va essayer de pas trop céder à la comparaison sonore avec le précédent (et puis c'est le pianiste qui se râcle les bronches comme un tuberculeux vers 1:00 ?). D'ailleurs pour être honnête le son est très écoutable pour un vieux concert mono (sauf un moment dans l'arietta vers 7:00, où la vitesse de la bande décroît et descend nettement le son). Mais alors en matière de débuts brusqués, c'est un peu fort, du coup ça ne respire pas suffisamment. Ensuite dans l'Allegro ça bouffe pas mal de notes subrepticement, ainsi qu'une reprise, bon on ne peut pas dire que ça manque d'élan, mais ça me semble un peu dilettante quand même. 2. On sent que le pianiste mise tout sur ce mouvement-là (un peu comme I.3). Contrairement au public qui visiblement prend l'exposition pour un interlude agréable pour se vider les bronches à souhait. Le pianiste y met beaucoup de lui-même, mais je ne trouve pas ça intéressant, plutôt gueulard même. Je ne trouve pas que ça s'améliore par la suite, c'est sec, je veux bien qu'on fasse sobre mais la musicalité elle ne va pas débarquer toute seule au milieu de ces marteaux si durs. -> 0 point Le classement sur cette poule se fait un peu "par défaut", autant être franc, je pense que je ne réécouterai pas souvent dans ma vie ces versions-là. Une fois pour la finale, et puis ensuite, je les oublierai sans déplaisir. Donc la 1 gagne malgré tout, mais entre la 2 et la 3 ça aurait pu être inversé aussi. On reste donc derrière les versions I.2 et I.3 en dépit des défauts techniques de celles-ci, enfin là on est un peu à égalité partout. Et sinon ils arrivent quand les vrais pianistes ? Classement perso : 1) I.3 2) I.2 3) II.1 4) I.1, II.2, II.3
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| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 12:24 | |
| Le vote de Pan : - Spoiler:
Version 1 : 4 pts Version 2 : 2 pts Version 3 : 0 point
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| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 14:09 | |
| Bilan de la Poule 2Troisième, avec 12 points, la version 3 : Vladimir Sofronitsky en concert à Leningrad le 3 février 1952. Une raclée pour ma version préférée de cette poule… Deuxième, avec 22 points, la version 2 : Claude Frank. Intégrale des Sonates chez Music and arts, publiée en 1970. Le vainqueur est la version 1, avec 32 points. Tous les participants l'ont placée en première ou seconde position. Les votes :- Spoiler:
C'est parti pour la poule 3. Les amateurs de son vont être contents.
Dernière édition par Mariefran le Sam 30 Oct 2010 - 14:32, édité 1 fois |
| | | Wolferl Lapinophobe
Nombre de messages : 13311 Age : 34 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 14:13 | |
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| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 14:15 | |
| Envoie moi ton vote, je vais corriger |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 14:17 | |
| Pour la 2.3, je ne voyais en effet pas trop qui d'autre ça pouvait être que Sofro, donc je l'ai presque éliminé en conscience... à regrets, mais je ne pense qu'il aurait été intéressant de le garder, il propose des choses similaires à mon sens à la 1.2, en moins abouti et tenu, et je pense que, vu comment les votes dégagent pour l'instant une certaine cohérence, ça aurait continué comme ça et qu'il n'aurait pas beaucoup enrichi l'écoute finale. |
| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 14:28 | |
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| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 14:52 | |
| Cela fait longtemps que j'avais envie d'écouter les interprétations de Claude Frank. Je dois dire que cette écoute refroidit mes ardeurs. |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 15:01 | |
| C'est une intégrale… Il y a donc des sonates plus ou moins réussies… Je me souviens d'un très bel opus 109 mais pas de grand chose d'autre, je dois l'avouer. Je ne l'ai écoutée qu'une fois et ma mémoire est une vraie passoire. Mais j'avais bien aimé l'ensemble. |
| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 15:12 | |
| - Mariefran a écrit:
Troisième, avec 12 points, la version 3 : Vladimir Sofronitsky en concert à Leningrad le 3 février 1952. Une raclée pour ma version préférée de cette poule… Tout s'éclaire pour moi, au sujet de la troisième version (poule 2)... Sofronitsky me semble donc avoir mis les pieds dans la sonate 32 de Beethoven en se croyant toujours dans Scriabine.... Ce pourquoi sans savoir son identité, je lui avais mis un zéro. |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 15:14 | |
| - Théo a écrit:
- Pour la 2.3, je ne voyais en effet pas trop qui d'autre ça pouvait être que Sofro
Sans le reconnaître, j'ai su que c'était lui aux manifestations d'allégresse de Scherzian... |
| | | Wolferl Lapinophobe
Nombre de messages : 13311 Age : 34 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 17:29 | |
| Voilà mes quelques commentaire sur ces trois versions, après trois écoutes dont la deuxième avec partition, et des revirements de situation improbables. Et surtout une connaissance, une appréhension et un goût interprétatif de cette oeuvre qui ont beaucoup changé depuis le début de cette écoute comparée. Merci Mariefran ! - Spoiler:
Version 1 -> 2 points
Un piano puissant et noble dans le premier mouvement, mais qui pour moi manque un peu de détail, de finitions. J'ai l'impression d'une vision très globale de l'oeuvre qui lui assure une grande cohérence, seulement dans l'exécution j'attendrais plus de contrastes dans les nuances, des phrasés plus marqués, ces petites choses qui donnent finalement vie au discours. On reste avec une espèce de raideur qui l'empêche un peu de se faire introspectif et tendre au début de l'Arietta, alors que tout le reste lui sied bien mieux. C'est tout à fait dans l'esprit de Beethoven je pense, mais je ne suis pas sûr que dans un autre répertoire je puisse aimer ce style.
Version 2 -> 4 points
Là, c'est un peu la révélation. Hippolyte parlait de clarté, d'une version lumineuse, c'est tout à fait ça. Je rajouterais qu'il y a quelque chose d'assez féminin dans cet esprit (c'est une image, je me fiche du sexe du pianiste). Ici j'ai eu la sensation que chaque mesure était pensée, tous les phrasés sont joliment sculptés, les nuances bien pesées et définies, les crescendos parfaitement menés, le tempos intelligemment choisis. Et beaucoup de délicatesse, de poésie voire de profonde mélancolie à la fin de l'Arietta - je crois que c'est une des versions qui m'a le plus ému. Oui, peut être qu'il y a des choses un peu exagérées, des maniérismes (dans le piano je me rends compte que tout ça me plait et rend vivant à mes oreilles cet instrument) mais tout reste fait avec finesse. En plus le son est beau partout, tout le temps, toutes les lignes sont parfaitement audibles, la texture est limpide, on a l'impression qu'on pourrait transcrire en détail toute la partition rien qu'à l'écoute... Et c'est peut être sont principal défaut, d'être un peu trop propre, de manquer d'abandon. Pour autant, une vraie énergie positive s'en dégage, il n'y a rien de mou là dedans - elle semble nimbée d'une aura lumineuse, de rayons couleur de miel. Bref, c'est beau.
Version 3 -> 0 points
Je suis un peu confus pour cette version, je ne sais pas trop quoi en penser. Plus je l'écoute et plus je l'apprécie, et je m'interroge même sur sa dernière position qui me semble un peu injuste, il faudrait pourvoir la mettre ex aequo avec la première. Seulement certains détails qui ne me plaisent pas du tout m'empêchent de réviser complètement mon jugement. D'abord un manque de lisibilité et un abord avec peu ragoûtant, mais on peut mettre ça sur le compte de la prise de son si laide. Et puis des choses un peu vulgaires, une Arietta qui commence platement et ne décolle pas, un caractère parfois grandiloquent, des idées de phrasés intéressant mais pas entièrement exploitées... D'un autre côté, beaucoup d'esprit, un sens du drame peu commun, une tension une peu longue à venir mais vraiment saisissante. C'est tellement sombre, on a l'impression de quelque chose perdu d'avance, c'est quasiment aux antipodes de la version précédente. Pas tout à fait le genre de piano que j'apprécie ici, pour résumer, mais c'est tout à fait intéressant, et original.
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| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Sam 30 Oct 2010 - 17:54 | |
| Merci à vous tous pour vos commentaires qui m'enrichissent et qui font l'intérêt principal de cette écoute ! |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 12:07 | |
| Je voudrais tout de même revenir sur Sofronitsky. Comment expliquez vous l'analyse que fait Scherzian ? Sofro nous donne l'impression de jouer une autre œuvre, pourtant, partition en main, tout ce qu'il joue est écrit… Avouez que c'est troublant. Ne ferait-il pas ressortir de la partition des aspects que d'autres n'ont pas vus ? Ne sommes nous pas habitués à une certaine façon de jouer l'opus 111, que nous tenons pour vraie parce que tout le monde, peu ou prou, la reproduit ? @ Théo : comment expliques-tu que j'aime beaucoup la version de Sofronitsky et peu celle de la version 2 de la poule 1, que je trouve trop démonstrative, aux effets trop appuyés ? Je ne vois pas en quoi le gagnant de la poule 1 réussit ce que Sofro a tenté d'approcher… |
| | | HOLLIGER Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2374 Date d'inscription : 13/09/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 17:11 | |
| bon ben je vais me faire taper sur les doigts, je donne mes donne pour la 2eme série trop tard sans doute! je n'ai rien regardé, ça reste donc comme pour tout le monde. désolé encore, c'est compliqué d'écouter avec le son plus que pourri de mon ordi. Mon classement de la 2eme session donc : 1) version 3 ; la prise de son désastreuse ne m'a pas rebuté, car j'adore cette version échevelée en concert ; la manière dont elle est interprétée me ramène à appassionata! Les 2 mouvements me comblent, c'est emporté, mais juste, disons que ça m'emporte moi. Je reprocherai peut être un léger manque de touché sur la sublime mélodie piano vers la fin du 2eme mouvement, c'est un peu dur. pour le reste, je le répète, j'aime entendre Beethoven comme cela! 2) version 1) c'est beau, bien réalisé, souvent subtil, les contrastes qui se succèdent dans cette sonate sont remarquablement mis en évidence. Ce n'est pas non plus le touché idéal dont je rêve (Radu Lupu). 3) version 2) je me suis clairement emmerdé, c'est soporifique, plus exactement mièvre de bout en bout, de manière égale! Aucune âme, on reste en surface, c'est pianoté bien comme il faut et c'est tout! Voilà, je pense que mes points ne vont pas compter à cause de mon retard, mais je vous le dis quand même! |
| | | HOLLIGER Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2374 Date d'inscription : 13/09/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 18:33 | |
| - Mariefran a écrit:
- Je voudrais tout de même revenir sur Sofronitsky. Comment expliquez vous l'analyse que fait Scherzian ? Sofro nous donne l'impression de jouer une autre œuvre, pourtant, partition en main, tout ce qu'il joue est écrit… Avouez que c'est troublant. Ne ferait-il pas ressortir de la partition des aspects que d'autres n'ont pas vus ? Ne sommes nous pas habitués à une certaine façon de jouer l'opus 111, que nous tenons pour vraie parce que tout le monde, peu ou prou, la reproduit ?
@ Théo : comment expliques-tu que j'aime beaucoup la version de Sofronitsky et peu celle de la version 2 de la poule 1, que je trouve trop démonstrative, aux effets trop appuyés ? Je ne vois pas en quoi le gagnant de la poule 1 réussit ce que Sofro a tenté d'approcher… Je viens de découvrir les votes! Je pense la même chose que toi de Sofronitsky! Et je suis surpris de lire (rapidement) que certains trouvent qu'il joue comme autre chose.. à l'aveugle c'est précisément cette version qui m'a paru toucher le cœur de Beethoven! Bon, je vais vous lire plus amplement. PS : pour l'instant, mes choix préférés sont les mêmes que les tiens, ça fait plaisir au regard d'une telle prêtresse de beethoven! |
| | | HOLLIGER Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2374 Date d'inscription : 13/09/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 18:44 | |
| - Scherzian a écrit:
- Un commentaire pour l'interprétation 2.3.
- Spoiler:
Version 2.3. (Quatre points.)
La tentation était là de ne rien dire de ce miracle. Ce n'est donc pas un commentaire définitif. Pourtant, en écoutant cette interprétation durant les deux dernières semaines, j'ai eu le sentiment d'un paradoxe selon que je l'écoutais avec ou sans la partition.
En écoutant sans la partition, on ne peut qu'être frappé, je pense, par la liberté que le musicien s'accorde, l'audace de ses phrasés et de ses nuances, le raffinement de ses couleurs (utilisation de la pédale), l'étendue de ses textures, la puissance de son expressivité, la ductilité du temps musical qu'il instaure. Quand on prend la partition, on constate qu'en réalité l'interprète obéit à la moindre de ses inflexions : il n'est pas un aspect, du plus infime au plus vaste, qui ait échappé à sa sensibilité ou résisté à son intelligence. C'est le paradoxe du contrôle et de la retenue dans la démesure. « Obéir », mais pas d'une façon servile : d'une manière consentie, volontaire. En pensant à cette dichotomie, je m'aperçois que c'est l'essence de la relation amoureuse, lorsque l'on dit : « Je t'aime pour ce que tu es et que je suis seul peut-être à comprendre. Par amour pour toi, je veux révéler au monde et à toi-même qui tu es. » On quitte le domaine de la restitution et même de l'interprétation pour celui de la révélation et peut-être de l'incarnation. L'interprète ou l'amoureux comme instrument suprême de la connaissance de soi. L'engagement spirituel de l'interprète et sa concentration sont admirables. C'est incroyable qu'un musicien soit ainsi possédé par l'œuvre qu'il joue.
Le maestoso est ombrageux et volontaire, très intégré à l'allegro. Le premier mouvement est un cyclone traversé de phrasés péremptoires. Mais le musicien ménage de nombreuses éclaircies qui toutes sont associées au second thème, le « thème pointé » lyrique (présentation aux mesures n°50-55, deuxième exposition aux mesures n°116-121, second développement aux mesures n°122-127). Il joue le thème pointé dans la même lumière que celle qu'il donnera à la coda : autant de prémonitions nescientes de l'Arietta.
La cohérence de la première partie de l'Arietta (le thème et ses deux premières variations, aux phrasés immaculés) est assurée par les nuances. Elles sont toutes « normales », sauf celles des mesures névralgiques de latence n°12 des variations I et II (n°I.12 et n°II.12) où l'ampleur de la nuance est en raison inverse de sa durée. La variation III est le sommet de la force, rendu nécessaire par ce qui précède. Par la variété des couleurs et le contraste des textures, la variation IV semble l'expression de la sentence : « Tu sépareras le subtil de l'épais. » Après la cataracte de la variation V inexorable dans son mouvement et par le soutien de ses lignes, la dernière variation s'écoule dans une lumière indescriptible. Par-delà les antagonismes et les émotions contradictoires, la vibration du trémolo, la pensée du chant et la lumière du trille coexistent un bref moment, avant le retour au réel marqué (mesure n°VI.14) par une agogique impressionnante.
On ne saurait mieux décrire cette version! |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 19:13 | |
| Je suis contente que tu aimes Sofro mais je n'ai rien d'une prêtresse de Beethoven… Tout au plus, suis-je atteinte d'une grave névrose. |
| | | HOLLIGER Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2374 Date d'inscription : 13/09/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 19:17 | |
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| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 20:16 | |
| C'est le propre des versions radicales que de susciter des réactions tranchées, des enthousiasmes et des rejets forts. Peut-être qu'avec une meilleure prise de son cette version serait un peu mieux passée, quoique. En ce qui me concerne, ce n'est pas cette radicalité qui m'a gêné, ce n'est pas cette lecture fiévreuse et sans concesssion, au contraire, ce qui m'a gêné c'est ce que j'ai entendu comme des défauts justement dans la réalisation de cette conception. Je ne vais pas répéter mes commentaires, mais en gros je trouve que la force du propos en vient à se perdre dans la précipitation, et la deuxième partie de l'Arietta ne me convainc pas du tout et je l'entends même comme une forme d'impasse dans la façon dont cette conception est mise en oeuvre. Que Sofro respecte très bien la partition, c'est certain, quoique je ne trouve pas particulièrement de majesté dans le Maestoso et que certains accents soient excessivement soulignés. Mais la version de Claude Frank, que je n'ai d'ailleurs pas aimée, respecte tout autant la partition, hormis quelques afféteries, sans en délivrer du tout la même lecture. Le respect de la partition est une chose, cela ne fait pas une interprétation, la lecture de Sofronitski ne consiste pas seulement dans le respect de la lettre. Nous sommes sans doute influencés par nos habitudes d'écoute, le risque que l'on court dans une écoute comparée est d'en venir à plébisciter une version de compromis ou une conception consensuelle, mais je ne crois pas que ce soit le cas ici. Je ne sais pas ce qu'a voulu dire Théo en rapprochant les versions Sofronitski et 1.2, elles ne se ressemblent pas, mais c'est peut-être que toutes deux manifesteraient dans l'Arietta ce que Théo a appelé l' "irrésolution" du conflit, par opposition à l'idée que l'Arietta serait la résolution du conflit exposé dans le 1er mouvement... |
| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 21:45 | |
| - Mariefran a écrit:
- Je voudrais tout de même revenir sur Sofronitsky. Comment expliquez vous l'analyse que fait Scherzian ? Sofro nous donne l'impression de jouer une autre œuvre, pourtant, partition en main, tout ce qu'il joue est écrit… Avouez que c'est troublant.
Je saisis ces phrases au vol... J'ai en effet buté de plein fouet sur ce problème. Ayant jeté un coup d'oeil sur la partition, j'ai vu les nombreuses et variées inflexions que Beethoven avait notées pour qu'on les imprime à sa musique. Or j'ai rejeté l'interprétation de Sofronitsky... alors qu'il semble n'avoir eu le tort que de les avoir trop bien suivies (!!!...) Toutefois, en tout respect des indications d'une partition, on peut obtenir des interprétations très différenciées correspondant, pour le pianiste, à des consistances de personnalité bien différentes... c'est quasiment dans l'insaisissable... ça se sent... à défaut de pouvoir être décrit objectivement. Pourquoi en respect égal de la partition suivie au microscope, celui-ci fait de la guimauve tremblante alors qu'un autre fait de l'acier... Mystère... J'ai de grosses difficultés à concevoir que la "personnalité" qui transparaît dans l'interprétation de Sofronitsky corresponde à la personnalité de Beethoven... Sur ce point, je touche un problème secondaire déjà évoqué par Scherzian sur la liberté d'interprétation du pianiste. Le pianiste a-t-il le droit de traiter l'oeuvre selon ses goûts, sans du tout se soucier de la personnalité réelle de son compositeur ? Dans un premier temps, je peux donner raison à Scherzian en disant que le pianiste peut bien faire ce qu'il veut ; je ne vois pas selon quelles lois on pourrait le lui interdire. Mais la musique étant faite pour être écoutée, finalement, l'auditeur a la légitimité de référer son écoute à la personnalité du pianiste, mais aussi et plus encore, à celle du compositeur. Je ne veux pas minimiser le mérite de l'interprète... et encore moins dans le cas particulier de cette sonate dont la cohérence supposée est impossible à se représenter raisonnablement (en deux mots pour un pianiste consciencieux, c'est "irreprésentable" et injouable). Mais je conçois que l'honnête auditeur soit d'abord en considération du compositeur, Beethoven en l'occurrence, et seulement en second dans la dévotion de l'interprète. En s'en tenant à cette hiérarchie de considération, l'auditeur se fait donc "une idée" du compositeur et de son oeuvre, et il a ensuite le droit de se sentir floué lorsque l'interprète diverge trop sensiblement. Bien sûr, l' "idée" que peut avoir l'auditeur sur le compositeur et sur son oeuvre peut se planter totalement, mais il lui est légitime d'essayer de s'en représenter quelque chose.... et de signifier ensuite s'il est d'accord avec la tournure musicale proposée par l'interprète. Je reste en expectative quand-même, sur le problème posé par l'interprétation de Sofronitsky. J'essaierai d'en pousser un peu plus l'analyse. (si je peux... car les poules se succèdent, et je n'ai pas assez de temps) (Je salue l'excellente formulation du problème par Mariefran, dans les phrases citées plus haut). |
| | | ouatisZemusic Mélomane averti
Nombre de messages : 247 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 11/08/2010
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 22:20 | |
| - Hippolyte a écrit:
- Le respect de la partition est une chose, cela ne fait pas une interprétation
Génial... tout est là, en effet. |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Lun 1 Nov 2010 - 22:36 | |
| - ouatisZemusic a écrit:
- Hippolyte a écrit:
- Le respect de la partition est une chose, cela ne fait pas une interprétation
Génial... tout est là, en effet. Je vous remercie de vos réponses. En effet, tout est là. En fait, j'ai un peu l'impression que ça se joue comme avec un texte littéraire… Il y a les mots, enfin ici les notes, quelques indications du compositeur, ce qu'on pourrait appeler les didascalies, et à l'arrivée une mise en scène. Alors, on retrouverait les mêmes mots de "trahison" ou de "fidélité" au texte… Donc la question est bien celle de l'idée que je me fais, avec ma culture, mon expérience, de ce texte. Ensuite, deux options s'offrent : le texte n'a qu'une vérité ou est au contraire sujet à toutes les représentations. Je comparerais volontiers ça aux multiples facettes qu'un livre offre. C'est à travers le prisme du lecteur qu'il se construit, avec ce que je suis, mon plaisir à voir jouer entre eux les mots, attentive aux moindres inflexions du style ou, au contraire, happée par la narration. Scherzian employait la métaphore de la rencontre amoureuse dans sa critique de la version de Sofro. N'est-ce pas, pour nous aussi, auditeurs, une histoire de rencontre amoureuse ? Quand l'alchimie opère, nous adhérons au discours qui nous est proposé, sinon, quel rejet ! |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Mar 9 Nov 2010 - 22:46 | |
| Une petite piqûre de rappel : c'est samedi que finit l'écoute de la poule 3. Profitez bien de votre jeudi férié |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Ecoute comparée de la sonate opus 111 Jeu 11 Nov 2010 - 17:43 | |
| La participation de Ciao / Jonjon. - Spoiler:
Ceci est à mon sens une poule bien plus relevée que les précédentes, ces trois versions sont excellentes dans leur genre, toutes les trois, même si elles me touchent très inégalement. Vivement la dernière poule pour avoir une vision d'ensemble.
Poule III
Version 1
1. Dès le début une foule de maniérismes qui m'insupportent (en plus ce n'est même pas techniquement parfait). J'ai l'impression qu'aucune note n'est sincère (et qu'en revanche tout ce que cette partition a d'évident est complètement perdu !). Puis, dans la deuxième moitié du mouvement, c'est un peu moins choquant, presque poétique même, mais trop mou ! Tout ressemble beaucoup à Serkin, mais j'ai beau avoir tendance à adorer ce qu'il fait dans Beethoven, là, c'est vraiment pas terrible. 2. Très joli, poétique dans l'exposition. Puis les variations se suivent naturellement, sans rupture de ton entre chaque épisode, ce qui est très bien même si ça frise parfois la monotonie au début. Mais au moins le mouvement a une vraie cohérence. Techniquement ça accroche parfois mais ce jeu est aussi très touchant, avec une très belle faculté à se libérer d'une certaine rigidité rythmique, ce qui permet de faire ressortir le caractère si chantant de certains passages, d'une façon limite schubertienne (vers 9 minutes). C'est vraiment remarquable de maîtrise et de finesse, particulièrement dans toute la deuxième moitié, et les dernières minutes sont miraculeuses. Que ce jeu soit si adapté à ce mouvement par rapport au précédent ne facilite pas le jugement, mais je soupçonne le pianiste (ou la pianiste ? c'est sa voix à la fin ?) de s'être libéré progressivement d'une certaine retenue (et d'une interprétation assez artificielle), puisque nous sommes en concert... Donc, au bénéfice du doute, je retiens surtout ce second mouvement extraordinaire.
-> 4 points
Version 2
1. Très beau début, majestueux sans être brutal ou rigide, et on a à la fois la tension et les couleurs dans tout le passage introductif. Puis, le mouvement se lance mais sans perdre cette liberté, cette musicalité, avec un jeu très... confortable je dirais, comme un fauteuil moelleux... Et le tout avec une technique quasi-irréprochable bien sûr. Bon, le problème, c'est que peut-être un peu sage en revanche, on ne prend pas de risque, et on ne peut pas dire non plus que ça soit très enflammé... C'est un peu brendelien quoi... 2. On passe pour la première fois aussi naturellement d'un mouvement à l'autre, ce qui est quand même très appréciable. Lecture méditative, un Beethoven vieux penseur sage se promenant à l'automne de ses jours plutôt que génie rayonnant sur tout le XIXe siècle. Bon, ça se défend, mais quand même, là c'est un peu lent, un peu tiède. Les passages syncopés sont juste gentiment dansants, c'est du piano qui dodeline sans entraîner. Puis la seconde moitié arrive de façon un peu mécanique, on ne change pas d'atmosphère. Alors évidemment, la qualité technique (pianistique et sonore) rend le tout très écoutable et même agréable, mais je n'ai pu m'empêcher de quelques chutes de concentration tout de même.
-> 0 point
Version 3
1. Début éloquent, presque un peu trop tendu, la majesté suppose quelque chose d'un peu plus posé. Mais il y a tout de même une belle volonté de donner du poids à ce piano-là, et même si c'est assez rapide on n'a pas l'impression que cela passe avec négligence sur les détails, au contraire c'est très maîtrisé et d'ailleurs techniquement bien réalisé. On sent le pianiste sûr de ses moyens, mais c'est un peu froid. 2. Début froid aussi, mais on n'est pas aidé par la prise de son et l'instrument plutôt dur. Cela continue sur le même mode variation après variation, sans prendre vie, et le froid devient glacial. Tout au long du mouvement, cela est assez rapide, pressant même, tout est en place, assez soigné, mais vraiment pas très musical. Dommage.
-> 2 points
La première version l'emporte donc assez nettement sur le plan musical, malgré des imperfections importantes et un premier mouvement déplaisant sur bien des plans. De fait, c'est celle que j'ai envie de réécouter. La troisième, en revanche, j'aurais plus de mal à m'infliger de nouveau la deuxième, sauf peut-être si j'ai envie d'une qualité d'enregistrement importante et d'une interprétation pas trop invasive (par exemple pour accompagner une lecture attentive de la partition). Mais globalement cette poule est d'un niveau assez élevé et cohérent, sans que l'une des trois versions soit très en-dessous (contrairement aux groupes précédents je trouve).
Classement perso : 1) III.1 2) I.3, III.3 - 4) III.2 5) I.2 6) II.1 7) I.1, II.2 - 9) II.3
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| | | | Ecoute comparée de la sonate opus 111 | |
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