Haendel : Teseo
12 Février 2011, Théâtre des Champs Elysées
Patrick Cohën-Akenine : direction
Les Folies Françoises
Max Emanuel Cencic : Teseo
Mary-Ellen Nesi : Medea
Emmanuelle de Negri : Agilea
Xavier Sabata : Egeo
Ana Quintans : Clizia
Damien Guillon : Arcane
Superbe soirée au TCE! (pour mieux oublier mon léger ennui lors de la création pleyelienne de la veille)
Deux haendels à la suite, deux réussites... Qui enfin me font oublier les semi réussites d'Orlando et Cesare

La musique est superbe (il est un peu prévisible là-dessus, Haendel, quand même), les habituels tours de forces instrumentaux, particulièrement bien mis en valeur d'ailleurs...
Les Folies françoises donc, tout d'abord, que je découvrais (sauf erreur de ma part) avec un très grand plaisir. Le flûtiste a parfois un peu courru après la partition, mais ce fut le seul bémol de cet orchestre qui a livré une exécution à la fois hyper energétique et jamais sèche de la partition, pour le plus grand bonheur d'un public très chaleureux -une fois de plus!-.
Dans le rôle titre, très attendu, Max Emanuel Cencic est globalement convaincant. Sa voix surprend tant elle est aiguë et acide, beaucoup plus que les autres contre ténors présents (ou qu'un, à tout hasard, Jaroussky). Mais son agilité et sa longueur de souffle font oublier les attaques un peu désagréables. Une belle prestation et particulièrement des moments incroyables quand on le voit, en duo avec Agilea, produire des notes parfois aussi aiguës que sa partenaire.
Mary Ellen Nesi est une perle de personnalité. Elle déferle sur la scène dans sa robe bustier rouge pour tout faire péter. Le rôle de Medea, rappelons-le, est terrible de haine, de méchanceté, de jalousie... Et de prouesses vocales. La voix de Nesi est très ample, un peu faible dans le grave mais elle passe très bien en voix de poitrine quand il est besoin de faire peurrr

Elle campe un personnage désespéré et puissant, avec en sommet une interprétation absolument fantastique du "O Stringero Nel' Sen" (fin de 1ère partie, conclusion de l'acte II). Un peu moins à l'aise sur le "Moriro", elle le termine en variations très audacieuses et boucle sur un aigu très impressionnant, provoquant une image très amusante pour ceux qui étaient attentifs : De Negri, assise sur le côté de la scène, secouant la main et faisant une tronche pas possible tant elle était soufflée par l'effet de sa collègue, mignon

Xavier Sabata est inégal en Egeo : un beau timbre et un soin des attaques, mais des vocalises parfois très savonnées et en fin de concert une voix fatiguée.
Ana Quintans campe une belle Clizia au timbre acidulé, peu marquante toutefois. On a l'impression qu'elle réalise une très belle performance mais que pour autant elle n'est pas encore prête à aborder les premiers rôles...
Damien Guillon (Arcane) est une très bonne surprise pour moi qui ne l'avais jamais entendu en live. Belle voix, vocalise aisée, timbre assez charmant, il s'acquitte très bien de son rôle avec une performance très égale et sans faute.
Je garde bien entendu pour la fin mon coup de coeur du soir, Emmanuelle de Negri (Agilea). Après le récital au comique qui m'avait permis de constater la beauté de son timbre, de son phrasé, le soin de chacune de ses attaques et la qualité stylistique, j'ai pu constater qu'elle sait aussi vocaliser, et pas qu'un peu! Magnifique dès son entrée en scène (alors que Nesi a du chauffer qqes minutes), un peu à la peine dans son premier air, elle se défait avec brio de toutes les difficultés de la partition dans la seconde partie (aces III, IV et V), impérieuse dans le duo avec Teseo et bouleversante dans son lamento, la performance totale pour cette jeune artiste au (très) grand charme. Elle a montré lors de cette soirée que le répertoire baroque, et pas seulement la tragédie lyrique, gagnera à l'entendre toujours plus!
Rediffusion sur France Musique samedi 5 mars à 19h
