Schumann-Kreisleriana op.16

Je répète: écoutez Nat dans les Kreisleriana. Vous aimerez ou pas, mais au moins voici quelque chose d'abouti.
Comme toujours avec lui, il faut faire abstraction des fausses notes (il devait avoir horreur de faire plusieurs prises en studio?).
Voici au moins un pianiste qui fait oublier le piano, ne recherchant jamais le pianisme brillant, ce n'est pas toujours le cas, et qui colore, qui colore, avec amusement et bienveillance. Une certraine parenté avec Egorov finalement (qui a pris le parti de ne pas s'amuser du tout dans les Kreisleriana, par contre)

Sofronisky 52, pour le moment j'ai un peu plus de mal mais je m'accroche. C'est implacable, limite hiératique, du très beau piano, et assez noir. Il semblerait qu'il y ait aussi un live de Sofro à découvrir, mais par contre pas de nouvelle gravure 61 (date trouvée dans un guide, ce serait la version 52).
Gezà Anda (celle que j'ai téléchargée) ça a l'air surtout gentillet selon mon approche actuelle, pas très emballant. Gieseking années 50 (on espère que la datation est bonne) : bof, mais pas mal (il joue vite le bougre!). Il y aurait un live 44.

J'attends beaucoup (trop?) de Perlemuter 55.


Mon tiercé gagnant pour le moment (mais je suis loin de tout connaître):

Nat
Egorov
Horowitz

Ceci dit, je suis au bord de l'indigestion de l'opus 16, il va me falloir un gros break. Mais pas avant d'avoir approché Perlemuter.

Je m'aperçois que quant à moi, outre Horowitz (2 fois), Virsaladze, Neuhaus, Egorov, Fischer, eh bien j'avais oublié de citer Gieseking, que j'aime beaucoup aussi, contrairement à Shushu...
J'aime ceci étant encore plus sa 1e Sonate et ses Davidbuntlertanze.

Mes excuses tout d'abord pour le léger décalage dans le sujet...
Je viens il y a quelque jour d'entendre M. Levinas jouer cette oeuvre en concert, dans le cadre du festival de la Côte Saint André. J'avais un peu peur, mais le résultat a été vraiment... magnifique.
L'oeuvre était bien maîtrisée techniquement, avec une très grande sensibilité. Enfin un pianiste qui prend son temps et qui ne se regarde pas jouer. Tout prenait sens sous ses doigts, les dissonances étaient mises en avant mais sans ostentation. Des climats vraiment réussis et que je n'avais jamais entendus auparavant (la partie plus calme de la 1ère partie, par exemple). Vraiment l'un des plus beaux concerts qu'il m'ait été donné d'entendre. Je n'ai qu'un souhait : qu'il réenregistre l'oeuvre !

Pourquoi, son enregistrement n'est pas bon?

J'ai réécouté récemment son enregistrement - fait il y a une trentaine d'année. Je trouve son enregistrement réussi, et c'est d'ailleurs cet enregistrement qui a lancé sa carrière de pianiste, mais ce qu'il propose en concert est vraiment une autre vision de l'oeuvre.

Théo B a écrit:

Je crois que les versions Kempff des Kreisleriana font partie des choses les plus impossibles à écouter qui aient jamais échouées dans ma discothèque...

Pour jouer au quarté-quinté plus, ma préférence va à Neuhaus, puis, sans ordre particulier, à Virsaladze (La Roque en priorité), Horowitz (j'y reviendrai), Egorov, ainsi que A. Fischer (BBC) et Cherkassky (Nimbus), que personne n'a cités je crois.

Pour Horowitz, outre la version célèbre multi rééditée, il y a un live fascinant (un "vrai" live, sans doute pirate), complètement... barré, sous acide, publié par l'improbable label italien Capital Musica, enregistré le 24 novembre 1968 à Carnegie Hall. Tout ce disque est assez extraordinaire (quoique j'ai toujours un peu de mal avec les Rachma d'Horowitz), et comporte notamment le plus invraisemblable 1e Scherzo de Chopin que je connaisse d'Horowitz (le plus invraisemblable tout court avec le vieux Michelangeli, en fait), malgré un son calamiteux, capté de toute évidence depuis le public à Boston en 1969.

Voici le premier studio d'Horowitz : watch?v=IYDHDKS9deg
Et le fameux live de Carnegie Hall : /watch?v=T1vlhp1K7z4
/watch?v=N_paHdNwoME
/watch?v=NPlBE9XxkEE

Le son du live est assez mauvais, c'est clairement capté sous le manteau, un peu lointain et avec pas mal de réverbération. Malgré les désavantages de cette prise de son, on a une idée de l'impact sonore d'Horowitz en salle, et on comprend ainsi un peu mieux l'aura que pouvait avoir ce pianiste de son vivant. Comme toujours avec Horowitz en concert il y a de petites scories, mais ici ça ne gêne pas.

La vision globale de l’œuvre est relativement proche du studio CBS réalisé un an après. Mais ce qui fait la valeur de ce live, c'est une prise de risque phénoménale associée à une sensation permanente d'être dans un état second (Horowitz aura rarement joué avec autant d'abandon), ce qui fonctionne très bien dans cette partition. La compréhension de l'enchevêtrement des lignes est remarquable, avec souvent de superbes contrechants (fin du Sehr innig und nicht zu rasch). On retrouve aussi un côté un peu vénéneux du piano d'Horowitz avec une instabilité qui peut mettre mal à l'aise (premières mesures du Sehr aufgeregt), mais ça alterne très rapidement avec des passages où le chant est superbe (toujours dans le Sehr aufgeregt par exemple). Et pour rester dans ce Sehr aufgeregt, les dernières mesures sont totalement hallucinées (et hallucinantes pour l'auditeur). Les contrastes sont tous exacerbés, sans pour autant tomber dans une simple binarité doux / passionné, il y a une vraie variété de climats.
Le jeu est parfois un peu sophistiqué (ça arrive souvent avec Horowitz), mais la folie du concert rend ce caractère beaucoup moins prégnant qu'en studio, l'atmosphère globale est tellement extrême que tout ça passe au second plan.

Quelques enregistrements récents à ajouter à la liste discographique :

Vassily Primakov (Bridge)

Fabrizio Chioveta (Palexa)

Je n'ai pas écouté.

Je ressors d'une nouvelle écoute de Y Egorov (coffret "Egorov, The Master Pianist"). Comme souvent, Egorov m'a tiré des larmes, le salaud.

Enfin un pianiste qui sait ce qu'est un pianissimo.

On en avait déjà parlé plus haut. Là c'est le Schumann à la limite du trouble bipolaire/maniaco-dépression

J'avais commencé à les travailler l'année dernière (je n'ai pas fini faute de temps et d'examens morceaux imposés etc mais je compte bien m'y remettre prochainement) et mes versions de référence étaient Radu Lupu et Horowitz (mis à part que je n'aime pas ce qu'il fait dans la première - trop sec à mon goût, le reste est génial)

 Deux excellentes versions, presque antinomiques : ici un phrasé très fin et cosmétique, là un clavier aux pieds fourchus qui sent le soufre...

Antinomiques certes mais chacune vaut son pesant d'or !

Horowitz : quelle version, Sony ou DG ? Perso, je préfère la première !

J'ai essayé de reprendre les interprétations que j'apprécie le plus dans les Kreisleriana. À coup sûr, Martha Argerich, Alfred Cortot (la version de 1935, mais aussi celle des années 1950, que Philips avait publiée dans la « version I » de sa série célèbre, avant de se raviser, et tant pis pour les problèmes techniques de cette dernière ; c'est trop essentiel d'écouter Cortot dans ces conditions sonores), Nicolas Economou, Walter Gieseking (la version de 1942 ou 1943 ; je ne connais pas les autres), Vladimir Horowitz (en studio à la fin des années 1960 et en direct en 1968), Heinrich Neuhaus, Rafael Orozco, Vladimir Sofronitsky (le studio du 7 juillet 1952, la version à laquelle je reviens toujours avec fascination et effroi) et Elisso Virssaladze (en direct à La Roque d'Anthéron en 2004). Peut-être Youri Egorov et Natan Brand, mais je ferais mieux de réécouter avant d'affirmer... La version tronquée de Josef Hofmann est fascinante aussi, mais je reste quand même gêné quand on ne joue pas une telle œuvre entière (j'ai sans doute tort, puisque, si je me souviens bien, Schumann indiquait à Clara de ne pas hésiter dans ce sens, mais le temps a passé et les préventions aussi, à mon avis...).

Chris3 a écrit:

Horowitz : quelle version, Sony ou DG ? Perso, je préfère la première !

Pour moi, Sony aussi, plus le live de 1968, mais DGG a ses amoureux également.

Mélomaniac a écrit:

Quelques enregistrements récents à ajouter à la liste discographique :

Vassily Primakov (Bridge)

Fabrizio Chioveta (Palexa)

Je n'ai pas écouté.

Merci à ceux qui connaitraient de nouvelles versions ou des rééditions de.....vous comprenez.

J'essaierai de compléter mon message de tête.

Et j'en profite pour faire un peu de retape pour Yves Nat   parce que je continue à penser (subjectivement!) que c'est absolument à connaitre alors que c'est plus ou moins tombé dans l'oubli. Ou ça m'est peut-être très personnel comme goût.

On le trouve dans la réédition en 15 CD de 2013; en séparé c'est trouvable (même série, vol.2).

J'aime beaucoup la version d'Argerich aussi. Par ailleurs j'ai une autre très belle version des Kreisleriana, mais comme je l'ai piquée à quelqu'un je ne connais pas l'interprète...
Peut-être que vous la connaissez ?

https://dl.dropboxusercontent.com/u/130334240/Kreisleriana%20op.%2016%20-%201.%20%C3%84u%C3%9Ferst%20bewegt.%20Agitatissimo.mp3

Vue la puissance percussive et la maîtrise de la palette de couleurs je pencherais pour du Horowitz, même si ce n'est pas du live.

Si vous avez une idée je serais content de savoir qui est l'interprète ! Et je peux vous mettre d'autres extraits si vous voulez.

Je réponds à mon propre message : j'ai de fortes raisons de croire qu'il s'agit de Horowitz dans sa version studio de 1985. Je n'ai pas pu la trouver sur Internet pour faire une comparaison directe, mais en m'appuyant sur la qualité acoustique, le jeu et surtout l'écoute des autres versions d'Horowitz (68, 9 et 86), je pense que c'est la version la plus probable

DavidLeMarrec, in Schumann, a écrit:

j'aime beaucoup Pollini, Jandó ou Cabasso, là-dedans, ils donnent du corps au propos,
pas trop fluides façon Argerich, pas trop lunaires façon Arrau…

Fichtre ça m'étonne que tu aimes la version Cabasso (à supposer que tu parles de celle de 1988 chez Astrée), lourde et opaque.
Ça donne du corps, oui, c'est le moins qu'on puisse dire !
Je t'imaginais plutôt compagnon des transparences de Pollini, certes,
ou alors Kissin (RCA), Perahia (CBS) ou Bis (Emi), pour rester dans l'incarné voltigeur et non cul-de-plomb.

Moi, Kissine ! Reste poli s'il te plaît. Biss, c'est bien, oui, mais pas ma référence perso.

Cabasso, ça fait un moment que je ne reviens plus qu'à Jandó, mais j'avais goûté sa simplicité, il me semble, et effectivement un côté terrien, sans la pesanteur mystique d'Arrau.

Une version Live,que je trouve interessante.Ce pianiste mexicain se défend pour moi,très bien dans cette oeuvre difficile.

ROBERT SCHUMANN – KREISLERIANA, op.16 (1838) – ERIK CORTÉS (Piano)