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| | Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse | |
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Auteur | Message |
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Mélomaniac Mélomane chevronné
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| Sujet: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Lun 19 Nov 2012 - 23:36 | |
| Les minutages de la présentation ci-dessous, conçue comme un parcours pour guider l'écoute, se réfèrent à l'interprétation de Georg Solti / Chicago Symphony Orchestra. Je commence par la présentation du premier mouvement. Les quatre suivants seront publiés dans quelques temps. Un peu de patience...
Dernière édition par Mélomaniac le Lun 19 Nov 2012 - 23:44, édité 1 fois |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Lun 19 Nov 2012 - 23:38 | |
| I. Langsam - AllegroMême si elle se réfère à une forme-sonate, la structure de ce premier mouvement n'est pas évidente à l'écoute, et l'analyse peut laisser apparaître différents schémas. Le musicologue grec Constantin Floros opte pour une conventionnelle morphologie Exposition / Développement / Récapitulation, qui ne recoupe pas exactement celle que propose A. Peter Brown. Le découpage de l'universitaire américain me semble plus riche, c'est celui que je vais utiliser ci-dessous. INTRODUCTION
Une pulsation anapestique, qui semble précéder le début de l'oeuvre, émane aux bois & cordes dans un registre grave, et frissonne sur un trémolo qu'amplifie la grosse caisse. En surgit une plainte emphatique (nommons-la « I1 ») au tenorhorn (0'13-), suivie par le choeur craintif des flûte & hautbois & clarinette, variée par la trompette (0'36-), avivée par les violons (1'00-), et dont l'incipit sonne à nouveau au tenorhorn (1'30-). Voilà donc planté le décor d'une inquiétante fantasmagorie nocturne, comme un voyageur s'enfonce dans une lugubre forêt peuplée de feulements et d'ombres surnaturelles. Dans la même tonalité de si mineur apparaît un deuxième sujet (nommons-le « I2 »), un peu moins lent (« etwas weniger langsam »), aux flûtes & hautbois (1'36-) puis aux violons (1'46-). Attentif au monde qui l'entoure, on dirait que le promeneur décide du chemin à prendre. Son errance s'oriente. Cette détermination bascule soudain dans une brève chevauchée aux accents tragiques (mi bémol mineur), comme un héros se sentant investi d'une mission fatidique. Observons cet exorde qui saillit aux trombones (nommons-le « I3 ») car il préfigure le thème principal de la partie suivante. Pour l'instant, cet épisode se résout dans un silence qui ramène l'Adagio liminaire (2'15-) : le tenorhorn reprend [I1] un peu modifié, moins innocent, prolongé par la trompette (2'32), tandis que la scansion enfle crescendo : elle se transfère aux cors (2'44-) qui accompagnent héroïquement le retour de [I3] aux violons, puis aux cors (2'49-) dont les violoncelles & contrebasses ont emprunté la scansion. L'angoisse s'accroît quand les trompettes annoncent...
EXPOSITION -premier volet (3'10-)
Le rythme se fluidifie, s'enjoue : on passe de 4/4 à 2/2. Sur un galop du triangle & violons s'élance en mi mineur le thème principal fièrement proclamé par les cors : nommons-le « A1 » -rappelons qu'il provient de [I3]. Un hoquet des violons (3'39) interrompt cette course par des circonvolutions syncopées (nommons-les « A2 »), comme un ivrogne qui menace de trébucher : cet épisode burlesque nous rappelle que dans la musique de Mahler, le trivial n'est jamais loin des plus hautes aspirations. [A1] revient aux cors (4'06) doublés ff par les violoncelles. Une succincte transition effilochée par les violons (4'18, nommons-la « A3 ») amène directement le second sujet (4'35-, nommons-le « B ») de cette partie : introduit par un pizzicato des basses, une ardente déclamation aux cordes, en ut majeur (en l'occurrence sixte sus-dominante de la tonique !) S'ensuit un retour triomphal de [A1] aux cuivres (ré majeur !), ponctué par cymbales et glockenspiel.
EXPOSITION -second volet (6'00-)
Des fragments de [A1] en mi mineur circulent aux cors, trompettes, violons, attisés par le triangle. Plus grotesque que jamais, [A2] revient en ré majeur aux violons (6'29), chahuté par le tambourin. Une accalmie où s'affaissent les contrebasses (6'55) ressuscite furtivement l'incipit de [I1] au trombone solo. Dans un climat étrange, cordes en sourdines et bois esquissent des bribes de B (7'06) avant que la trompette ne ramène [A1] (7'30-) excitant quelques turbulences aux frontières de l'atonalité.
DEVELOPPEMENT (7'45-)
Dans la tonalité de mi bémol, des motifs de [A1] et [A2] s'affichent en lutte puis s'apaisent. Une suspension sur un si bémol aigu des violons en double octave (8'43) installe une extase visionnaire et tendre que Constantin Floros suppose importée du Lied "Urlicht" de la Symphonie n°2. Un subit Allegro (mais dans la douce nuance piano) vient invoquer quelques souvenirs de [A1] où domine le violon solo (9'41-). Un nouveau havre extatique (10'18) résonne de lointaines sonneries de trompettes, d'appels des bois. Le temps s'est arrêté : une béatitude confortée par de rassurantes paroles aux altos & violoncelles & bassons (10'44), aux bassons & cors (11'14), aux cors & trombones & violoncelles (11'28). Un glissando de harpe (11'47) nous élève en des contrées célestes (si majeur) qui constituent le berceau mystique de ce premier mouvement. Deux clash de cymbales (12'51, mf mais « mit Feuer » ; 13'19, ff) y couronnent chaque fois un ardent crescendo patiemment ourdi par les violons. Le voyageur s'est abandonné à la contemplation du ciel étoilé, et va maintenant reprendre sa route dans la...
RECAPITULATION (13'27-)
La marche reprend péniblement : deux contrebasses marmonnent l'incipit de [I1] (13'34) qui va être glosé par le trombone solo. Le tenorhorn gémit [A1] (13'54) aguenillé en douloureuse complainte qu'érodent de spasmodiques trémolos d'archets. Tenorhorn et trombone ploient sous le faix d'un dialogue harassé de Weltschmertz (14'10), bientôt taraudé par les violons (14'54). Un hymne de cors & trombones (15'11) tente d'oindre ces plaies mais les violons reviennent les lanciner (15'29) avec le concours des trompettes en sourdines qui culminent sur un strident sol dièse (15'56). Un crescendo passionné (les trois trompettes doivent jouer pavillon en l'air) réintroduit le trépidant Allegro [A1] qui s'active successivement à divers registres de l'orchestre. Une soudaine césure silencieuse précède une apothéose « Grandioso » (16'37). Les thèmes secondaires s'intègrent aussi à cette récapitulation : bringuebalées par les timbales, les cocasseries de [A2] défilent pompeusement, sur les clashes de cymbales. [A1] reparait furtivement (17'46) et s'essouffle vers le bref motif [A3] (17'58) qui se fond dans l'ardente supplication [B] (18'04) désormais en sol majeur, moitie par d'ondoyants bariolages altos & violoncelles et des glissandi de harpe.
Tout l'orchestre s'empresse et s'enfièvre (19'09) vers une vertigineuse exaltation de [A1] dans sa tonique réaffirmée (mi mineur) : une délirante cavalcade à 3/2 (19'36) qu'enfourchent trompettes & trombones, graduellement freinée. Car cet assaut débraye maintenant sur la scansion anapestique du tout début, pesamment martelée par la percussion, les cordes graves, le tuba (20'25). [A1] retentit en canon aux cors, violons puis trombones, trompettes (20'35). Cette poussive péroraison appelle la CODA qui s'élabore en trois phases : Reprise du galopant Allegro en mi mineur (21'02) Brève décélération (21'17) Un emport conclusif dans la tonique majorisée (21'23).
Dernière édition par Mélomaniac le Mer 23 Oct 2019 - 22:27, édité 4 fois |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Lun 19 Nov 2012 - 23:39 | |
| II. Nachtmusik. Allegro moderato
La première Nachtmusik renvoie à une toile de Rembrandt, illustrant une ronde milicienne à la tombée du jour (1642) : notables et lansquenets en patrouille aux portes de la ville. La structure s'avère symétrique, répondant à une Sérénade à deux Trios séparés d'intermèdes, ce qu'on peut schématiser ainsi : (I)-(A)-(B)-(I/A)-(C)-(I/A)-(B)-(A)-(I)
Voici les minutages, toujours d'après l'enregistrement de Georg Solti (Decca, 1971) :
Introduction A (section principale) : 1'23 B (Trio n°1, lui-même tripartite) : 3'44 Intermezzo, qui emprunte à l'Introduction (5'29) et à A (6'30) C (Trio n°2) : 7'25, parcouru d'un rappel de l'Introduction (8'16), avant de poursuivre (8'40) Intermezzo (9'43) réinstaurant A (10'19) B' : 12'00 A' : 13'32 Introduction' : 14'32
Deux cors se répondent dans le lointain, créant un effet de perspective que Berlioz avait déjà utilisé dans la Scène aux champs. La clarinette (0'35) déclenche l'inquiet commentaire des volucres, comme dérangés dans leur demi-sommeil. Le basson (0'56), le tuba (1'06) citent la mélodie liminaire, suscitant un affolement qui ébroue les plumages. Les cors (1'23) installent la section principale, dérivée de l'introduction, mais cette fois plus assurée dans sa démarche. Les violons dégingandés (1'45) sont suivis des altos (2'02), violoncelles (2'06), contrebasses (2'12) qui avancent à pas feutrés. L'incartade des timbales (2'29, 2'48) dissipe les somnolences, les cordes font progresser l'escorte, dans une humeur grandiloquente et débonnaire, qui renvoie à l'insolite équipage du peintre flamand : des personnages solennels, mais aussi des mercenaires interlopes. Le premier Trio (3'44), en la bémol majeur, prend essor par les violoncelles, dans un passage volubile qui redevient processionnel (4'19), cédant à l'enthousiasme collectif d'une joyeuse compagnie. Le cor revient sonner come prima (5'29), annonçant le premier interlude où tintent des cloches d'alpage, et qui progressivement reprend la marche principale (6'30) aguichée par pizzicati et trilles. En fa mineur, le second Trio (7'25) instille une poignante nostalgie exhalée par les hautbois (7'36), entrecoupée par la réapparition du climat introductif dans une veine fébrile (8'16), puis se poursuit langoureusement en ut mineur par les violoncelles (8'46) notés molto espressivo, laissant affleurer quelques roucoulades importées de l'introduction (après 9'13), avant de se dissoudre dans un nouvel intermède (9'43). Dans une ambiance diaphane, la flûte gazouille. Des appels de trompette (10'02), timidement répondus par le hautbois, la flûte, la clarinette, réinstaurent la marche (10'19) fièrement emmenée par les violons, battue par les timbales (10'37), dans ce qui apparaît un acmé, illuminé par harpe et piccolo (11'11), qui déambule au gré de sa fantaisie. Le rappel de la section B (12'00) s'élance aux violons, puis se discipline dans le cortège que poétisent glockenspiel et cloches de troupeau (12'46). L'appel du cor (13'28) remobilise la section principale A, soumise à des variations dissonantes (le sforzando des violons à 14'01) qui aigrissent l'atmosphère, non exempte de cynisme bourru (cor anglais et bassons à 14'18). Bouclant cette architecture en palindrome, le cor recycle l'introduction (14'32) et se lance dans un contrepoint serré avec flûte et clarinette que Mahler souhaite « comme des chants d'oiseaux ». Un guillochis des violons en pizzicato (15'19) s'étiole vers un glas conclusif rendu au silence de la nuit (15'45).
Dernière édition par Mélomaniac le Mar 5 Nov 2019 - 22:24, édité 1 fois |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Lun 19 Nov 2012 - 23:40 | |
| III. Schattenhaft. Fliessend aber nicht schnell
Voilà un Scherzo à la fois débonnaire et terrifiant, peuplé de créatures bizarres et d'esprits frappeurs, en même temps qu'il parodie la tradition de la valse viennoise, comme dilatée par un délire hallucinatoire. Il répond à une structure à la fois symétrique et cumulative. La section principale se scinde en deux parties dont la seconde est reconduite après un rappel de l'introduction. Un trio tripartite sert de pivot au retour de la Section Principale un peu modifiée. Tout ce matériel thématique s'interpénètre dans une quatrième section qui les brasse comme dans un chaudron de sorcier, avant une Coda qui se résorbe dans l'insaisissable ambiance initiale.
Section Principale Introduction épisode 1 : 0'14 épisode 2 : 0'37 épisode 3 : 0'55 Introduction' : 1'14 épisode 1' : 1'28 épisode 2' : 1'50 épisode 3' : 1'58 conclusion : 2'43
Trio partie 1 : 3'02 partie 2 : 3'45 partie 3 : 4'18
Section Principale épisode 1'' : 4'44 épisode 2'' : 5'00 introduction : 5'17 épisode 1''' : 5'37 épisode 2''' : 6'10 épisode 3''' : 6'27 synthèse : 6'47 variation sur épisode 1 : 7'07
Brassage du Trio et de l'épisode 3 de la Section Principale partie 1 : 7'23 partie 2 : 7'59 partie 3 : 8'20 Coda : 8'46
Sur un rythme 3/4, une sourde pulsation de timbale et de pizzicati engrène un rythme boiteux, aux accents incongrus (le décalage temps faibles/temps forts engendre d'emblée une impression de malaise) où clignotent d'étranges lueurs. Le premier épisode (0'15) établit la tonalité de ré mineur. Les violons soufflent un vent frondeur qui frôle des ombres furtives et maléfiques. Ce monde est celui des spectres, qui s'esquivent dans un rictus. Un bal d'ectoplasmes. Les indications dynamiques privilégient d'abruptes variations de registre et d'intensité, par exemple le vertigineux glissando des clarinettes qui en un instant ravale toute la tessiture en decrescendo (0'26) ! La complainte des flûtes et hautbois (0'37) sentimentalise ce cimetière sans le rendre moins inquiétant, -on croirait entendre le cri de détresse des âmes damnées. Les violons précisent ce que laissait pressentir le mètre ternaire : une valse (0'55) se dessine, mais crispée, hideuse, ce que soulignent les crissements. L'Introduction reparaît (1'14) sur une trame plus complexe, mais tout aussi grouillante. Deux mugissements du tuba (1'21) sont acquiescés par une crapoteuse contrebasse soliste. L'orchestre bourdonne d'élytres surnaturelles. Une alarme de trompette (1'39) apeure le hautbois et suscite une nouvelle plainte à la flûte (1'50). Retour de la valse (1'58) toujours aussi grimaçante et corsetée. Un rire moqueur du hautbois (2'38) s'atrophie à la clarinette basse puis au contrebasson, avant une rôdeuse conclusion (2'43).
Le Trio central (ainsi dénommé par la partition) débute dans une ambiance (3'02) totalement étrangère au cauchemar qui précède : un radieux ré majeur où hautbois puis violon chantent insouciamment. Mais l'alto (3'45) vient ternir cette éclaircie et réactive la valse (3'54) toujours aussi boursouflée. Triangle et cymbales (4'18) amènent la dernière séquence où violoncelles et cors (4'25) épanchent la mélodie initiale du Trio.
Les insidieuses rafales des cordes (4'44) relancent le boitillement initial, que les hautbois lancinent (5'00, cette fois en mi bémol mineur), avant de prendre un nouvel essor par un violent coup de timbale (5'17). Le premier épisode zigzague à l'alto (5'37), le tuba vagit (5'51). Comme dans la première séquence d'exposition, une sonnerie des trompettes (5'58) précède la plainte, cette fois aux violons (6'10) ornée par l'ondoiement des flûte et clarinette. Un coup de mailloche (6'27) réveille la valse où se greffe la complainte. Le rire bilieux du hautbois se dégonfle et achoppe sur un pizzicato arraché aux violoncelles et basses (7'07) qui reconduit les froides bourrasques de l'introduction.
La section suivante opère une synthèse entre Section principale et Trio. D'abord la valse se mêle à la mélodie de la troisième partie, caricaturée sur les trombones (7'23). Les violons s'élancent passionnément (7'42), les bois aigus préservent la causticité (7'54), le second épisode du Trio apparait au cor anglais (7'59), le troisième aux violoncelles (8'20) mais comme perclus de fatigue. Des bribes fantomatiques s'esquissent à divers pupitres qui semblent lassés de la danse, ce que confirme la Coda (8'46) où les énergies s'épuisent avant un ultime sursaut (9'11).
Dernière édition par Mélomaniac le Mar 5 Nov 2019 - 22:25, édité 1 fois |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Lun 19 Nov 2012 - 23:41 | |
| IV. Nachtmusik (Andante amoroso)
Cette Sérénade pourrait porter en exergue ce vers du Nachtlied de Nietzsche : « mon âme aussi est la chanson de quelqu'un qui aime. » Arnold Schönberg admirait la transparence chambriste de cet Andante amoroso, notamment des instruments à cordes pincées (harpe, mandoline, guitare), à laquelle il rendra hommage dans sa propre Sérénade op. 24.
La structure répond à une forme-sonate, augmentée d'un Trio : Section principale en coupe Rondo : A-B-A'-C-A'' Développement, en trois parties (3'45) Trio, en trois parties (6'39) Récapitulation, en cinq parties (9'27) Coda (12'45)
Une anacrouse passionnée du violon solo mobilise une sorte de promenade à 2/4 (0'10) dont le cor annonce le refrain (0'18), décliné par le hautbois, par violons et altos (1'04), repris au cor (1'30) avant un nouveau commentaire des violons (2'10) en crescendo, qui achoppe sur les cordes graves (2'46). La dernière occurrence du refrain échoit au hautbois (2'54) bariolé par le violon solo avant de subir quelques gracieuses variations. Le Développement (3'45) interpose d'abord un sombre tuilage émané des contrebasses, des altos, des violons, au bas du registre, qui s'émancipe avec le hautbois et la mandoline (4'16). Le seconde section (4'39), en la bémol, est confiée au cor et à la mandoline, puis aux violons qui haussent la tension vers un nouveau seuil d'achoppement (5'24) chargé de menace, avant une dernière section en sol bémol (5'54) qui ne résorbe pas tous les conflits latents. Puisque c'est le rôle du Trio (6'39) qui s'échappe du violoncelle par une radieuse mélodie en si bémol, ornée par le cor, avant d'être creusée par un dolent épisode en mi bémol mineur au grave des violons (7'35), taraudé par le soliste. Dans un confiant fa majeur (8'07), la dernière section nourrit une chaude polyphonie aux cordes. La Récapitulation (9'27) s'élance aux violons, ramène le refrain du cor (9'41) en dialogue avec le violon. On réentend le délicat commentaire des violons (10'22), la reprise du cor (10'48). La section d'achoppement de l'Exposition devient ici une phase de sidération à la guitare (11'26), comme si la Sérénade s'enrayait, mais ourdit un fiévreux crescendo amplement nourri par les cordes. Le refrain reparait une dernière fois dans cette réexposition, au hautbois (12'00) prolongé par clarinette et violon solo. Les altos initient la Coda (12'45), parsemée de trilles, de bribes du refrain. Un impalpable staccatissimo des violons (13'25) s'affecte d'une ineffable tendresse, puis le tableau se volatilise jusqu'au morendo conclusif (14'27).
Dernière édition par Mélomaniac le Mar 5 Nov 2019 - 22:26, édité 1 fois |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Lun 19 Nov 2012 - 23:42 | |
| V. Rondo - Finale
L'exégèse du Finale a fait couler beaucoup d'encre. Même certains avocats de la cause comme Deryck Cooke l'ont qualifié de Kapellmeistermusik. Theodor Adorno fustigeait une telle positivité, la contrainte de l'humeur joyeuse enfermée dans une sphère diatonique et artificielle (« il n'y a qu'au théâtre que le ciel peut être aussi bleu »). Au-delà de ce conventionnalisme forcé, d'autres comme Peter Ruzicka ont décelé un inventaire (naïf ou parodique ?) d'une époque qui s'achève, « un environnement musical sur le point de s'écrouler ». Une sorte de pompeuse pyrotechnie, une cérémonie controuvée, qui tirent la révérence d'un siècle ? La structure en collage s'alimente de malicieuses citations d'opéra, rappelant la culture musicale du compositeur qui fut aussi un grand chef de fosse. Ce tourbillon sans véritable développement accuse une nature délibérément séquentielle, un traitement désultoire où la concaténation relève du libre-arbitre, exploite les idées pour le plaisir de la formule, et semble une fin en soi, une autocélébration hédoniste qu'on a pu qualifier de panégyrique. Ce qui n'ôte rien à la virtuosité d'un tel exercice d'écriture, où les idées (malgré la redondance) sont toujours en instance de métamorphose, et s'affichent dans un cadre polyphonique touffu, voire parfois asphyxiant. La plus séduisante thèse (soulevée par Constantin Floros rappelant la connivence mahlérienne envers le Zarathoustra de Nietzsche), sinon la plus pertinente, évoque une parabole de l'éternel retour, qui transparait ici dans la structure en rondo, ressassant le refrain (intégralement ou par fragment) à huit reprises, jusqu'à l'intoxication, en alternance avec deux sujets secondaires :
Ritournelle 1 S1 (Premier thème secondaire) : 1'41 Ritournelle 2 : 2'31 S2 (Second thème secondaire) : 3'05 Ritournelle 3 : 3'36 S1 : 4'24 Ritournelle 4 : 5'31 S1 : 6'06 S2 : 6'20 Unisson : 7'23 Dévpmt sur Ritournelle et S2 : 7'49 Ritournelle 5 : 8'25 S1 : 9'02 Ritournelle 6 : 10'15 Unisson : 10'30 section 2 de la Ritournelle (11'02) puis S2 (11'18) Unisson : 12'09 Ritournelle 7 : 12'34 Citation du 1°mvt à 12'44 (mesure 455), 13'26 (492) et 13'40 (506) Unisson acclimaté : 13'16 S2 : 13'58 Ritournelle 8 : 14'31 Coda : 15'12
Le refrain repose sur six épisodes liés. D'abord un branle-bas de mailloches, bientôt rejoint par les cors et les cordes... ...qui laisse exploser une joyeuse fanfare (0'15) où la trompette culmine jusqu'au contre-ut. Le troisième (0'31) parodie les Meistersinger de Wagner (sur un tempo plus rapide que l'original), le quatrième saccade une marche (0'45) entre cors et timbales, prolongée par un abrasif galop des violons, le cinquième (1'12) fait retentir trompettes et cors, le sixième (1'24) s'empresse vers un silence qui conclut ce vertigineux exposé !
Un accord des hautbois et clarinette aura servi de pont vers la première section secondaire (1'41), en la bémol majeur, qui fait allusion à la valse de La Veuve Joyeuse de Franz Lehar. L'occurrence de la ritournelle (2'31) exploite surtout sa section 3 (celle des Maîtres-Chanteurs) et dérive vers un autre emprunt (2'47) exfiltré des turqueries de Die Entführung aus dem Serail de Mozart, formant une imperceptible transition vers le second thème secondaire (3'05), grazioso en ut majeur dévolu aux flûtes. La ritournelle résonne (3'36), sa section 2 et un travail sur les suivantes, s'affaissant vers une claudication de timbales (4'24) : une reprise de la valse de Lehar, mais cette fois en la mineur. Marcato, le cor anglais (4'31) s'accompagne d'un effet de percussion : la tête de grosse caisse frappée par un Rute (faisceau de fines tiges autour d'une baguette), dont un des premiers usages attestés dans le répertoire remonte à... L'Enlèvement au Sérail (!) L'humeur hésite entre le gracieux (bois et triangle à 4'54) et le désir, on sent poindre une agitation velléitaire qui après un pesante excavation des cordes expulse le matériau wagnérien associé à la ritournelle (5'31). Une Luftpause (5'47) ramène le bringuebalant épisode entendu à 2'48 (en mesure ternaire), suivi du premier sujet secondaire, aux bois (6'06), et du second sous la guise d'un exquis menuet tréfilé par le violon solo, cette fois en la majeur (6'20) puis en ré bémol (7'06). Entretemps, une semonce des archets à l'unisson et un martèlement des timbales (7'03) auront annoncé une véhémente assertion (7'19) qui s'exclame à l'ensemble des archets, sur le rebond de la grosse caisse puis qui, par le biais d'une étourdissante dégringolade, expulse la ritournelle (7'49) dont les sections se télescopent dans un empilement vertical !, laissant tendrement affleurer les thèmes secondaires. Mais des segments de la ritournelle resurgissent en force (8'25), déployant une virevoltante élaboration sur le matériel de La Veuve Joyeuse (9'02), en sol bémol majeur. Sixième apparition des éléments de ritournelle (10'15), en si bémol majeur, solennisée par les cloches, et les cors pavillons en l'air. Le pesant unisson vient s'esclaffer (10'30), et s'active jusqu'à une cursive sonnerie de la section 2 de la ritournelle (11'02). Un ritenuto convie l'élégant second sujet secondaire aux violons (11'18), en ut majeur, tandis que l'incipit du refrain principal s'infiltre à la trompette (11'27, 11'49). Cette accalmie a discipliné le motif d'unisson qui apparait placidement (12'09), laisse échapper le septième rappel de la ritournelle (12'34), en ré majeur. Les cors se remémorent un extrait martial du premier mouvement (12'44), qu'on réentendra aux trombones en si bémol mineur (13'26), et aux trompettes (13'40) transfiguré en ré bémol majeur Entretemps, le procédé de l'unisson vient lourdement regimber (13'16), dans une exaltation de kermesse. Les cordes réinvitent le second sujet secondaire (13'58) pour un dernier bal suranné et néanmoins pris d'excitation. Une déflagration (14'31) canalise l'ultime récidive de la ritournelle, sous une forme quasi intacte. La Coda (15'12) vibre d'une ardeur festive, où carillonne la grandiloquente batterie de cloches. Après un passage hiératique, les violons (16'12) précipitent l'orchestre dans une escalade conclue par un accord fortissimo (16'22).
Dernière édition par Mélomaniac le Mar 5 Nov 2019 - 22:26, édité 1 fois |
| | | vinclec Mélomaniaque
Nombre de messages : 628 Age : 42 Localisation : Amiens Date d'inscription : 14/10/2012
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 7:05 | |
| Merci infiniment Mélomaniac pour cette présentation passionnante. J'aime beaucoup tes analogies avec une promenade. Mahler n'ayant pas écrit de programme, je suppose qu'elles sont de toi ? ça colle très bien avec ce que l'on ressent. Ce premier mouvement est l'une des plus belle chose au monde, n'est-ce pas pas ? Je pourrais l'écouter 1000 fois sans me lasser. Ce début si mystérieux, ce travail sur les couleurs et les timbres... En concert, c'est formidablement émouvant, presque abstrait. Étrange, la réception catastrophique de l'oeuvre à son époque. Et pourtant quelle magie ! Quelques petites remarques : - Mélomaniac a écrit:
- "En surgit une plainte emphatique au tenorhorn"
Mahler a écrit ce premier mouvement en dernier, après les quatre autres. Il cherchait donc un "début" et, Pour la petite histoire, d'après Lagrange, c'est en faisant de la barque sur un lac qu'il a "entendu" cette plainte emphatique et son accompagnement mystérieux. C'est d'ailleurs assez fluvial, comme thème, non ? - Mélomaniac a écrit:
- "Voilà donc planté le décor d'une inquiétante fantasmagorie nocturne"
D'où le surnom parfois donné à la Symphonie, Chant de la Nuit (est-il de Mahler ?). On attend la suite !!! |
| | | kegue Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 9:40 | |
| Bravo pour cette présentation. On va pouvoir enfin débattre sur la musique de Tatavounet C'est vrai que pour le plan de ce premier allegro, il y a beaucoup d'hypothèses. Ton plan se rapproche aussi de l'analyse de De la Grange, si je me souviens bien. J'ai quelques remarques à faire, tu te doutes bien Je ne pense pas que le rythme caractéristique de l'intro (croche pointée, deux triples croches) soit un rythme anapeste. Il me semble que l'anapeste est une succession de deux notes brèves et d'une note longue. Ici, c'est le contraire qui est écrit ; je parlerais donc plus de rythme dactyle. Il me semble aussi intéressant de remarquer que le thème A possède des ressemblances avec l'intro du Final de la Sixième, ainsi qu'avec le thème du Veni creator de la Huitième. Autre rapprochement intérressant : la phrase de trombone qui commente celle des contrebasses à 10.34 est tirée du thème secondaire du Final de la Sixième. @vinclec. Je connais beaucoup moins cette Septième que les six précédentes, je ne suis donc sûr de rien, mais je ne crois pas que Le chant de la nuit soit une idée de Mahler (inversement à Szymanowsky pour sa superbe Troisième Symphonie) |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 11:27 | |
| Bravo pour ce travail Mélomaniac ! - kegue a écrit:
Il me semble aussi intéressant de remarquer que le thème A possède des ressemblances avec l'intro du Final de la Sixième, ainsi qu'avec le thème du Veni creator de la Huitième..
C'est marrant, à moi ce thème m'a toujours fait penser (dès la première écoute !) au premier thème du premier mouvement de la symphonie précédente. Sinon, au début de la "récapitulation" il y a aussi une citation presque textuelle (au trombone, je crois) d'un thème du 1er mouvement de la Troisième. |
| | | vinclec Mélomaniaque
Nombre de messages : 628 Age : 42 Localisation : Amiens Date d'inscription : 14/10/2012
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 16:13 | |
| - Mélomaniac a écrit:
- INTRODUCTION : une pulsation qui semble précéder le début de l'oeuvre, émane aux bois & cordes dans un registre grave, et frissonne sur un trémolo qu'amplifie la grosse caisse. En surgit une plainte emphatique
J'ai retrouvé la lettre de Mahler à sa chère Alma où Mahler raconte comment lui est venu le début du premier mouvement : "Comme tu dois t'en souvenir, je me suis torturé jusqu'à la folie [[Mahler venait de perdre 15 jours à cause d'une migraine et d'un manque d'inspiration ]]. Jusqu'à ce que je fasse mon excursion dans les Dolomites ! Mêmes tortures là haut. Si bien que je me suis décidé à tout abandonner et à repartir, convaincu que l'été était perdu. A Krumpendorf, je suis monté en bateau pour traverser le lac. Dès le premier coup de rame, l'idée m'est venue du thème, ou plutôt du rythme et de l'atmosphère, de l'introduction du premier mouvement. En quatre semaines, les premier, troisième et cinquième mouvement étaient entièrement terminés." ...Autre anecdote croustillante, Mahler venait d'essuyer deux terribles fiascos, celui de la cinquième et celui de la sixième (aujourd'hui vénérées par 99 % de l'humanité ou presque, n'est-ce pas ?).... Donc, au moment de faire jouer sa septième, il n'a même pas trouvé d'éditeur pour copier les partitions et les parties d'orchestre ! Il a du s'en charger à ses frais et sur son temps libre. Motivé, le Gustav. |
| | | vinclec Mélomaniaque
Nombre de messages : 628 Age : 42 Localisation : Amiens Date d'inscription : 14/10/2012
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 16:19 | |
| - kegue a écrit:
Il me semble aussi intéressant de remarquer que le thème A de la 7ème possède des ressemblances avec l'intro du Final de la Sixième
A propos des ressemblances entre certains thèmes de la septième et de la Sixième : il est à noter que Mahler a travaillé SIMULTANEMENT sur ces deux oeuvres en 1904. C'était d'ailleurs la première fois dans son histoire créative qu'il composait deux oeuvres en même temps (selon Lagrange, toujours) !!!!! Plus précisément, il achevait sa sixième tout en esquissant les deux mouvements "nocturnes" (II. et IV.) Je serais curieux de savoir si ces champions de kegue et Melomaniac nous y décèlent des thèmes communs. Enfin, il y a qq années, un commentateur de France Musique disait qu'un thème du mouvement lent (IV.) était tiré du Wunderhorn, et que c'était la dernière fois que Mahler citait son Wunderhorn, ce que je n'ai JAMAIS réussi à retrouver, mais je ne suis pas aussi pointu que vous. J'offre une récompense. |
| | | kegue Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4936 Age : 54 Localisation : Là où repose Cocteau Date d'inscription : 27/10/2008
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 16:56 | |
| Cela ne me dit rien comme ça. Par contre, la première Nachtmuzik peut être rapprochée de Revelge par certains côtés. C'est peut-être de cela que le commentateur de FM voulait parler. On peut aussi admettre que les deux sérénades sont dans l'esprit du Wunderhorn par leur langage thématique et orchestral. Mais bon, on ne sait jamais avec Mahler...Le Wunderhorn n'est jamais très loin. |
| | | vinclec Mélomaniaque
Nombre de messages : 628 Age : 42 Localisation : Amiens Date d'inscription : 14/10/2012
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 17:28 | |
| - kegue a écrit:
- Avec Mahler le Wunderhorn n'est jamais très loin.
Jolie phrase, je la garde. Encore un post-it sur mon frigo qui va susciter l'inquiétude de ma famille. Sinon, parfaitement d'accord pour Revelge, et pour l'ambiance "en-chantée" des sérénades. |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mar 20 Nov 2012 - 18:15 | |
| En y repensant, je me rends compte qu'il y a beaucoup de poins communs entre les mouvements initiaux de la 3e et de la 7e - dans la structure, le côté panthéiste de Création-du-monde, la variété des ambiances et du matériau musical, la trajectoire globale de l'ombre vers la lumière... Le premier mouvement de la 7e peut être perçu comme une sorte de synthèse ultra condensée (et beaucoup plus audacieuse dans son langage harmonique) des mouvements extrêmes de la 6e et du premier mouvement de la 3e : je l'ai toujours considéré comme une sorte d'aboutissement chez Mahler, par la suite il fera tout autre chose mais n'ira jamais plus loin dans cette direction-là; en outre chaque nouvelle œuvre (8e, Das Lied, 9e, 10e) sera profondément différente de la précédente, tandis que la 7e (et notamment son 1er mouvement) marque au contraire le point ultime d'une évolution assez continue et homogène depuis la Première Symphonie. Et bien sûr le Wunderhorn est toujours là - de manière plus souterraine et moins immédiate à partir de la 5e, mais on en trouve des échos assez évidents dans la 10e, la 8e et même la 9e... Ce cycle est le cœur profond de toute son œuvre, son principe générateur... |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 21 Nov 2012 - 1:27 | |
| - kegue a écrit:
- Bravo pour cette présentation.
[...] Je ne pense pas que le rythme caractéristique de l'intro (croche pointée, deux triples croches) soit un rythme anapeste. Il me semble que l'anapeste est une succession de deux notes brèves et d'une note longue. Ici, c'est le contraire qui est écrit ; je parlerais donc plus de rythme dactyle. [...] Alors Kegue veut s'amuser à me contredire Je confirme l'anapeste. L'attaque liminaire au temps fort sur la croche se perçoit comme un dactyle mais tronqué : sa queue. C'est même ce qui confère à cette marche l'impression qu'elle a commencé avant le début de la scansion. D'ailleurs quand des dactyles se succèdent ils ont endance à être entendus comme des anapestes par effet d'attraction vers la syllabe longue, qui dans la partition est accentuée. Les deux brèves sont perçues comme une anacrouse vers la longue. Tu remarqueras ainsi que la mélodie principale amorcée en croche pointée sur le troisième temps par le tenorhorn est elle-même précédée par une levée de double-croche à la fin du temps faible de l'accompagnement rythmique. On perçoit donc d'abord la découpe métrique de cet exorde comme les pas harassés d'un marcheur qui ahane fastidieusement, et s'immobilise découragé sur le palier conclusif de l'anapeste. Quand arrive la mélodie, ce palier déploie de vaniteux essors vers l'aigu et traduit la lutte du marcheur avec sa fatigue qu'il tente de surmonter en feignant de l'ignorer. C'est sur cette dialectique que repose l'ambiance ambivalente du début de l'introduction. Mais j'attends tes arguments |
| | | kegue Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4936 Age : 54 Localisation : Là où repose Cocteau Date d'inscription : 27/10/2008
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 21 Nov 2012 - 9:38 | |
| Mes arguments sont assez simples sur ce plan. Je suis entièrement d'accord pour le motif du tenorhorn qui, par phénomène d'attraction sur la valeur longue, peut préter à confusion. Quoiqu'au chiffre 1, ce motif raccourci n'est plus en anacrouse et se joint au rythme d'ostinato auquel il répond, avec encore une fois, des accents sur les temps forts. Mais sur l'ostinato (et c'est surtout de cela que je parlais), il n'y a aucun phénomène de levée. De plus, il y a une altèrnance d'articulation (_ ..) qui montre bien l'appui du phrasé sur trouve bien sur le temps et non sur sa levée. Je ne vois donc pas d'anapeste là-dedans. Il n'y a pas non plus de succession rythmique par le fait que la mesure est partagée en deux (croches pointée deux triples x2 / blanche). Cette organisation confirme bien qu'il n'y a pas d'anacrouse (phénomène très rare chez Mahler qui travaillait énormément sur la levée). Autre exemple, sur la fausse exposition du thème A (mesure 27), les rythmes s'enchaînent effectivement sur 3 mesures et demi. Mais encore une fois, il n'y a pas de levée (on doit même observer un respiration comme en témoigne la virgule avant la double barre, ce qui ôte complètement à la phrase des cors toute sensation de levée). Le phénomène est encore visible à la mesure 31 où la phrase des violons est coupée par une autre virgule, avant la reprise du rythme au chiffre 4. Maintenant, ce genre de débat est sans doute un peu compliqué à résoudre. Je nomme ce rythme par rapport à son organisation dans le temps et j'ai l'impression que tu le nommes par rapport au ressenti (ce qui se défend complètement d'ailleurs, même si je n'entends pas de marcheur dans cette intro où "ici brame la nature" comme le disait si bien Mahler). |
| | | vinclec Mélomaniaque
Nombre de messages : 628 Age : 42 Localisation : Amiens Date d'inscription : 14/10/2012
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 21 Nov 2012 - 11:43 | |
| - Golisande a écrit:
- Le premier mouvement de la 7e : je l'ai toujours considéré comme une sorte d'aboutissement chez Mahler
Je suis absolument d'accord, ce mouvement condense toute la science mahlérienne, utilisant tous les registres (lyrique, burlesque, extatique, épique, mélancolique, etc.) : c'est définitivement un très grand mouvement mahlérien, mon préféré avec le finale de la Sixième. Je suis moins d'accord avec l'analogie que tu proposes avec le premier mouvement de la troisième, qui me semble d'un esprit assez différent, plus exploratoire (collages, superpositions), et moins intériorisé. Je ne trouve pas que le premier mouvement de la 7ème puisse être rapproché de cette veine "panthéiste" de jeunesse. Il n'y a d'ailleurs ni programme ni indication programmatique de la par de Mahler. |
| | | Pipus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3571 Age : 50 Localisation : Vienne... en Isère, pas en Autriche ;-) Date d'inscription : 24/05/2010
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 17 Juil 2014 - 6:43 | |
| Mais que s'est-il passé, le mercredi 21 novembre 2012, après 11h43 ? Une description passionnante du premier mouvement de la 7e, démarrée deux jours précédents par les oreilles expertes et attentives de Mélomaniac. S'ensuit une discussion non moins captivante avec plusieurs forumeurs, l’histoire et la thématique du mouvement, l’anapeste... quelle joie de (re)découvrir ce premier mouvement, les thèmes, leurs reprises, leurs variations, les circonvolutions de la composition. Je m'apprêtais alors à passer au second mouvement... et là… Mélo, il faut absolument que tu continues ce travail ! |
| | | A Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5473 Date d'inscription : 04/02/2013
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Ven 18 Juil 2014 - 4:53 | |
| Je plussoie. Mais peut-être as-tu trouvé une interprétation plus intéressante comme plan de match pour II-V ? ( ) Allez-Mélo ! Allez-Mélo !! |
| | | Pipus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3571 Age : 50 Localisation : Vienne... en Isère, pas en Autriche ;-) Date d'inscription : 24/05/2010
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 6 Aoû 2014 - 13:11 | |
| Je dois en être à ma 10e écoute de la version Abbado à Lucerne en 2005. Cette 7e peut demander un peu de temps pour rentrer dans l'oeuvre, mais quelle beauté après quelques écoutes ! Ce démarrage du 5 mouvement ! Ces cuivres ! Et quelle mandoline |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Sam 3 Jan 2015 - 15:39 | |
| Ce fil est un peu triste depuis que Jérôme, Emmanuel et Kegue se sont éloignés. - Jaky a écrit:
- Mélomaniac a écrit:
Gustav Mahler (1860-1911) :
Symphonie n°7 en mi mineur
= Seiji Ozawa, Orchestre symphonique de Boston
(Philips, mars 1989)
Je n'écoute plus le Finale, trop vulgaire au point de choquer mon sens esthétique.
Il faudrait rétablir la fessée publique!! Dame Calbo est demandée!! - Mélomaniac a écrit:
- Bart a écrit:
c'était bien évidemment une petite boutade innocente.
Oui mais tout le monde se gausse de mes goûts musicaux et iconographiques, alors je commence à avoir des doutes...
Au sujet du Finale de cette 7°, oui ça correspond bien aux aspects vulgaires de la dialectique mahlérienne.
Mais même en le sachant, après les quatre premiers mouvements si subtils, cette musique de foire fait un peu tache... |
| | | Xavier Père fondateur
Nombre de messages : 91460 Age : 43 Date d'inscription : 08/06/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Sam 3 Jan 2015 - 15:41 | |
| Justement, je voulais redonner une chance à cette symphonie, et j'ai été surpris de beaucoup aimer le 1er mouvement (que j'ai trouvé assez proche du climat de la 6è), et assez le 2è également. (pas encore eu le temps d'écouter la suite) |
| | | Anthony Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3621 Age : 38 Date d'inscription : 24/06/2007
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Sam 3 Jan 2015 - 15:41 | |
| Oh, je n'avais jamais vu ce fil. Merci à toi Mélo pour ton décorticage du premier mouvement (le meilleur de la symphonie je pense)! Dommage que tu n'aies pas poursuivi l'entreprise. Cela t'aurait donné l'occasion d'écouter le final en boucle. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Sam 3 Jan 2015 - 15:47 | |
| - Mélomaniac a écrit:
- tout le monde se gausse de mes goûts musicaux et iconographiques, alors je commence à avoir des doutes...
Tu as raison, ça n'a plus rien de subtil. Aussi, je m'engage solennellement à te laisser un peu de répit. - Citation :
- Mais même en le sachant, après les quatre premiers mouvements si subtils, cette musique de foire fait un peu tache...
C'est sûr que le quatrième mouvement, avec son côté Docteur Jivago, c'est très subtil… Il y a beaucoup plus de superpositions très adroites dans le dernier mouvement, tout de même. Moi, je l'adore, ce dernier mouvement : autant les précédents sont un peu uniformément gris (avec des choses magnifiques, en particulier dans le premier, mais aussi les deux suivants), autant celui-ci joue la carte de la jubilation permanente, et c'est quand même sacrément dur à tenir sur une aussi longue durée. Certains disent qu'ils y voient une sorte de fanfare ironique, façon Cinquième de Chostakovitch (et il est un fait qu'on y retrouve les bouts de Ländler mi-malicieux, mi-grinçants)… mais moi j'y entends une véritable exultation musicale, un peu comme à la fin de la Deuxième, ou dans l'Inextinguible de Nielsen. Et Mahler dit qu'il est d'accord avec moi, il voulait une sorte d' « explosion de lumière » pour terminer sa longue fresque. Le problème de la Septième, c'est plutôt la disparité, pour moi : aussi bien entre les épisodes qu'à l'intérieur de ceux-ci (dans chaque Nachtstück, dans le Scherzo, on a beaucoup de retours un peu à l'identiques, un peu répétitifs pour une œuvre aussi longue…). La Deuxième et la Troisième, pourtant particulièrement disparates, n'ont pas ce problème. Même la Huitième me paraît finalement plus cohérente. En tout cas, j'aime beaucoup ce final de la Septième (si bien que je n'éprouve aucune gêne à l'écouter seul, même s'il a encore plus d'effet au bout de la symphonie) ; justement du fait de la structure lâche de l'ensemble — c'est beaucoup plus frustrant si on le fait avec la 2, la 3, la 5, la 6 ou la 8. Formidablement orchestré, tout de même. Et quelle poussée ! (C'est quand même la grande vertu de Mahler, le maintien quasi-éternel de la tension.)
Dernière édition par DavidLeMarrec le Sam 3 Jan 2015 - 15:52, édité 1 fois |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Sam 3 Jan 2015 - 15:51 | |
| - Xavier a écrit:
- Justement, je voulais redonner une chance à cette symphonie, et j'ai été surpris de beaucoup aimer le 1er mouvement (que j'ai trouvé assez proche du climat de la 6è), et assez le 2è également. (pas encore eu le temps d'écouter la suite)
Ah ben oui, quand même ! À mon avis, c'est justement le reste qui t'a rebuté (les mouvement suivants sont assez répétitifs, et le IV pas loin d'être niais à mon avis). - Bart a écrit:
- Oh, je n'avais jamais vu ce fil. Merci à toi Mélo pour ton décorticage du premier mouvement (le meilleur de la symphonie je pense)!
Pour compléter, Jérôme en avait fait un autre auparavant. - Citation :
- Dommage que tu n'aies pas poursuivi l'entreprise.
Oui, c'était le temps béni où Mélo parlait de musique au lieu de pochettes. Et après il s'étonne que notre attitude ait changé. |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 9:19 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- le IV pas loin d'être niais à mon avis
Ørgh. Je fais une petite visite au forum en attendant d'avoir de nouveau quelque chose à y raconter (c'est-à-dire de me remettre à Wagner), et voilà sur quoi je tombe. Une des pièces les plus enchanteresses et magnétiques de l'Univers. Et cette coda (Il n'y a que celle du II de Pelléas pour l'égaler)... Combien de fois ai-je quitté cette symphonie sur ce mouvement, pour en garder cette image et fuir le réveil vrillant et blafard du Rondo. |
| | | starluc Mélomaniaque
Nombre de messages : 951 Date d'inscription : 13/08/2013
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 14:44 | |
| - Xavier a écrit:
- Justement, je voulais redonner une chance à cette symphonie, et j'ai été surpris de beaucoup aimer le 1er mouvement (que j'ai trouvé assez proche du climat de la 6è), et assez le 2è également. (pas encore eu le temps d'écouter la suite)
Je ne sais pas si tu perds quelque chose...Comme souvent chez Malher, le 1er mouvement est un régal avec ce côté, "je ne sais quoi", de promenade sur une montagne à l'ambiance maléfique et de découverte soudaine et radieuse d'un lac italien entouré de villas 1900 à l'esthétique baroque...Le reste, si je me souviens bien est assez confus, bruyant et redondant... Je sens que je me faire encore des amis, tiens... |
| | | Xavier Père fondateur
Nombre de messages : 91460 Age : 43 Date d'inscription : 08/06/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 14:47 | |
| C'est juste que ça me paraît un peu hâtif et radical de balancer trois adjectifs négatifs sur les 3/4 d'une symphonie d'un type comme Mahler... Je dis ça alors que j'ai quand même souvent du mal avec la moitié de ses symphonies. Mais enfin, c'était pas un baltringue quand même, alors je réessaie. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 14:52 | |
| - Golisande a écrit:
- Une des pièces les plus enchanteresses et magnétiques de l'Univers.
Si on aime les vacances au Tyrol et les doublures de balalaïka façon Jarre, sans doute. Pour les autres, le bilan est sans doute plus contrasté. |
| | | starluc Mélomaniaque
Nombre de messages : 951 Date d'inscription : 13/08/2013
| | | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 16:31 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Golisande a écrit:
- Une des pièces les plus enchanteresses et magnétiques de l'Univers.
Si on aime les vacances au Tyrol et les doublures de balalaïka façon Jarre, sans doute.
Pour les autres, le bilan est sans doute plus contrasté.
Oui, si on le prend au premier degré, bien sûr (mais c'est malheureusement le cas de pas mal de versions récentes). En revanche, joué méchamment, ça prend un côté sarcastique et grinçant qui peu assez bien fonctionner dans l'économie d'ensemble de l'œuvre (Scherchen et Maderna le font très bien; Klemperer aussi dans un autre genre). |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 16:59 | |
| Oui, Klemperer, c'est différent. Je l'aime beaucoup dans Mahler, mais là, quand même, on est quelque part entre ses qualités malheriennes et ses lourdeurs habituels. Maderna, je crois que j'ai déjà essayé (et je n'ai rien remarqué). Mais si Scherchen fait des coupures, ça m'intéresse. |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 17:45 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Oui, Klemperer, c'est différent. Je l'aime beaucoup dans Mahler, mais là, quand même, on est quelque part entre ses qualités malheriennes et ses lourdeurs habituelles.
Radicalement différent. Mais justement: dans la 7e, on est loin de ses qualités mahlériennes habituelles, mais tout aussi loin de ses lourdeurs habituelles: c'est au-delà du lent ou du pesant de ses Mozart, c'est si radicalement étiré que tout en est complètement désarticulé et distordu - ça en a un côté insoutenable assez inouï. (Enfin, moi j'aime beaucoup.) - DavidLeMarrec a écrit:
- Mais si Scherchen fait des coupures, ça m'intéresse.
Scherchen ne coupe pas dans la 7e. En revanche, il n'a pas son pareil pour rendre corrosif tout ce qui pourrait ressembler à de la guimauve (en plus, avec les crincrins acides* de l'orchestre du Staatsoper chez Westminster ou des Symphoniker chez Orfeo, c'est parfait.) Et Maderna, en fait, ça y ressemble assez (avec les Symphoniker aussi). *Dans le genre raisins verts, les violons des Philharmoniker, c'est de la gnognotte à côté. |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 20:21 | |
| - Benedictus a écrit:
- En revanche, joué méchamment, ça prend un côté sarcastique et grinçant qui peu assez bien fonctionner dans l'économie d'ensemble de l'œuvre (Scherchen et Maderna le font très bien; Klemperer aussi dans un autre genre).
Eh bien, je ne voulais pas dire ça non plus... Pour moi, il n'y a strictement rien de méchant ni de grinçant dans ce mouvement (sinon de façon souterraine, puisqu'il a évidemment aussi sa part d'ombre - très audible entre autres dans les clair-obscurs de la coda - et qu'en vérité la musique de Mahler n'est jamais gentille), et oui il faut le prendre au premier degré, et non il n'y a pas une once de niaiserie (ou alors je pourrais commencer à parler de Strauss, ce dont je n'ai pas la moindre envie parce que je l'aime bien quand même) mais au contraire une suprême élégance, une gravité souriante et délicatement voilée... Ce n'est pas Arabella, c'est tout-à-fait autre chose mais au moins aussi fort - et qui me touche encore bien plus. Vacances au Tyrol, oui pourquoi pas (je vous signale quand même que Mahler passait tous ses étés - et, accessoirement, a composé toute son œuvre - non pas au Tyrol mais bien dans les Alpes autrichiennes un peu plus à l'est), mais ce mouvement est un rêve - de vacances dans les Alpes comme de beaucoup d'autres choses ; et sous ses airs modestes, c'est pour moi une des choses les plus parfaites et miraculeuses de Mahler (au moins à la hauteur de l'Adagio de la 4e, et bien au-dessus de l'Andante de la 6e, pour rester dans une veine pas trop éloignée) et même au-delà... ... Et il ne faut pas écouter Bernstein là-dedans, encore moins Boulez (plutôt Haitink en 1982 ou Sinopoli par exemple)... ...Et j'aime énormément Julie Christie dans Dr Jivago... |
| | | Horatio Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4135 Age : 30 Localisation : Très loin de la plage ! Date d'inscription : 04/07/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 20:58 | |
| Ce quatrième mouvement est en tous cas un alter ego intéressant de la première Nachtmusik : les deux mouvements suggèrent des visions insaisissables de mondes clair-obscurs. Je n'ai jamais réussi à mettre des mots exacts sur les panoramas qu'ils m'évoquaient - car à chaque fois que je croyais tenir une illustration pertinente de cette musique, les climats sonores avaient changé et évoquaient déjà autre chose... La première, surtout, est un rêve éveillé, un petit miracle de subtilité par cette manière de ne jamais se livrer tout-à-fait, de suggérer sans dévoiler. Je trouve la seconde plus terrestre, moins magique - peut-être est-ce dû à l'orchestration (plus lourde) ; l'instabilité des mouvements précédents se mue en un schéma de détente-inquiétude-détente plus voyant. Difficile de rester sur les mêmes sommets pendant cinq mouvements... |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Mer 14 Jan 2015 - 21:20 | |
| Précisément : j'adore la première Nachtmusik mais, pour reprendre tes mots, je trouve la seconde encore plus magique et insaisissable – précisément parce que l'étrangeté et l'onirisme y sont moins "voyants", fondus dans un discours faussement pépère et conventionnel, et donc bien plus radicaux à mon sens... Avec la première on est dans un ballet d'ombres, mais la seconde est une féerie en miniature, une sérénade de lucioles... Et un rêve tout court, pas un rêve éveillé (d'où le réveil brutal et impitoyable qui suit)... |
| | | arnaud bellemontagne Gourou-leader
Nombre de messages : 25859 Date d'inscription : 22/01/2010
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 14:05 | |
| Issu du sujet discographique: Et le final ? |
| | | andika Mélomaniaque
Nombre de messages : 662 Age : 34 Localisation : France Date d'inscription : 13/06/2017
| | | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 14:32 | |
| Pourtant, c'est exactement le propos de la symphonie, aux atmosphères inquiétantes ou extatiques de la nuit succède la « pleine clarté de midi », Mahler l'a écrit très clairement ; et je crois que ça s'entend, rien de grinçant dans ce frand débordement de lumière. Ça n'étonnera personne si je dis que c'est pour moi l'un des plus enthousiasmants mouvements du corpus. |
| | | arnaud bellemontagne Gourou-leader
Nombre de messages : 25859 Date d'inscription : 22/01/2010
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 14:37 | |
| Il a osé. |
| | | andika Mélomaniaque
Nombre de messages : 662 Age : 34 Localisation : France Date d'inscription : 13/06/2017
| | | | Cololi chaste Col
Nombre de messages : 33320 Age : 43 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 10/04/2009
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 16:27 | |
| - arnaud bellemontagne a écrit:
- Il a osé.
C'est même à ça qu'on le reconnaît _________________ Car l'impuissance aime refléter son néant dans la souffrance d'autrui - Georges Bernanos (Sous le Soleil de Satan)
|
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 16:29 | |
| Trêve de trollage : intéressant, très certainement, mais magnifique... Pour moi non, pas moyen (en revanche je trouve la seconde Nachtmusik magnifique, et je sais que beaucoup ne sont pas de cet avis). |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 17:45 | |
| - arnaud bellemontagne a écrit:
- Il a osé.
Pourquoi, vous auriez voulu que je mente, et que je dise, comme tous les gens bien, que les mouvements centraux qui nous font la grâce, depuis les profondeurs de l'ennui, d'un brin de mandoline rabâché, sont tellement géniaux que ce final gâche tout ? Il y a plein de tuilages et de lumière aveuglante, je ne vois vraiment pas pourquoi je bouderais mon plaisir, juste pour confirmer les préjugés de Cololi sur la vraie musique. (Ce garçon a un sérieux besoin d'aide pour amender sa vision de l'art musical, j'attends le retour de Mélo pour lui expliquer qu'on peut aussi écouter avec un plaisir élevé des œuvres assez loin de manifester le génie…) |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 18:06 | |
| Bizarre. J'aime énormément cette 7ᵉ, mais dans sa totalité, et y compris avec ses inégalités d'inspiration et de ton (un peu comme la 3ᵉ); je crois bien que je n'en écouterais pas des mouvements isolés - et je ne me passerais pas de ce Finale. |
| | | JosefK Mélomane averti
Nombre de messages : 412 Date d'inscription : 13/04/2018
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 18:29 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Pourtant, c'est exactement le propos de la symphonie, aux atmosphères inquiétantes ou extatiques de la nuit succède la « pleine clarté de midi », Mahler l'a écrit très clairement ; et je crois que ça s'entend, rien de grinçant dans ce frand débordement de lumière.
Ça n'étonnera personne si je dis que c'est pour moi l'un des plus enthousiasmants mouvements du corpus. J'ai toujours été surpris par ces commentaires péjoratifs, fort majoritaires dans la musicologie, sur ce finale qu'il est donc de bon ton de dénigrer. De même, d'ailleurs, par le fait que tout le monde, ou presque, depuis B. Walter a l'air de trouver que la Sixième est "une noix dure à craquer". |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| | | | Roupoil Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2045 Age : 43 Localisation : Pessac Date d'inscription : 22/04/2017
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 18:38 | |
| La septième est ma symphonie préférée de Mahler (ce qui n'est pas rien puisque Mahler est lui-même certainement mon compositeur préféré). Mes mouvements préférés sont sûrement les trois premiers, j'aurais du mal à hiérarchiser tant chacun des trois se trouve haut dans mon Panthéon des mouvements symphoniques inoubliables. J'aime moins la deuxième Nachtmusik, surtout en comparaison avec la première qui est pour moi nettement supérieure, et par contre j'adore aussi le Finale, même si c'est moins inattaquable que les premiers mouvements. Je suis surpris que le premier mouvement soit peu cité dans les messages précédents, il est pour moi extraordinaire (peut-être pas autant que l'andante comodo de la neuvième mais presque !). |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7904 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 18:47 | |
| Le premier mouvement de la Septième est mon préféré parmi tous les premiers mouvements des symphonies de Mahler - à l'exception peut-être de celui de la 9, mais je n'en suis pas du tout sûr... En revanche, la seconde Nachtmusik est pour moi un très haut chef-d'œuvre (je ne dis pas que c'est mon morceau préféré de Mahler - ne serait-ce que parce qu'il y a l'Abschied -, mais on n'en est pas loin)... |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97867 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Mahler, Symphonie n°7 : présentation et analyse Jeu 19 Avr 2018 - 19:31 | |
| - Golisande a écrit:
- En revanche, la seconde Nachtmusik est pour moi un très haut chef-d'œuvre (je ne dis pas que c'est mon morceau préféré de Mahler - ne serait-ce que parce qu'il y a l'Abschied -, mais on n'en est pas loin)...
Je veux bien lire un plaidoyer plus détaillé. (Parce que pour moi, son principal mérite à ce jour, c'est le contraste avec le dernier mouvement. Ça se répète beaucoup, et à tempo lent.) Sinon, oui, le premier mouvement est remarquable, je crois que tout le monde est d'accord là-dessus, mais c'est finalement, en plus sombre, très comparable aux autres premiers mouvements de Mahler, grande forme sonate hypertrophiée et digressive comme dans les 2,3,5,6… Cela dit, le manque d'appétence du final me surprend parce que je ne vois, là aussi, pas de différence très fondamentale avec le final de 1, ou même (en moins arborescent et davantage interrompu) de la 2, ni avec les épisodes plus grotesques de la 3 et de la 4… Si on aime le Mahler triomphant ou ländlerisant, on n'est pas très dépaysé. |
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