Du premier baroque italien, on connait Monteverdi bien sûr... et bizarrement, Stefano Landi reste dans l'ombre... bizarrement car après l'écoute de deux de ces oeuvres (
La Morte d'Orfeo et
Il Sant'Alessio), je dois dire que je trouve l'inspiration et l'intérêt aussi grand chez l'un que chez l'autre!
Rapide biographie :Formé au Collegio Germanico et au Seminario Romano de Rome, Landi va étudier la musique avec le Mâitre de Chapelle Agazzari, mais étudiera aussi la rhétorique et la philosophie.
Musicien d'église, Landi va tout de même composer des oeuvres théâtrales, dont le premier sera commandé par la famille qu'il sert : les Barberini. C'est grâce à eux qu'il entre en 1629 dans le choeur pontifical comme alto.
Oui, ce fut très rapide... pour plus d'informations, je vous renvoie vers l'article en anglais de Wikipedia... plus complet : Stefano Landi sur Wikipedia
Regard subjectif et assez naïf sur sa musique :Après avoir découvert ces deux oeuvres, je dois dire que je trouve ce compositeur vraiment très à l'aise dans un certain style déclamatoire, où les déplorations sont magnifiquement ciselées sans aucun sur-jeu ou un pathos trop marqué. Que ce soit dans l'un ou l'autre, l'orchestre reste toujours dans l'illustration délicate et l'accompagnement ciselé. Varié en terme de styles (le Sant'Alessio passe allègrement des scènes les plus tristes aux bouffonneries sans soucis!) ces deux oeuvres n'ennuient jamais de part les beautés mélodiques, les différenciations des personnages et les ambiances créées.
Peut-être moins théâtrale qu'un Monteverdi (mais en même temps ces deux oeuvres ne sont-elles pas plus à classer dans les oratorios que dans les oeuvres théâtrales?) mais d'une beauté et d'une inspiration aussi grande, Landi est un compositeur que je découvre depuis quelques temps, à force d'écoute de ces deux oeuvres et dont les subtilités me font l'admirer de plus en plus!
La Morte d'Orfeo :Tragicomedia pastorale en cinq actes
Livret d'Angelo Poliziano en 1484
1619Suite de l'Orfeo de Monteverdi dans le mythe, on assiste à la fin de vie de celui qui perdit son amour.
Le jour de son anniversaire, Orphée s'attire deux ennemis puissants : Bachus et les Ménades. En effet, en refusant les réjouissances il choque ces personnages divins. Sous les coups de Ménades, il meurt, au grand désespoir de sa mère. Arrivé en Enfer, il doit convaincre Charon de le laisser passer pour rejoindre Eurydice. Mercure a beau lui proposer de séjourner sur l'Olympe, Orphée veut revoir son aimée. Elle apparait mais ne reconnait pas son amant, l'eau du Léthé lui ayant fait perdre la mémoire. Comprenant que lui aussi perdra tout souvenir, Orphée quitte les Enfers pour rejoindre Jupiter sur l'Olympe.
Discographie :Il existe deux enregistrements :
- le premier enregistré en 1987, dirigé par Stephen Stubbs
- le deuxième enregistré en 2006, dirigé par Françoise Lasserre
C'est ce deuxième enregistrement qui m'a fait découvrir Landi :
Attiré par les chanteurs et l'histoire d'Orphée, je ne savais pas trop à quoi m'attendre. Et j'ai été rapidement ébloui par ce que j'ai entendu. J'ai déjà un peu expliqué ce qui m'a particulièrement marqué dans le style de Landi... et le tout est magnifiquement rendu par les musiciens. Françoise Lasserre dirige un orchestre assez réduit avec l'ensemble Akademia. Subtile et très coloré, la partition se trouve très bien servie. Les chanteurs ne sont pas en reste, avec un Cyril Auvity splendide en Orphée. Le phrasé est magique, la voix de toute beauté et la délicatesse du chant nous fait vraiment entendre ce poète. Par deux personnages (la mère d'Orphée ainsi que Tétis), Guillemette Laurens donne à la déploration tout le poids de sa noblesse de chant. Toujours aussi magnifique dans ses incarnations que dans les années 80, cette grande dame ébloui par une voix superbe et une émotion des plus touchante! A l'opposé, Dominique Visse (lui aussi un ancien en pleine forme!) chante les rôles de Bacchus et Charon. Avec sa voix étrange et tranchante, il est toute la haine, la méchanceté ou le grinçant des personnages.
Tout le reste de la distribution est au même niveau que ces trois là, qui avaient été pour moi l'argument d'écoute premier...
Il Sant'Alessio :Historia sacra en deux actes
Livret de Giulio Rospigliosi
1631Durant cette oeuvre, on assiste aux derniers jours d'Alexis, Saint maintenant oublié, qui abandonna sa famille pour vivre une vie pieuse après un séjour à Jérusalem. De retour à Rome, il finira ses jours comme mendiant sous l'escalier de la demeure familiale, ignoré de tous. On assiste au désespoir des parents du jeune homme ainsi que de sa femme, à la tentative de corruption du future saint par un démon... et enfin à la reconnaissance du corps du jeune homme par sa famille. Tout cela est ponctué par des scènes humoristiques des valets.
Discographie :Deux versions là encore :
- un premier enregistrement en 1995 dirigé par William Christie
- un deuxième enregistrement (en DVD) en 2007 toujours dirigé par William Christie
C'est là encore le deuxième enregistrement que j'ai visionné :
Enregistré à Caen, ce spectacle est mis en scène par Benjamin Lazare et la distribution est exclusivement masculine, pour répondre aux traditions de l'époque de la création. Lazare nous propose un retour aussi à l'origine avec un superbe travail à la bougie, des costumes magnifiques et une gestuelle très travaillée.
Le fait de ne faire chanter que des hommes pose quelques soucis à priori... comment distribuer la mère et la femme d'Alexis? Tout simplement en appelant des contre-ténors voyons! Et c'est donc Xavier de Sabata et Max-Emmnanuel Cencic qui prennent ces deux rôles. Superbes l'un comme l'autre, ils donnent vocalement vraiment une très belle interprétation de leurs rôles : sensibles et délicat, le chant donne vraiment l'illusion de femmes ici. Splendide.
Autre contre-ténor, Philippe Jarrousky chante Alexis. La voix est plus claire que celles des deux autres, et du coup, toute la fragilité et la naïveté du personnage est là.
Au milieu de ces trois voix hautes, Alain Buet prête sa belle voix de baryton pour chanter le père, alors que Luigi De Donato souffre un peu dans les graves du démon tout en étant assez magnétique!
Reste de la distribution sans faille, et puis William Christie en maître d'oeuvre. Les Arts Florissants sont vraiment magiques! Beauté des timbres, délicatesse de la direction, mise en valeurs des mélodies... Un vrai chef-d'oeuvre!
Voilà... c'est tout ce que je peux dire... Pas grand chose me direz-vous... et des choses assez convenues. Mais j'ai du mal à expliquer tout ce que j'ai peu entendre... c'est un émerveillement de tous les instants
Du coup, je me tourne vers vous... avez-vous d'autres disques de Landi à me conseiller? Est-il intéressant d'écouter les autres enregistrements cités ci-dessus? Je dois dire que le premier Christie du Sant'Alessio me tenterait bien...
Je vous cède la parole donc!