Autour de la musique classique Le but de ce forum est d'être un espace dédié principalement à la musique classique sous toutes ses périodes, mais aussi ouvert à d'autres genres. |
| | La musique de chambre de BRAHMS | |
|
+83Ravélavélo LeKap greg skywalker Bruno Luong Iskender Mélomaniac xoph yannig Anaxagore khool63 Benedictus Eusèbe Montfort nugava Rilke silkkuuikku j.p. bregegrahf Vivien64 MIMI21 Philippe VLB Percy Bysshe Golisande Opus100 Mandryka benvenuto Fiordiligi Horatio Cololi Walther Utnapištim epinal88 vieille cire Oudread keane Zeno arnaud bellemontagne Kilban Ophanin aurele Richard *Nico Mariefran poisson Schwark Dr. Strangelove KID A jerome Passage Wolferl miralf TuC Zeugma Acco Rubato atomlegend Tus WoO mari OYO TOHO Pierrot Lunaire Fanfaron bouddha Bertrand manontroppo felyrops Morloch Cello nonopoly enie Stadler Kia Tutur antrav Poulet DavidLeMarrec quintette op.57 adriaticoboy Julien Jaky Swarm Xavier sofro 87 participants | |
Auteur | Message |
---|
DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mar 24 Juil 2018 - 14:08 | |
| Un plaisir bien trop rare que de lire Vieille Cire dans ces pages, en effet. Kremer-Argerich, je n'ai pas essayé, mais je n'ai pas eu de bonnes expériences avec eux, Kremer a quelque chose de toujours étrangement abstrait. Et effectivement, ce sont plutôt des réunions de solistes, même si Maisky-Argerich est un duo en général fécond. Stern / Ma / Ax, c'est une autre histoire, vraiment des spécialistes de la musique de chambre qui y ont dédié une très large partie de leur carrière et de leurs enregistrements, toujours avec les mêmes partenaires, donc vraiment un esprit chambriste, tout solistes qu'ils sont. C'est certes moins organique qu'avec des ensembles constitués, mais leur Brahms atteint quelque chose de brut et massif que je trouve vraiment dans l'esprit : rugueux et primitif au moins autant que formel et subtil. Néanmoins, je trouve que c'est moins lisible et abouti que les Capuçon. |
| | | vieille cire Mélomane averti
Nombre de messages : 240 Age : 78 Localisation : asnieres sur seine Date d'inscription : 06/05/2009
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mar 24 Juil 2018 - 23:02 | |
| Je vous remercie à nouveau. En parfait accord avec ce qu'en dit Iskender, j'ai découvert grâce à vous deux et avec beaucoup de plaisir la version des Capuçon. Mais, voyez-vous, une telle réponse ne fait guère avancer le Schmilblick et c'est pourquoi j'interviens peu dans le forum. |
| | | Eusèbe Mélomaniaque
Nombre de messages : 1599 Age : 47 Localisation : Paris/ Lille Date d'inscription : 23/09/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Jeu 16 Aoû 2018 - 20:48 | |
| Suite aux recommandations d'Iskender, j'ai écouté les sonates piano/ violon par Capuçon et Angelich.
Je suis à la fois séduit par Angelich et pas entièrement convaincu par Capuçon: trop de vibrato à mon goût, ce qui donne un Brahms qui fait un peu trop dans le pathos, en particulier dans l'op. 108. C'est sans doute l'Op 100 où les deux instruments s'équilibrent le mieux.
Une belle version, agréable et bien enregistré, mais un peu conventionnelle. |
| | | arnaud bellemontagne Gourou-leader
Nombre de messages : 25818 Date d'inscription : 22/01/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Dim 11 Nov 2018 - 15:20 | |
| Disques en lice consacré au quatuor avec piano n°1.
https://www.rts.ch/play/radio/disques-en-lice/audio/johannes-brahms---quatuor-avec-piano-no-1-en-sol-mineur?id=9948290 |
| | | Eusèbe Mélomaniaque
Nombre de messages : 1599 Age : 47 Localisation : Paris/ Lille Date d'inscription : 23/09/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mar 4 Déc 2018 - 23:52 | |
| Brahms, Quatuors op. 51, 1 et 2, Quatuor Belcea (Alpha)
Je m'étais acheté ce disque sur les conseils de Benedictus, mais je n'avais jamais eu le temps de l'écouter sérieusement. Je suis pleinement convaincu par ces attaques très tranchantes, ces phrasés tendus, rehaussés par la grande clarté des lignes instrumentales, qui mettent en valeur les audaces harmoniques. C'est un Brahms plus expressionniste que romantique, nettement tourné vers la postérité - le disque a été enregistré à peu prés en même temps que celui (que je n'ai pas écouté) consacré à Schoenberg, Berg et Webern. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mer 5 Déc 2018 - 0:00 | |
| Pour du Brahms bartókien, le Quatuor Bartók chez Hungaroton livre des interprétations massives, rugueuses, très impressionnantes, comme un folklore brut et tourmenté – je n'aime pas le quatuor à cordes massif, ni énormément Bartók, mais là, je rends complètement les armes.
Très atypique et beaucoup plus vivant qu'à peu près tout le reste de la discographie, je trouve (sinon j'aime quand même beaucoup les Vertavo chez Simax, dans un genre emporté / élancé / lumineux qui est moins atypique). |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 8 Déc 2018 - 17:27 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Pour du Brahms bartókien, le Quatuor Bartók chez Hungaroton livre des interprétations massives, rugueuses, très impressionnantes, comme un folklore brut et tourmenté – je n'aime pas le quatuor à cordes massif, ni énormément Bartók, mais là, je rends complètement les armes.
Très atypique et beaucoup plus vivant qu'à peu près tout le reste de la discographie, je trouve. J'avais acheté leur disque du quintette à cordes parce que c'était leur interprétation qu'on entendait dans le film Buffet froid ... Dans la scène juste avant que tous les musiciens se fassent abattre. watch?v=cw3W94eyp4g watch?v=Nv3P1BshPTY - Spoiler:
- J'ai jamais tué personne. Je suis un artiste. Je suis un musicien. Je suis 3e violon à l'Opéra. - Quoi? - Je suis un simple musicien. Un violoniste insignifiant. - Mettez-lui les menottes. - Qu'est-ce que j'ai fait? - Il y aura pas de violoniste dans cette tour. C'est une tour interdite aux musiciens. C'est une tour sans gammes et sans arpèges. On veut pas devenir dingues avec ton archet qui va grincer 4 heures par jour sur 30 étages! Ça me scie les nerfs, le violon. Je suis allergique!
Excellente interprétation par ailleurs. |
| | | Cello Chtchello
Nombre de messages : 5748 Date d'inscription : 03/01/2007
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 18 Mar 2019 - 14:56 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Cello a écrit:
- 10 - Trio avec cor
Ah tiens, davantage que les trios piano-cordes ? - Cello a écrit:
- Bizarre, hein ?
C'est surtout le mouvement lent si étrange qui le fait figurer en si enviable place parce que sinon, globalement, les trios cordes-piano sont plus aboutis. Mais ce mouvement lent me trouble remarquablement, je connais rien d'autre qui s'en approche en terme de climat dans toute l’œuvre de Brahms. ... C'est surtout le mouvement lent si étrange qui le fait figurer en si enviable place parce que sinon, globalement, les trios cordes-piano sont plus aboutis. Mais ce mouvement lent me trouble remarquablement, je connais rien d'autre qui s'en approche en terme de climat dans toute l’œuvre de Brahms.
- DavidLeMarrec a écrit:
- C'est vrai qu'il y a des bifurcations étranges, une atmosphère lunaire (sans un tout autre genre, la première sonate avec clarinette a ce type d'effet)…
Les qualificatifs ci-dessus s'appliquent particulièrement à l'interprétation que l'on trouve sur ce disque : En fait, c'est le son très particulier de Francis Orval au cor qui renforce ces qualités. Là où son côté un peu "blanc" le rend trop discret sur l'ensemble du trio, son timbre prend un tour fantomatique tout à fait unique et approprié dans le mouvement lent. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 18 Mar 2019 - 16:53 | |
| Je ne l'ai jamais écouté (pas particulièrement inconditionnel de ces gens), j'essaierai pour entendre de plus près ce que tu disais. |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1740 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 18 Mar 2019 - 17:24 | |
| Si on est puriste, il faut écouter le trio pour cor avec un cor naturel comme préconisé par Brahms. Heureusement on a la très belle version de Teunis van der Zwart (avec Faust et Melnikov). |
| | | Cello Chtchello
Nombre de messages : 5748 Date d'inscription : 03/01/2007
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 23 Mar 2019 - 16:21 | |
| Ah oui, ça j'ai aussi en stock. J'en garde un bon souvenir, en effet. |
| | | greg skywalker Mélomaniaque
Nombre de messages : 1013 Date d'inscription : 06/08/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Dim 14 Avr 2019 - 18:05 | |
| - playlist a écrit:
Brahms Quatuor avec piano n°1 op25 Norbert Brainin/peter Schidlof/martin lovett/Emil Gilels Un grand écart stylistique entre les Artemis et Amadeus ... quelqu'un peut me conseiller une interprétation moderne des Quatuors avec piano (les 3 ) de Brahms ? (les capuçon ? le sage , d'autres ? )
|
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mar 2 Juil 2019 - 17:52 | |
| À cause de vos récentes conversations, je me réécoute les meilleures versions du Quintette avec piano : Jandó & Kodály SQ, Kudritskaya & Brodsky SQ… J'aime comme le premier claque, et me rouler dans les moirures des Brodsky pour l'autre…
(Et puis les œuvres pour clarinette je découvre qu'il existe Fröst, Jansen, Rysanov, Thedéen et Pöntinen… comment on peut à se point réunir les meilleurs artistes du monde sur un disque… C'est bien évidemment très convaincant.) |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mer 28 Aoû 2019 - 23:47 | |
| - Mélomaniac, in playlist, a écrit:
Johannes Brahms (1833-1897) :
Quatuor avec piano n°1 en sol mineur, Op. 25
Szymon Goldberg, violon William Primrose, alto Nikolai Graudan, violoncelle Victor Babin, piano
(RCA, janvier 1968)
Captée à New York dans une acoustique étroite et mate, la sonorité n'offre rien de gracieux, mais la puissance et le caractère bourru impressionnent ! Contrairement à ce que suggère le nostalgique paysage automnal sur la pochette, cette indocile interprétation s'avère très dense, physique, exaltée voire agressive. L'Allegro culmine sur un pic d'intensité qui laisse sans voix, et le presto final du Rondo renverse tout sur son passage dans une fureur de tornade. Pour ces quelques moments sismiques, un témoignage à connaître !
|
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Dim 8 Sep 2019 - 0:14 | |
| • Quintette pour clarinette et cordes op. 115 en si mineurFlorent Pujuila (clarinette), Pierre Fouchenneret, Deborah Nemtanu (violons), Lise Berthaud (alto), François Salque (violoncelle) En public, Waterloo, X.2017 & III.2018 La Belle Saison LiveVersion imparfaite mais très touchante, découverte grâce à Eusèbe qui avait signalé cette intégrale de la musique de chambre. Elle se distingue d’abord par ses sonorités presque fluettes, en tout cas claires et déliées: par rapport aux versions Leister dont j’ai l’habitude (avec les Amadeus chez DG, les Brandis chez Nimbus et les Leipziger chez MDG), la pâte sonne vraiment très allégée - ce qui à mes yeux est loin d’être un défaut. Il est cependant possible qu’elle ne fasse pas l’unanimité en raison même de son parti-pris de production. Il s’agit en effet de captation sur le vif non retouchées, avec un ensemble de solistes: ce qui signifie que, par rapport à des versions studio enregistrée avec des ensembles constitués, on pourra relever des scories (des bruits d’estrade et de salle, mais surtout des équilibres pas toujours maîtrisés, quelques moments de relatif flottement dans la cohésion ou les intonations, quelques phrasés d’une justesse un peu défaillante); mais en contrepartie, ce qu’on entend là est remarquable de chaleur et d’engagement, avec des vraies prises de risques (c’est une lecture très contrastée, notamment au niveau des tempi.) Bref, le contraire d’un disque impeccable, mais un enregistrement qui rend palpables et vivants l’atmosphère d’une rencontre musicale, les impondérables de la musique en train de se faire, l’esprit chambriste en somme. J’écouterai en tout cas avec intérêt d’autres maillons de cette intégrale. (Même si j’ai aussi très envie, pour ce quintette, d’écouter aussi la version Fröst, qui elle aussi doit être tout aussi svelte de sonorité mais que j’imagine beaucoup plus au cordeau.) |
| | | LeKap Mélomaniaque
Nombre de messages : 1648 Age : 67 Localisation : Bruxelles Date d'inscription : 23/04/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mer 11 Sep 2019 - 16:28 | |
| Bonjour Quelqu’un aurait-il écouté les sonates violon et piano part le tandem Faust/ Melkinov |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 7 Oct 2019 - 23:57 | |
| - Mélomaniac, in playlist, a écrit:
Johannes Brahms (1833-1897) :
Trio avec piano n°1 en si majeur, Op. 8 Trio avec piano n°2 en ut majeur, Op. 87
Itzhak Perlman, violon Lynn Harrell, violoncelle Vladimir Ashkenazy, piano
(Emi, février-avril 1991)
Bonne lecture, mais qui ne m'a jamais enthousiasmé plus que ça, et guère davantage ce soir. Aucun trait de génie, que de l'agréable routine sans rien qui retienne l'attention. Bref : manque de caractère, d'autant qu'au sein de ce trio (plutôt une union de solistes dans la mesure où il ne s'agit pas d'un ensemble constitué), le violoncelle d'Harrell peine un peu à exister.
- docteur mabuse a écrit:
Je ne connais pas ce disque Brahms, mais j'ai un bon souvenir de leur Trio de Tchaikovsky. Ils avaient quand même l'habitude de jouer ensemble.
- Spoiler:
EMI (1981)
Leur Trio de Ravel était bien aussi, quoique atypique, pas très dans l'esprit français. Plus romantique.
- Spoiler:
Decca (1995)
|
| | | Ravélavélo Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9007 Localisation : Pays des Bleuets Date d'inscription : 28/09/2015
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 11 Oct 2019 - 5:02 | |
| - Bruno Luong a écrit:
- Si on est puriste, il faut écouter le trio pour cor avec un cor naturel comme préconisé par Brahms.
Heureusement on a la très belle version de Teunis van der Zwart (avec Faust et Melnikov). Je note ta référence, merci ! Existe-t-il d'autres versions de cette oeuvre jouée sur instruments d'époque ? |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| | | | Ben. Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2075 Age : 36 Localisation : Paris Date d'inscription : 02/10/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 18:05 | |
| - Benedictus a écrit:
- En Playlist, greg skywalker a écrit:
- Ben. a écrit:
- greg skywalker a écrit:
- Brahms sextuor à cordes n°2 op.36 Capuçon renaud et gautier , caussé , koncz,chilemme,hagen
J'écoute davantage le mainstream que j'ai l'air ... Je déteste cette version !
C'est bien d'avoir des goûts aussi affirmé ! Perso , cette version me convient bien . Pour les sextuors tu écoutes qui ? - Ben. a écrit:
- J'ai souvent beaucoup de mal avec Capuçon(s).
La version historique: Stern/Katims/Casals/Scneider/Thomas/Foley La version live: Cypress String Quartet/Shiffman /Bailey La version qui plaira à tout le monde: Amadeus/Aronowitz/Pleeth La version impeccable: Prazak/Holman/Fortin Ma version préférée: Talich/Kanka/Kluson
Je crois que certains aiment Saint Martin in the Fields mais je trouve ça trop rond. Je n'ai jamais écouté cette version (ni d'une manière générale les frères Capuçon en musique de chambre) - ça m'intéresserait si vous pouviez développer un peu ce qui vous plaît et vous déplaît dans cet enregistrement. (Sinon, par Stern/Casals & Co., il n'y a hélas que l'op. 18.)
Je développerai plus ultérieurement mais en quelques mots, je trouve que ces sextuors sont à la fois magnifiques et en même temps très propice à des interprétations rondouillardes, qui se traînent un peu, ambiance salon et fond sonore pour petits fours. Les seules versions qui font ressortir le caractère de ces pièces sont à mon sens celles qui font le parti pris de cordes très vertes, parfois même un peu rêches - très Europe centrale, donc. Et la version Capuçon, avec son côté très propre sur soi, verse vite dans la musique d'ambiance. Je n'y entends ni l'intériorité (moins immédiate que dans d'autres pièces de musique de chambre de Brahms), ni le caractère, ni la dimension dramatique. Même dans les nuances, tout oscille entre le mezzo-piano et le mezzo-forte. C'est à peu près comme ça qu'il faut jouer Brahms pour en faire ressortir tous les défauts supposés. |
| | | greg skywalker Mélomaniaque
Nombre de messages : 1013 Date d'inscription : 06/08/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 19:38 | |
| Je connais que 2 versions des sextuors , les capuçon et les amadeus . Je trouve la rondeur chez les Amadeus , les capuçon ont un son presque frêle mais ils sont plus vifs que les Amadeus ; peut être c'est l'effet "concert live" , la version parait plus brouillonne, mais plus romantique et vivante (plus emportée aussi) que les Amadeus joue plus "classique" , plus "mezzo" ... Bref je lis "Et la version Capuçon, avec son côté très propre sur soi, verse vite dans la musique d'ambiance. Je n'y entends ni l'intériorité (moins immédiate que dans d'autres pièces de musique de chambre de Brahms), ni le caractère, ni la dimension dramatique." |
| | | Ben. Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2075 Age : 36 Localisation : Paris Date d'inscription : 02/10/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 20:14 | |
| - greg skywalker a écrit:
- Je connais que 2 versions des sextuors , les capuçon et les amadeus . Je trouve la rondeur chez les Amadeus , les capuçon ont un son presque frêle mais ils sont plus vifs que les Amadeus ; peut être c'est l'effet "concert live" , la version parait plus brouillonne, mais plus romantique et vivante (plus emportée aussi) que les Amadeus joue plus "classique" , plus "mezzo" ...
Bref je lis "Et la version Capuçon, avec son côté très propre sur soi, verse vite dans la musique d'ambiance. Je n'y entends ni l'intériorité (moins immédiate que dans d'autres pièces de musique de chambre de Brahms), ni le caractère, ni la dimension dramatique." Oui mais sans parler de tempo, tu ne trouves pas ça terriblement lisse ? (Amadeus aussi, c’est pour ça que j’en fais ma version « grand public ») |
| | | greg skywalker Mélomaniaque
Nombre de messages : 1013 Date d'inscription : 06/08/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 20:43 | |
| en tout cas , moins lisse que des Amadeus . Il faudrait que j'écoute les Tallich (ta version favorite ) |
| | | Eusèbe Mélomaniaque
Nombre de messages : 1599 Age : 47 Localisation : Paris/ Lille Date d'inscription : 23/09/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 21:52 | |
| Les Amadeus, c'est tout de même assez charpenté et symphonique. Je n'aime pas trop les Capuçon dans Brahms: pour moi, c'est une version de solistes, qui mettent trop de pathos dans cette musique, avec du vibrato appuyé (en tous cas les sextuors et les sonates pour violon, je n'ai pas été voir le reste). On image cela joué cheveux au vent et yeux fermés. A mon avis, pas trop fait pour Benedictus. Prazak, c'est assez parfait. Curieusement, je n'ai jamais entendu les Talich, alors que je les aime bien en général. J'ai pour ma part trouvé ma version favorite avec Fouchenneret, Berthau, Salque et consorts en live chez B records, une version assez idéalement chambriste (Benedictus a donné un commentaire détaillé de leur op. 115 plus haut). Amples phrasés, aéré et clair, de manière qu'on entend les contrechants comme à peu près nulle part ailleurs. |
| | | Ben. Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2075 Age : 36 Localisation : Paris Date d'inscription : 02/10/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 23:07 | |
| Talich c’est extrêmement engagé, et surtout une sonorité incroyable et vibrante. C’est assez violent comme interprétation, mais on ne peut pas lui retirer son caractère et une forme d’impétuosité dans ces œuvres assez linéaires. Franchement a découvrir. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 15 Nov 2019 - 23:39 | |
| Et pour la verdeur des cordes, le galbe, l'éloquence brûlante, personne n'aime Yehudi Menuhin - R. Masters - C. Aronowitz - E. Wallfisch - M. Gendron - D.Simpson (chez Emi) ? |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 16 Nov 2019 - 0:01 | |
| Sans doute que si, mais pas moi. - À la page précédente, Benedictus a écrit:
- Ravélavélo a écrit:
- bAlexb a écrit:
- À la fois pour les parties et pour leur somme !
Brahms n'est pas d'une écoute facile pour moi. Ah, et puis, cette version là peut ne pas aider... (Je parle de Menuhin, Gendron & Co.) Disons qu’il faut supporter une approche très «romantique»: du rubato à la louche, des portamenti en veux-tu en voilà, le tout noyé dans un épais halo de vibrato (et des phrasés plus «expressifs» que naturels)... Je conçois qu’on puisse aimer, mais, personnellement ça ne m’a jamais beaucoup touché. Pour une version plus droite, moins sentimentale mais ample, détaillée et tendue, tu peux essayer les versions du Leipziger Streichquartett chez MDG (voire L’Archibudelli chez Sony, si tu n’as pas peur d’un son baroquisant et plus fluet). Et puis si tu veux du romantique, essaye (mais dans le seul 1ᵉ) Casals à Prades en 52 (Sony): là, c’est tout aussi intense qu’à Abbey Road, mais le son est plus sombre et plus râpeux, et d’une intensité plus tragique qu’effusive. Pour ma part, outre ceux que citais alors, j'ai bien aimé, comme Eusèbe (et d'ailleurs découvert sur sa recommandation) Fouchenneret & Co. |
| | | Horatio Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4135 Age : 30 Localisation : Très loin de la plage ! Date d'inscription : 04/07/2011
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 16 Nov 2019 - 0:59 | |
| Découverte (ou plutôt -- première écoute attentive) du second sextuor dans la version des Talich. Ils prennent sans cesse à contre-pied la vision lyrique et automnale de Brahms. Leur sonorité est serrée, une pointe d'acidité chez les violons, et le discours est tendu de la première à la dernière note. L'équilibre est remarquable, on entend tout, et jamais un instrument n'est saisi de velléités solistes ; une grande stabilité rythmique, peu de rubato, et des temps relativement lents. Un antidote revitalisant aux versions trop romantiques. A vrai dire, je suis presque surpris de redécouvrir un Brahms qui n'invite à s'enfoncer dans son fauteuil et à soupirer d'aise. Les sonorités astringentes et le parti pris de ne jamais relâcher les phrases noue la gorge de l'auditeur. Le mouvement lent crée ainsi une vague impression de mal-être. Les Talich profitent de leur tempi pour articuler la musique, parfois à l'excès (le début de l'œuvre est un rien précieux). En tous cas, la qualité technique des musiciens laisse rêveur.
Afin de comparer, j'ai réécouté la version des Membres de l'Octuor du Philharmonique de Berlin, que j'affectionne beaucoup. Les tempi sont uniformément plus rapides ; là où les Talich privilégient l'articulation, les Berlinois accordent plus d'importance au flux musical, au mouvement horizontal. La respiration est moins contrainte qu'avec les Tchèques, beaucoup plus fluide. Il s'agit à nouveau d'une belle musique, dont les accents plus douloureux ne sont cependant pas occultés. En ce sens, cette version est plus changeante que celle des Talich, elle joue davantage le jeu d'aller-retours entre tension et libération. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 16 Nov 2019 - 1:08 | |
| - Benedictus a écrit:
Disons qu’il faut supporter une approche très «romantique»: du rubato à la louche, des portamenti en veux-tu en voilà, le tout noyé dans un épais halo de vibrato (et des phrasés plus «expressifs» que naturels)...
Ah oui, très d'accord avec cette qualification. C'est d'ailleurs ce que j'apprécie dans cette version effusive. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 1 Fév 2020 - 1:22 | |
| - Mélomaniac, in playlist, a écrit:
Johannes Brahms (1833-1897) :
Trio avec piano n°1 en si majeur, Op. 8 Trio avec piano n°2 en ut majeur, Op. 87
Josef Suk, violon Janos Starker, violoncelle Julius Katchen, piano
(Decca, juillet 1968)
Un enregistrement référentiel, déjà plus que cinquantenaire ! Généreuse dans les basses, la prise de son accorde une somptueuse présence au violoncelle. Avec un Suk châtié, qui n'est pas du genre à tirer la couverture à lui, le pianiste américain peut ici incarner le maître des équilibres et des horloges. Toujours un jalon incontournable dans la discographie de ces trios, et de la musique de chambre brahmsienne !
- Benedictus a écrit:
Mais oui, immense version!
|
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 0:13 | |
| Après les quatuors de Bartók, je me suis essayé au même exercice d’écoute comparative pour les quatuors de Brahms ; avec les mêmes limites. Je me suis restreint aux versions dont je disposais dans mes armoires, sans souci aucun d’exhaustivité. Par ailleurs, je m’en tiens à une description très générale ou globale de ce que j’entends (une seule audition par version !), sans entrer dans trop de détails. Inutile de souligner l’aspect éminemment subjectif de l’exercice. Et je ne suis pas dupe des biais inévitables d’une telle écoute comparée : enfiler des versions à la suite et les comparer rend parfois sourd aux qualités spécifiques d’une interprétation écoutée pour elle-même. En outre, la répétition elle-même induit des effets pervers, comme une éventuelle lassitude. Bref, je vous livre ces résultats avec toutes leurs imperfections . Quatuor à cordes n° 1 en ut mineur op. 51 n°1JanáčekDans une acoustique un peu trop réverbérée (Prague, 1966), les Janáček offrent une magnifique interprétation de ce premier quatuor, d’un grand classicisme. Ce qui frappe avant tout, c’est le tempo très vif (27’), la régularité de la pulsation et la rigueur rythmique, sans que cela ne donne jamais lieu à aucune raideur. Du premier au dernier mouvement, cela avance sans aucun alanguissement, avec une éloquence déclamatoire axée sur les violons, très modérément vibrés. Les traits sont précis, les sonorités incisives et fines sous les archets légers, tandis que l’articulation comme l’architecture d’ensemble sont fermement établies. Tout au plus pourrait-on souhaiter que la polyphonie soit un peu mieux fouillée. Le premier (sans la reprise de l’exposition) et surtout le dernier mouvements démontrent un dramatisme et un engagement très prenants. Le mouvement lent est très sobre et refuse tout sentimentalisme. L’allegretto, pris très rapidement, refuse quant à lui l’embourbement pâteux trop souvent constaté dans de ce mouvement. Un Brahms austère, autoritaire et décaramélisé. Une très, très grande version. BergDans une belle prise de son (1975 ?), plus charnue et plus proche des instruments que la précédente, les Berg donnent du premier quatuor une version techniquement parfaite, plastiquement très aboutie, mais qui n’a ni l’urgence dramatique ni la fièvre communicative de la précédente. Le tempo est beaucoup plus lent (30’, en dépit de l’absence de la reprise du premier mouvement), le son beaucoup plus dense, massif et brillant (prédominance du premier violon). L’expression est très extravertie et l’approche plutôt objective et clairement structurée. En définitive, Brahms apparaît ici comme un épigone un peu mineur de Beethoven, ce qui me semble pour le moins réducteur. Une interprétation, en tant que telle irréprochable, mais qui peine pourtant à me passionner. EmersonLes Emerson donnent du premier quatuor une version classique, assez austère, avant tout axée sur l’équilibre formel — on notera qu’ils font, eux, la reprise de l’exposition du premier mouvement. Elle est hélas desservie par une prise de son lointaine (New York, 2007) avec une réverbération très excessive ; et c’est malheureux parce que cette approche me convainc dans l’absolu mieux que celle des Berg. Les sonorités sont ici mates et les quatre voix sont parfaitement équilibrées, sans la prédominance des violons observée dans les deux versions précédentes. Les tempi sont légèrement plus rapides que chez les Berg et aussi plus souples (accélération de la coda du premier mouvement). L’approche est à la fois plus sobre et mieux engagée que celle du quatuor autrichien, mais elle est vraiment défavorisée par la prise de son. C’est dommage. BudapestCaptés en 1963, au plus près des cordes, dans les studio de la Columbia et dans une acoustique absolument sèche au point de paraître artificielle (absolument aucune réverbération), les Budapest donnent du premier quatuor une version romantique, axée sur l’expression et oscillant entre dramatisme et mélancolie. Les tempi sont très lents (31’ au total sans la reprise de l’exposition dans le premier mouvement) et l’agogique très souple et mobile. Deux gros problèmes m’ont néanmoins rendu cette version insupportable : la justesse et le style. Les problèmes d’intonation sont légion, tandis que le rubato et le portamento sont incessants. Les sonorités quant à elles, quasiment sans vibrato, sont couinantes. Le mouvement le plus épouvantable est le troisième, qui se traine littéralement (plus de 9’ !!!) et qui s’englue dans une mélancolie geignarde et dépressive, au moins capable de rendre un poisson rouge neurasthénique. Mais les deux mouvements extrêmes manquent quant à eux d’énergie, tandis que le mouvement lent s’effondre sous les problèmes de justesse et un rubato envahissant. Selon moi, la version idéale si on veut être dégoûté à tout jamais de ce quatuor. TokyoDans une prise de son très réverbérée (New-York, 1984), les Tokyo donne une interprétation à la fois lyrique, très ample et symphonique de ce quatuor. Leur puissance sonore est tout à fait impressionnante et remédie de ce fait sans problème à la distance sensible des micros. Les tempi sont plutôt lents (plus de 30 minutes sans la reprise de l’exposition dans le premier mouvement), mais très mobiles. L’équilibre des voix est excellent et la polyphonie très fouillée, tandis que l’approche est à la fois très axée sur le chant et en même temps bien architecturée. La réalisation plastique enfin est de toute beauté, les sonorités des japonais, souvent un peu trop vibrées, étant magnifiques. Mon seul regret, tout personnel, concerne l’excès de graisse et de caramel. On peut en effet légitimement trouver que, çà et là, la pâte est trop épaisse et protéinée. Les deux mouvements extrêmes ne manquent pas d’énergie mais les deux mouvements centraux ont parfois tendance à s’alanguir, en particulier le troisième. Pour donner une analogie symphonique, on est plus du côté du Brahms de Karajan, dernière manière, que de celui de Szell. C’est en soi très réussi, et non sans beautés, mais cela ne satisfera pas ceux qui cherchent un Brahms à la diète. Takács ICaptés à distance dans une acoustique trop réverbérée (1990 ?), les Takács, première mouture, défendent eux aussi une conception très ample et symphonique de ce premier quatuor. Leur approche est objective, axée sur une expressivité immédiate et très extravertie, une éloquence très déclamatoire, une véhémence même, qui s’affirme parfois au détriment de la rigueur. Les tempi sont un peu plus rapides que ceux des Tokyo (avec cette fois la reprise de l’exposition du premier mouvement) mais avec une pulsation plus martelée et régulière. Les sonorités modérément vibrées sont brillantes et constamment puissantes et les quatre voix plutôt bien équilibrées. Cela dit, on pourrait rêver d’une lecture plus subtile et fouillée. Nos quatre musiciens sont perpétuellement dans la déclamation à plein poumon et on serait en droit d’attendre une proposition un peu plus nuancées. Les deux mouvements centraux ont le mérite de ne pas trop s’alanguir, mais c’est au prix d’une certaine banalité, tandis que le final, hurlé fortissimo d’un bout à l’autre, en devient un peu pénible. Dans l’absolu, c’est loin d’être déshonorant mais je reste évidemment sur ma faim. Takács IIDix-huit années plus tard, en 2008, les Takács, dans leur nouvelle formation (le premier violon et l’alto ont changé de titulaire), modifient radicalement leur conception et donnent de ce premier quatuor une interprétation classique, sobre et authentiquement chambriste. La prise de son Hyperion est magnifique et très naturelle. Les sonorités sont toujours aussi belles, mais beaucoup plus légères. Les tempi restent très modérés (31’, toujours avec la reprise de l’exposition) mais sont plus souples qu’en 1990. L’approche est axée sur l’équilibre des voix, l’exploration de la polyphonie et la clarté formelle. Elle gagne évidemment en maturité, en rigueur, en subtilité, mais elle perd beaucoup de son éloquence et de son dramatisme d’antan. Les deux mouvements qui profitent le mieux de cette approche sont les deux mouvements centraux, en particulier le second dont le lyrisme est valorisé avec beaucoup de pudeur et de sobriété. Les deux mouvements extrêmes par contre ne laissent pas de paraître trop sages : une certaine fièvre et véhémence me semblent nécessaires à leur discours et elles sont trop peu présentes ici. Une belle version mais trop dédramatisée. New ZealandDans une belle prise de son naturelle (2014), avec de la réverbération mais sans excès, les néozélandais défendent une interprétation lyrique du premier quatuor, avant tout axée sur la chant. Cela chante dans tous les coins, du début jusqu’à la fin, dans des tempi parmi les plus lents de la confrontation (32’ au total avec la reprise de l’exposition), mais aussi une grande mobilité agogique. Leurs sonorités sont beaucoup plus mates et granuleuses que celles des Takács, mais très séduisantes. Les deux mouvements extrêmes manquent à mon sens de dynamisme et d’énergie, surtout le premier. Le second mouvement lui s’accommode assez naturellement de cette approche. L’allegretto par contre s’alanguit dangereusement et on se surprend çà et là à s’ennuyer un peu. Une interprétation cohérente dans ses options, qui n’est pas sans beauté, mais qui est trop univoque pour me convaincre totalement. ArtemisJ’ai été très heureusement surpris par l’interprétation plutôt inattendue des Artemis. Familier de leur intégrale Beethoven, je m’attendais à des sonorités grasses, denses, pleines, puissantes, pour une interprétation « germanique » , véhémente et hypervirtuose. Or, rien de tout cela. Captés à Berlin en 2014, dans une belle prise de son très naturelle, ils donnent une version classique, par son attention aux équilibres formels, mais empreinte de fragilité et marquée par un art étonnant de la litote. Les sonorités des musiciens sont inhabituellement légères, réservées, râpeuses même, tout en demeurant magnifiques. Les tempi quant à eux sont très modérés (32’ au total avec la reprise de l’exposition) mais ne donnent jamais l’impression de la lenteur, tant ils sont souples, les Artemis alternant constamment moments de tension fiévreuse et suspensions étrangement contemplatives. Il en résulte une architecture très mobile, fouillée, mais parfaitement claire, où les quatre voix sont très bien équilibrées, sans prédominance aucune des violons. Le style allusif des musiciens, surprenant dans le premier mouvement, nous vaut deux mouvements centraux magnifiques, avec un allegretto qui, pour une fois, ne s’embourbe pas. Le final, plus véhément, marie le dramatisme avec cette constante retenue dans la puissance et cette légèreté dans la sonorité qui caractérisent cette magnifique interprétation, très habitée. Elle contredit pour une part mes attentes habituelles dans ce quatuor, mais je suis pourtant conquis. ÉbèneDans une belle prise de son de 2008, les Ébène donnent de ce premier quatuor une version qui n’est pas sans similitudes avec celle des Artemis. Les tempi sont très, très lents (plus de 34’ avec la reprise de l’exposition), mais ici aussi très mobiles. Et comme les musiciens allemands, ils alternent les moments dynamiques et dramatiques et les suspensions contemplatives ; à cela près cependant que celles-ci se démultiplient dangereusement et surtout qu’elles s’éternisent jusqu’au maniérisme. Les Ébène multiplient les effets de loupe où ils donnent le sentiment de s’écouter jouer. À ce jeu là, c’est tant le dramatisme du premier mouvement qui se perd que sa structure qui s’effiloche. Et, si le second mouvement ménage quelques beaux moments, l’allegretto (plus de 10’ !!!) s’enlise complètement dans un marécage de rubatos, de ralentendos et de minauderies en tout genre qui le rendent insupportable. Un naufrage! Le dernier mouvement renoue heureusement avec un certain dynamisme mais souffre de curieuses baisses de tension qui le rendent finalement aussi peu convaincant. Une interprétation « chichiteuse », techniquement très aboutie — les sonorités mates, rêches et peu vibrées sont superbes et la virtuosité sans failles — mais, en tout cas pour moi, stylistiquement imbuvable. C’est bien essayé, mais c’est raté ! ArisUne bien belle surprise que cette récente version du jeune quatuor Aris, inconnu à mes oreilles. Dans une belle prise de son naturelle (Cologne, 2020), avec de superbes sonorités mates, très peu vibrées, râpeuses et au grain assez épais, ils donnent une solide version classique de l’œuvre de Brahms, axée avant tout sur l’architecture et l’exploration de la polyphonie. Les quatre voix sont bien équilibrées et les tempi modérés ne donnent jamais l’impression de la lenteur tant le mouvement est régulièrement pulsé et relancé. L’expression est sobre et pudique et tout alanguissement est évité. Le premier mouvement, avec la reprise de l’exposition, est solidement assis et construit sur une pulsation assez régulière. Le second mouvement déploie un lyrisme sobre tandis que l’allegretto se montre, une fois n’est pas coutume, assez allant, surtout le trio pris d’une manière inhabituellement et heureusement rapide. Le final démontre une belle vigueur et même une certaine fièvre. Une version à la robustesse assez germanique, qui ne cherche pas l’épate, mais dont la sobriété expressive et la solidité structurelle en imposent. J’aime assez. Belcea IIDans une magnifique prise de son (2014-15), très physique, les Belcea donnent une interprétation classique, plutôt monumentale, de ce premier quatuor, axée avant tout sur les équilibres formels qui sont ici remarquablement mis en valeur. Leurs sonorités sont très séduisantes, pleines, denses, brillantes, mais sans trop de vibrato, tandis que leurs tempi sont les plus lents de la confrontation avec ceux des Ébène (plus de 34’ au total, avec les reprises). Ils prennent en effet le temps de mettre en place une solide architecture, très maîtrisée et très claire, mais sans raideur. Ils démontrent en effet un sens réel du mouvement et surtout les lignes de la polyphonie sont intensément habitées. La structure du premier mouvement, et en particulier du développement, ressort avec une évidence frappante. Le second mouvement, très réussi, affiche un lyrisme sobre bien en situation. Le troisième mouvement est quand même un peu lent à mon goût, même s’il évite de justesse l’enlisement. Le final, avec le dramatisme et l’éloquence déclamatoire qui lui siéent, renoue avec la solidité architecturale du premier. Au total, une interprétation à la solidité plus germanique que nature, qui en impose par sa maîtrise et sa perfection technique. Tout en reconnaissant l’excellence de ce que j’ai entendu, je ne partage néanmoins pas tout à fait — de manière tout à fait subjective d'ailleurs — l’enthousiasme de Benedictus et d’ Eusèbe ci-dessus. L’investissement réel des musiciens me semble ici un peu trop calculé pour me convaincre tout à fait. Je regrette notamment certaines coquetteries, çà et là. Pour exemple, pourquoi, dans le premier mouvement, Corina Belcea modifie-t-elle le rythme (triolets de noires) aux mesures 12 et 14 (et ensuite lors de chaque reprise du thème) ? Elle est la seule à faire ça et je n’y vois aucune justification. Et je pourrais donner plusieurs autres exemples. Une interprétation solide, objectivement irréprochable, mais qui ne remet pas en cause ma préférence pour les Janáček. Je dois constater au terme de cette écoute qu’il y a en définitive peu de versions qui me convainquent totalement. Les Janáček qui m’ont fait aimer l’œuvre demeurent mon premier choix. Ils sont les seuls à dégraisser efficacement cette partition qui, chez d’autres, flirte dangereusement avec un classicisme un peu ampoulé. Je mentionnerai quand même la version des Artemis qui m’a agréablement surpris et celle du jeune quatuor Aris. Mais il ne s’agit là bien sûr que de choix subjectifs et je ne doute pas que plusieurs trouveront, très légitimement, davantage de plaisir dans d’autres approches. Je passe au second quatuor.
Dernière édition par Anaxagore le Sam 15 Jan 2022 - 15:53, édité 1 fois |
| | | gluckhand Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4967 Localisation : Amiens Date d'inscription : 15/07/2013
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 8:29 | |
| Bravo Anaxagore pour ta patience et ton classement. Pour Janacek, je suis d'accord avec toi.En regardant en vitesse, tu n'as pas sélectionné il me semble ,le Quartetto Italiano,dont je crois ,il ne reste aucun des membres vivants .Moi j'aime bien leur vision latine de l'oeuvre. |
| | | Rubato Mélomane chevronné
Nombre de messages : 14470 Date d'inscription : 21/01/2007
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 8:45 | |
| Merci Anaxagore pour ce super "boulot"! Pour info, j'ai la version du Quatuor New Budapest (intégrale). |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 15:32 | |
| Merci à vous. Je n'ai jamais écouté le New Budapest Quartet. Mais j'imagine sans peine que les membres actuels ont une justesse irréprochable... Je leur tendrai l'oreille à l'occasion, de même qu'à la version des Italiano . Les versions sont vraiment très nombreuses. Impossible de tout écouter d'un coup. |
| | | Eusèbe Mélomaniaque
Nombre de messages : 1599 Age : 47 Localisation : Paris/ Lille Date d'inscription : 23/09/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 15:39 | |
| Merci Anaxagore pour ce compte-rendu détail d'un corpus qui ne s'apprivoise pas facilement, et qui ne donne pas lieu à beaucoup de réussites éclatantes. J'irai à l'occasion jeter une oreille sur les Artemis (que j'apprécie beaucoup en général) et sur l'inattendu New Zealand quarter. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 16:37 | |
| Le New Zealand SQ est une valeur sûre, je ne lui connais pas d'enregistrements médiocres. En revanche ce n'est pas le plus typé, ça reste relativement peu coloré, pas sûr que ça fasse fendre l'armure à Brahms.
Pour ma part, je trouve remarquable les Vertavo comme d'habitude (ils n'ont fait que les 1 & 2), très passionnés, avec de belles transparences colorées. Je suis curieux aussi d'entendre les Arcanto (Weithaas, Sepec, T. Zimmermann, Queyras !).
Mais la version qui fait vraiment la différence, c'est le Quatuor Bartók chez Hungaroton, âpre, vraiment un son de terroir, une petite merveille sombre et bondissante. La seule qui m'ait vraiment fait entendre une inspiration plus folklorique et mieux fait comprendre le sens des thèmes et la direction des équilibres dans les quatuors de Brahms. |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 18:32 | |
| J'écouterai la version du Quatuor Bartók. Vu ce que tu en dis, cela devrait me plaire . |
| | | Mandryka Mélomaniaque
Nombre de messages : 928 Date d'inscription : 03/04/2010
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Lun 3 Jan 2022 - 18:41 | |
| Je ne suis pas très Brahms, mais je viens de trouver un nouveau disque de ses quatuors que je pense est magnifique -- Dudok Quartet Amsterdam. Je n'ai jamais entendu un meilleur op 55/1 |
| | | Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mer 12 Jan 2022 - 21:50 | |
| - Anaxagore a écrit:
- Quatuor à cordes n° 1 en ut mineur op. 51 n°1
Janáček
Dans une acoustique un peu trop réverbérée (Prague, 1966), les Janáček offrent une magnifique interprétation de ce premier quatuor, d’un grand classicisme. Ce qui frappe avant tout, c’est le tempo très vif (27’), la régularité de la pulsation et la rigueur rythmique, sans que cela ne donne jamais lieu à aucune raideur. Du premier au dernier mouvement, cela avance sans aucun alanguissement, avec une éloquence déclamatoire axée sur les violons, très modérément vibrés. Les traits sont précis, les sonorités incisives et fines sous les archets légers, tandis que l’articulation comme l’architecture d’ensemble sont fermement établies. Tout au plus pourrait-on souhaiter que la polyphonie soit un peu mieux fouillée. Le premier (sans la reprise de l’exposition) et surtout le dernier mouvements démontrent un dramatisme et un engagement très prenants. Le mouvement lent est très sobre et refuse tout sentimentalisme. L’allegretto, pris très rapidement, refuse quant à lui l’embourbement pâteux trop souvent constaté dans de ce mouvement. Un Brahms austère, autoritaire et décaramélisé. Une très, très grande version. […] Les Janáček qui m’ont fait aimer l’œuvre demeurent mon premier choix. Ils sont les seuls à dégraisser efficacement cette partition[…]
Je passe au second quatuor. Je viens déjà de commander cette version du Quatuor Janáček. (J'imagine qu'ils seront aussi bien placés dans ton comparatif du 2ᵉ?) |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mer 12 Jan 2022 - 21:58 | |
| - Benedictus a écrit:
Je viens déjà de commander cette version du Quatuor Janáček. (J'imagine qu'ils seront aussi bien placés dans ton comparatif du 2ᵉ?) J'arrive bientôt avec le comparatif pour le second quatuor. Mais oui, les Janáček sont, à mon humble avis, également magistraux dans le n° 2. J'espère que tu ne seras pas déçu. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Mer 12 Jan 2022 - 22:44 | |
| J'ai vu en 'Playlist' que tu avais aussi écouté les versions Bartók et Leipziger ! Curieux de lire ton opinion. |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Jeu 13 Jan 2022 - 14:07 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- J'ai vu en 'Playlist' que tu avais aussi écouté les versions Bartók et Leipziger ! Curieux de lire ton opinion.
J'ai beaucoup aimé, surtout les Bartók. Mais j'en dis plus bientôt . |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1740 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Jeu 13 Jan 2022 - 22:50 | |
| Du coup moi aussi je décide à choisir une version des quatuors de Brahms. En écoutant un extrait de pleines de versions je décide que je commander ce disque du quatuor Borodine, tant pis s'il manque le No. 2, je verrai ça ultérieurement. |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 14 Jan 2022 - 1:28 | |
| - Bruno Luong a écrit:
- Du coup moi aussi je décide à choisir une version des quatuors de Brahms. En écoutant un extrait de pleines de versions je décide que je commander ce disque du quatuor Borodine, tant pis s'il manque le No. 2, je verrai ça ultérieurement.
Oh, encore une version que je ne connais pas du tout ! Il y en a tellement ... |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1740 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Ven 14 Jan 2022 - 8:35 | |
| - Anaxagore a écrit:
- Bruno Luong a écrit:
- quatuor Borodine ...
Oh, encore une version que je ne connais pas du tout ! Il y en a tellement ... Si tu auras l'occasion d'écouter j'aimerais savoir ton avis. J'ai écouté le 3e en entier, et je ne sais pas si je suis biasé par les interprètes, ca sonne Russe et ca me plait ! |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 15 Jan 2022 - 9:00 | |
| - Bruno Luong a écrit:
- Anaxagore a écrit:
- Bruno Luong a écrit:
- quatuor Borodine ...
Oh, encore une version que je ne connais pas du tout ! Il y en a tellement ... Si tu auras l'occasion d'écouter j'aimerais savoir ton avis. J'ai écouté le 3e en entier, et je ne sais pas si je suis biasé par les interprètes, ca sonne Russe et ca me plait ! J'ajouterai les Borodine à ma liste pour le troisième quatuor . |
| | | Bruno Luong Mélomaniaque
Nombre de messages : 1740 Date d'inscription : 07/08/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 15 Jan 2022 - 9:11 | |
| |
| | | Anaxagore Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3094 Age : 59 Date d'inscription : 06/01/2012
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 15 Jan 2022 - 9:18 | |
| Quatuor à cordes n° 2 en la mineur op. 51 n° 2JanáčekÀ l’instar du premier, la réussite des Janáček dans le second quatuor est totale. Très bien captés (Prague, 1966) , avec de la réverbération mais aussi une réelle présence physique, ils donnent de l’œuvre de Brahms une lecture lyrique, merveilleusement chantante, en même temps que parfaitement construite. Clarté structurelle, beauté, transparence et finesse des sonorités — qu’on peut éventuellement trouver parfois trop vibrées — précision des attaques, incisivité, légèreté des archets, sens du mouvement, intensité et sobriété de l’expression, tout concourt à l’excellence de cette interprétation. Les tempi sont beaucoup plus retenus que dans le premier quatuor (31’ sans reprise), mais les musiciens tchèques ne donnent jamais l’impression de la lenteur tant leur chant est habité. Le premier mouvement, dégraissé, est remarquablement équilibré et sa structure ressort parfaitement. L’andante chante avec un naturel confondant, tandis que le trio du menuet est idéalement bondissant. Le final enfin est déclamé avec une éloquence ici parfaitement en situation. J’adore. BergLes Berg (1975 ?) donnent du second quatuor une interprétation à l’opposé de celle, lyrique, des Janáček. Dans des tempi beaucoup plus rapides (28’ au total, sans reprise), mais aussi beaucoup plus souples, ils axent leur lecture sur un dramatisme extraverti, parfois un peu superficiellement théâtral. Les sonorités sont évidemment beaucoup plus denses, pleines et rondes, avec une prédominance excessive du premier violon (problème récurrent avec les Berg). Le premier mouvement acquiert ici un caractère épique et conflictuel assez beethovenien ; le second quant à lui affiche une expressivité un rien démonstrative, tandis que le menuet perd un peu de l’ambiguïté qu’il avait sous les archets des musiciens tchèques. C’est l’éloquence déclamatoire du final qui est en définitive la mieux adaptée à la vision des musiciens autrichiens et que ceux-ci réussissent le mieux. Une version techniquement irréprochable, mais on aura compris que je préfère nettement l’abandon lyrique, la subtilité et le naturel des Janáček, à la théâtralité démonstrative univoque et un peu « fabriquée » des Berg. EmersonUne interprétation vraiment très particulière que celle des Emerson, dans une optique similaire à celle du premier quatuor mais qui est en réalité mieux adaptée au second. Sa sophistication propre l’oppose tant au naturel et à l’évidence des musiciens tchèques qu’à l’univocité extravertie et théâtrale des Berg. Tout d’abord les musiciens américains déploient ici des sonorités très particulières, à la fois très mates — comme de l’or patiné —, légères, et très vibrées, mais malheureusement mal captées avec beaucoup trop de réverbération (New York, 2005). Les quatre voix sont par ailleurs parfaitement équilibrées et indépendantes, sans prédominance aucune des violons (on entend sans cesse l’alto) et elles pratiquent un constant mezza voce, ne chantant à plein poumon que dans le dernier mouvement, comme son éloquence constitutive l’exige. Les tempi sont légèrement plus allant que ceux des Janáček et plus lents que ceux des Berg (32’ au total mais avec la reprise de l’exposition du premier mouvement), tandis que l’agogique est remarquablement souple. L’interprétation pour sa part, très lyrique, est toute entière axée sur la conduites des voix de la polyphonie dont la grande complexité est ici parfaitement illustrée. L’architecture, assez mouvante, — et que l’on visite comme de l’intérieur — résulte tout entière du déploiement très sinueux des quatre voix. On découvre de la sorte toute la complexité et la richesse d’écriture des deux mouvements extrêmes, tandis que le second déploie un lyrisme sophistiqué et que le menuet est ambigu et insinuant à souhait. Une interprétation qui ne fera pas l’unanimité tant je la pressens clivante, mais que je trouve pour ma part passionnante. Une condition néanmoins : franchir le mur du son qui n’est vraiment pas terrible (merci à la DGG). BudapestIl faut l’écouter pour le croire ! La situation est pire encore que celle du premier quatuor. Les Budapest défendent — si l’on peut dire, en se retenant de rire — une conception lyrique et apaisée de l’œuvre, pour ne pas dire geignarde et mollassonne. En réalité, ils jouent tout simplement faux du début jusqu’à la fin. On se demande s’ils ont pris la peine de s’accorder. C’est tout simplement insupportable. J’ai encore lu çà et là des critiques toutes récentes qui portent ces interprétations aux nues. Alors, je veux bien admettre que je suis sourd, que je suis un barbare qui ne comprend rien à rien, mais — même en admettant qu’on était sans doute plus tolérant à l’époque sur quelques petits problèmes d’intonation — là, je ne comprends plus. C’est pour moi une énigme. TokyoDans une excellente prise de son, cette fois très proche et très présente (New York, 1984), les Tokyo donnent une interprétation dramatique du second quatuor qui n’est pas sans rappeler celle des Berg, mais avec moins de théâtralité et dans des tempi plus modérés. Les sonorités sont très puissantes, très denses voire lourdes et épaisses, ce qui est accentué par la prise de son. Ils jouent malheureusement tout très fort, en n’exploitant que fort peu l’amplitude de l’échelle dynamique, ce qui donne à l’ensemble un caractère unilatéralement affirmatif fort peu nuancé. Les mouvements extrêmes sont ceux qui s’accommodent le mieux d’une telle approche, surtout le dernier dont l’éloquence naturelle est bien mise en valeur. Les deux mouvements centraux souffrent par contre de ce ton déclamatoire, le second manquant de poésie, le menuet perdant toute son ambiguïté. Une version très virtuose, plastiquement très aboutie, mais beaucoup trop univoque. Takács IDans une acoustique beaucoup trop réverbérée, les Takács (première mouture, 1990 ?) défendent ici, à l’instar de ce qu’ils font dans le premier quatuor, une conception ample et symphonique de l’œuvre. Cependant, ce qui pouvait à la rigueur convenir pour le premier quatuor ne convient pas nécessairement pour le second. Si l’engagement et la véhémence avec lesquels les musiciens dramatisent le discours sauvent leur interprétation de l’ennui, ils ne leur permet pas d’honorer l’équivocité de l’œuvre, en particulier dans les mouvements centraux, et ils occasionnent en outre un certain manque de rigueur. Les tempi sont modérés, souples et situés dans la moyenne ; les sonorités quant à elles sont brillantes, mais les attaques, émoussées par la réverbération, sont molles, tandis que les phrasés sont « collants » par excès de legato. Une version engagée, juvénile, mais mal captée et décevante par manque de recul et de rigueur. Takács IIDans des tempi très semblables à ceux de leur premier version, les Takács, dans leur seconde mouture bien mieux captée (2007), tournent pourtant résolument le dos à l’ample conception dramatique et symphonique qui était jadis la leur. Leur approche est cette fois lyrique, pudique, allusive, presque fragile. Leurs sonorités sont beaucoup plus légères et incisives, l’équilibre des voix est mieux assuré, la polyphonie mieux fouillée, tandis que les phrasés sont cette fois fortement articulés. À ce jeu là, le premier mouvement semble manquer un peu de poids, mais les deux suivants en profitent à plein, surtout le menuet idéalement ambigu, alors que le final est déclamé avec l’éloquence idoine. Tout serait parfait si le style un peu précieux et maniéré du premier violon ne venait me gâcher le plaisir. Mais cette nouvelle version est à mon sens beaucoup plus aboutie, fine et rigoureuse que la première. New ZealandLes néozélandais restent fidèle à l’optique chantante qu’ils défendaient déjà dans le premier quatuor, mais qui convient mieux au second. Dans des tempi très lents (35’ avec la reprise de l’exposition dans le premier mouvement), mais aussi très souples et mobiles, ils donnent une version lyrique et étrangement contemplative de l’œuvre de Brahms. Leurs sonorités, empreintes de fragilité, sont légères, séduisantes et peu vibrées. Ils haussent très rarement la voix et s’en tiennent à un mezza-voce quasi permanent. Leur expression est sobre, pudique, insinuante et allusive. Dans le premier mouvement, ils prennent la peine de mettre en valeur le moindre contrechant, mais c’est au détriment de l’architecture qui pourrait être plus fermement établie. Le second mouvement déploie son lyrisme naturel tandis que le menuet distille une ambiance un peu mystérieuse. Le final retrouve heureusement un tempo plus allant et une expression plus éloquente, même si, là aussi, on a droit à quelques pauses plus contemplatives. Une interprétation séduisante mais dont je regrette malgré tout le manque de fermeté structurelle et la lenteur parfois excessive. ArtemisAlors là, c’est le coup de foudre ! Les Artemis réussissent une version proprement miraculeuse de ce second quatuor, curieusement complémentaire de celle du premier, alors qu’elle a été captée à Berlin en 2000 bien avant les deux autres quatuors enregistrés en 2014, et avec une autre formation (ici le premier violon est encore tenu par Natalia Prischepenko). Leur approche n’est pas sans ressemblances avec celle des New Zealand, mais avec beaucoup plus de simplicité et de naturel — c’est-à-dire sans le maniérisme un peu fabriqué que je regrettais dans celle-ci — et beaucoup mieux construite. Dans des tempi lents (34’ avec les reprises) mais qui ne donnent jamais l’impression de la lenteur, ils offrent une lecture lyrique, empreinte d’une grande pudeur et nimbée dans les trois premiers mouvements d’une douce mélancolie très prenante. L’agogique est très souple, le mouvement alternant avec des pauses contemplatives. Ainsi, en dépit de la durée totale de leur interprétation, ils donnent au menuet le trio le plus rapide de toute la confrontation. Leur sonorités sont mates, granuleuses, très modérément vibrées : en un mot, tout simplement magnifiques ! Ils ne haussent par ailleurs que très rarement la voix : dans le développement du premier mouvement, opportunément dramatisé, et dans le final qui affiche l’éloquence déclamatoire qui lui convient. Du début jusqu’à la fin, j’ai été happé par l’évidence d’une compréhension intérieure de ce quatuor mystérieux. J’encourage tout particulièrement Eusèbe à y jeter une oreille. JerusalemCaptés dans une belle prise de son naturelle à Berlin en 2012, les Jerusalem donnent une version objective de ce second quatuor, à la perfection toute classique et d’une grande beauté plastique. Dans des tempi sensiblement plus alertes (32’ au total avec les reprises), ils usent de toute l’échelle dynamique et d’une articulation très aérée pour construire une architecture remarquablement claire et solide, alternant lyrisme très retenu et dramatisme mesuré (développement du premier mouvement). C’est en effet la mesure et l’équilibre qui caractérisent sans doute le mieux cette interprétation qui évite tous les excès, au risque de paraître parfois un peu lisse (second mouvement un peu banal). La finition est quant à elle supérieurement aboutie (sonorités très fines, sous des archets légers, avec du vibrato mais sans excès). Le menuet, idéalement mystérieux, et le final bondissant et très articulé sont particulièrement réussis. Une très belle version à laquelle je reviendrai. LeipzigerIci, la poésie, le lyrisme, le mystère, l’ambiguïté ou l’allusion laissent la place à un classicisme sévère. Captés en 1996 dans une belle prise de son très naturelle, les Leipziger optent pour la rigueur et l’austérité. Ils refusent le beau son et toute séduction facile. Leurs sonorités sont très mates, rêches, très modérément vibrées, tandis que les quatre voix sont parfaitement équilibrées. Les tempi oscillent de modéré à lent (33’ au total avec les reprises) et la battue est relativement régulière. Le premier mouvement, bien construit, progresse avec une grande continuité et déploie un discours assez dramatisé. Le second, plus rapide que la moyenne, se refuse à tout épanchement, tandis que le menuet, opportunément dansant, adopte des tempi assez contrastés. Le final, nettement plus lent que la moyenne et très articulé, est particulièrement sévère. Délaissant l’éloquence fiévreuse, les Lepiziger s’y livrent plutôt à la construction rigoureuse du contrepoint. Une très belle version, un peu intimidante, parfaitement maîtrisée, mais qui délaisse peut-être trop l’art de la suggestion pour la seule science de l’écriture. BartókÀ l’invitation de David, j’ai écouté l’interprétation du Quatuor Bartók et c’est en effet une très belle version. Captés en 1991 avec une légère réverbération, les musiciens hongrois offrent une interprétation très détendue, presque agreste et printanière, de ce second quatuor, la plus naturellement chantante de toutes. Dans des tempi plutôt plus rapides que la moyenne, surtout pour les deux mouvements centraux (et sans la reprise de l’exposition dans le premier mouvement), ils déploient des sonorités très particulières : mates, terreuses, modérément vibrées et un rien charmeuses. Le premier mouvement, inhabituellement détendu, progresse de manière assez allante et laisse chanter toutes les voix sans arrière-pensée sophistiquée. Le second, plutôt rapide, s’accorde idéalement avec cette approche presque bucolique, tandis que le menuet, l’un des plus rapides de la confrontation est léger, bondissant, joyeusement dansant. Le final, un peu plus retenu et laissant tomber l’éloquence déclamatoire habituelle, opte lui aussi pour le lyrisme et la détente. Une très belle version atypiquement radieuse. @ David : je te rejoins tout à fait sur le « son âpre du terroir » et sur le côté « folklorique » (c’est ce que j’exprime sans doute à ma manière en parlant d’une interprétation chantante et détendue). Je comprends moins ce que tu veux dire en parlant d’un coté « sombre ». Pour ma part, j’ai trouvé ça au contraire très lumineux (du moins l’interprétation dans son ensemble, pas la sonorité). À moins que tu ne parles spécifiquement du premier quatuor, que je n’ai pas écouté par les Bartók et qui est effectivement en soi beaucoup plus sombre ? Belcea IIInterprétation vraiment très singulière que celle des Belcea (2014-2015), en tout point comparable avec celle du premier quatuor. Les sonorités, magnifiquement captées, sont vraiment splendides, modérément vibrées, pleines, appuyées, intenses et denses, brillantes sans être clinquantes. Les tempi quant à eux sont vraiment très lents : les plus lents de la confrontation (36’ au total avec les reprises !!!), mais souples (accélérations et pauses contemplatives quasi-immobiles). À ce rythme-là, les musiciens ont tout le temps d’édifier une vaste architecture très ample où tous les recoins de la partition sont explorés. Le premier mouvement, monumental, est joué très doucement, dans un mezza-voce quasi permanent, mais avec des montées soudaines dans la dynamique lorsque la dramatisation du discours l’exige. Le second mouvement, chantant, épanouit posément son lyrisme dans un tempo qui reste dans la moyenne. Le Quasi minuetto, joué fort lentement, mais avec un trio rapide qui contraste bien, renoue avec le mystère et la suggestion déjà illustrés dans d’autres versions. Le final enfin, déclamé avec éloquence, mais exécuté lui aussi sur un tempo très modéré, est assez appuyé. Il répond par sa monumentalité à celle du premier mouvement et conclut cette belle interprétation. Même si je trouve tout cela un peu emphatique, au risque parfois de la lourdeur, je suis mieux convaincu par l’approche des Belcea dans ce second quatuor que dans le premier. L’œuvre me semble mieux se prêter à un tel traitement. Ce second quatuor est en définitive mieux servi que le premier, cela tenant peut-être à l’ambiguïté constitutive de l’œuvre, autorisant de ce fait un plus grand nombre d’approches différentes. Pour ma part, je retiendrai tout particulièrement les Janáček, les Bartók et les Artemis. Mais je reviendrai certainement aussi aux Jerusalem, aux Leipziger et aux Emerson. Cela dit, il y a suffisamment de belles versions pour que la subjectivité de chacun y trouve son compte. Je passe au troisième acte avec l’op. 67.
Dernière édition par Anaxagore le Sam 15 Jan 2022 - 15:54, édité 1 fois |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 15 Jan 2022 - 14:45 | |
| Quelques réactions alors ! D'abord, parmi ceux que tu n'as pas écoutés, me reviennent les Vertavo (Simax, dans les 1 & 2 seulement) : spectre très clair, grande sensibilité dramatique – Schumann et surtout Nielsen leur conviennent mieux, mais ça reste de très grande qualité. Tu devrais cependant trouver la prise beaucoup trop réverbérée. Et puis l'intégrale des Mandelring, un Brahms aux contours très nets, de la très belle ouvrage qui n'est pas forcément ce que j'aime le plus ici (quand ça danse comme avec les Bartók, ou les Voce en concert, toujours plus animés qu'au disque… ça compense le formalisme un peu lourd de ces pages – je trouve). Mais cette intégrale couple pour chaque volet un contemporain de Brahms, notamment Herzogenberg et Gernsheim, donc pas de petits tâcherons pour faire joli ! Gernsheim est meilleur dans les formes avec piano, mais Herzogenberg est vraiment très bien. (Je ne sais plus quel était l'autre, qui m'avait moins enthousiasmé je crois.) Il faut bien sûr, quand on aime la musique de chambre de Brahms, écouter les quatuors et quintettes de Herzogenberg (qui était son pote, en plus, de mémoire ?). |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97845 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS Sam 15 Jan 2022 - 14:58 | |
| Et sur les interprétations que tu mentionnes : → Je n'avais pas remarqué la prédominance de Pichler que tu mentionnes chez les Berg. Le problème pour moi tient plutôt dans les couleurs assez grises (prises EMI aidant) et le manque de personnalité forte dans les propositions, en général plus léchées qu'éloquentes. (Quand je me rappelle comment Pichler expliquait leur succès : « par rapport à la plupart des autres quatuors, on travaille vraiment plus, sans comparaison ». Ils croyaient vraiment être les meilleurs, je crois.) Les Budapest, a priori pas ma came, ils ne m'ont jamais impressionné dans Beethoven – et d'une manière générale, le niveau a tellement monté en musique de chambre que les versions anciennes me séduisent rarement. Ton commentaire m'a rendu curieux, et je suis allé entendre ce matin. Hé bien, j'ai beaucoup aimé ! J'ai trouvé à nouveau l'aspect roots (certes en moins maîtrisé) que j'avais aimé chez les Bartók, quelque chose d'un peu plus guindé-viennois en sus. Bien sûr, ça a vieilli, c'est figé par moment, mais pour la justesse, à part dans le développement du premier mouvement du Deuxième Quatuor (j'ai écouté les trois quatuors, le premier quintette à cordes et le quintette avec clarinette) où ça tire vraiment à hue et à dia, j'ai trouvé les imprécisions d'intonation assez vénielles, en tout cas absolument pas gênantes. Je ne sais pas si ça t'éclaire, mais ça te fait un autre écho. → Mon ressenti est assez différent pour les Bartók : je n'entends pas ce côté chantant et détendu. J'ai bien sûr aimé le côté allant et dansant, mais avec ces timbres et cette âpreté, j'y ai au contraire senti quelque chose de très combattif, à la fois dansant et menaçant. Plus proche de l'esprit des quatuors de Bartók que d'un divertissement folklorique. Cela concernait l'ensemble des quatuors du corpus, mais ça doit évidemment varier si on les écoute isolément. → Les Belcea avaient fait une première version chez EMI, on pourrait donc parler de Belcea II pour ZZT. Merci pour ce parcours ! |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: La musique de chambre de BRAHMS | |
| |
| | | | La musique de chambre de BRAHMS | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |
|