Les musiques qui sentent l'été

la chaleur, la farniente, le soleil, les vacances...

Depuis quelques années je remarque qu'avec l'arrivée des beaux jours Respighi a tendance à revenir systématiquement dans mes écoutes. Cette impression de vacances en rentrant à vélo alors qu'on a bossé toute la journée, c'est plutôt agréable.     A l'écoute des Fontaines ou d'autres poèmes symphoniques on s'installerait bien à l'ombre des pins, un verre de vin frais à la main...

Moi je suggère la symphonie "Antartica", ben oui certains n'aiment pas les grosses chaleurs, je m'imagine l'écouter au coin du feu, un grog à la main…  

Première réponse, première déviation   

 

- Forcément L'Estate de Vivaldi ; et notamment son mouvement lent, écrasé de soleil, étouffant/brûlant quand le larde les traits pointés de l'orchestre derrière le violon solo.
- Cerdaña de Séverac ou En vacances ; pour l'immanence d'un paysage, d'une atmosphère (au sens presque météorologique du terme).
- L'aria de la Bachiana brasileira n° 5 de Falla ; et le mouvement médian du Concerto d'Aranjuez de Rodrigo (les deux pour ce puissant ressenti profondément émollient d'y rentrer dans une dimension où le temps n'a pas cours).
- La Conga del fuego de Marquez (Dudamel/DGG) et El currucha par Pluhar (album Pajaros perdidos, Virgin) : deux morceaux qui m'inspirent une vraie joie de vivre, une énergie solaire.
- Pour moi (mais c'est parce que je les ai beaucoup écoutés dans le jardin de mes parents, sur les hateurs de Nice), les Gnossiennes et les Gymnopédies de Satie qui respirent un complet sentiment de plénitude.
C'est étonnant comme question ; et à quoi cela tient-il, d'ailleurs, à un état d'esprit ou à quelque chose de programmatique ? Un simple hasard de calendrier ?

- Eclairs sur l'au-delà de Messiaen; qui traduit bien ma fatigue sous les chaleurs estivales mais aussi la lumière absolue du soleil de plomb...
- Fête des belles eaux de Messiaen; terriblement rafraîchissant.  
- Les Boréades de Rameau; solaire et fougueux.

Une seule réponse? Iberia d'Albeniz.
Sur une terrasse de Barcelone avec une coupe de sangria, c'est délicieux!!!     

Jaky a écrit:

Moi je suggère la symphonie "Antartica", ben oui certains n'aiment pas les grosses chaleurs, je m'imagine l'écouter au coin du feu, un grog à la main…  

là, j'essaie d'imaginer à quoi peut ressembler Amundsen-Scott en ce moment, et (pardon mais) ton grog et ton feu me font doucement rigoler. 

bAlexb a écrit:

- L'aria de la Bachiana brasileira n° 5 de Falla

  

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  Intéressant sujet !

Même si ce tropisme est quand même assez élastique, mes goûts semblent aussi tributaires d'une certaine saisonnalité.

Il ne s'agit pas forcément d'oeuvres qui illustrent ou figurent l'été, mais plutôt de genres ou d'humeurs privilégiés.

Je m'incline à des oeuvres plus légères, aussi bien pour le tempérament que pour l'effectif.

Plutôt Copland ou Respighi que Bruckner ou une symphonie de Brahms.

Et c'est la période où j'écoute le plus de clavier / musique de chambre...

Mélomaniac a écrit:

Plutôt Copland ou Respighi que Bruckner ou une symphonie de Brahms.

Respighi serait plutôt printanier, pour moi (comme les deux suites Jazz de Chostakovitch, à la fois joyeuses mais toujours parcourues par l'incertitude fébrile de la sortie de l'hiver ; comme aussi le concerto pour flûte et harpe de Mozart) ; Brahms est mon "automne" ; Bruckner inonde mes "hivers" (y compris intérieurs). Schubert est peut-être plus "transversal" et riche de toute les saisonnalités.
Pour l'été, en-dehors de l'humeur, j'aurais pu parler des musiques de "festivals" : les opéras à grand spectacle qu'on entend dans les arènes/théâtres antiques, par exemple ou la musique baroque en général qui fait les beaux soirs estivaux (mais l'opéra m'accompagne tout le temps ; c'est constitutif et va très au-delà du tropisme seul, chez moi).

Golisande a écrit:

Jaky a écrit:

Moi je suggère la symphonie "Antartica", ben oui certains n'aiment pas les grosses chaleurs, je m'imagine l'écouter au coin du feu, un grog à la main…  

là, j'essaie d'imaginer à quoi peut ressembler Amundsen-Scott en ce moment, et (pardon mais) ton grog et ton feu me font doucement rigoler. 

Abandonné seul sur la banquise je suis certain que tu apprécierai…   

Sinon par bon temps, les quintettes de Fauré, ils sentent si bon…  

Jaky a écrit:

Abandonné seul sur la banquise je suis certain que tu apprécierai…   

Tu as raison : quitte à mourir de froid, autant le faire au chaud.  

Je ne sais pas pourquoi mais je sens que je vais intervenir dans ce topic....  

Jaky a écrit:

Sinon par bon temps, les quintettes de Fauré, ils sentent si bon…  

si bon la mort...

Le corpus symphonique de Gustav Mahler !







...ben quoi, c'était un compositeur d'été, non ?


  

Bart a écrit:

Le corpus symphonique de Gustav Mahler !







...ben quoi, c'était un compositeur d'été, non ?

Eh bien oui, figure-toi que je suis assez d'accord : c'est plutôt l'été frisquet à la montagne avec forêts, lacs et cascades, mais moi je suis preneur. 

Été = vacances au chalet = parties de Parchesi sur la veranda = image cenrale de la table de jeu = tableau idyllique avec maison au fond d'un jardin fleuri, grands arbres, le tout baigné d'un soleil langoureux.

- Delius: The Walk to the Paradise Garden (A Village Romeo and Juliet). Une marche langoureuse dans le sentier, se cachant le plus possible du généreux soleil d'août.
- Vaughan-Williams: The Lark Ascending (L'envol de l'alouette). Celle-ci prend son envol et semble faire des mamours au soleil aveuglant. Telle Icare elle semble s'en approcher, de plus en plus près...

Pour moi, c'est de la bonne musique baroque bien éclatante, comme le soleil en majesté : des toccatas de Bach, Water music de Haendel, Le concerto pour 2 trompettes de Vivaldi...
Symphonie Haffner de Mozart, L'enfant des îles de Florentz, España de Chabrier, Carmen de Bizet, Quatuor La truite de Schubert...
La pastorale de Beethoven m'évoquerait plutôt le printemps.

J'sais pas, moi : l'été, c'est "Ibéria" de Debussy avec ses "parfums de la nuit" étouffants comme une nuit d'été espagnole, la "Turangalila" de Messiaen où je sens toute la force de la nature en majesté, la suite du "Sea Hawk" de Korngold avec son orchestre fourmillant où encore "la Fontaine d'Aréthuse" de Szymanovski à la chaleur presque étouffante....J'oublie "les Fontaines de Rome" de Respighi qui me sont si chères et où je ressens un souvenir d'enfance : les tâches de soleil du crépuscule qui filtraient à travers les grands arbres du parc de mes grands-parents en Ariège avec la cloche de l'église qui sonnait dans le lointain...Je ne peux écouter la fin des "Fontaines" sans frissonner...

Autrement, l'été, je m'écoute bcp de "Bossa-nova" et dérivés : Joao Gilberto, Tom Jobim, Sergio Mendès, Flora Purim, etc...Réminiscences de mes vacances à Royan, ville inspirée par le Brésil (chose bien oubliée aujourd'hui, les Français détestant la couleur) et qui, pour moi, ado, était la seule ville où l'on pouvait vire heureux...

On a de ces idées, parfois...

J'écoute les Heures Persanes de Koechlin en boucle au bureau...

Debussy:Les Collines d'Anacapri
Honegger:Symphonie n°4
Schumann:Quintette op.44
Mahler:Symphonie n°1 1er mouvement
Villa-Lobos:Ruda +quasiment tout le corpus...
Marx:Herbstsymphonie
Bach:Concerto Brandebourgeois n°1
Milhaud:Le Carnaval d'Aix
Reich:Music for Large Ensemble
Florentz:L'Enfant des Iles
Chavez:Sinfonia India
Copland:Symphonie n°3 Final
Mozart:Symphonie n°39 1er mouvement
Haydn:Symphonie n°82 1er mouvement
Strauss:Une vie de Héros 1er mouvement
Berlioz:Roméo et Juliette scherzo de la reine Maab

arnaud bellemontagne a écrit:

Debussy:Les Collines d'Anacapri
[……

J'aurai plutôt choisi "jardin sous la pluie", enfin cela dépend de la région ou l'on se trouve…   

Richard Strauss -Eine Alpensinfonie

qui se déroule incontestablement en été
Auf blumigen Wiesen
Auf der Alm
Durch Dickicht und Gestrüpp auf Irrwegen

et j'ai oublié
Charles Gounod-Mireille

Qui débute lors de la Saint-Jean

Jaky a écrit:

arnaud bellemontagne a écrit:

Debussy:Les Collines d'Anacapri
[……

J'aurai plutôt choisi "jardin sous la pluie", enfin cela dépend de la région ou l'on se trouve…   

"Des pas sur la neige" pour moi, naturellement (ayant survécu à l'Antarctique grâce à mon container de grog, j'ai rejoint la Patagonie).  

Vous me parlez des titres, moi je vous parle de la musique!   

L'été me donne des envies de Mendelssohn, compositeur solaire s'il en est.
... Et puis il y a le souvenir de feue ma Grand-Mère qui, il y a bien des étés de cela, m'a offert une cassette pleine de Songe et d'Italienne.
Je l'ai écoutée en boucle pendant les Grandes Vacances en sautant systématiquement la Marche Nuptiale (qu'il faut nonobstant savoir réécouter pour goûter d'une papille neuve la prodigieuse orchestration et la puissance comique) et en trouvant que les bois sonnaient "bizarre".
En septembre, j'avais remisé la cassette et Mendelssohn dans la catégorie "Musique Adolescente pas Sérieuse", moi qui prenais très au sérieux mon adolescence que j'exigeais sinistre et torturée.
Maintenant que chenu et revenu de tout je reviens à tout, ayant en plus bien dépassé l'âge définitif de ce compositeur inconséquemment moqué, j'aime à écouter cette musique jeune et primesautière, vive et puissante, d'une sève qui m'a si tôt abandonné.
(message commencé à 18h40, mille fois interrompu par des visites, le travail et le toujours malvenu changement d'une bouteille de gaz...)
Puissent mes mains et mon front dans mes mains être rafraichis encore longtemps par les Hébrides et La Mer Calme et l'Heureux Voyage !  

 Je les ai mes tubs de l'Eté !
Et s'il ne m'en coûte pas trop de temps, je créerai bientôt une chorégraphie pour vous faire tous danser dessus, ensemble et au pas !

tod a écrit:

cette musique jeune et primesautière, vive et puissante

Mais pas que... Elle peut être aussi d'une beauté grave et retenue (quatuors op. 42 et 43, motets), voire d'une grande force dramatique (quatuor op. 80, Elias et Paulus).

Il y a en général, chez les compositeurs morts prématurément, et même dans leurs oeuvres qualifiées de lumineuses, ou de joyeuses, un arrière-plan où gravitent la tristesse, la gravité, le tragique même parfois, comme si l'ombre de la Faucheuse se profilait déjà insidieusement au-delà des intentions du musicien...

C'est pas de l'illusion retrospective ça?

Après tout Mozart et Schubert ne savaient pas qu'ils allaient mourir prématurement...

arnaud bellemontagne a écrit:

C'est pas de l'illusion retrospective ça?

J'allais le dire ; c'est la problématique des "souvenirs du futur" qu'on applique, nous "sachants", à une construction historique et chronologique dont on connait autant les tenants que les aboutissants.

arnaud bellemontagne a écrit:

C'est pas de l'illusion retrospective ça?

Après tout Mozart et Schubert ne savaient pas qu'ils allaient mourir prématurement...

Evidemment que c'est une illusion rétrospective, mais c'est quand même cool de se dire ça.   

Et puis pour Schubert, il me semble qu'il était très angoissé les dernières années (ne savait-il pas qu'il avait la chtouille ?)

Bart a écrit:

(ne savait-il pas qu'il avait la chtouille ?)

J'imagine que ça devait être dur à ignorer  !
Mais la question c'est de savoir à partir de quand on se sent/sait perdu. Pour Mozart, quand on connait l'état d'avancement du Requiem au moment de sa mort et quand on écoute, dans le même temps, la Flûte et dans une moindre mesure la Clemenza, je ressens plus d'apaisement lumineux que d'inquiétude/pessimisme. Mais ça aussi, ça relève de la construction personnelle.
Mais tout ça c'est HS par rapport à notre musique "estivale" (j'ai envie d'ajouter la "Forlane" et le "Rigaudon" du Tombeau de Couperin de Ravel).

Le trio à cordes et le quintette (avec harpe) de Jean Cras.

Graceland de Paul Simon.

Mélomaniac a écrit:

bAlexb a écrit:

- L'aria de la Bachiana brasileira n° 5 de Falla

 

         

Pourquoi pas du Fauré, aussi? Y a pas mieux que lui pour évoquer l'été!   

Koechlin aussi (et pas seulement les Heures Persanes !)...

Ma remarque était ironique : je ne connais pas musique plus confinée, plus morose, moins "plein air" que celle de Fauré...

Je ressens sa "Pavane" comme un véritable hymne, que dis-je, une magnification de l'ennui...

Je ne suis pas fan de Fauré, mais il y a beaucoup de choses très "plein air" chez lui, dans la musique de chambre notamment (je pense par exemple aux deux sonates violon/piano).

La Pavane, je trouve ça très joli à petite dose, mais effectivement ça évoquerait plutôt les mois d'octobre/novembre ou de mars/avril dans un bocage humide... Ça reste du plein air, cela dit  (et c'est plutôt sympathique).

Mireille de Gounod bien sûr! Ce début de premier acte est un vrai rayon de soleil!

starluc a écrit:

Ma remarque était ironique : je ne connais pas musique plus confinée, plus morose, moins "plein air" que celle de Fauré...

  

Sa musique de chambre ne m'évoque... strictement...


rien.   

C'est clair qu'il y a pas mal de trucs chez Fauré qui tournent plus ou moins à vide et peuvent sembler étriqués, mais dans le 1er mouvement de la 2e Sonate pour violon et piano il réussit à mettre les voiles, et (pour moi) ça sent vraiment le grand large...  (Tiens d'ailleurs il faudrait que je réécoute ça, je serai peut-être déçu...)

va falloir que j'écoute cela....

starluc a écrit:

Ma remarque était ironique : je ne connais pas musique plus confinée, plus morose, moins "plein air" que celle de Fauré...

C'est vrai. Mais elle n'en demeure pas moins géniale !

Tout dépend de l'idée qu'on se fait du génie...  

Je ne me rappelle plus qui a dit de lui : "trop de raffinement confine à la préciosité et trop de sens de la nuance, à l'insignifiance"...

J'approuve entièrement...

starluc a écrit:

Tout dépend de l'idée qu'on se fait du génie...  

Je ne me rappelle plus qui a dit de lui : "trop de raffinement confine à la préciosité et trop de sens de la nuance, à l'insignifiance"...

J'approuve entièrement...

C'est toujours vrai : en art comme ailleurs, la vérité n'est jamais dans l'excès (quel qu'il soit).
Mais je te garanti que la musique de chambre (et musique tout court) de Fauré n'est pas dans cet écueil.

Darius Milhaud : Les Six Petites Symphonies

Si on ne sent pas l'été dans ces petits chefs-d’œuvre, et bien c'est qu'on a le nez complétement bouché.

Cololi a écrit:

starluc a écrit:

Tout dépend de l'idée qu'on se fait du génie...  

Je ne me rappelle plus qui a dit de lui : "trop de raffinement confine à la préciosité et trop de sens de la nuance, à l'insignifiance"...

J'approuve entièrement...

C'est toujours vrai : en art comme ailleurs, la vérité n'est jamais dans l'excès (quel qu'il soit).
Mais je te garanti que la musique de chambre (et musique tout court) de Fauré n'est pas dans cet écueil.

Pas d'accord avec toi : ce que j'ai entendu de la musique de Fauré, de par son côté confiné, éthéré (on dirait du Puvis de Chavannes), morose mais où on n'atteint même pas le désespoir profond d'un Schumann (n'est pas fou qui veut!) m'a prodigieusement ennuyé. Quand j'entends la "Pavane", je chante souvent "c'est vraiment fou c'qu'on s'emm...ici, fou c'qu'on s'emm... ici, oh oui!"

Une belle musique d'été en revanche me revient : "les Fresques de Piero della Francesca" de Bohuslav Martinu. En particulier, le 1er mvt : c'est une promenade dans un paysage gorgé de soleil comme le 1er mvt "d'Ibéria" de Debussy...Avec l'inquiétante étrangeté de Claude en moins et la jouissance éclatante de Roussel en plus...

starluc a écrit:

Quand j'entends la "Pavane", je chante souvent "c'est vraiment fou c'qu'on s'emm...ici, fou c'qu'on s'emm... ici, oh oui!"

Tout Fauré ne ressemble pas à la Pavane, loin de là.

Cololi a écrit:

starluc a écrit:

Ma remarque était ironique : je ne connais pas musique plus confinée, plus morose, moins "plein air" que celle de Fauré...

C'est vrai. Mais elle n'en demeure pas moins géniale !

Que veux-tu Cololi, nous sommes seuls au monde!  

Spoiler:

Jaky a écrit:

Cololi a écrit:

starluc a écrit:

Ma remarque était ironique : je ne connais pas musique plus confinée, plus morose, moins "plein air" que celle de Fauré...

C'est vrai. Mais elle n'en demeure pas moins géniale !

Que veux-tu Cololi, nous sommes seuls au monde!  

Le raffinement ça ne s'apprend pas   

Citation :

Spoiler:

Plus besoin du pacs maintenant Jaky, faut suivre !