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| | La question musicale du jour (3) | |
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Auteur | Message |
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lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 20:21 | |
| À partir de quand (chez qui) trouve-t-on en musique classique occidentale des rythmes irrationnels (décidément c’est une appellation débile ) autres que “binaires” dans un sens ou dans un autre (3:2, 5:4, etc. ou 2:3, etc.), soit typiquement 5:3, 6:5, 7:5, 7:6, etc. ?
Dernière édition par lucien le Mar 27 Oct 2015 - 22:55, édité 1 fois |
| | | Xavier Père fondateur
Nombre de messages : 90768 Age : 42 Date d'inscription : 08/06/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:11 | |
| 3 pour 2 ou 2 pour 3, il y en a chez Schubert, avant lui je ne vois pas, mais en cherchant bien... peut-être Beethoven? |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:13 | |
| tu n’as pas compris ma question, il me semble. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:21 | |
| - Xavier a écrit:
3 pour 2, il y en a chez Schubert, avant lui je ne vois pas
Déjà dans les Courantes, deux siècles auparavant. |
| | | Cololi chaste Col
Nombre de messages : 32962 Age : 43 Localisation : Bordeaux Date d'inscription : 10/04/2009
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:30 | |
| - lucien a écrit:
- À partir de quand (chez qui) trouve-t-on en musique classique occidentale des rythmes irrationnels (décidément c’est appellation est débile ) autres que “binaires” dans un sens ou dans un autre (3:2, 5:4, etc. ou 2:3, etc.), soit typiquement 5:3, 6:5, 7:5, 7:6, etc. ?
Si tu peux écrire un nombre sous forme de fraction de deux entiers relatifs il est rationnel ... donc ... _________________ Car l'impuissance aime refléter son néant dans la souffrance d'autrui - Georges Bernanos (Sous le Soleil de Satan)
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| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:34 | |
| je sais bien, c’est pour ça que cette appellation est débile, mais je n’en peux rien, moi. bon, je cherche des choses comme ceci : (1919 pour le second) |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97256 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:37 | |
| Je ne suis pas trop sûr de ce que cherche Lucien… Parce que des substitutions fantaisistes, il y en a très tôt dans les diminutions vocales, dans des madrigaux (il me semble qu'il y en a beaucoup chez Luzzaschi, j'irai vérifier), dans les airs de cour italiens et français, dans une partie de la musique sacrée aussi… Évidemment, on pouvait élargir la mesure, donc ce n'est pas pareil que dans les Sonates de Boulez, mais le principe est là.
Après, c'est toujours plus facile à placer que dans la musique récente, ça part d'un temps et tombe sur un autre, hein.
Ce n'était pas forcément écrit. Regarde chez Luzzaschi et Bacilly, c'est là où tu auras le plus de probabilités d'en trouver. (J'en ai vu aussi chez Lochon, mais il y a tellement de fautes dans les manuscrits qu'on ne peut pas trop en jurer !) |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 21:48 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Évidemment, on pouvait élargir la mesure, donc ce n'est pas pareil que dans les Sonates de Boulez, mais le principe est là.
il ne me semble pas qu’il y ait ce dont je parle dans les sonates de Boulez, justement, mais seulement du 3:2 et du 5:4 (simples triolets et quintolets, je ne parle pas de polyrythmie), éventuellement imbriqués les uns dans les autres comme dans Mana. |
| | | Jof Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3541 Date d'inscription : 02/05/2014
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 22:47 | |
| C'est quoi un rythme irrationnel (si des 3 pour 2 n'en sont pas, je ne vois pas) |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 22:53 | |
| un rythme qui ne tombe pas sur les temps/divisions de la mesure, non ? (donc oui, 3 pour 2 doit en faire partie) |
| | | Jof Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3541 Date d'inscription : 02/05/2014
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 23:01 | |
| Ah, donc la superposition d'un rythme étranger à la mesure et d'un rythme "normal".
Tu cherches des rythmes irrationnels vraiment sans valeur binaire ou alors qui soient composés de 2 rythmes étrangers à la mesure ? (parce sinon, on doit en trouver chez Chopin, dans les pièces mesurées en ternaire) |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97256 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 23:04 | |
| Je riens de vérifier, ça se trouve bien dans des volumes de Guédron, Bacilly ou Lochon… Après, ce sont des cadences assez libres et il y a même d'évidentes fautes de copie dans certaines (même la basse n'entre pas dans une mesure fixe), je ne suis pas convaincu que ça entre du tout dans le même esprit… mais ça existe donc dès le début du XVIIe siècle (trouvé dans le Ballet pour le mariage du duc de Vendôme, notamment). |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 23:17 | |
| - Jof a écrit:
- Ah, donc la superposition d'un rythme étranger à la mesure et d'un rythme "normal".
pas forcément la superposition, un rythme est suffisant. - Jof a écrit:
- Tu cherches des rythmes irrationnels vraiment sans valeur binaire ou alors qui soient composés de 2 rythmes étrangers à la mesure ? (parce sinon, on doit en trouver chez Chopin, dans les pièces mesurées en ternaire)
effectivement, si la mesure elle-même est ternaire... mais c’est beaucoup moins drôle... (je n’ai pas dû chercher longtemps pour trouver du 5:3 et du 7:6 chez Chopin, donc merci.) - DavidLeMarrec a écrit:
- Je riens de vérifier, ça se trouve bien dans des volumes de Guédron, Bacilly, d'Ambruis ou Lochon… Après, ce sont des cadences assez libres et il y a même d'évidentes fautes de copie dans certaines (même la basse n'entre pas dans une mesure fixe), je ne suis pas convaincu que ça entre du tout dans le même esprit… mais ça existe donc dès le début du XVIIe siècle (trouvé dans le Ballet pour le mariage du duc de Vendôme, notamment).
des cadences notées sans valeurs précises, ce n’est pas vraiment la même chose, en effet... mais tu ne pourrais pas montrer un exemple ? |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97256 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 27 Oct 2015 - 23:22 | |
| J'étais en train de le faire (ce ne sont pas des cadences finales ou sans accompagnement, je précise). (Sinon, oui, Chopin est le cas évident de généralisation du truc que tu cherches. On en trouve peut-être chez des prédécesseurs, mais rien d'aussi marquant – il me semble que chez Field tout est bien régulier ; si ça arrive, c'est vraiment un effet temporaire.) -- Chez Guédron (ballet d'Alcine, début XVIIe) : Mesure à 3/2. -- Chez Bénigne de Bacilly (seconde moitié XVIIe) : (La mesure débute avec trois rondes à la ligne précédente, et se se lisent à 3/2 pour les autres.) -- Chez Lochon (première moitié XVIIIe) : -- il y a des erreurs évidentes (le copiste de Lochon ne devait pas lire la musique, il y a des trucs comme ça partout, la première noire est une blanche, on le voit dans une autre mesure), mais pas partout, et l'on voit bien qu'il y a des ajustements nécessaires pour que ce soit jouable. En l'état, on serait obligé de tomber à côté des temps. Mais à mon avis, on est assez loin de ce que tu cherches : c'est un précédent arithmétique, mais le principe est totalement différent de la superposition de rythmes dans un but délibérément retors. Ici, on reste dans le principe de l'ornement (et éventuellement de la fluctuation du mètre, comme dans Guédron). |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 28 Oct 2015 - 0:04 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Sinon, oui, Chopin est le cas évident de généralisation du truc que tu cherches.
certainement pas la généralisation, on est même encore un cran en-deçà (dans ce que j’ai vu), puisque c’est toujours autant de notes pour une division entière de la mesure. merci pour les extraits, je médite dessus, mais je suis plutôt circonspect : je me perds un peu dans le Guédron, mais je ne vois pas où pourrait apparaitre ce que je cherche ; pour les autres cela me parait plus évident qu’il y a des erreurs, et même en les ignorant je ne suis pas persuadé que l’ajustement comme tu dis nécessiterait ce genre de rythmes. (pour le premier Lochon, sans voir le reste, j’aurais plutôt mis deux noires et une blanche en dessous plutôt que remplacer la noire au-dessus, mais bon.) |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 28 Oct 2015 - 0:29 | |
| au passage, je ne pense pas que ce soit une question de faire retors, mais plutôt de fluidité, avec ou sans superpositions. |
| | | xoph Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5517 Age : 65 Localisation : là Date d'inscription : 12/10/2011
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Ven 30 Oct 2015 - 23:41 | |
| Au secours, je croyais la question bouclée et que les frettes mobiles étaient inventées au XXIéme siècle pour le seul plaisir de jouer plus finement notre cher Schubert (et expérimenter quelques musiques microtonales), mais voilà que: "Ici les frettes sont faites de cordes entourant le manche. Sur d’autres instruments elles peuvent être faites de petites tiges en bois, en ivoire ou en métal, fixes ou mobiles, permettant au musicien d’ajuster son instrument." in http://classic-intro.net/introductionalamusique/instruments/Lesvioles.html Tempérament, peu de tenue de l'instrument dans l'accord, microtonal. Et si tout ceci n'était finalement pas sans lien? Vite mes lunettes! |
| | | Alifie Googlemaniac
Nombre de messages : 19640 Date d'inscription : 29/01/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Ven 30 Oct 2015 - 23:56 | |
| https://fr.wikipedia.org/wiki/Frette_(musique) |
| | | xoph Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5517 Age : 65 Localisation : là Date d'inscription : 12/10/2011
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 31 Oct 2015 - 0:17 | |
| "sur les instruments anciens, on utilisait des cordes en boyau nouées autour du manche, nommées pour cette raison «ligatures»." J'en conçois assez facilement la mobilité... à présent. |
| | | Fuligo Déesse du scalpel
Nombre de messages : 3788 Age : 43 Localisation : Nothingness, SK Canada Date d'inscription : 10/01/2006
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 31 Oct 2015 - 2:22 | |
| On a aussi des frettes en cordes sur les saz (pluriel de saz??)
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/ac/Saz_frets.jpg |
| | | Alifie Googlemaniac
Nombre de messages : 19640 Date d'inscription : 29/01/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 31 Oct 2015 - 2:34 | |
| On les voit bien sur la 1ère photo de cette page-là : https://en.wikipedia.org/wiki/Bağlama |
| | | Dadamax Mélomane averti
Nombre de messages : 271 Age : 50 Localisation : Provence Date d'inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 21 Nov 2015 - 11:28 | |
| - lucien a écrit:
- À partir de quand (chez qui) trouve-t-on en musique classique occidentale des rythmes irrationnels (décidément c’est une appellation débile ) autres que “binaires” dans un sens ou dans un autre (3:2, 5:4, etc. ou 2:3, etc.), soit typiquement 5:3, 6:5, 7:5, 7:6, etc. ?
Si tu entends par là : "je joue 4 notes à la main droite pendant que j'en joue 3 avec la gauche", ce n'est pas si rare en classique ou en baroque. La sonate en sol majeur op 25 n°2 de Clementi joue beaucoup avec du trois pour quatre. J'ai le souvenir d'un 4 pour 5, mais ponctuellement, dans cette période, que j'avais travaillé mais j'ai oublié où... Si tu entends rythmes à 5 temps, 7, 9, etc... ou des choses sans compter : Il y a le récitatif italien au XVIIème : l'usage voulait, selon Jean Christian Bach, de ne pas respecter la mesure de ce qui était écrit mais de laisser la prosodie et l'idée du texte décider du rythme (le continuo suivait le chanteur). Par exemple Monteverdi écrit une musique (mais instrumentale ici) qui évoque le galop d'un cheval où on lit d'abord des blanches répétées puis des noires : l'instrumentiste est censé accélérer petit à petit, comme un cheval qui se lance. Lully a préféré noter exactement ces rythmes, et le récitatif de l'opéra français a jusqu'à Rameau gardé cette tradition de nombreux changements de mesures. C'est ce que dit Nikolaus Harnoncourt dans "Le Discours Musical", que je suis en train de lire - et trouve très instructif. Je pense que c'est ce qui a fait écrire à Télémann : "le récitatif français coule comme du champagne"! Mais je n'ai pas encore eu l'occasion de vérifier dans les partitions. Francisco Correa di Arauxo (1584-1654), en Espagne, a eu recours aux mesures inégales, c'est à dire par exemple aux rythmes à cinq temps, ou sept, ces rythmes ayant été entendus par le compositeur chez des gitans durant son enfance. John Bull, dans In Nomine, du Fitzwilliam Virginal Book fait un merveilleux usage de mesures inégales, 8+3=11 temps (!) La musique espagnole de la renaissance : souvent ces compositeurs ajoutent des mesures à 2 temps quand on est à trois temps, ce qui peut donner des effets très variés, ou encore ils découpent une mesure à 8 : 3+3+2. Ex : ici on compte jusqu'à trois à chaque accord, et d'un coup on compte à deux. /watch?v=miX0xosI_Js Entre parenthèse, je trouve le CD de ce groupe excellent! Mais je ne connais pas ce type d'indication : [3:2] tout ça... c'est quoi au juste? |
| | | Dadamax Mélomane averti
Nombre de messages : 271 Age : 50 Localisation : Provence Date d'inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 21 Nov 2015 - 11:57 | |
| Après, la musique ne se lisait peut-être pas de la même manière il y a quelques siècles. Harnoncourt et d'autres pensent qu'au XVIIème, la partition exprimait l'idée de composition. L'instrumentiste ou le chanteur devait lui se charger de "l'elocuzio", l'élocution, trouvant les figures de rhétoriques pour convaincre l'auditeur. Des tas de choses étaient donc sous entendues. Et qu'ensuite, au XIXème, il s'agissait plus d'indications pour l'exécutant. Concrètement, ça fait qu'un instrumentiste d'aujourd'hui lit une croche pointée alors qu'il faut entendre un double pointé (parce-que c'est une ouverture, ou qu'il est noté comme indication "Grave"...) D'autres fois une note a un statut d'appoggiature, qui fait que la durée de quelques notes ne sont pas déterminées par une mesure précise mais on saura qu'il faut jouer plutôt lentement ou plutôt vite si on comprend qu'il s'agit d'un effet rythmique qui est recherché ou bien l'effet de dissonance (alors on fait durer, gnarc! Gnarc !)
Un exemple de non respect des temps de la mesure au XVIIIème : regarder à 1 minute 45 : /watch?v=xX2ADG1m9DE |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 21 Nov 2015 - 12:31 | |
| non, ce n’est ni l’un ni l’autre que je cherchais. (ici l’explicitation va suivre dans la suite du message, et non plus quelque vingt minutes plus tard, en espérant qu’on n’y verra plus une insulte.) - Dadamax a écrit:
- Mais je ne connais pas ce type d'indication : [3:2] tout ça... c'est quoi au juste?
C’est une notation utilisée depuis le début vingtième siècle semble-t-il (du moins je n’en ai jamais vu avant... ça pourrait être aussi une question intéressante), et qui se généralise peut-être après que Stockhausen les utilisa massivement dans les quatre premiers Klavierstücke. 3:2 pour dire grosso modo trois notes à la place de deux, c’est-à-dire que dans l’intervalle de temps où on aurait une division en deux, on a une division en trois. Donc c’est un simple triolet, noté plus économiquement 3. De la même façon, le 5:4, le quintolet, est en général noté simplement 5, etc. ; dans une mesure ternaire, 2 correspond à 2:3, etc. Ce que je cherchais, donc, ce sont des rythmes autres soit qu’une redivision quelconque de quelque chose de binaire (donc les classiques 3:2, 5:4, etc.), soit qu’une redivision en deux de quelque chose (2:3 ou 4:3, peut-être 2:5 ou 4:5, etc.). Après la remarque de Jof, ce que je cherchais fondamentalement était plutôt des rythmes qui échappent à cette logique qui veut qu’on a toujours une redivision d’une partie entière d’une mesure, que celle-ci soit binaire ou ternaire. Mais après réflexion, même dans des cas complexes (un exemple simple : dans une mesure en 4/4, un 6:5 en croches suivit d’un 5:3 en croches), on peut voir des divisions régulières des parties d’une mesure inégale (dans l’exemple on aurait 5/8+3/8 ). Même chose si on est en mesure libre. Ces rythmes peuvent bien sûr se superposer et ne pas coïncider, mais David peut attester qu’on trouve déjà des mesures qui ne coïncident pas chez Mozart, Wagner et chez les baroques qui ont un mauvais copisteparce que l’écriture est plus libre. Donc au final, je pense qu’il n’y a pas de rupture, pas de réelle nouveauté, mais plutôt une généralisation des principes antérieurs avec une liberté accrue. - Spoiler:
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| | | Dadamax Mélomane averti
Nombre de messages : 271 Age : 50 Localisation : Provence Date d'inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 21 Nov 2015 - 20:56 | |
| - lucien a écrit:
- Donc au final, je pense qu’il n’y a pas de rupture, pas de réelle nouveauté, mais plutôt une généralisation des principes antérieurs avec une liberté accrue.
- Spoiler:
Sur le papier oui mais dans ce qu'on entend, peut-être pas. Par exemple, dans la "petite" musique que montre Malcom Bilson dans le dernier exemple que je proposais, il serait extrêmement difficile, voir impossible d'écrire mathématiquement ce qui est joué, alors qu'avec Boulez qui en particulier souhaite qu'on joue rigoureusement ce qui est écrit, c'est toujours possible (au mieux il y a des accélérations demandées), tout ce qui est joué est écrit. Ainsi la Petite Musique de Nuit est plus complexe qu'une sonate de Boulez (elle est bien cette phrase, non?), pas sur le papier mais parce-qu'elle fait appel au sens pour être bien interprêtée. C'est peut-être aussi cette idée qui a fait mettre un peu de côté la complexité de la musique polyphonique par un Monteverdi, pour goûter la richesse infinie qui est possible en mélangeant la musique et la signification. Ce sont des choses infimes qui différencient une interprétation lumineuse de Mozart ou Schubert avec un tunnel d'ennui sans forme. Ces choses ont rapport avec le sens : j'ai le souvenir d'un jeune pianiste bon techniquement qui jouait Mozart et où j'ai eu la vision d'un pépé assis au coin d'un feu, sirotant un digestif... alors que quand c'est bien joué on voit des personnages d'opéra, un orchestre, le vent dans les arbres ou des phrases clairement énnoncées... Schubert aussi ça devient vite informe si l'accentuation, les différences de vibrato du violon ou d'autres aspects musicaux ne servent pas l'histoire qui est racontée. Tout ça n'est jamais noté mais est simplement essentiel. On trouve sur internet un extrait d'un bon documentaire qui montre assez bien de ces choses infimes si importantes. La vidéo s'appelle : Yuri Baschmet travaille la sonate "Arpeggione" de Schubert avec Andréï Gridchuk Voici deux autres exemples (cocasses) d'une interprétation non linéaire escomptée par le compositeur, trouvés dans le livre "Anton Von Webern" par Alain Galliari : Kemplerer, discutant avec Peter Heyworth, lui dit que, comme il ne comprenait pas la musique de Webern : "J'ai alors demandé à Webern de venir et de me la jouer au piano. Je pensais qu'ainsi je pourrais peut-être la comprendre davantage. Il vint et joua chaque note avec une fougue et un fanatisme extrêmes. - Heyworth : Pas froidement? - Kemplerer : Non, passionnément! Lorsqu'il eut fini, je dis : "Vous savez, je ne peux pas la diriger de cette façon là. Je suis tout simplement incapable d'apporter cette fougue énorme à votre musique. Je ferais de mon mieux." C'est ce que je fis, et tout alla plutôt bien." Réaction de Webern après le concert, lettre du 6 décembre à Steuermann : "Kemplerer a joué ma symphonie [...]. Je sais que Schoenberg est à présent au mieux avec le bonhomme [...], mais je dois bien dire que ce qu'il a tiré de ma pièce était mauvais au delà de toute borne, sans aucun sens; il aurait mieux valu que cela ne fût pas." Le témoignage du jeune pianiste Peter Stadlen est lui aussi éloquent : "J'étais avec lui au concert au cours duquel sa symphonie op.21 fut jouée. Il était tout à fait consterné et disait : "Un son dans l'aigu, un son dans le grave, un son au milieu – comme si c'était la musique d'un fou!" (En plus, Kemplerer est un très bon chef...) Autre extrait de la même biographie, toujours à propos du sens en relation aux sons, pour une autre interprétation de la même oeuvre : Après la première européenne de l'op.21, Adorno compara en 1932 la harpe de cette cinquième variation aux cloches de vaches, "chargé de sentiment entendu dans la montagne". Le 3 décembre 1932, Webern écrivait au philosophe : "Il en va tout bonnement ainsi : on dépeint ce qu'on a expérimenté. De sorte que lorsque vous avez interpréter le passage de la harpe de la cinquième variation de ma symphonie comme une "cloche de vache", cette comparaison m'a grandement réjoui car j'en conclu que vous avez entendu avec justesse – comme vous le dites vous-même avec vos mots" |
| | | lulu Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20489 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 21 Nov 2015 - 21:27 | |
| - Dadamax a écrit:
- Sur le papier oui mais dans ce qu'on entend, peut-être pas. Par exemple, dans la "petite" musique que montre Malcom Bilson dans le dernier exemple que je proposais, il serait extrêmement difficile, voir impossible d'écrire mathématiquement ce qui est joué, alors qu'avec Boulez qui en particulier souhaite qu'on joue rigoureusement ce qui est écrit, c'est toujours possible (au mieux il y a des accélérations demandées), tout ce qui est joué est écrit.
Ainsi la Petite Musique de Nuit est plus complexe qu'une sonate de Boulez (elle est bien cette phrase, non?), pas sur le papier mais parce-qu'elle fait appel au sens pour être bien interprêtée.
C'est peut-être aussi cette idée qui a fait mettre un peu de côté la complexité de la musique polyphonique par un Monteverdi, pour goûter la richesse infinie qui est possible en mélangeant la musique et la signification.
Ce sont des choses infimes qui différencient une interprétation lumineuse de Mozart ou Schubert avec un tunnel d'ennui sans forme. Ces choses ont rapport avec le sens : j'ai le souvenir d'un jeune pianiste bon techniquement qui jouait Mozart et où j'ai eu la vision d'un pépé assis au coin d'un feu, sirotant un digestif... alors que quand c'est bien joué on voit des personnages d'opéra, un orchestre, le vent dans les arbres ou des phrases clairement énnoncées... Schubert aussi ça devient vite informe si l'accentuation, les différences de vibrato du violon ou d'autres aspects musicaux ne servent pas l'histoire qui est racontée. Tout ça n'est jamais noté mais est simplement essentiel.
On trouve sur internet un extrait d'un bon documentaire qui montre assez bien de ces choses infimes si importantes. La vidéo s'appelle : Yuri Baschmet travaille la sonate "Arpeggione" de Schubert avec Andréï Gridchuk Ce sont juste deux choses totalement différentes. Je parle de “liberté” rythmique dans l’ écriture : pour le dire grossièrement, on n’est pas obligé de n’écrire que des noires. Ensuite, évidemment qu’une interprétation est une interprétation, demande une prise de liberté avec elle, demande d’articuler des phrasés, fait appel au sens, évidemment qu’il y a des petites inflexions qu’on ne peut noter, choses infimes, etc. Ça, ça ne change pas... euh... avec le vingtième siècle (c’est de ça que tu parlais ?). On peut constater que globalement (je dis bien globalement) la tendance est plutôt de préciser davantage l’écriture au fur et à mesure que les siècles ou décennies passes, mais il n’est pas du tout assuré qu’on puisse dire (et encore moins démontrer) qu’une œuvre moderne ou contemporaine demande moins d’ interprétation qu’une œuvre baroque ou classique. Mais encore une fois, ce n’est pas du tout de ça que je parlais. D’ailleurs je ne parlais même pas de musique moderne (disons) en soi. (Si tu veux, je peux aussi donner un exemple : la sonate de Barraqué, qui passe pour un monstre de radicalité rigoureuse. Au début, il y a un quintolet, puis un second juste après au début de la seconde mesure. Herbert Henck, qui est un très bon pianiste, par exemple, joue le second presque deux fois plus lentement que le premier, et en articulant les deux de façon très marquée.) - Dadamax a écrit:
- Voici deux autres exemples (cocasses) d'une interprétation non linéaire escomptée par le compositeur, trouvés dans le livre "Anton Von Webern" par Alain Galliari :
Kemplerer, discutant avec Peter Heyworth, lui dit que, comme il ne comprenait pas la musique de Webern : "J'ai alors demandé à Webern de venir et de me la jouer au piano. Je pensais qu'ainsi je pourrais peut-être la comprendre davantage. Il vint et joua chaque note avec une fougue et un fanatisme extrêmes. - Heyworth : Pas froidement? - Kemplerer : Non, passionnément! Lorsqu'il eut fini, je dis : "Vous savez, je ne peux pas la diriger de cette façon là. Je suis tout simplement incapable d'apporter cette fougue énorme à votre musique. Je ferais de mon mieux." C'est ce que je fis, et tout alla plutôt bien." Réaction de Webern après le concert, lettre du 6 décembre à Steuermann : "Kemplerer a joué ma symphonie [...]. Je sais que Schoenberg est à présent au mieux avec le bonhomme [...], mais je dois bien dire que ce qu'il a tiré de ma pièce était mauvais au delà de toute borne, sans aucun sens; il aurait mieux valu que cela ne fût pas." Le témoignage du jeune pianiste Peter Stadlen est lui aussi éloquent : "J'étais avec lui au concert au cours duquel sa symphonie op.21 fut jouée. Il était tout à fait consterné et disait : "Un son dans l'aigu, un son dans le grave, un son au milieu – comme si c'était la musique d'un fou!"
(En plus, Kemplerer est un très bon chef...)
Autre extrait de la même biographie, toujours à propos du sens en relation aux sons, pour une autre interprétation de la même oeuvre : Après la première européenne de l'op.21, Adorno compara en 1932 la harpe de cette cinquième variation aux cloches de vaches, "chargé de sentiment entendu dans la montagne". Le 3 décembre 1932, Webern écrivait au philosophe : "Il en va tout bonnement ainsi : on dépeint ce qu'on a expérimenté. De sorte que lorsque vous avez interpréter le passage de la harpe de la cinquième variation de ma symphonie comme une "cloche de vache", cette comparaison m'a grandement réjoui car j'en conclu que vous avez entendu avec justesse – comme vous le dites vous-même avec vos mots" Euh, quel est le rapport ? |
| | | Jof Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Sam 21 Nov 2015 - 23:31 | |
| Je me greffe au milieu d'une intéressante conversation, mais simplement pour demander si quelqu'un sait quand on a commencé à trafiquer les enregistrements et faire du collage de différentes prises ? |
| | | Dadamax Mélomane averti
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| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Lun 23 Nov 2015 - 13:48 | |
| - lucien a écrit:
- On peut constater que globalement (je dis bien globalement) la tendance est plutôt de préciser davantage l’écriture au fur et à mesure que les siècles ou décennies passent, mais il n’est pas du tout assuré qu’on puisse dire (et encore moins démontrer) qu’une œuvre moderne ou contemporaine demande moins d’interprétation qu’une œuvre baroque ou classique.
Disons qu'il y a plus de différence entre ce qui est écrit et ce qu'on est censé entendre. Il y a des opéras baroques écrits sur une ou deux lignes pour l'orchestre : les exécutants étaient censés écrire eux-mêmes les parties intermédiaires, comme l'attestent les parties d'orchestre d'époque qu'on a retrouvées (une même musique était jouée ici à quatre voix et là à 5, avec des parties complètement différentes). C'est au XIXème que la musique commence à être écrite plus comme un mode d'emploi que comme l'indication d'une trame avec un vocabulaire commun. Je suppose bien sûr que ce qui t'intéresse est plus ce qui s'entend que le papier lui-même. Je suis d'accord sur le fait qu'un bon musicien va forcément interpréter ce qui est écrit, mais, pour reprendre ton exemple, rien dans la sonate de Barraqué ne permet de dire qu'il faille absolument jouer les deux quintolets différemment : ça ne change pas fondamentalement l'oeuvre, et quelqu'un qui simplement jouera ce qui est écrit avec un peu de goût ne rendra pas l'oeuvre inaudible. Par contre, il est impensable de jouer même une valse de Johann Strauss telle qu'elle est écrite rythmiquement, autant qu'il est impensable de la jouer en allongeant le temps qu'on est censé raccourcir (au passage, le rapport mathématique entre les durées de ces temps n'est pas une fraction simple). Et je trouve qu'il n'en va pas de même pour une bonne part de la musique contemporaine : l'abstrait et l'arbitraire, ça peut être beau mais on finit par s'y perdre et ne dire plus rien. "Je veux de l'ail dans mon gigot!"(Poulenc) Du coup, le jeu musical s'en trouve restreint il me semble. J'ai pris l'exemple de Webern parce-que Boulez, qui prétend le suivre, dit (sincèrement je crois) que la musique n'exprime qu'elle-même, n'a aucune signification. Je trouve que c'est se priver d'un atout fondamental, surtout quand j'entend du Chostakovitch, Bartok, Henze, ou autres. D'ailleurs, même l'aspect mathématique important dans la musique de Webern correspond, comme il l'a écrit lui-même, à une visée expressive, voir mystique (il voulait créer des objets sonores où on reconnaisse un plan commun à travers la diversité, un germe qui porte en lui toute l'œuvre, comme on peut reconnaître l'arbre à sa feuille...) Le lien est que le sens, la signification, a des implications directes sur le jeu, sur la musique, et qu'il peut être dégagé par un travail objectif. Je cherche ce sens dans certaines musiques contemporaines et ne le trouve pas. Je me dis souvent :"Il a bien parlé mais qu'est-ce qu'il a dit?" J'ai deux interprétations d'une pièce pour clavecin de Duphly. Déjà, je n'entend pas les mêmes notes, et les interprétations sont différentes, mais ce n'est pas n'importe quoi : il y a des règles de jeu d'une part et une signification d'autre part qui font que les deux interprétations fonctionnent, que j'y entend un "jeu" musical. Chez Barraqué, l'interprête a le mérite (sûr, ce n'est pas facile) de jouer toutes les notes... Skip Sempé a eu une répartie amusante je trouve dans une interview, quand on lui demandait ce qui était important quand on joue à deux clavecins, répondant : D'abord, il faut écouter l'autre, et c'est valable dans toute musique de chambre, où le plus important est d'écouter ce que joue l'autre; sinon ce n'est pas la peine de jouer à plusieurs. Ce n'est pas comme dans Le Marteau Sans Maître où la gloire du musicien, c'est de compter. (!) Dans le fond je trouve qu'il peut parfois y avoir plus de liberté artistique dans une cadence parfaite que dans un enchaînement de clusters. Ceci peut sembler exagéré, mais pense à la cadence du premier concerto pour piano et trompette de Chostakovitch! |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
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| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Lun 23 Nov 2015 - 20:18 | |
| Je ne vais pas participer à la conversation directement, puisque je ne crois pas que vous parliez de la même chose ( Lucien parle des substitutions de valeurs sur les partitions, pas de leur liberté d'exécution), mais plusieurs remarques de Dadamax ont suscité mon intérêt. - Citation :
- Disons qu'il y a plus de différence entre ce qui est écrit et ce qu'on est censé entendre. Il y a des opéras baroques écrits sur une ou deux lignes pour l'orchestre : les exécutants étaient censés écrire eux-mêmes les parties intermédiaires, comme l'attestent les parties d'orchestre d'époque qu'on a retrouvées (une même musique était jouée ici à quatre voix et là à 5, avec des parties complètement différentes).
Tu pourrais donner des exemples précis ? Ça ne m'évoque rien. ¶ Il y a les cas des réductions, qui ne contiennent que la mélodie (ligne de dessus, ou bien solistes vocaux et/ou instrumentaux) et la basse, parfois seules à nous être parvenues, et qui obligent à récrire les parties intermédiaires dans le style de l'époque pour pouvoir les représenter avec orchestre. Comme, pour prendre un exemple tout frais, le Ballet de la Nuit de Cambefort & anonymes. ¶ Il y a les cas fréquents d'adaptations (un air de cour tantôt monodique avec luth, tantôt polyphonique avec trois, quatre, cinq parties, au gré de chacun). Mais des partitions délibérément écrites comme lacunaires, ça me paraît étrange : en général, c'était commandé pour être joué, quitte à ce qu'un élève / secrétaire écrive les parties intermédiaires (comme Collasse pour LULLY). - Dadamax a écrit:
- Lully a préféré noter exactement ces rythmes, et le récitatif de l'opéra français a jusqu'à Rameau gardé cette tradition de nombreux changements de mesures. C'est ce que dit Nikolaus Harnoncourt dans "Le Discours Musical", que je suis en train de lire - et trouve très instructif. Je pense que c'est ce qui a fait écrire à Télémann : "le récitatif français coule comme du champagne"! Mais je n'ai pas encore eu l'occasion de vérifier dans les partitions.
Oui, dans les partitions, c'est assez spectaculaire, les récitatifs changent de mesure tout le temps dès LULLY. Ensuite, je doute que l'exécution en soit voulue aussi exacte que tu le dis : les mêmes libertés s'y appliquent, même s'il notait bien plus précisément ce qu'il voulait que les déliges pénibles de croches du seria. - Citation :
- J'ai deux interprétations d'une pièce pour clavecin de Duphly. Déjà, je n'entend pas les mêmes notes, et les interprétations sont différentes, mais ce n'est pas n'importe quoi : il y a des règles de jeu d'une part et une signification d'autre part qui font que les deux interprétations fonctionnent, que j'y entend un "jeu" musical.
Tu pourrais préciser ? J'ai toujours entendu les mêmes notes dans Duphly, qui est écrit précisément… la littérature solo n'est pas censée contenir beaucoup d'ajustements, et particulièrement à cette date. Quelles interprétations, quelles différentes, ça m'intéresse. |
| | | Dadamax Mélomane averti
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| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 25 Nov 2015 - 17:16 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Mais des partitions délibérément écrites comme lacunaires, ça me paraît étrange
Et beh, ça m'étonne que tu n'aie jamais entendu parler de ça... Comme je l'ai suggéré plus haut, il semble que ce soit un principe général de la musique à cette époque. Je vais essayer de l'esquisser avec les souvenirs qui me viennent. D'après Lionel De La Laurencie, Lully a du se battre avec son orchestre de violons afin que les musiciens cessent d'improviser sur sa musique. La rigueur qui s'en est suivie, ainsi que la grande taille de cet orchestre, étaient une nouveauté et une exception à l'époque. Tout comme l'orchestration (relative ou pas?) de l'Orfeo par Monteverdi est une autre exception. Ici : /watch?v=5onQReth8BY , à 2mn, René Jacobs en touche un mot, mais j'ignore si quelqu'un ne dit pas ça, de William Christie à Harnoncourt et les autres, jusqu'à Romain Rolland, qui admirait que le génie de Cavalli puisse s'exprimer sur deux lignes. Jouer selon les règles dites de la basse continue n'était pas seulement un moyen de pallier aux difficultés de l'imprimerie musicale naissante mais une manière de faire de la musique. Tout ça existe encore au XVIIIème, par exemple jusque dans la partie de continuo chez Mozart pour Cosi Fan Tutte, partie qui ne présente que les harmonies, pas parce-que la partie a été perdue mais parce-qu'elle n'a vraissemblablement jamais existée, parce-que c'était la coutume à l'époque de laisser des blancs dans la partition et que tout musicien savait comment les remplir. C'est Rossini je crois qui en a eu marre que des chanteurs rendent sa musique méconnaissable par leurs vocalises et écrivit lui-même celles-ci en demandant qu'on ne chante plus que les notes écrites. Au sujet l'écriture "lacunaire" au XVIIIème, voici deux extraits du livre de Harnoncourt : "Léopold Mozart écrit déjà dans son "école de violon" publiée en 1756, mais qui regarde cependant à bien des égards vers l'avenir, que les appoggiatures sont utilisées pour rendre intéressant un chant, une mélodie et pour l'épicer de dissonnances. Pas un paysan, dit-il, ne chanterait une simple chanson paysanne sans appoggiatures, et il donne comme exemple une mélodie, avec les appoggiatures que "tout paysan chanterait". Je l'ai soumise à quelques musiciens, qui n'étaient pas des paysans, mais des musiciens professionnels diplômés – et aucun d'entre eux n'y a ajouté ces appoggiatures. On voit donc que le paysan de l'époque de Mozart était plus musicien que le musicien de notre temps. (Ou du moins que des évidences d'autrefois peuvent être tout à fait étrangères à l'heure actuelle.)" [...] "Les traités du XVIIIème qui parlent des appoggiatures disent qu'il est très difficile de les exécuter correctement, en particulier lorsqu'elles ne se trouvent pas au dessus des notes principales sous forme de petites notes mais qu'elles sont écrites comme des notes normales; il pourrait arriver que l'on ne reconnaisse pas l'appoggiature et que l'on y ajoute encore une appoggiature." [...] "Léopold Mozart estime que seuls des "musiciens idiots" feraient une chose pareille. Le fait de ne pas reconnaître les appoggiatures conduit à une réaction en chaîne de fautes dans l'interprétation. Il est difficile de s'imaginer comment une oeuvre classique sonne différemment suivant que les appoggiatures sont identifiées et jouées en tant que telles ou non. Le caractère de la pièce peut s'en trouver totalement modifié." En effet, ces notes ont un statut particulier, variable selon le contexte musical, qui implique ici des liasons, là des sections, ailleurs des appuis (appoggiature veut dire appuyer en italien), improvisations, etc... On m'a raconté qu'un musicien qui écoutait jouer Jean Sébastien Bach a écrit ce qu'il a entendu, qu'on a retrouvé ce papier et quand on compare avec la partition originale, il y a plein de notes en plus, de réelles mélodies ajoutées... Dans les Fantaisies pour clavecin de Telemann, chaque fantaisie de la première douzaine et de la 3ème sont construites en deux parties, avec répétition de chaque première partie. Ces répétitions donnent l'occasion à l'instrumentiste d'inventer lui-même ses ornements, ses variations mélodiques ou au choix, à l'endroit des appoggiatures. Un signe revient presque à chaque mesure dans la littérature baroque française. C'est : x. Ce signe veut dire : faite quelque chose ! C'est l'unique appoggiature employée et, selon le contexte, on peut jouer un trille, un mordant, un mordant en battant avec la note supérieure, une appoggiature simple du genre dissonance, une petite mélodie, un gruppetto, une improvisation... William Christie disait à des chanteurs que « les appoggiatures, c'est votre grammaire » ou quelque chose de similaire. C'est aussi la ponctuation, ou le rythme (chez Purcell mes partitions ne disent pas « trille » mais « beat », « shake », ou roulement...). Quand François Couperin demande un trille d'une main et un mordant de l'autre, ça sonne clairement comme un roulement de tambour. Couperin se plaignait que les compositeurs français n'écrivaient pas les temps comme il fallait les jouer mais selon un code particulier. Il trouvait que les italiens étaient plus précis à ce niveau. Il s'agissait en particulier des "notes inégales", et plus généralement toutes les notes pointées (notées ou pas), dont la durée du point dépendait du fameux "bon goût" de l’interprète, et du caractère de la pièce, du contexte. C'en est à tel point que, de temps en temps, un compositeur français de cette époque précise qu'une suite de noires ou croches ne doit pas être jouée en notes inégales (légèrement pointées) : soit il donne cette indication en toutes lettres en début du morceau, soit il a ajouté ce qui est aujourd'hui le signe du piqué, un point, au dessus de chaque note qu'il souhaite entendre "égale". Après évidemment, toutes ces règles sont à reconsidérer au cas par cas, selon chaque musique, selon l'envie de l'interprète, ses idées... Il vaut mieux n'en respecter aucune mais faire quelque chose de musical que les respecter toute mais sèchement, sans plaisir. Par contre, ces règles peuvent donner des idées... - DavidLeMarrec a écrit:
-
- Citation :
- J'ai deux interprétations d'une pièce pour clavecin de Duphly. Déjà, je n'entend pas les mêmes notes, et les interprétations sont différentes, mais ce n'est pas n'importe quoi : il y a des règles de jeu d'une part et une signification d'autre part qui font que les deux interprétations fonctionnent, que j'y entend un "jeu" musical.
Tu pourrais préciser ? J'ai toujours entendu les mêmes notes dans Duphly, qui est écrit précisément… la littérature solo n'est pas censée contenir beaucoup d'ajustements, et particulièrement à cette date. Quelles interprétations, quelles différentes, ça m'intéresse. La claveciniste Brigitte Tramier a enregistré un excellent disque de Duphly. Il y a, d'un autre côté, l'intégrale que je trouve remarquablement bien jouée par Pieter Jan Belder. Chacun joue La forqueray très différemment mais les deux versions me plaisent. Mais, pour le rajout de notes, je te conseille d'écouter La De Drummond par Brigitte Tramier, avec sous les yeux une partition (moderne) réalisée sur le site : http://jacques.duphly.free.fr/quatriemelivre.html où le choix des appoggiatures me semble particulièrement bien composé. La même expérience est très agréable avec le disque d'Armand Louis Couperin par Jennifer S. Paul au clavecin (les partitions sont ici : http://imslp.org/wiki/Category:Couperin,_Armand-Louis) Ce que je trouve super, c'est de travailler quelques morceaux et ensuite d'écouter le disque... |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
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| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 25 Nov 2015 - 17:48 | |
| - Dadamax a écrit:
- Et beh, ça m'étonne que tu n'aie jamais entendu parler de ça... Comme je l'ai suggéré plus haut, il semble que ce soit un principe général de la musique à cette époque.
Un principe fréquent dans les partitions qui nous sont parvenues, certes, mais les parties étaient écrites par le compositeur au départ, pas écrites par n'importe qui (ça n'a pas de sens, d'ailleurs, il faut bien les écrire une première fois pour les jouer). - Citation :
- D'après Lionel De La Laurencie, Lully a du se battre avec son orchestre de violons afin que les musiciens cessent d'improviser sur sa musique. La rigueur qui s'en est suivie, ainsi que la grande taille de cet orchestre, étaient une nouveauté et une exception à l'époque.
C'est une chose différente. L'écriture des parties intermédiaires ne peut pas s'improviser, puisque par définition le contrepoint nécessite une vision d'ensemble (sinon on fait plein de fautes !). Ton épisode parle plutôt de l'inclusion de diminutions (ce qu'on appelait ornements) ; effectivement, chez LULLY, même les agréments sont notés (néanmoins, vu la variété qui existait, je doute qu'on se soit limité lors des représentations à une poignée de tremblements notés). Ce n'est pas la même chose que des parties intermédiaires délibérément lacunaires. - Citation :
- Tout comme l'orchestration (relative ou pas?) de l'Orfeo par Monteverdi est une autre exception.
On dispose d'un instrumentarium de création, mais pas de l'orchestration pour l' Orfeo. Je ne crois même pas que la liste dont on dispose ait été notée par Monteverdi lui-même, en tout cas elle n'a rien d'obligatoire. - Citation :
- Ici : /watch?v=5onQReth8BY , à 2mn, René Jacobs en touche un mot, mais j'ignore si quelqu'un ne dit pas ça, de William Christie à Harnoncourt et les autres, jusqu'à Romain Rolland, qui admirait que le génie de Cavalli puisse s'exprimer sur deux lignes.
Jacobs explique que tout ne figure pas sur la partition, ce qui est vrai – et il parle surtout de la basse, d'ailleurs. Ça ne veut pas dire que le compositeur ait fait exprès d'ôter les parties. Tu cites Cavalli et ses deux lignes. C'est vrai pour les récitatifs, mais les ensembles ou les ritournelles, comme pour l'Orfeo, sont écrites en entier. Voici un extrait du I de La Didone où ça se voit très bien (ritournelle puis récitatif). - Citation :
- Jouer selon les règles dites de la basse continue n'était pas seulement un moyen de pallier aux difficultés de l'imprimerie musicale naissante mais une manière de faire de la musique.
Oui, bien sûr, la basse continue est allusive, c'est son principe (il y a même de nombreux cas où l'on peut choisir l'harmonie, en l'absence de chiffrage). Je parlais vraiment des parties intermédiaire, il me semble que tu y faisais allusion dans ton message. Sinon, bien sûr, la réalisation de la basse et les agréments et ornements divers sur le chant ne sont pas écrits, c'est le principe de base de l'interprétation de l'époque (même chose pour les exceptions rythmiques que tu indiquais, surpointé, inégalité…). - Citation :
- C'est Rossini je crois qui en a eu marre que des chanteurs rendent sa musique méconnaissable par leurs vocalises et écrivit lui-même celles-ci en demandant qu'on ne chante plus que les notes écrites.
Oui, le tournant se situe à ce moment (est-ce Rossini lui-même, je ne peux pas le certifier, mais dans les partitions que j'ai lues, ça correspond). - Citation :
- "Léopold Mozart écrit déjà dans son "école de violon" publiée en 1756, mais qui regarde cependant à bien des égards vers l'avenir, que les appoggiatures sont utilisées pour rendre intéressant un chant, une mélodie et pour l'épicer de dissonnances. Pas un paysan, dit-il, ne chanterait une simple chanson paysanne sans appoggiatures, et il donne comme exemple une mélodie, avec les appoggiatures que "tout paysan chanterait". Je l'ai soumise à quelques musiciens, qui n'étaient pas des paysans, mais des musiciens professionnels diplômés – et aucun d'entre eux n'y a ajouté ces appoggiatures. On voit donc que le paysan de l'époque de Mozart était plus musicien que le musicien de notre temps. (Ou du moins que des évidences d'autrefois peuvent être tout à fait étrangères à l'heure actuelle.)"
[...] "Les traités du XVIIIème qui parlent des appoggiatures disent qu'il est très difficile de les exécuter correctement, en particulier lorsqu'elles ne se trouvent pas au dessus des notes principales sous forme de petites notes mais qu'elles sont écrites comme des notes normales; il pourrait arriver que l'on ne reconnaisse pas l'appoggiature et que l'on y ajoute encore une appoggiature." [...] "Léopold Mozart estime que seuls des "musiciens idiots" feraient une chose pareille. Le fait de ne pas reconnaître les appoggiatures conduit à une réaction en chaîne de fautes dans l'interprétation. Il est difficile de s'imaginer comment une oeuvre classique sonne différemment suivant que les appoggiatures sont identifiées et jouées en tant que telles ou non. Le caractère de la pièce peut s'en trouver totalement modifié." D'accord, mais je ne vois pas le rapport avec ma question. Je ne contestais pas du tout la présence de sous-entendus dans les partitions baroques, qui sont un canevas dont les interprétes sont co-créateurs (et au premier chef desquels les continuistes !). Ce qui m'intriguait, c'était cette affirmation précise : - Citation :
- Il y a des opéras baroques écrits sur une ou deux lignes pour l'orchestre : les exécutants étaient censés écrire eux-mêmes les parties intermédiaires, comme l'attestent les parties d'orchestre d'époque qu'on a retrouvées
Je ne crois pas que les exécutants rédigent dans leur coin les parties manquantes (ce qui serait d'ailleurs impossible concrètement), j'ai toujours lu que c'était fait d'emblée par le compositeur (parfois son élève / secrétaire), et si nous n'en disposons pas toujours, c'est parce que nous n'avons reçu que des réductions. En France, Ballard publiait aussi bien les versions intégrales avec toutes les parties que des versions réduites avec seulement chant et basse, pour usage plus personnel. Ça ne veut pas dire que chaque ville qui programmait Atys était censée récrire les parties, et que chaque haute-contre de violon devait sortir son crayon pour composer sa ligne. En tout cas, je n'ai jamais rien lu qui me le suggère. D'où ma question : est-ce que tu aurais des cas concrets ? - Citation :
- Un signe revient presque à chaque mesure dans la littérature baroque française. C'est : x. Ce signe veut dire : faite quelque chose ! C'est l'unique appoggiature employée et, selon le contexte, on peut jouer un trille, un mordant, un mordant en battant avec la note supérieure, une appoggiature simple du genre dissonance, une petite mélodie, un gruppetto, une improvisation...
C'est un +, en fait. Déformation du t pour tremblement. Il existe des signes spécifiques en France pour chaque type d'agrément, même si on trouve effectivement très massivement, dans la musique vocale et d'orchestre, le seul +. En revanche, les clavecinistes utilisent toute la gamme de la symbolique disponible (avec même le nombre de battements demandés). - Citation :
- Mais, pour le rajout de notes, je te conseille d'écouter La De Drummond par Brigitte Tramier, avec sous les yeux une partition (moderne) réalisée sur le site : http://jacques.duphly.free.fr/quatriemelivre.html où le choix des appoggiatures me semble particulièrement bien composé.
La même expérience est très agréable avec le disque d'Armand Louis Couperin par Jennifer S. Paul au clavecin (les partitions sont ici : http://imslp.org/wiki/Category:Couperin,_Armand-Louis) Ce que je trouve super, c'est de travailler quelques morceaux et ensuite d'écouter le disque... Merci, je vais regarder ça. |
| | | Alifie Googlemaniac
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| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 25 Nov 2015 - 19:09 | |
| - Jof a écrit:
- Je me greffe au milieu d'une intéressante conversation, mais simplement pour demander si quelqu'un sait quand on a commencé à trafiquer les enregistrements et faire du collage de différentes prises ?
Personne ne t'ayant encore répondu pour l'instant, je risque un avis non autorisé, donc sans doute approximatif : pour le montage lui-même, très certainement dès l'apparition de la bande magnétique (avant-guerre, mais pas nécessairement à des fins musicales), pour le bidouillage sonore, à partir des années 50 (Henry, Schaeffer et le futur GRM chez nous), pour le mixage de différentes prises, très probablement avec l'apparition des premiers véritables multipistes, au début des années 60, mais j'imagine à peu près uniquement pour la musique de variétés (en jazz, le grand spécialiste du collage a été dans les années 70 Teo Macero, le producteur de Miles Davis chez Columbia). Pour le classique, hormis le contemporain et la musique électro-acoustique, je suppose, mais je me trompe peut-être, que c'est plus tardif. |
| | | Jof Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3541 Date d'inscription : 02/05/2014
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 25 Nov 2015 - 19:19 | |
| Merci de ta réponse. Je me rappelle d'une version du Concerto et de la Rhapsodie in blue de Gershwin par Jérôme Lewenthal et un orchestre américain où tous les solos du piano sont enregistrés séparément (ça s'entend beaucoup, je crois même que ça passe de stéréo à mono, mais pas sûr), et je vois que ça date de 1967. C'était chez le label Vanguard, je ne sais pas du tout s'ils étaient à la pointe de la technologie. Je me demandais ça parce que ça remet pas mal de choses en question : aujourd'hui, on peut enregistrer tout un morceau en faisant un bout par semaine si on veut. Avant que cette technique se généralise (je suppose qu'elle est plus ou moins pratiquée chez tout le monde maintenant ?), les interprètes avaient à tout jouer d'un bout à l'autre, comme au concert... |
| | | xoph Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5517 Age : 65 Localisation : là Date d'inscription : 12/10/2011
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 25 Nov 2015 - 22:47 | |
| - Alifie a écrit:
- Jof a écrit:
- Je me greffe au milieu d'une intéressante conversation, mais simplement pour demander si quelqu'un sait quand on a commencé à trafiquer les enregistrements et faire du collage de différentes prises ?
...Pour le classique, hormis le contemporain et la musique électro-acoustique, je suppose, mais je me trompe peut-être, que c'est plus tardif. On trouve dans le livre de Geoffrey Payzant -un homme du futur- sur Gould un chapitre intitulé "où tricher c'est créer" avec quelques citations de Gould datant des années 60 sur le montage. C'est un thème sur lequel Glenn Gould revient de façon récurrente (et qui va de pair avec le fait de délaisser le concert) "Le montage ne nuit pas à la ligne générale; bien au contraire le montage crée la bonne ligne et peu importe qu'on ait utilisé des collures (sic *) toutes les deux secondes ou aucune pendant une heure, du moment que le résultat paraît être un tout cohérent" Gould ou encore "L'idée qu'on trouve frauduleux d'obtenir une interprétation idéale par les moyens mécaniques du montage m'exaspère. Si l'interprétation idéale nécessite qu'on amoncelle illusions et trucages, eh bien soit! allons-y" Gould * http://www.cnrtl.fr/definition/collure
Dernière édition par xoph le Jeu 26 Nov 2015 - 1:32, édité 1 fois |
| | | Alifie Googlemaniac
Nombre de messages : 19640 Date d'inscription : 29/01/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 25 Nov 2015 - 23:03 | |
| Oui, ça semble plus que logique que Gould se soit saisi de cette possibilité. Dans mon tour d'horizon au débotté, n'ayant pas spécialement de lumière sur la question, j'ai oublié pour la pop et le rock, les Beatles, dès les années 60, et Zappa (un coup à se faire par Picro et arnaud). En jazz, on peut ajouter Roland Kirk, dans un esprit proche de celui de Frank Zappa, dans ses disques des années 70. |
| | | Dadamax Mélomane averti
Nombre de messages : 271 Age : 50 Localisation : Provence Date d'inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 26 Nov 2015 - 14:10 | |
| David, tu me mitiges un peu... je suis nuage gris... Mon affirmation qui t'intrigue, je l'ai lue chez Harnoncourt. Hélas, bien que son livre soit aisé à lire car il y a peu de notes de bas de page – mais je préfère le contraire personnellement- il manque du coup un peu des références précises. Là en tous cas... mais l'idée me paraissait tellement cohérente que je n'ai pas cherché plus loin. Par exemple il me revient que René Jacobs affirmait dans une autre interview que les musiciens d'une autre époque étaient capable d'écrire, voir d'improviser leur partie à partir d'un canevas, qu'il espérait que ça puisse revenir un jour mais qu'en attendant il écrivait les parties de chacun. Harnoncourt dit que parfois les parties en haut et en bas étaient prévues mais pas les parties au milieu. J'ignore comment ils s'y prenaient mais ça ne donne quand même pas 36 solutions il me semble, si on veut respecter l'harmonie et pas cacher la mélodie... Les règles du contrepoint sont, elles, très rigoureuses, mais elles sont relatives et me semblent beaucoup plus raides au XIXème ou chez Bach que chez d'autres compositeurs baroques ou même au XVIème. C'est sûr qu'un passage particulièrement contrapuntique, comme les voix qui accompagnent Poséidon dans Elena de Cavalli, est écrit d'emblé. Par contre, je ne vois pas pourquoi les copistes de l'époque se seraient donné le mal d'écrire tout un opéra sur quelques lignes si ce n'était pour que l'opéra soit joué en public, plutôt que l'usage personnel que tu suggères, que j'appliquerais plutôt à la musique de chambre, à des airs isolés, ou des cantates. Pour la France baroque c'est un peu particulier vu les grands effectifs de Louis XIV mais pour un opéra créé à Venise puis repris à Naples ou ailleurs, j'imaginais que l'on adaptait l'orchestration à l'effectif local. Tu as raison : c'est + et pas x, le signe dans les partitions baroques françaises. Le site sur Jacques Duphly proposait il y a quelques années les partitions originales des 4 livres de clavecins. J'en avais téléchargé et ce signe est l'unique signe d'appoggiature que j'y aie lu. Un détail : je suis assez ignorant en basse continue et j'avais compris que quand il n'y avait pas de chiffre, cela voulait dire que l'accord était en position fondamentale, en accord de quinte. Je sais que c'est un travail énorme d'apprendre la basse chiffrée mais j'imagine que même en connaître un peu doit être bénéfique pour pratiquer la musique. - Jof a écrit:
- Je me demandais ça parce que ça remet pas mal de choses en question : aujourd'hui, on peut enregistrer tout un morceau en faisant un bout par semaine si on veut. Avant que cette technique se généralise (je suppose qu'elle est plus ou moins pratiquée chez tout le monde maintenant ?), les interprètes avaient à tout jouer d'un bout à l'autre, comme au concert...
Une personne qui m'avait vendu un piano numérique m'avait fait écouter un morceau de son groupe de musique : la musique me déplaisait totalement et j’y ai entendu la voix la plus cagneuse qui soit... mais sans fausse note. Un peu gêné, je me raccroche à ce détail et, quand il me demande mon avis, je dis « elle chante bien juste la chanteuse » (car il faut reconnaître les qualités là où il y en a), ce à quoi il me répond « Ah non, là on a tout repris à l'ordinateur mais au départ tout le chant est faux »... Ceci dit, contrairement à ce que pense Gould, je trouve qu'on s'abuse sur les possibilités du bidouillage. Ça permet d'avoir moins de fausses notes et c'est plus propre mais il n'y a qu'à comparer un enregistrement de concert et un studio pour entendre que très souvent le studio n'est que l'ombre de la magie du concert. Malgré la technologie dont on dispose, il y a des musiciens qui préfèrent enregistrer en direct, ou même devant un petit public, ou simplement après une tournée de concerts pour que les souvenirs en reviennent dans l'enregistrement. Ce qui est bien c'est autre chose je trouve. L'autre jour j'ai réécouté une cassette de démos, que j'avais faites sur un 4 pistes à cassette quand j'avais 23 ans. Outre que j'aime toujours les idées (les idées qui viennent par hasard et du cœur sont les meilleures pour moi), je suis content que mes souvenirs soient de la musique. Sinon pour faire des essais c'est bien mais autrement ce que je trouve le plus intéressant dans un enregistrement c'est qu'il capture un moment. Pour ma part, je sais que très tôt je me suis débrouillé pour ne pas faire de quatrième prise pour enregistrer quelque chose, parce-que j'ai vu que ça ne servait qu'à mettre cette prise à la poubelle... Après, si des musiciens sont inspirés du matin jusqu'au soir, tant mieux pour eux mais je ne crois pas en connaître. |
| | | xoph Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5517 Age : 65 Localisation : là Date d'inscription : 12/10/2011
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 26 Nov 2015 - 22:00 | |
| - Dadamax a écrit:
Ceci dit, contrairement à ce que pense Gould, je trouve qu'on s'abuse sur les possibilités du bidouillage. Ça permet d'avoir moins de fausses notes et c'est plus propre mais il n'y a qu'à comparer un enregistrement de concert et un studio pour entendre que très souvent le studio n'est que l'ombre de la magie du concert.... Je crois bien que c'est une des questions. Tu comprends le bidouillage comme une rectification de ce qui est erroné, alors qu'on peut le penser comme une construction (dans un sens classique, c'est d'ailleurs ce que dit Gould: "vers un tout cohérent"), ou comme un mode d'invention (Gould est par rapport à ça en retrait, et pas tellement un homme du futur ou même proche de ses contemporains aventureux). Ces collures sont pourtant pratiquées à cette fin par les surréalistes, dont Max Ernst (qui pourrait te toucher si j'en crois ton dadamax), puis le cut up de Gysin, mais là je ne crois pas que ce soit le propos de Gould. Par contre penser que l'émotion ne se fait pas sans construction: oui. Et les artifices sont nombreux dans tous les cas (en concert ou pas), donc autant les considérer et les "travailler", et peut-être y faire surgir un peu de magie
Dernière édition par xoph le Jeu 26 Nov 2015 - 22:35, édité 1 fois |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97256 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 26 Nov 2015 - 22:32 | |
| - Dadamax a écrit:
- Par exemple il me revient que René Jacobs affirmait dans une autre interview que les musiciens d'une autre époque étaient capable d'écrire, voir d'improviser leur partie à partir d'un canevas, qu'il espérait que ça puisse revenir un jour mais qu'en attendant il écrivait les parties de chacun.
C'est encore autre chose : improviser, bien sûr, mais des ornements mélodiques ou une réalisation de basse, pas des parties intermédiaires. Et surtout, si la plupart des musiciens pouvaient écrire leurs parties, ça ne se fait évidemment pas au débotté pendant le concert ! On en revient toujours à la même histoire : il faut bien que le compositeur les écrive (ou les fasse précisément écrire par un assistant) pour les premières représentations ! Qu'ensuite, lorsqu'elles ne sont pas transmises, à l'époque ou aujourd'hui, d'autres puissent les compléter, bien sûr. - Citation :
- Harnoncourt dit que parfois les parties en haut et en bas étaient prévues mais pas les parties au milieu. J'ignore comment ils s'y prenaient mais ça ne donne quand même pas 36 solutions il me semble, si on veut respecter l'harmonie et pas cacher la mélodie...
Ça peut se récrire sans changer trop de choses, oui (encore que, il y a vraiment de très belles mélodies secondaires dans le répertoire français, qui n'est pas une « écriture-clavier » comme en Italie), mais ça ne peut pas s'improviser (sinon on risque par exemple de doubler involontairement des notes faibles ou proscrites). - Citation :
- Par contre, je ne vois pas pourquoi les copistes de l'époque se seraient donné le mal d'écrire tout un opéra sur quelques lignes si ce n'était pour que l'opéra soit joué en public, plutôt que l'usage personnel que tu suggères, que j'appliquerais plutôt à la musique de chambre, à des airs isolés, ou des cantates.
Mais pour la musique de chambre et les cantates, il n'y a rien de plus à écrire, il n'y a pas de parties intermédiaires ! - Citation :
- Pour la France baroque c'est un peu particulier vu les grands effectifs de Louis XIV mais pour un opéra créé à Venise puis repris à Naples ou ailleurs, j'imaginais que l'on adaptait l'orchestration à l'effectif local.
Bien sûr ! Et les parties pouvaient être récrites à l'occasion. Il n'empêche que ce n'étaient pas les musiciens qui les écrivaient pour les premières représentations, me semble-t-il (sauf basse, évidemment). - Citation :
- Tu as raison : c'est + et pas x, le signe dans les partitions baroques françaises. Le site sur Jacques Duphly proposait il y a quelques années les partitions originales des 4 livres de clavecins. J'en avais téléchargé et ce signe est l'unique signe d'appoggiature que j'y aie lu.
Dans ce cas, lis du Couperin. Ou même Jacquet de La Guerre. Mais oui, chez beaucoup d'auteurs, il y a peu de variantes. - Citation :
- Un détail : je suis assez ignorant en basse continue et j'avais compris que quand il n'y avait pas de chiffre, cela voulait dire que l'accord était en position fondamentale, en accord de quinte.
Ça, c'est de la théorie. En pratique, peu de partitions sont chiffrées, déjà. Ensuite, pour celles qui le sont, ce sont essentielleent les moments ambigus qui le sont. Beaucoup d'accords de sixte évidents ne sont pas précisés, même dans les partitions qui incluent par ailleurs des chiffrages. C'est une béquille, mais pas du tout une équivalence rigoureuse comme le serait une étude harmonique. Dans certains cas (basse seule au début d'une pièce, par exemple), il y a donc plusieurs choix possibles, même si la couleur du morceau et les conventions générales du style permettent en général de faire des déductions faciles. - Citation :
- Je sais que c'est un travail énorme d'apprendre la basse chiffrée mais j'imagine que même en connaître un peu doit être bénéfique pour pratiquer la musique.
Ce n'est vraiment pas compliqué dès qu'on a des notions minimales d'harmonie, vraiment. En plus le nombre de tonalités est limité et les enchaînements assez peu nombreux, on a vite fait de trouver des repères. C'est pour faire de jolis contrechants, s'adapter aux différents styles que ça devient plus complexe. |
| | | Dadamax Mélomane averti
Nombre de messages : 271 Age : 50 Localisation : Provence Date d'inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 1 Déc 2015 - 12:05 | |
| Je reviens sur des sujets abordés plus haut, sans réelle source précise mais avec deux extraits, de propos de René Jacobs et d'un article de Denis Morrier, parus en avril 1995, à propos de l'opéra vénitien au XVIIème siècle :
Denis Morrier :
"Les musicologues (et en particulier Denis Arnold dans un article du Musical Times paru en 1963) ont révélé la constitution exacte des orchestres employés dans les théâtres de la Sérénissime République : les livres de comptes du Théâtre San Cassiano indiquent que dix instrumentistes seulement étaient le plus souvent requis dans les années 1640-1650 – deux violons, deux basses d'archet (viole et/ou violoncelle), une violetta (viole), deux théorbes et pas moins de trois musiciens pour les claviers (clavecin et/ou orgue). Toutefois, il faut rappeler que de riches orchestres de cérémonies ont pu être employés lors de représentations de cour par exemple. Les compositeurs du XVIIème siècle ne pouvaient guère imaginer une image sonore définitive pour leurs compositions : en témoignent les diverses copies d'une même partition qui, bien souvent, diffèrent les unes des autres. L'examen de la discographie des opéras vénitiens révèle une semblable dichotomie : on pourrait opposer les interprètes soucieux de respecter le plus scrupuleusement possible les versions originales et qui font référence dans leurs choix orchestraux aux ensembles réduits employés dans les théâtres vénitiens (tels Alan Curtis, Richard Hickox, ou encore Jean Claude Malgoire) à ceux que l'on pourrait qualifier d'interprètes-arrangeurs (tels René Jacobs et Nikolaus Harnoncourt, mais également les "pionniers symphonistes" que furent Goehr, Ewerhart et même Raymond Lepard). Ceux-ci considèrent les sources comme une codification non définitive, susceptible d'être remaniées en fonction des moyens spécifiques offerts par une production ponctuelle, à la manière des reprises effectuées au XVIIème siècle par des commanditaires plus "riches" que les impresarii vénitiens. Ainsi chacune des réalisations de rené Jacobs révèle ce même parti pris : il "arrange" les oeuvres (ainsi que Harnoncourt le justifie dans son livre Le Dialogue musical au chapitre "Oeuvre et arrangement") pour un orchestre fastueux avec cordes, vents (flûtes, cornets à bouquins, saqueboutes, doulcianes) et continuo foisonnant. Sa réalisation du Retour d'Ulysse mérite de figurer au sommet de la discographie, aux côtés des deux enregistrements de Nikolaus Harnoncourt. Chez ces interprètes, un important travail de réécriture peut être mis en évidence : outre l'ajout de nombreuses ritournelles et sinfonie empruntées aux compositions de Monteverdi et de plusieurs de ses contemporains, on remarque la composition de nouvelles parties orchestrales d'accompagnement pour diverses sections d'air, voir de récitatif; et même, chez Jacobs, la recomposition de tirades et de scènes entières (des scènes chorales, le plus souvent) qui figuraient dans le livret publié mais non dans la partition manuscrite. Ces ajouts séduisants ont pour contrepartie quelques coupures opérées ça et là pour cause "d'efficacité dramatique". Pour cette raison, la première version de Nikolaus Harnoncourt (enregistrée en 1971), la seule exempte de toute coupure, constitue un document irremplacé. Pour ce qui est du traitement vocal, on remarque de fréquents recours aux transpositions, tant chez Jacobs que chez Harnoncourt, suivant, là encore, un usage hérité du XVIIème siècle : en effet, les indications de transposition abondent dans les sources, et souvent diffèrent d'un manuscrit à l'autre d'une même oeuvre."
René Jacobs :
"Mon approche est fondée sur l'hypothèse (pour le moment, on ne peut rien certifier) que, aux tout débuts de l'opéra, les violons improvisaient en accord avec le compositeur, qui était toujours là. Puis, peu à peu, de plus en plus de détails ont dû être notés, mais pas nécessairement dans la partition générale : sur des feuilles volantes, des carte, qui appartenaient aux instrumentistes – on a retrouvé quelques unes de ces carte, mais la plupart se sont naturellement perdues. Il était d'usage, au début du XVIIème siècle, que violons jouent "sopra il basso" : en lisant la basse et la ligne de chant, ils pouvaient improviser des ornements assez complexes."
Il y avait peut-être moins de différence entre les compositeurs et les interprètes - au moins pour les continuistes... Quand Mazzarin demande à un romain, par lettre, quels sont les meilleurs musiciens en Italie, la réponse donne deux noms : un compositeur et un continuiste (harpiste). Je pense aussi aux castrats, dont la formation incluait la composition. Et à une chanson de Monterverdi, Si dolce è il tormento, qu'il me paraît dur d'interpréter sans variations, dans le chant et dans l'accompagnement, accompagnement pouvant inclure un ritornello, donc violon ou autre soliste... |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97256 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 1 Déc 2015 - 22:54 | |
| Tout cela est passionnant, mais vient plutôt conforter ce que je disais : les altérations sont permises, mais pas prévues par le compositeur en laissant des blancs, ce sont les interprètes qui choisissent ensuite de faire des modifications (ou de compléter des sources lacunaires). En tout cas, hors continuo, solistes et dessus, il n'y avait pas d'improvisation pendant l'exécution (pour les parties intermédiaires, donc) – improvisation toute relative de toute façon, vu qu'il y a des formules et des répétitions, si bien que c'est plutôt de la musique orale que réellement improvisée. (surtout avec Jacobs, qui écrit toutes les diminutions pour ses chanteurs, ce qui est un souci pas du tout authentique !) Merci pour ces références précises ! |
| | | Quart de tonne Néophyte
Nombre de messages : 15 Date d'inscription : 15/08/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mar 5 Jan 2016 - 16:03 | |
| Bonjour à tous. Je me demandais dernièrement quelles sont la ou les premières œuvres, dans l'histoire de la musique, construites autour d'un système harmonique moderne (c'est à dire un système qui pense l'organisation d'accords d'au moins trois notes) ? J'imagine qu'elles datent de la fin XVIème début XVIIème, vers les derniers temps de l'épopée polyphonique et au début de l'ère baroque, sans doute en Italie (ou en France) ? Mais je connais très mal cette période qui m'intéresse peu, alors si vous avez des lumières à m'apporter je suis preneur . Si vous n'êtes pas surs de vous, peut-être pouvez vous au moins m'indiquer quelles sont les œuvres ou les compositeurs les plus anciens que vous ayez entendu faire usage d'un tel système. ps: je précise que je ne fais pas ici référence à la théorie plus ou moins aboutie dont va accoucher Rameau dans son traité harmonique, mais bel et bien aux toutes premières œuvres et premiers compositeurs qui pensent une organisation d'accords (qui ne soient plus obtenus "accidentellement" par croisement des lignes polyphoniques) en faisant preuve d'une volonté résolue à produire une vraie musique harmonique (et non plus seulement contrapuntique) reposant sur l'accord en tant que cellule de base de sa conception. |
| | | Quart de tonne Néophyte
Nombre de messages : 15 Date d'inscription : 15/08/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 20 Jan 2016 - 22:06 | |
| Bon, ben faute de réponse je m'en vais poser une toute autre question.
Je m'adresse aux gros connaisseurs de musique baroque. Auriez vous remarqué, au cours du 17ème siècle, si la musique germanique a tendance à s'émanciper d'une éventuelle influence italienne ?
Je demande ça parce qu'au terme de la guerre de trente ans, le Saint Empire Romain-Germanique a perdu définitivement l'intégralité de tous ses territoires nord-italiens. Il ne serait donc pas illogique que l'influence culturelle italienne se fasse en net recul dès ce moment là dans ce qu'il reste de l'empire (à savoir les territoires germaniques). Et pas seulement au niveau musical d'ailleurs. |
| | | camillebarathieu Néophyte
Nombre de messages : 1 Date d'inscription : 25/02/2016
| Sujet: la fille au cheveux de lin de Debussy Jeu 25 Fév 2016 - 10:35 | |
| Bonjour, pourriez-vous me dire quel est la forme de la fille au cheveux de lin de Debussy? (exemple: ABAC...) Merci d'avance, Camille |
| | | Dadamax Mélomane averti
Nombre de messages : 271 Age : 50 Localisation : Provence Date d'inscription : 07/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Mer 2 Mar 2016 - 18:40 | |
| - Quart de tonne a écrit:
- Bonjour à tous.
Je me demandais dernièrement quelles sont la ou les premières œuvres, dans l'histoire de la musique, construites autour d'un système harmonique moderne (c'est à dire un système qui pense l'organisation d'accords d'au moins trois notes) ?
J'imagine qu'elles datent de la fin XVIème début XVIIème, vers les derniers temps de l'épopée polyphonique et au début de l'ère baroque, sans doute en Italie (ou en France) ? Mais je connais très mal cette période qui m'intéresse peu, alors si vous avez des lumières à m'apporter je suis preneur .
Si vous n'êtes pas surs de vous, peut-être pouvez vous au moins m'indiquer quelles sont les œuvres ou les compositeurs les plus anciens que vous ayez entendu faire usage d'un tel système.
ps: je précise que je ne fais pas ici référence à la théorie plus ou moins aboutie dont va accoucher Rameau dans son traité harmonique, mais bel et bien aux toutes premières œuvres et premiers compositeurs qui pensent une organisation d'accords (qui ne soient plus obtenus "accidentellement" par croisement des lignes polyphoniques) en faisant preuve d'une volonté résolue à produire une vraie musique harmonique (et non plus seulement contrapuntique) reposant sur l'accord en tant que cellule de base de sa conception. Bonjour. Je tend à penser que la conception que tu proposes n'est pas une approche adéquate, malgré que ce soit le point de vue le plus partagé, notamment dans la littérature musicologique. Et je vais essayer de me justifier ici. Mais pour me faire pardonner je commence par donner ce qui me semble être un exemple de musique construite sur une base harmonique, et dont la partition date du Moyen Âge . Je connais très peu cette période mais j'aime beaucoup ce disque : "Músicas para la cámara de Isabel de Castilla" par l'ensemble Cinco Siglos et Delia Agvndez. On en trouve des extraits sur le site du groupe http://www.cincosiglos.es/discografia/renacimiento/373-musicas-para-la-camara-de-isabel-de-castilla.html "Mais quoi qu'il ait pu advenir aux tout premiers âges de la musique, il n'en reste pas moins évident que, pour notre musique actuelle, deux méthodes – l'une harmonique, l'autre polyphonique – sont, depuis quatre siècles au moins, demeurées, chacune à sa façon, également et puissament génératrices de développement. Il semble donc à peine pensable d'envisager la construction des accords en vertu d'un seul de ces deux principes en les présentant, ainsi que cela se fait la plupart du temps dans l'enseignement de l'harmonie, comme s'ils s'étaient développés eux-mêmes selon une fécondation spontannée, pas plus qu'il n'est raisonnable d'expliquer la polyphonie par une pure conduite des voix qui -dans le cadre de certaines limites seules fixées par le goût du moment – ne tiennent aucun compte (comme dans le contrepoint) de la rencontre des parties sur des accords. Je dirais plus justement que le développement de l'harmonie n'a pas été seulement profondément influencé par des principes mélodiques mais s'est trouvé souvent directement déterminé par eux, tout comme le développement de la conduite des voix a pu l'être aussi par des principes harmoniques. Si l'on ne considère que l'un ou l'autre de ces principes, on aboutira à des évènements qui ne se laissent pas intégrer dans leur système, d'où, ensuite, les multiples exceptions et les nombreux endroits où le professeur devra lever un interdit imprudemment proclamé et lui substituer bon gré mal gré une licence. Sans omettre les cas fréquents où le professeur sera contraint de dire sans pouvoir en apporter la moindre preuve : "C'est comme ça et pas autrement" et où l'élève devra prendre pour argent comptant ce qui lui sera imposé par le maître." (Arnold Schoenberg, Traité d'harmonie) Je pense que pour n'importe quel chanteur, toutes époques confondues, le seul moyen de chanter dans une polyphonie sans se rendre compte que les voix se rejoignent sur des intervalles et des accords, c'est d'être sourd! Je ne crois pas que les compositeurs et les auditeurs d'une époque se seraient privé de l'effet physique de la musique – même si cette tendance "graphologique" existe, à minima depuis 1945, et peut-être aussi dans la plupart des traités sur la musique. Et même si, pour la défense d'une musique contrapuntique abstraite, on peut penser que les chiffres avaient, semble-t-il, une importance mystique à la renaissance, j'ai cru comprendre que c'était dans une optique cosmologique, où justement il n'y a pas de barrières et où tout coïncide... donc je n'adhère pas à cette conception qui fait comme si le son n'existait pas. Il suffit d'entendre deux personnes simplement chanter à l'unisson pour se rendre compte qu'il se produit entre deux chants une interaction physique, qui change la nature même de ce qu'on ressent comparé à l'audition d'une voix seule. Je dis tout ça parce-que je lis un peu partout qu'il y aurait eu une époque pour la polyphonie et une autre pour l'harmonie. Ça ne me paraît pas cohérent, ne serait-ce compte tenu de la nature des sons, la manière dont ils se comportent. ? |
| | | Laocoon Néophyte
Nombre de messages : 2 Date d'inscription : 26/03/2016
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 14 Avr 2016 - 3:10 | |
| Bonjour, excusez-moi si je ne suis pas au bon endroit (ce topic m'a plutôt l'air de concerner les questions techniques ?), mais j'aimerais savoir si l'art ou/et la mythologie grecs ont été représentés dans la musique classique, et comment ? Si vous avez des écoutes à me proposer je suis preneur, je pense que je saurai mener mes recherches en amont de ce que vous aurez à me proposer, mais je ne trouve rien sur quoi me baser avec Google. Pour l'instant j'ai Offenbach et Charpentier sur le thème d'Orphée. |
| | | Xavier Père fondateur
Nombre de messages : 90768 Age : 42 Date d'inscription : 08/06/2005
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 14 Avr 2016 - 3:19 | |
| Pour Orphée, tu as aussi Monteverdi, Glück et Liszt. Sinon il y a aussi Idoménée chez Mozart, Elektra, Daphne, Hélène d'Egypte et l'Amour de Danae chez Strauss, Perséphone et Oedipus Rex chez Stravinsky, Déméter chez Szymanowski. Et pour revenir à Offenbach, la Belle Hélène. Ce sont ceux qui me viennent à l'esprit tout de suite, mais il y en a surement plein d'autres. |
| | | Emeryck Mélomane chevronné
Nombre de messages : 13513 Age : 25 Localisation : Karl-Marx-Stadt. Date d'inscription : 27/07/2012
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 14 Avr 2016 - 11:41 | |
| Il y a aussi Icare chez Henri Pousseur. |
| | | math Mélomane averti
Nombre de messages : 403 Localisation : Au nord du centre du sud de la France Date d'inscription : 13/09/2010
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 14 Avr 2016 - 13:08 | |
| ...et aussi Purcell, Haydn, Beethoven, Schubert, Berlioz, Saint-Saëns, Wolf, Debussy, Ravel, Pierné, Roussel, Satie, Martinu, sans parler des compositeurs actuels. Finalement, il est plus rapide de faire la liste des compositeurs qui n'ont jamais traité de sujet mythologique. |
| | | Roderick Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3456 Age : 49 Date d'inscription : 10/06/2013
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 14 Avr 2016 - 13:20 | |
| Et LULLY ! (Peri, Caccini, Landi, Schütz, Rossi à ajouter pour le mythe d'Orphée... tout ceci avant 1650 !) |
| | | luisa miller Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5647 Age : 923 Date d'inscription : 27/11/2008
| Sujet: Re: La question musicale du jour (3) Jeu 14 Avr 2016 - 13:56 | |
| Pour le mythe d'Orphée, les principaux compositeurs ont été cités.
Mais il y a aussi le mythe de Faust (Gounod, Berlioz, Meyerbeer, Schumann,Boïto ...).
De manière plus généraliste : Hyppolite et Aricie, Les boréades ont une floppée de divinités qui se font des coups bas en tous genres
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