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| | Évolution du niveau des musiciens à travers les âges | |
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+6draffin fadosolrélamisi Mélomaniac Nestor Diablotin DavidLeMarrec 10 participants | Auteur | Message |
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DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97763 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 11:59 | |
| Sujet mainte fois abordé ici, mais je ne crois pas qu'il ait reçu de fil spécifique. À la demande de Mélo, c'est chose faite. Mélomaniac :
- DavidLeMarrec a écrit:
Oui, le parallèle fonctionne vraiment bien : sans découvertes majeures nécessairement, mais la qualité de la pratique a vraiment augmenté, comme pour les sports où l'on a sans cesse repoussé les records. Rien qu'en regardant les critères les plus simples (justesse, notamment dans les pupitres intermédiaires comme l'alto ; célérité sans accrocs…), la différence est abyssale, même entre les plus grands orchestres d'autrefois et les bons orchestres d'aujourd'hui.
Pas envie de nous aventurer ici dans une digression, mais ce type de propos récurrents mériterait qu'on en discute dans un nouveau topic spécifique, qu'on réfléchisse vraiment à la question, et surtout exemple et preuve précis à l'appui. Outre que cette notion de progressisme m'agace (ça m'a tout l'air d'une idéologie), je ne saisis pas trop en quoi les musiciens d'y a soixante ans seraient plus gauches qu'aujourd'hui, ou que les chefs d'hier seraient laxistes. Mais je ne tomberai pas non plus dans le procès inverse du c'était mieux avant (pour rester dans le strict champ de la netteté d'exécution). Pourquoi les musiciens auraient-ils versé dans une considération sportive du toujours-plus-vite-toujours-plus-propre ? En quoi les musiciens d'hier étaient incapables (physiquement, psychologiquement ?) d'atteindre le niveau de performance que tu sembles leur trouver aujourd'hui ? Cela concerne-t-il tous les pupitres ? Ce serait lié aux progrès de la facture, à un meilleur apprentissage, à la logique des concours d'orchestre ? Pour en discuter, mieux vaudrait rester dans le répertoire de la symphonie classique-romantique, qui a eu le temps d'être digérée même au début du XX° siècle. Choisissons quelques oeuvres et comparons : je ne suis pas à l'affut de tout ce qui s'enregistre de nos jours, mais je pense pouvoir trouver chaque fois des interprétations anciennes qui présenteront le même niveau. Fin de la parenthèse.
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| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97763 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 12:00 | |
| Xavier :Pourquoi Liszt et Paganini étaient-ils les seuls capables de jouer leurs oeuvres à leur époque alors qu'aujourd'hui n'importe quel bon pianiste ou violoniste amateur arrive à les jouer? Pourquoi l'entrée de basson du Sacre paraissait-elle si difficile à réussir il y a un siècle alors que maintenant tous les bassonistes attrapent ce do aigü sans aucun problème? Pourquoi les athlètes font-ils tomber les records uns après les autres? Tout le monde court le 100m en moins de 10 secondes alors qu'avant c'était un exploit incroyable? Etc... Je ne dis pas que j'ai les réponses, mais le constat est facile à faire. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97763 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 12:20 | |
| Et maintenant, à moi : - Mélomaniac a écrit:
- Pas envie de nous aventurer ici dans une digression, mais ce type de propos récurrents mériterait qu'on en discute dans un nouveau topic spécifique, qu'on réfléchisse vraiment à la question, et surtout exemple et preuve précis à l'appui.
Avec plaisir. Idéologie ? – Domaines concernés - Citation :
- Outre que cette notion de progressisme m'agace (ça m'a tout l'air d'une idéologie), je ne saisis pas trop en quoi les musiciens d'y a soixante ans seraient plus gauches qu'aujourd'hui, ou que les chefs d'hier seraient laxistes. Mais je ne tomberai pas non plus dans le procès inverse du c'était mieux avant (pour rester dans le strict champ de la netteté d'exécution).
Oui, je me place dans le strict champ de la virtuosité individuelle : le reste est affaire de goût. Mais non, ce serait idéologiquement beaucoup plus confortable pour moi de me dire que c'était différent mais globalement aussi bien. Simplement, la réalité est plus cruelle. Ce n'est pas vrai dans tous les domaines, d'ailleurs : pour certains répertoires lyriques (en particulier les plus « physiques », comme Verdi ou Wagner), il est clair qu'on a perdu en technique, avec des voix beaucoup moins sonores et libres aujourd'hui. Lorsqu'on dit que le moindre troupier ferait une carrière de premier plan aujourd'hui, ce n'est pas forcément si exagéré (si on laisse de côté les questions de style, parce que ceux qui ont conservé ces qualités ne font pas, justement, des carrières de superstar – en France, Courtis a eu une superbe carrière, mais pas de « statut » starisé comme Pape ou Courjal, et Théruel est carrément resté confidentiel). En revanche, dans le lied, on a tellement gagné par rapport aux grandes voix impavides qu'on a documenté au disque – sans doute lié au fait que ce n'était pas les meilleurs spécialistes qui les enregistraient, mais même des poètes comme Lotte Lehmann ou Hans Hotter se révèlent très ennuyeux… (Certes, à la même époque, il y a Hüsch et DFD, mais ils ne représentent pas la majorité des témoignages.) Quelles causes ? - Citation :
- Pourquoi les musiciens auraient-ils versé dans une considération sportive du toujours-plus-vite-toujours-plus-propre ? En quoi les musiciens d'hier étaient incapables (physiquement, psychologiquement ?) d'atteindre le niveau de performance que tu sembles leur trouver aujourd'hui ?
Je me suis évidemment posé la question, mais je n'ai pas de réponse définitive à ça. Je me figure, tout simplement, qu'il y a une expérience acquise qui se transmet de génération en génération, et qui s'affine. Une sorte d' évolution musicale. À moi aussi, ça me paraît tout à fait contre-intuitif (la facture n'a guère évolué, la durée d'apprentissage est la même, et à la rigueur, la contrainte qui pouvait s'exercer sur les enfants autrefois expliquerait une différence entre hier et aujourd'hui, à rebours de ce qu'on observe), mais les observations sont là. - Citation :
- Cela concerne-t-il tous les pupitres ?
Certains plus que d'autres. Il suffit de voir le type de tempo extrême que peuvent soutenir désormais n'importe quelle section de cordes (ce qui était impossible ou imprécis autrefois). Quel orchestre institutionnel accepterait un pupitre dans cet état ? http://carnetsol.fr/css/index.php?2009/01/15/1114-comparaisons-violons-altos Et ça, c'était l'équivalent de l'Orchestre National de France aujourd'hui (orchestre de radio spécialisé dans l'accompagnement lyrique). On pourrait croire que la guerre et les persécutions des années 30-40 aurait fait baisser le niveau (et il paraît que ça a été vrai pendant quelques années), mais en réalité, si certains orchestres prestigieux ont effectivement eu un moment d'adaptation, leur niveau est globalement bien meilleur en 1950 qu'en 1920. Il y a peut-être aussi des effets de période – dans les années 70-80, peut-être parce qu'on a plus de captations, notamment sur le vif, j'ai l'impression d'une sorte de flottement qu'on n'entend pas forcément dans les années 60 (à mon avis parce qu'on a beaucoup plus de studios proportionnellement, mais je suis ouvert à d'autres hypothèses). Ordalie ? - Citation :
- Pour en discuter, mieux vaudrait rester dans le répertoire de la symphonie classique-romantique, qui a eu le temps d'être digérée même au début du XX° siècle.
Volontiers. - Citation :
- Choisissons quelques oeuvres et comparons : je ne suis pas à l'affut de tout ce qui s'enregistre de nos jours, mais je pense pouvoir trouver chaque fois des interprétations anciennes qui présenteront le même niveau.
Si tu prends les quelques meilleures interprétations anciennes, oui, bien sûr : Berlin dans les années 60, c'est déjà irréprochable. Le Concertgebouw a toujours été un orchestre d'une très grande précision, et je trouve même que plus on remonte dans le temps, plus il était flexible et engagé. Mais si tu prends dix enregistrements des années 50 et dix enregistrements des années 2000 (même avec des orchestres moyennement renommés), la différence (je parle uniquement de technique, encore une fois) est flagrante. Je suis prêt à essayer si tu veux. On peut même ouvrir un fil du genre « écoute comparée » sur le sujet, avec appel à participants, comme tu veux. Premières pièces au dossierSur le plan de la simple théorie, on peut s'en rendre compte par les arguments avancés par Xavier : personne ne pouvait simplement jouer les Quatuors ou Sonates de Beethoven, et maintenant n'importe quel étudiant sorti d'un conservatoire régional les joue sans faute (bien ou mal, peu importe, ce n'est pas la question, il les joue !). Les compositeurs se plaignaient de l'incapacité des orchestres à exécuter leurs œuvres (la Fantastique, que maintenant n'importe quel orchestre joue très bien), alors qu'aujourd'hui les grands orchestres interprètent des partitions contemporaines d'une difficulté ultime sans ciller. Ça se voit très bien dans l'évolution de la composition : les compositeurs influent en ce sens, en repoussant les limites. Fais jouer à un orchestre du XIXe une symphonie de Chostakovitch ! En termes de témoignages, il y a par exemple l'Arabella de Böhm avec Vienne (le compositeur était dans la salle et dans les coulisses, ils se fréquentaient, etc.)… C'est très beau d'ailleurs, mais c'est lent, pas précis, Vienne ânonne un peu… Alors que j'ai des prises sur le vif récentes de Liège ou Toulouse qui sont immaculées. Ça ne me fait pas particulièrement plaisir de le constater, mais je ne vois pas trop comment le percevoir autrement. |
| | | Diablotin Mélomaniaque
Nombre de messages : 1148 Age : 57 Localisation : Strasbourg Date d'inscription : 25/03/2010
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 12:58 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
-
En revanche, dans le lied, on a tellement gagné par rapport aux grandes voix impavides qu'on a documenté au disque – sans doute lié au fait que ce n'était pas les meilleurs spécialistes qui les enregistraient, mais même des poètes comme Lotte Lehmann ou Hans Hotter se révèlent très ennuyeux… (Certes, à la même époque, il y a Hüsch et DFD, mais ils ne représentent pas la majorité des témoignages.)
Ça, pour le coup, c'est totalement subjectif et ça dépend de tes habitudes d'écoute... Le style a changé, mais ça n'a rien à voir avec les capacités ou la technique, qui sont les critères qui nous occupent ici : je déteste le trop-plein d'expressivité de DFD pour ma part, par exemple.
Pour le reste, autant de questions que de pistes de réponse. Le sujet est complexe, mais quand je vois les progrès réalisés en chant par ma fille en l'espace d'un an, alors qu'elle partait de rien en termes de technique vocale, je pense que l'enseignement à des enfants a énormément évolué -en fait, les cours sont super bien faits et les enfants d'aujourd'hui, quoi qu'on en dise par ailleurs, sont nettement plus à l'aise pour se produire en public que par le passé et ont sans doute des oreilles plus malléables que lorsque nous étions enfants, du fait d'un environnement sonore qui les sollicitent bien plus-. Le domaine sportif évoqué par Xavier, à mon sens, n'est pas l'exemple le plus parfait. L'élévation du niveau des performances, à la fin du 20ème siècle, est également largement lié à l'évolution des matériaux -pistes synthétiques à la place des pistes cendrées, évolution des chaussures, des raquettes, des ballons, apparition des matériaux composites...- ainsi qu'à des méthodes d'entraînement largement complétées d'apports divers : diététique, coaching mental, ... inimaginables avant les années 80. |
| | | Nestor Mélomaniaque
Nombre de messages : 1587 Date d'inscription : 05/10/2012
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 13:07 | |
| L'évolution de la facture instrumentale ( et domaines annexes) rend des choses périlleuses d'autre fois plus simples aujourd'hui, que ce soit en terme de technique digitale, d'intonation ou de facilité dans les différents registres...
Dernière édition par Radnam le Dim 20 Sep 2015 - 21:22, édité 1 fois |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97763 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 13:13 | |
| Mais la facture n'a pas beaucoup évolué entre 1940 et 2010… Donc ça peut valoir pour la comparaison avec le XIXe, assurément, mais moins pour le XXe. - Diablotin a écrit:
- Ça, pour le coup, c'est totalement subjectif et ça dépend de tes habitudes d'écoute... Le style a changé, mais ça n'a rien à voir avec les capacités ou la technique, qui sont les critères qui nous occupent ici
C'est vrai, ça complétait simplement les nuances que j'essayais d'apporter pour démentir les visées potentiellement idéologiques de mon observation. Cela dit, la maîtrise du style (et traiter un poème autrement que comme un rôle opéra) peut être considérée comme un prérequis technique (typiquement vrai pour le baroque) ; mais je suis d'accord, il s'agit d'une part de goût, d'autre part et surtout d'information : on ne peut pas dire qu'ils étaient intrinsèquement moins bons alors qu'ils avaient les moyens mais pas les informations musicologiques. (DFD jeune n'est pas du tout trop-plein ; si tu n'as pas essayé, tente ses lieder Billing, Reutter ou Klust, par exemple.) |
| | | Nestor Mélomaniaque
Nombre de messages : 1587 Date d'inscription : 05/10/2012
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 13:15 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Mais la facture n'a pas beaucoup évolué entre 1940 et 2010…
Si, dans les pupitres de bois notamment ( cuivre aussi il me semble) et dans les domaines annexes, je pense notamment à ce qui touche aux traitements du roseau pour les clarinettes, bassons et hautbois... Je ne parle pas de grand changement de facture visible mais de nombreuses améliorations ont eu lieu entre 1950 et 2000, voire même entre 2000 et maintenant qui rendent la vie plus confortable. Par ailleurs, là où les instrumentistes à vent commençaient assez tard avant, maintenant il n'est pas rare de voir des gens ayant débuté vers 6-9 ans.
Dernière édition par Radnam le Dim 20 Sep 2015 - 13:27, édité 1 fois |
| | | Diablotin Mélomaniaque
Nombre de messages : 1148 Age : 57 Localisation : Strasbourg Date d'inscription : 25/03/2010
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 13:20 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Mais la facture n'a pas beaucoup évolué entre 1940 et 2010… Donc ça peut valoir pour la comparaison avec le XIXe, assurément, mais moins pour le XXe.
- Diablotin a écrit:
- Ça, pour le coup, c'est totalement subjectif et ça dépend de tes habitudes d'écoute... Le style a changé, mais ça n'a rien à voir avec les capacités ou la technique, qui sont les critères qui nous occupent ici
C'est vrai, ça complétait simplement les nuances que j'essayais d'apporter pour démentir les visées potentiellement idéologiques de mon observation. Cela dit, la maîtrise du style (et traiter un poème autrement que comme un rôle opéra) peut être considérée comme un prérequis technique (typiquement vrai pour le baroque) ; mais je suis d'accord, il s'agit d'une part de goût, d'autre part et surtout d'information : on ne peut pas dire qu'ils étaient intrinsèquement moins bons alors qu'ils avaient les moyens mais pas les informations musicologiques. On en avait parlé dans le sujet "Winterreise" : je ne pense pas que tu puisses méconnaître les "informations musicologiques" qui fondent l'interprétation du Lied schubertien par Hotter : "Schubert ne tolérait pas du tout l'expression violente des émotions dans l'interprétation de lieder. Il conservait toujours le même tempo, sauf dans les rares cas où il avait lui-même indiqué un changement. Le chanteur de lieder doit raconter des événements et transmettre des émotions qui lui sont en principe étrangers; il ne représente pas la personne dont il décrit les sentiments. Tout ce qui entrave le flux de la mélodie et le cours régulier de l'accompagnement va à l'encontre des intentions du compositeurs et annule l'effet musical". Mais c'est HS, comme ta remarque initiale |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 15:59 | |
| - Xavier a écrit:
Pourquoi Liszt et Paganini étaient-ils les seuls capables de jouer leurs oeuvres à leur époque alors qu'aujourd'hui n'importe quel bon pianiste ou violoniste amateur arrive à les jouer?
On pourrait trouver d'autres exemples à chaque siècle : une musique qui introduit des difficultés nouvelles, inouïes, se heurte à une réticence des exécutants et les amène à se hisser au niveau des contraintes. Mais faut du boulot et de la motivation. Et les capacités ! Tu cites là deux des plus grands virtuoses de leur époque, qui ont écrit des partitions à leur mesure, censés les faire valoir tant comme compositeurs que comme solistes. Pour Liszt, outre la difficulté digitale s'ajoutait l'harmonie novatrice et compliquée (bref une difficulté conceptuelle). J'ignore quel est le niveau actuel des "amateurs", mais s'ils arrivent à jouer les Caprices ou les Etudes d'exécution transcendante, effectivement le constat est sans appel. Et encore, faudrait s'entendre sur la signification de jouer : même si la plupart des pianistes (même renommmés) se tirent des plus redoutables défis lisztiens, peu m'éblouissent vraiment, à cause du défaut de prise de risque. Tout le monde n'est pas Cziffra, Berman ou Barere, si ? - Xavier a écrit:
Pourquoi l'entrée de basson du Sacre paraissait-elle si difficile à réussir il y a un siècle alors que maintenant tous les bassonistes attrapent ce do aigü sans aucun problème?
La réponse est dans ta question : elle paraissait difficile car ce registre était inusité. L'inconnu fait peur, et soulève l'appréhension. Ca n'en reste pas moins un passage périlleux, en raison de sa tessiture et de sa faible dynamique. Et aussi parce que c'est un solo où on entend le moindre accroc. Pour autant, même à considérer les plus vieux enregistrements du Sacre, j'ai pas l'impression que les bassonistes se pissaient dessus. - Xavier a écrit:
Pourquoi les athlètes font-ils tomber les records uns après les autres? Tout le monde court le 100m en moins de 10 secondes alors qu'avant c'était un exploit incroyable? Etc...
L'argument de l'émulation me convainc en matière sportive. Diablotin a avancé quelques explications qui révèlent que le matos intervient (en matière cycliste c'est flagrant, même en athlétisme avec les chaussures et les surfaces des pistes). Autres facteurs : l'ego training, les substances à-l'insu-de-leur-plein-gré. L'argument me disconvient en matière de performance musicale. Je ne crois pas que les jeunes virtuoses se fixent comme objectif intrinsèque de jouer plus-vite-plus-propre qu'avant. C'est certainement plutôt une conséquence de l'éthique des concours et de ce qu'attendent les jurys : la perfection technique au lieu du tempérament. Ce qui implique une course à l'échalote sur des critères objectifs. Et explique aussi qu'on se retrouve avec des candidats stéréotypés et interchangeables, sortes de clones suprahumains obnubilés par l'exactitude. - Xavier a écrit:
le constat est facile à faire.
On va voir ça |
| | | fadosolrélamisi Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 41 Localisation : Incertaine-En lutte. Date d'inscription : 20/09/2015
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 18:12 | |
| Intéressant. N'y a-t-il pas aussi - en en dépit de ce que l'on a tendance à croire - disons depuis la seconde moitié du XXème siècle, un nombre infiniment plus grand de musiciens qui, dès leur plus jeune âge, apprennent à jouer d'un instrument ? Par ailleurs les écoles de musiques et les conservatoires se sont aussi professionnalisés. Donc au total, assez logiquement, le niveau monte et cela dans des proportions statistiquement significatives. |
| | | draffin Mélomaniaque
Nombre de messages : 871 Age : 41 Date d'inscription : 29/01/2013
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 21:05 | |
| - fadosolrélamisi a écrit:
- Intéressant. N'y a-t-il pas aussi - en en dépit de ce que l'on a tendance à croire - disons depuis la seconde moitié du XXème siècle, un nombre infiniment plus grand de musiciens qui, dès leur plus jeune âge, apprennent à jouer d'un instrument ? Par ailleurs les écoles de musiques et les conservatoires se sont aussi professionnalisés. Donc au total, assez logiquement, le niveau monte et cela dans des proportions statistiquement significatives.
J'ai lu (je ne sais plus où) que l'argument statistique est le meilleur pour expliquer l'amélioration des performances sportives à très haut niveau. J'ai l'impression que cet argument doit être valable en musique aussi : augmentation de la population mondiale -> augmentation du nombre de musiciens -> meilleure sélection des musiciens d'orchestre. Reste à savoir dans quelle proportion. |
| | | Democrite Mélomaniaque
Nombre de messages : 962 Localisation : Ville de Baie Date d'inscription : 22/04/2013
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 20 Sep 2015 - 23:17 | |
| Il faut dire que si les musiciens s'entraînent depuis longtemps sur les mêmes vieilles scies romantiques , à force ça finit par rentrer, il y a un effet d'emballement, de contagion. Puis ils s'ennuient et rejouent du baroque, là aussi de mieux en mieux. Le parallèle avec le sport est frappant, comme s'il y avait un progrès, comme en sciences d'ailleurs. D'ailleurs peut-on dire des musiciens qu'ils progressent, comme en sport et en sciences ? Leur virtuosité n'a pas de limites mais la musique n'étant pas d'inspiration réaliste, il n'y a pas de progrès. Même en littérature et en arts réalistes il n'y a pas de progrès, les témoins du progrès le véhiculant étant immobiles. Les comédiens enfin sont en progrès constants mais s'essoufflent rapidement, comme les authentiques acteurs du réel progrès qui eux se relayent constamment, réduisant à bien peu de choses le perfectionnement des individus. |
| | | gluckhand Mélomane chevronné
Nombre de messages : 4967 Localisation : Amiens Date d'inscription : 15/07/2013
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Lun 21 Sep 2015 - 8:47 | |
| Plusieurs remarques qui tournent autour de ce sujet. D'abord à l'époque de Bohm par exemple, les musiciens étaient âgés plus ou moins dans la même tranche d'âge que le chef, aujourd'hui, même si on regarde même Abbado,récemment disparu , les musiciens sont bien plus jeunes. Je viens de voir le Youth Baltic sea et aussi plusieurs fois l'orchestre du Divan dirigé par Barenboïm, il y a une énergie chez ces jeunes qu'on retrouve moins dans les orchestres installés, énergie et émotion pas toujours qualité musicale, mais dès fois on préfère trouver les premiers plutôt que le second si l'on aime beaucoup la musique comme moi . Enfin,car c'est un vaste sujet interessant, on peut dire que maintenant tout le monde finit par très bien jouer Mozart ou Beethoven, c'est sûr qu'on est loin de Furt et de sa mystique, mais on a assimilé cette musique et on ne la joue plus grossièrement, mais avec de la finesse. Un dernier truc, c'est la musique contemporaine qui a réhaussé la musique en général, la classique comme surtout la contemporaine bien sûr? |
| | | Iskender Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2568 Age : 56 Localisation : Bretagne Date d'inscription : 11/08/2009
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Lun 21 Sep 2015 - 11:30 | |
| - Radnam a écrit:
- L'évolution de la facture instrumentale ( et domaines annexes) rend des choses périlleuses d'autre fois plus simples aujourd'hui, que ce soit en terme de technique digitale, d'intonation ou de facilité dans les différents registres...
----------- Dans les pupitres de bois notamment ( cuivre aussi il me semble) et dans les domaines annexes, je pense notamment à ce qui touche aux traitements du roseau pour les clarinettes, bassons et hautbois... Je ne parle pas de grand changement de facture visible mais de nombreuses améliorations ont eu lieu entre 1950 et 2000, voire même entre 2000 et maintenant qui rendent la vie plus confortable. Par ailleurs, là où les instrumentistes à vent commençaient assez tard avant, maintenant il n'est pas rare de voir des gens ayant débuté vers 6-9 ans. Entièrement d'accord avec tout ça. Par exemple pour le cor, instrument réputé périlleux et dont les solistes, très exposés à l'orchestre, avaient autrefois mauvaise réputation, j'avais évoqué il y a quelques années sur le sujet consacré à cet instrument le passage à l'utilisation du corps double. Le circuit court facilite les aigüs. Mais j'ajouterai pour les vents la même remarque que celle de Diablotin sur la voix : c'est aussi le style qui a évolué. Aujourd'hui le vibrato des grands solistes des bois français des années 50-60 tel qu'on l'entendait chez Jacques Lancelot à la clarinette, Paul Hongne au basson ou Daniel Defayet au saxophone apparaissent à juste titre désuet ou surrané . Mais ça n'enlève rien au niveau de ces interprètes. Pour les cordes c'est différent : comme vous l'avez fait il faut distinguer les solistes des orchestres. Chez les solistes, je dirais que techniquement l'exceptionnel existait déjà avant mais que plus qu'une progression il s'est plutôt généralisé. Concernant les pupitres d'orchestres je m'interroge : pour les orchestres français le répertoire soliste est maintenant pratiqué avec exigence dans les conservatoires nationaux (je ne parle pas que des deux CNSM mais bien avant) pour les quatre instruments. Cela peut expliquer une telle progression. En même temps on reproche souvent à l'enseignement français de se focaliser sur ce répertoire, alors que le niveau est comme vous l'avez dit excellent depuis longtemps en Allemagne ou Pays-Bas, où on travaille les traits d'orchestre dans les classes (me semble-t-il). Une question qui pourrait être une explication sur une progression de niveau : Y'avait-il tout simplement autant de musiciens qui sortaient des conservatoires avec un niveau professionnel avant les années 60 ? Et surtout par conséquent depuis quand le recrutement dans les orchestres passe-t-il par des concours ? (avec l'exigence que l'on connaît de ces concours d'entrée). J'aimerais bien le savoir... |
| | | fadosolrélamisi Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 41 Localisation : Incertaine-En lutte. Date d'inscription : 20/09/2015
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Lun 21 Sep 2015 - 14:50 | |
| - Iskender a écrit:
- Y'avait-il tout simplement autant de musiciens qui sortaient des conservatoires avec un niveau professionnel avant les années 60 ?
La réponse est clairement "non". Sans parler de "grands élèves" et de fin d'étude, mes jeunes enfants étant au CRR de Lyon, je suis d'assez près les concerts et auditions de classes, et je peux vous dire que l'évolution est assez bluffante, ne serait-ce que par rapport à mes jeunes années (et je ne parle pas ici de mon niveau personnel à cette époque, qui était assez certes assez médiocre, mais bien de celui des différents ensembles d'élèves). Il y a quand même des concerts joués par des gamins de 10-15 ans qui sont d'une qualité exceptionnelle. Je ne dis pas "professionnelle", mais qui donnent vraiment le change, et qu'on peut apprécier. Les profs, de façon générale, sont très exigeants que ce soit en cours individuels qu'en ensemble, et les résultats sont pour moi, absolument flagrants. De même en classe d'écriture, au demeurant .... |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Lun 21 Sep 2015 - 21:31 | |
| Intéressant vos arguments. Les progrès pédagogiques dans les Conservatoires expliqueraient donc l'amélioration du niveau moyen des musiciens d'orchestre, ce qui peut s'appliquer non seulement aux phalanges d'élite mais aussi aux orchestres de moindre envergure. |
| | | Nestor Mélomaniaque
Nombre de messages : 1587 Date d'inscription : 05/10/2012
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Lun 21 Sep 2015 - 21:47 | |
| - Iskender a écrit:
où on travaille les traits d'orchestre dans les classes (me semble-t-il). Ce n'est pas qu'une question de traits d'orchestre, plutôt de pratique collective... Parce qu'en soi tu peux bien travailler tes trais d'orchestre chez toi et ne pas bien te mélanger avec les copains en situation. Et c'est vrai que les cursus manquent cruellement d'orchestre en dehors de certains conservatoires. |
| | | Iskender Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2568 Age : 56 Localisation : Bretagne Date d'inscription : 11/08/2009
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Mar 22 Sep 2015 - 9:09 | |
| - Radnam a écrit:
- Iskender a écrit:
où on travaille les traits d'orchestre dans les classes (me semble-t-il). Ce n'est pas qu'une question de traits d'orchestre, plutôt de pratique collective... Parce qu'en soi tu peux bien travailler tes trais d'orchestre chez toi et ne pas bien te mélanger avec les copains en situation. Tu as entièrement raison. En fait j'ai dit ça de cette façon là car j'ai été marqué par une expérience : lorsque j'étais étudiant je faisais partie de la Jeune Philharmonie franco-allemande. Et quand on s'échauffait dans les coulisses avant les concerts c'était flagrant : les français jouaient des passages des concertos qu'ils étaient en train de travailler alors que les allemands élèves dans les Hochschule jouaient des traits d'orchestre (pas ceux de notre programme du moment, mais les traits qui font référence; par exemple pour mon pupitre chez les altistes c'était l'ouverture de La fiancée vendue par coeur !). De même les cornistes allemands qui entendaient nos collègues français français jouer des concertos et leur disaient "Mais dans votre vie vous ne les jouerez jamais avec orchestre !"; et eux connaissaient les solos d'orchestre de Richard Strauss sur le bout des doigts (et des lèvres ) Assez représentatif d'une culture de l'orchestre tout de même. |
| | | fomalhaut Mélomaniaque
Nombre de messages : 1418 Age : 80 Localisation : Levallois-Perret Date d'inscription : 23/04/2006
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Mar 22 Sep 2015 - 12:21 | |
| - Iskender a écrit:
- Radnam a écrit:
- Iskender a écrit:
où on travaille les traits d'orchestre dans les classes (me semble-t-il). Ce n'est pas qu'une question de traits d'orchestre, plutôt de pratique collective... Parce qu'en soi tu peux bien travailler tes trais d'orchestre chez toi et ne pas bien te mélanger avec les copains en situation. Tu as entièrement raison. En fait j'ai dit ça de cette façon là car j'ai été marqué par une expérience : lorsque j'étais étudiant je faisais partie de la Jeune Philharmonie franco-allemande. Et quand on s'échauffait dans les coulisses avant les concerts c'était flagrant : les français jouaient des passages des concertos qu'ils étaient en train de travailler alors que les allemands élèves dans les Hochschule jouaient des traits d'orchestre (pas ceux de notre programme du moment, mais les traits qui font référence; par exemple pour mon pupitre chez les altistes c'était l'ouverture de La fiancée vendue par coeur !). De même les cornistes allemands qui entendaient nos collègues français français jouer des concertos et leur disaient "Mais dans votre vie vous ne les jouerez jamais avec orchestre !"; et eux connaissaient les solos d'orchestre de Richard Strauss sur le bout des doigts (et des lèvres ) Assez représentatif d'une culture de l'orchestre tout de même. Il me semble souvent avoir entendu dire par des mauvaises langues, peut-être plus informées que mauvaises d'ailleurs, que les musiciens des orchestres français, anciens élèves des conservatoires, avaient un ego de soliste. fomalhaut |
| | | fadosolrélamisi Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 41 Localisation : Incertaine-En lutte. Date d'inscription : 20/09/2015
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Mar 22 Sep 2015 - 14:33 | |
| - Mélomaniac a écrit:
- Intéressant vos arguments.
Les progrès pédagogiques dans les Conservatoires expliqueraient donc l'amélioration du niveau moyen des musiciens d'orchestre, ce qui peut s'appliquer non seulement aux phalanges d'élite mais aussi aux orchestres de moindre envergure. Absolument. Il y a bon nombre d'ensembles d'amateurs, qui ne sont pas visibles au disque, rarement en salle .... mais qui sont constitués de musiciens solides. Et ce, n'est-ce pas, pas seulement en France. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges Dim 6 Mar 2016 - 1:40 | |
| - DavidLeMarrec, in playlist, a écrit:
Mais oui, Szell est fabuleux dans la 2 et la 5, en effet – je n'aime pas beaucoup ce chef d'ordinaire (très raide, plutôt impavide, assez insensible au style), mais ses Beethoven sont des sommets qui, à son époque, n'avaient pas d'équivalent. (Et puis, ce qu'il a fait de Cleveland !)
- Mélomaniac a écrit:
- DavidLeMarrec a écrit:
Et puis, ce qu'il a fait de Cleveland !
Ouais enfin Artur Rodzinski était déjà passé par là et a atteint des sommets de virtuosité avec cet orchestre, pendant une décennie. Szell n'est donc pas parti d'une bande d'anarchistes. Il a seulement dû retaper un peu le niveau après le bref mandat de Leinsdorf.
- DavidLeMarrec a écrit:
Tiens, Rodziński était un bâtisseur d'orchestre ? Je ne le percevais vraiment pas comme quelqu'un se souciant vraiment du détail ou du son.
Oui, précisément un bâtisseur d'orchestre, c'est d'ailleurs souvent comme ça qu'on le présente. Tu as dû oublier que c'est lui qui a a affûté le NBC de Toscanini. Repenche-toi sur ses enregistrements à Cleveland chez Columbia, tu verras à quel degré il pousse le soin du détail. Et cela à un niveau de virtuosité (tempos, équilibres...) qui resta souvent indépassé dans les annales de la direction d'orchestre. Au demeurant, et c'est certainement l'image qui domine ton impression, c'est vrai qu'il était aussi capable d'émoustiller les pupitres (un peu comme Dorati) et de produire des interprétations proprement électrisantes. Parfois à la limite de la caricature (par exemple sa délirante Ouverture de Guillaume Tell). Mais il savait surtout obtenir une impeccable discipline. Réécoute par exemple La Mer ou Schéhérazade. - DavidLeMarrec a écrit:
Quel était le problème avec Leinsdorf (qui, justement, a plutôt fait ses preuves par ailleurs sur ce critère-là) ?
Ce serait certainement injuste de l'imputer à son prédécesseur, mais quand on écoute les tout premiers enregistrements de Szell après sa prise de poste en 1946, on a l'impression que l'orchestre sortait d'un creux de la vague. |
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| Sujet: Re: Évolution du niveau des musiciens à travers les âges | |
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| | | | Évolution du niveau des musiciens à travers les âges | |
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