Ã‰coute comparée : Musique pour cordes, percussion et célesta

A la 1ère écoute, Esteban m'a impressionné, surtout le 2 ème mouvement (et le 4 ème), oui, c'était ça.
Et puis finalement, sur l'ensemble, je mets Tao en 1.
Dans les mouvements lents, sur Esteban, j'attendais que ça se termine. Alors qu'avec Tao, je savourais.
La scansion, les rythmes, les timbres magnifiques (percus, celesta...), les mélodies, la fluidité. Il y a plus de recherche dans cette interprétation je trouve.
Pas mal de variations de tempo, accelerando, je n'ai pas la compétence pour juger si c'est normal...
Dans les - : ça manque de peps dans certains passages à mon goût, et notamment la fin.
Zia : je ne sais quoi en dire, très bel orchestre, mais moins "stylé" que Tao. Assez "carré".
Ca avance bien dans le  4ème mouvement.
Esteban : 3
Tao : 5
Zia : 2.

Je tire de cette écoute comparée la conviction qu’il n’y a aucune version idéale de la MPCPC, … du moins dans celles que nous a proposées Mélo   . Mais j’imagine aussi qu’il n’a pas laissé passer des pépites   .

Esteban

C’est à mes oreilles, et sans hésitation, la meilleure des trois. C’est la plus engagée et la plus cohérente des trois versions sur l’ensemble des mouvements. Il n’y a aucun véritable point faible. Dans les deux mouvements lents (Finot et Tintin), l’approche est très lente et ouvertement post-romantique. On peut rêver d’autre chose mais l’approche est assumée jusqu’au bout et tient parfaitement la route. Dans les deux mouvements rapides (Panoramix !!!), l’engagement est total et ça dépote ! La conception d’ensemble est très symphonique, voire lourde par endroits (les timbales dans le second mouvement n’ont pas toujours la finesse que l’on pourrait souhaiter), mais c’est défendu avec conviction et un orchestre qui assure. Mon seul regret: l’enregistrement. De bout en bout, on a un souffle important. Est-ce le souffle analogique d’un enregistrement ancien ou le résultat de la compression ? Je n’en sais rien mais c’est désagréable. 5/5  

Zia

Je place Zia en seconde position. C’est vivant, bien en place, mais cela manque d’engagement. Très beau premier mouvement et très bon dernier (Idefix). Le second mouvement manque d’impact et le troisième est quand même très lent (Gaston).  C’est une version qui est bonne partout mais géniale nulle part. 3/5  

Tao

Tao commence très bien avec un premier mouvement proche de l’idéal (Flairsou). Le second (Albator) est très bon mais un peu trop civilisé. Le troisième mouvement est bon (Milou) mais le quatrième décevant (Ordralfabetix). En bref, d’excellents mouvements lents mais des mouvements rapides qui déçoivent. C’est une version très inégale. Je place donc Tao en dernière position. 2/5  


Esteban >> Zia > Tao

Je te rassure, Esteban est superbement enregistré, je ne sais pas comment Melo l'a saboté, mais l'enregistrement est vraiment superbe.

Il va être difficile de faire des commentaires en oubliant totalement ce que je reconnais des tours précédents,
mes commentaires seront peut-être assez succincts.

ESTEBAN

I
J'aime beaucoup le tempo choisi et ce côté rampant parfaitement rendu.
La lenteur est ici plus assumée que dans d'autres versions, sans accélération intempestive, en dehors du très léger changement demandé
mesure 38.
A cause de la compression on reconnaît facilement cette version qu'on a pu entendre dans tel ou tel mouvement dans les tours précédents,
mais maintenant que je l'ai reconnue je sais que c'est un très beau disque magnifiquement enregistré.

II
Je trouve le contraste avec la lenteur du premier mouvement parfait.
C'est vif, nerveux, précis et détaillé.
Du travail d'orfèvre, mais sans froideur, bien au contraire.

III
Comme dans le I, j'aime bien ici des tempi un peu plus lents que ceux indiqués par Bartok.
L'atmosphère est superbe, tous les détails y sont, on est proche de l'idéal que je cherche ici.
C'est terrifiant, et c'est aussi très beau.

IV
J'ai reconnu la version entendue au tour précédent, je n'en dirai pas plus, c'est superbe.

Version équilibrée, précise, impeccable, habitée, et qui accentue avantageusement les contrastes entre les 4 mouvements.
L'orchestre est superbe, je n'ai rien à redire nulle part, et je prends un plaisir énorme à écouter.
On dit parfois que les écoutes comparées favorisent les versions lisses, celle-ci, bien que parfaitement en place (magnifique produit
de studio) fait à mon sens vraiment exception, la furia du II et du IV est là pour le démontrer et pour nous enthousiasmer.
Le I est une introduction parfaite et implacable, le III est soufflant de beauté.
Si cette version est en finale et peut-être gagne en dépit du handicap de la forte compression qui nous a parfois poussés à la noter
un peu sévèrement, c'est qu'elle le mérite vraiment!
Note: 5/5

TAO

I
C'est bien, mais assez froid, sans grande profondeur.
Est-ce qu'il faut mettre des intentions ou bien jouer ce mouvement de façon froide et presque inexpressive?
Je n'ai pas de réponse... mais j'aime quand même moins qu'Esteban, qui y met déjà presque du drame.

II
Là aussi, c'est très bien, mais c'est un peu plus froid qu'Esteban, c'est très en place, tout est vraiment bien, mais on n'est pas soufflé.
Version qui respecte assez bien tous les changements de tempi demandés.

III
J'aime quand ça prend un peu plus son temps dans ce début; là c'est très en place, un chouilla raide.
Le passage mesure 20 est là aussi glacial, désincarné, dans le genre c'est très réussi.
Mesure 36 je trouve l'entrée des cordes un peu forte (là où c'était si mystérieux chez Esteban), par contre
on peut apprécier de si bien entendre la harpe. (presque trop?)
Célesta un peu étouffé à 65.
Mesure 75 (à 6'31), les contrebasses jouent une octave plus bas que ce qui est écrit, c'est étonnant pour une version si respectueuse
de la lettre dans le reste de l'oeuvre.
Ca me semble délibéré, car mesure 76 c'est joué strictement à la bonne octave.

IV
Moins de nerf que chez Esteban, pourtant c'est vraiment très bien là encore dans l'ensemble.
La harpe est toujours aussi audible, mais les cordes un peu moins engagées.

Vraiment une bonne version, mais (je me répète un peu) moins enthousiasmante qu'Esteban pour moi, sur chacun des 4 mouvements.
Je note un peu sévèrement peut-être, mais pour marquer la différence assez nette tout de même.
Note: 2/5

ZIA

I
J'aime beaucoup le 1er mouvement, assez lent et profond, je trouve le climax un tout petit peu manqué, un peu léger.

II
Très réussi dans l'ensemble, sans être particulièrement marquant.
Claviers très présents.
Petit décalage embêtant à 6'04.

III
Très beau mouvement lent, un chouilla moins éblouissant qu'Esteban, mais tout de même très réussi, peut-être le plus réussi de
cette version.

IV
J'ai reconnu la version entendue au tour précédent, donc je n'en dirai pas beaucoup plus, c'est très bon, mais moins qu'Esteban.

Vraiment très proche de Tao, difficile de les départager.
Je mets Zia devant, car les mouvements lents me plaisent quand même plus et le final est un chouilla meilleur.
Note: 3/5

5 points pour Esteban, 3 pour Zia et 2 pour Tao; il fallait faire des écarts mais Zia et Tao sont tout de même deux très bonnes versions.

Voilà qui me rassure   ! Parce que je ne connais pas cette version et que je compte bien me la procurer quand son identité sera dévoilée    ... Je pensais à une version ancienne tant le souffle est important, mais visiblement c'est tout récent   .

Esteban et Zia sont au-dessus du panier, malgré un Tao pour lesquels les reproches restent rares. Esteban est d'une très grande qualité mais je ne comprends pas pourquoi le 4e mouvement est si explosif. Zia m'apparaît plus cohérente et très belle, malgré un manque de folie qui en ferait un joyau à mes yeux.

J'attends de laisser retomber la poussière avant de faire mon choix final.

Esteban:très bien dans les deux premiers mouvements,mais après cela se gâte.Tout est surligné en gras que cela finit par me laisser indifférent.

Tao:belle version,qui pourtant ne m'a pas convaincu dans les deux premiers mouvements.Le troisième,par contre est superbe et s'il n'y avait
que ce mouvement en lice,Tao aurait eu la palme.

Zia:c'est la version que je met loin devant les autres.La plus équilibrée sur l'ensemble des mouvements.C'est celle qui maîtrise le mieux les progressions et qui traduit le mieux l'intériorité mystérieuse de Bartok.

Zia: 5/5
Tao:3/5
Esteban:2/5

Esteban
Mouvement 1: Cette version choisit de privilégier les contrastes à la rapidité. La relative lenteur permet au crescendo de se déployer de manière magistrale. Mais c'est tout de même loin des indications du compositeur.
Mouvement 2: Le piano et les percussions claquent comme il le faut. On se lance dans un rythme cette fois endiablé et sauvage (les glissandi!), toujours avec le même souci de contraste, sans rien sacrifier de la clarté des différents plans sonores. Le piano est peut-être légèrement trop appuyé à la fin, mais dans la furie de l'ensemble, ça passe.
Mouvement 3: Climat nocturne plus onirique qu'angoissant. L'entrée du célesta est magnifique. Puis cela s'anime avec une certaine violence, et on retrouve l'immense maîtrise des percussions de cet orchestre.
Mouvement 4: Panoramix. Exceptionnel.
Bilan: une réussite, une maîtrise orchestrale remarquable. Mais faut-il être autant démonstratif dans cette oeuvre?

Tao:
Mouvement 1: Bien plus rapide (7'02), du coup il y a un rythme extrêmement prenant, mouvement de flux et de reflux très fidèle à ce que Bartok disait de son mouvement. Le climax est très réussi. Très belle entrée du célesta.
Mouvement 2: 7'34. Cordes décidément très belles. Tout cela est bien en place et efficacement conduit, avec un souci des contrastes d'intensité.
Mouvement 3: 7'30. Avec les cordes acides et les percussions sèches, c'est un climat à la Kubrick.
Mouvement 4: C'est le maillon faible de l'ensemble. je suis nettement emballé, alors que sur le reste Tao fait jeu égal (avec un parti-pris différent et qui me convient mieux) avec Esteban.
Version plus contemplative qu'Esteban. Mais desservie par le 4e mouvement (dommage).

Zia:
Mouvement 1: début légèrement étouffé, mais les entrées successives sont très claires. C'est assez dépouillé, ce qui n'est pas pour me déplaire, mais ça manque un peu de vie.
Mouvement 2: Pareil, c'est bien (mieux sur la fin du mouvement d'ailleurs), dansant, sans excès.
mouvement 3: J'aime beaucoup. Le meilleur troisième mouvement du groupe. Un onirisme paisible (je m'aperçois que l'emploie spontanément les mêmes mots que pour Gaston, c'est rassurant), légèrement en éveil. C'est superbe.
Mouvement 4: Beaucoup d'animation et de beaux contrastes orchestraux.
Version un peu sage pour moi dans les deux premiers mouvement mais particulièrement réussie dans les deux autres. C'est sans doute moins parfait qu'Esteban, mais je me reconnais mieux dans ces choix, plus sobres, plus retenus, et d'une tension finalement plus intérieure que ceux d'Esteban.

Verdict:
Zia 4/5
Esteban: 3/5 (note un peu injuste, je dois dire, mais nécessaire à partir du moment où je veux mettre en I Zia qui n'est pas sans défaut... quel casse-tête!)
Tao: 2/5

Esteban: 5
Mon vainqueur: le premier mouvement n'est pas mon préféré mais il y a une vraie intensité dans cette retenue, cette absence d'effets qui prend tout son sens lorsqu'on écoute la suite: les parties rapides explosives, véritables courses à l'abîme, le mouvement lent d'un expressionnisme extrême.

Zia: 4
Voilà la version qui aurait pu concurrence Esteban, par sa finesse et son équilibre... Il y a la une douce ivresse dans les parties rapide qui souffre cependant un peu de la comparaison de l'engagement sans concession d'Esteban. Cela manque parfois de spontanéité, l'orchestre donne l'impression de s'écouter jouer...

Tao: 2
Globalement une belle version limpide, qui m'a marqué par son manque de contrastes sur les mouvements lents, qui me laissent un peu extérieur. Sur les mouvements rapides, cela manque aussi un peu de folie à mon goût.

Une écoute passionnante, qui m'a enrichie au-delà de ma connaissance de l'oeuvre. Un grand merci à Mélomaniac

Si chacune des trois versions a sa propre approche interprétative, les prises de son me paraissent très similaires et d'excellente qualité : bien définies, ni trop proches ni trop lointaines de l'orchestre, avec une stéréo mesurée.

Concernant l'interprétation, je ne peux mettre 5 à Zia car ce n'est pas parfait, mais c'est la version qui me semble la plus cohérente sur l'ensemble des mouvements. Je note Esteban juste en dessous car si le 4e mouvement me paraît hors-propos (survitaminé), le reste est excellent, en particulier un premier mouvement d'une évidence ! Et pris à un rythme idéal. Quant à Tao, initialement j'avais mis 1 mais je remonte à 2 car après plusieurs écoutes et malgré certains passages étranges qui peut-être m'ont déplu initialement, il est volontaire et finalement intéressant, avec un 3e mouvement réussi.

Zia 4/5 - Une version très cohérente, avec un orchestre soyeux et un aspect chambriste qui me plait bien. Avec un peu plus de folie, elle eut peut-être été ma version de référence.

Esteban 3/5 - La version qui me laisse un goût amer. Les trois premiers mouvements sont d'excellente tenue, très bien menés, mais pourquoi une telle explosion dans le 4e mouvement ? Cela me paraît en décalage par rapport à tout ce qui précède et l'amène, et vraiment je n'aime pas du tout, c'est rédhibitoire. Je ne comprends pas, je suis curieux de savoir ce qu'a souhaité le chef.

Tao 2/5 - Une belle version, mais qui fini à la troisième position à cause d'un premier mouvement trop rapide et d'un quatrième approximatif dans les violons. Le troisième mouvement est réussi, très poétique, énigmatique, et globalement cela reste une version très agréable à écouter.

Eh bien cela parait plus serré que prévu entre Esteban et Zia... Suspens!

ESTEBAN : une version à la fois virtuose et riche en atmosphères, qui distille dès le début du I une inquiétude prégnante sans négliger des moments de sauvagerie très bartokiens (II, à 1'45), qui nous entraîne dans une succession de tourbillons menant fatalement à des cimes ou à des gouffres (II encore, vers 4'32). III est particulièrement tendu et étouffant, vraie musique de film d'horreur réussie (c'est si rare...) ! Les cordes graves de l'orchestre et les percussions sont particulièrement colorées, les rapports de tempo plutôt bien gérés... mais je suis, à la réécoute, un peu perplexe devant IV dont la force irrépressible a pour corollaire un aspect démonstratif, presque tape-à-l'oeil qui n'est pas de mise ici. Cela dit, c'est vraiment impressionnant !

ZIA : j'aime beaucoup le début de I, désincarné, en apesanteur, avec une montée très progressive vers le premier apogée, ce qui est la marque, pour moi, d'une interprétation tournée vers l'abstraction, le sens de l'immatériel (III : seule version où les percussions semblent "flotter"), sans pour autant négliger les contrastes, qu'ils soient amenés en douceur (I, II) ou en puissance. Parfois, l'orchestre touche un peu ses limites, notamment pour les violons à la peine à la fin de II, mais c'est le prix à payer pour des choix étonnants et payants, tel précisément cette sensation d'ondoiement des cordes après le passage à la harpe dans II, comme s'il se créait des échos au fil de l'oeuvre. IV est vif, assez joueur, moins saisissant qu'Esteban mais plus accordé à la cohérence d'ensemble.

TAO : assez peu de choses à dire sur une version assez remarquable, mais qui, sur la durée, ne méritait peut-être pas sa place en finale... Certes, c'est vif et bien joué, mais souvent au détriment des atmosphères (I, trop pressé et avec de curieux rapports de tempo), sauf dans III, où un alliage de traits acidifiés et d'aplats lunaires fonctionne étonnamment bien. En revanche, IV est presque banal (par rapport à Zia et Esteban, bien sûr) et je déplore dans l'ensemble qu'il y ait chez Tao aussi peu de moments à blâmer qu'à louer.

Classement :
Pour la 1ère place, c'est vraiment très dur entre la force d'Esteban et le miroitement de Zia... De toute façon, il faut connaître les deux, qui avaient bien leur place en finale.
DONC :
Esteban : 5/5
Zia : 4/5 (pour moi, sentimentalement, c'est ex aequo)
Tao : 2/5

Ah, ah Dutoit . Je ne m'y attendais pas ...