Dame de Pique - Jansons - Herheim - Amsterdam juin 2016

Le week end du 18 juin je serai à Amsterdam avec une dizaine d'anciens élèves de mon école pour découvrir cette Dame de Pique.
Je sais que si Jansons est un chef symphonique superlatif, il ne dirige presque jamais d'opéra, et que son enregistrement de l'oeuvre avec la Radio Bavaroise a suscité des réactions partagées.
Mais il y a suffisamment de motifs pour justifier le déplacement au delà de Jansons :
Le Concertgebouw dans la fosse
Stefan Herheim à la mise en scène
Une distribution intégralement russophone, avec Misha Dydik en Hermann et Larissa Diadkova en Comtesse.

Je n'ai pas vu cette oeuvre souvent sur scène : deux fois à l'ONP dans la m e s de Dodine, mais mon souvenir le plus marquant aura été à Vienne en octobre 2007, dans une m e s moyenne de Vera Nemirova, avec Ozawa à la baguette, Neil Shicoff, Martina Serafin et Anja Silja en Comtesse.

 Montfort

Dès que j'aurai du temps je ferai un C R détaillé de ce superbe spectacle.
Notez dès maintenant que la représentation de samedi a été captée à la télévision et sera diffusée sur Arte - Live mardi 21 juin à partir de 19h5:
http://concert.arte.tv/fr/la-dame-de-pique-de-tchaikovski-mis-en-scene-par-stefan-herheim-amsterdam

 Montfort

Amsterdam - De Nationale Opera - représentation du 18 juin 2016

La Dame de Pique

Mise en scène : Stefan Herheim
Décors : Philip Furhofer
Dramaturgie : Alexander Meier Doerzenbach

 Liza : Svetlana Aksenova
 La Comtesse : Larissa Diadkova
 Polina : Anna Goryachova
 Hermann : Misha Didyk
 Tomski : Alexey Markov
 Jeletski : Vladimir Stoyanov

  Choeurs du Nationale Opera
 Nieuw Amsterdams Kinderkoor
 Koninklijk Concertgebouworkester

 Mariss Jansons

Soirée en tous points remarquable : l'oeuvre a été donnée en version intégrale, j'ai découvert des passages pas entendus auparavant - on a reproché au librettiste et au compositeur de trahir Pouchkine en tirant le propos vers Dostoïevski : c'est vrai, et ça l'est encore plus dans cette production là !
En effet, comme attendu Herheim ne se contente pas de nous raconter le livret, il en fait une relecture très stimulante.
L'équilibre dramatique, qui repose dans le livret sur Liza et Hermann devient ici un trio : Jeletski, qui musicalement apparaît peu, est omniprésent, et devient un personnage bisexuel, engagé dans une relation avec Hermann - plus encore, il est aussi l'incarnation du compositeur, notant en permanence sur des partitions la transposition de l'action à laquelle il participe ou il assiste : cette juxtaposition n'offre pas toujours une lecture aisée de l'action, mais il faut reconnaître qu'elle est dramatiquement très intéressante. Sur le plan de la scénographie, on voit quelque chose de classique, avec des intérieurs somptueux et des costumes qui sont empruntés au XVIIIème siècle, mais aussi à la fin du XIXème. Herheim ménage pas mal de moments forts : en ouverture, une scène silencieuse : Jeletski et Hermann engagés dans un acte homo érotique, ou encore la pastorale, totalement subvertie, qui tourne au spectacle pornographique sois les yeux effarés de Jeletski ! Les choeurs sont utilisé de manière intéressante, représentant la plupart du temps l'aspect répressif de la société.
La mise en scène fourmille de détails signifiants comme l'apparition récurrente d'un verre rempli d'un breuvage blanc, allusion au suicide du compositeur, ou encore lors de la scène du retour du bal de la Comtesse, ses servantes l'invitent à se reposer, alors que l'une d'entre elle ouvre le piano capitonné comme un cercueil ! La direction d'acteur est impeccable, et l'ensemble est réalisé avec beaucoup de finesse - à l'exception d'un ou deux passages tirant sur le grand guignol, comme par exemple la scène de la révélation de la martingale.
Ce spectacle est servi musicalement par des interprètes de haut niveau, avec une mention particulière pour Misha Didyk. La Comtesse de Larissa Diadkova n'est pas le personnage diabolique qu'on voit souvent : là nous avons une femme très âgée, épuisée et nostalgique de ses jeunes années.
Orchestre absolument magique, d'un raffinement constant dans les nuances, sans jamais sacrifier le drame.
C'est d'autant plus frappant que l'orchestre et le chef ne sont pas familiers de l'art lyrique - Jansons reste manifestement très aimé du public, il a été vigoureusement acclamé.
Valait très très largement le voyage !

Une critique :
http://www.forumopera.com/la-dame-de-pique-amsterdam-piotr-ilyitch-le-prince-travesti

 Montfort

Une autre critique, dubitative sur la mise en scène :

http://www.altamusica.com/concerts/document.php?action=MoreDocument&DocRef=6010&DossierRef=5503


 Montfort

C'est plutôt cet article qui me laisse dubitatif...
«Misha Didyk également, qui nous a habitués à son Hermann musical, sans pour autant développer ce surplus de charisme qu’on connaît chez les plus grands»: il me semble que c'est plutôt l'inverse justement: avec ses harmoniques très denses, la voix de Didyk n'est pas musicalement très flatteuse, mais possède un charisme assez impressionnant.
«Mariss Jansons exalte la partition d’orchestre par une direction alliant les sonorités russes à la lumière du Concertgebouw»: alors là

Merci, en revanche, Montfort, pour ton propre compte-rendu, évocateur et sans cuistrerie.

Benedictus a écrit:

C'est plutôt cet article qui me laisse dubitatif...
«Misha Didyk également, qui nous a habitués à son Hermann musical, sans pour autant développer ce surplus de charisme qu’on connaît chez les plus grands»: il me semble que c'est plutôt l'inverse justement: avec ses harmoniques très denses, la voix de Didyk n'est pas musicalement très flatteuse, mais possède un charisme assez impressionnant.
«Mariss Jansons exalte la partition d’orchestre par une direction alliant les sonorités russes à la lumière du Concertgebouw»: alors là

Merci, en revanche, Montfort, pour ton propre compte-rendu, évocateur et sans cuistrerie.

Merci pour ces remerciements.
Le contenu de cette critique renvoie à une discussion animée que j'ai eue avec d'autres parisiens qui avaient fait le voyage avec moi - on était encore sous le choc de l'image qui clôturait la fin de la pastorale : comme indiqué dans le livret Catherine II s'avance, puis elle enlace Piotr - Eletsky, puis sa robe tombe : c'est Hermann !!
Evidemment, c'est gratuit, et outrancier, mais je trouve réducteur de juger le travail du metteur en scène sur ces détails - Herheim détourne en effet le livret, mais d'une manière intelligente et féconde - j'espère que d'autres que moi pourront juger de cette mise en scène, qui sera donnée à Covent Garden, évidemment sans le superbe Concertgebouw et Jansons.

Montfort

Encore une critique, celle - ci très enthousiaste, sur un site que je ne connais pas :

http://blog.parisbroadway.com/

 Montfort