CRR Paris - Fauré Koechlin - 10/09/17 (concert de l'année)

"REGARDS CROISÉS" / DOUBLE PORTRAIT
of 2 great French composers
Gabriel Fauré and his pupil, Charles Koechlin
Celebrating the 150th anniversary of Charles Koechlin’s birth
and a 100 years since the premiere of the Violin Sonata

- 16:00
FAURE : Sonate n° 2 for violin* & piano (1916)
KOECHLIN : Sonate for violin* & piano (1916)

- Intermission : Meet the artists and enjoy a drink with them !

- 18:00
FAURE : Piano Quintet n° 2 (1921)
KOECHLIN : Piano Quintet op. 80 (1921)

- Reception & CD signing session

SYNTONIA
Stéphanie Moraly* & Thibault Noally, violons
Caroline Donin, alto
Patrick Langot, violoncelle
Romain David, piano

Auditorium Marcel Landowski
Conservatoire à Rayonnement Régional
14 rue de Madrid
75008 Paris



Programme exigeant, chef d'oeuvresque et original, interprètes au top, salle idéale, concert gratuit.
Que demande le peuple?

Oui !

Le Quintette n'est jamais donné en plus (et la seule fois où j'ai vu la Sonate programmée, c'est par les mêmes !). Deux des plus grandes œuvres de Koechlin.

Je ne crois pas avoir entendu plus grande violoniste que Stéphanie Moraly dans une salle de concert, Romain David sert aussi cette musique avec une probité incroyable (jouer aussi bien du Koechlin sans user de tours de passe-passe brumeux à la pédale, impressionnant)… et leur Koechlin a déjà montré sa valeur.

Je ne me suis toujours pas remis de la précédente expérience (d'ailleurs, je suis les concerts de Moraly depuis : cette saison, c'était Ropartz 2 + Debussy !).

Comme tu dis, salle parfaitement calibrée pour la musique de chambre (on voit et entend bien de partout, c'est à la fois spacieux et très net), et il y a deux concerts, et c'est gratuit, et ils offrent même le pot. Sérieux ??

C'est un peu un autre esprit que lorsqu'on paie 200€ pour entendre une vedette du chant faire quatre tubes sur vingt minutes dans un hangar.

Clairement le concert que j'attends le plus de toute l'année.

Un concert qui a complètement comblé mes espérances.

Programme cohérent, bien construit, et de haute volée, avec des oeuvres assez voire très rares. (puisque c'était la première exécution de la version corrigée du Quintette de Koechlin, mais de toute façon, ce quintette n'a jamais été très joué!)
Pour tout dire, je n'avais même jamais entendu les deux Fauré en concert.

Je n'ai pas été déçu par la 2è sonate pour violon de Fauré, ma préférée, le son de Stéphanie Moraly s'avérant immédiatement riche et généreux, et j'ai été très heureux du tempo de l'Andante, qu'on joue parfois trop vite à mon goût, et qui s'est révélé hautement poétique comme il doit l'être.
La sonate de Koechlin était sur les mêmes cîmes, si ce n'est plus haut encore, sans que cela s'avère surprenant, puisque nous avions déjà pu l'entendre par les mêmes interprètes assez récemment.
Le piano de Romain David a été encore une fois précis, sobre et hautement musical.
Une heure de musique pour cette première partie, mais une heure très dense déjà, entrecoupée de présentations succintes et très pertinentes de Stéphanie Moraly et Marc Lerique-Koechlin sur la genèse des oeuvres et les échanges épistolaires entre Koechlin et son vieux maître. (les deux sonates en question datent de la même année)

La 2è partie, consacrée aux quintettes avec piano, était peut-être encore plus exigeante (pour les interprètes comme pour l'auditoire) et encore plus dense.
Chez Fauré, le mouvement lent m'a encore une fois fait le plus grand effet.
En comparaison, la musique de Koechlin fait un contraste important, tellement libre, tellement imprévisible.
Evidemment, ce quintette est un choc plus grand encore en concert qu'au disque.
On ne peut que souligner le talent et le travail des cinq interprètes, qui ont joué devant un auditoire relativement modeste (malgré l'entrée libre et le buffet offert à l'entracte ainsi que le cocktail après!) après un travail immense sur ce programme très très exigeant.
Il ne reste plus qu'à écouter l'enregistrement Timpani maintenant sorti et à comparer le "nouveau" Quintette avec celui qu'on connaissait précédemment dans les versions Rosbach ou autres, pour voir si l'on décèle aisément les 1200 fautes corrigées!

Rien à rajouter, concert fantastique dans une ambiance chaleureuse. Je découvrais les deux œuvres de Koechlin dans ces conditions, beaucoup d'émotions...

Oui, quatre œuvres gigantesques, à peu près jamais données en concert (a fortiori le Quintette qui n'avait jamais été donné dans une version fidèle – à part peut-être la création, jouée sur le manuscrit ?), et jouées à un niveau incroyable. Je ne sais pas comment on peut donner autant de musique aussi dense à ce niveau constant – dans un orchestre, si on a de petites faiblesses ponctuelles, c'est aisément masqué, mais ici, ça ne pardonnerait pas.

Par ailleurs, présentations concises et instructives, accueil chaleureux… nous étions presque scandalisés que ce soit gratuit.

Le parterre de l'auditorium était bien rempli, belle réussite pour un dimanche de reprise et de fin d'été, avec un concert pas du tout annoncé dans les circuits officiels (ni Cadences, ni site du CRR… il fallait vraiment suivre de près la lettre d'info d'Amis-Charles ou le site de Stéphanie Moraly !).

Et le disque est désormais disponible avec les deux Koechlin chez Timpani !

*Nico a écrit:

Rien à rajouter, concert fantastique dans une ambiance chaleureuse. Je découvrais les deux œuvres de Koechlin dans ces conditions, beaucoup d'émotions...

Si : on peut ajouter que le public était visiblement de qualité ! Cela rendait les conditions d'écoute idéales et, grâce aussi à l'interprétation fascinante et fidèle à la partition révisée, on ne sentait pas le temps passer, alors que ces œuvres offrent des passages "pour gens peu pressés", comme le dit Koechlin lui-même dans une lettre à Paul Collaer (20.12.1932) :

« […] Quant à mon Quintette, et qui est une œuvre à laquelle je tiens beaucoup, […] je l'ai terminé il y a déjà plusieurs années mais j'ai toujours reculé le moment de le livrer au public, d'abord parce qu'il me faut le recopier au net et revoir la partie de piano, qui par endroits est trop chargée, - ensuite parce que je pensais qu'il valait mieux attendre pour que mon nom eût davantage de notoriété, et d’« autorité » pour imposer cette musique ; non qu'elle soit, par sa polytonalité, peu compréhensible : on y est habitué à présent; mais elle est, à bien des endroits, à la fois développée et intérieure, ces passages-là étant pour des gens peu pressés et capables de suivre avec attention et sympathie une assez longue évolution de sentiments. Mais je crois qu’à présent, en effet, ce serait le moment de donner ce Quintette, et je vais me mettre au travail, dès le mois de janvier, pour en réaliser (comme disait Flaubert) la « version définitive ». D'ailleurs, j'ai toujours l'intention de l'orchestrer un jour, comme j'ai fait pour le second quatuor [op. 57 ; 1911-15] qui est devenu une Symphonie [1^ère Symphonie op. 57 bis ; orchestration 1926] ; mais je serai toujours heureux si on joue aussi ces œuvres sous leur forme de musique de chambre : quintette et quatuor à cordes. […] »

En tout cas, dans l'auditorium du CRR de Paris, le 10 septembre 2017 (85 ans plus tard), il y avait plein de gens capables de suivre avec attention et sympathie une assez longue évolution de sentiments ! Merci à eux !

Et je viens de voir que nous avons été lus et cités par les musiciens! (facebook de Stéphanie Moraly et Caroline Donin)

Pour mémoire, avec "un peu" de retard ici (mais pas sur FB), les 2 Quintettes de ce concert mémorable ont été redonnés avec le même talent le samedi 14 septembre 2019 par Syntonia dans un endroit improbable mais à surveiller ! À Gavaudun (église de Laurenque) dans le Lot-et-Garonne.

Voir ici la page de l'association "Connaissance des Jeunes Interprètes" qui a invité Syntonia.

Un de mes plus grands regrets (2017, pas Gavaudun, quoique...)...
C'est dans ce genre de cas que je bénis la technologie - voire (malgré tout) l'industrie du disque...