Philarmonie - Takemistu/ Chausson/Zemlinski - Petrenko

Je profite d'une soirée désoeuvrée pour aller écouter ce programme

Toru Takemitsu
Toward the sea, pour flûte et harpe
Ernest Chausson
Poème de l'amour et de la mer
Alexander von Zemlinsky
La Petite Sirène (Die Seejungfrau)

Le philarmonique de Radio-France est dirigé par Vasily Petrenko.

Trois oeuvres qui étaient pour moi une découverte, donc je n'ai ni attentes ni points de comparaison.

Pas grand chose à dire sur le Takemitsu, entrée en matière chambriste d'un post-debussysme de bon aloi.

Chausson: c'est superbe. La direction de Petrenko est lumineuse et aérée, on entend tout. Le point noir vient de la chanteuse: Marie-Nicole Lemieux, que j'ai apprécié dans les oeuvres pour quatuor et voix de l'école de Vienne avec les Diotima, a remplacé au pied levé Anna-Catarine Antonacci, et sa diction n'est pas des plus limpides. J'ai plus écouté ça comme un orchestre avec voix que comme une mélodie avec orchestre. Je vais chercher une version enregistrée pour réécouter cela avec attention.

Dans Zemlinski, on retrouve les mêmes qualités, mais avec plus de liant orchestral. On est loin de l'univers des quatuors et des audaces de l'ami Schoenberg dont le Peléas et Mélisande fut crée en même temps. Ca s'écoute néanmoins avec plaisir, il y a de belles couleurs et de belles atmosphères. Le parti-pris du soir me semble assez juste: une lecture au premier degré, sans chercher des profondeurs insondables, malgré des accents mahleriens, qui dit juste le plaisir qu'il y a à raconter une histoire en faisant sonner l'orchestre.

Eusèbe a écrit:

Je vais chercher une version enregistrée pour réécouter cela avec attention.

Oui, si tu trouves Otter/Jordan ou Le Roux/Dutoit par exemple, ça sera surement mieux.

Eusèbe a écrit:

Dans Zemlinski, on retrouve les mêmes qualités, mais avec plus de liant orchestral. On est loin de l'univers des quatuors et des audaces de l'ami Schoenberg dont le Peléas et Mélisande fut crée en même temps.

Ah tiens, je trouve que c'est assez proche du Pelléas de Schoenberg justement, il y a même des passages où on croirait que ça vient de l'œuvre d'à côté, je trouve.

La Philharmonie était bien peu remplie, c'est bien triste...

Apparemment, le nom de Zemlinsky est fatal au remplissage. (ça fait deux fois)

Le voisinage de Leipzig/Nelsons et Los Angeles/Dudamel a pu nuire au remplissage.
C'est dommage parce-que Petrenko est probablement le meilleur chef des trois, et qu'il donne toujours d'excellents concerts avec le Philharmonique de RF. Le concert d'hier soir était encore une fois très solide, avec un Zemlinsky admirablement conduit. Orchestre en forme, avec quasiment les meilleurs à chaque pupitre.

Xavier a écrit:

Apparemment, le nom de Zemlinsky est fatal au remplissage. (ça fait deux fois)

Non, je crois que c'est plutôt l'effet vacances scolaires (en général il n'y a pas de concerts pendant ces périodes, les Franciliens – assez riches pour aller au concert – s'enfuient) ou week-end prolongé.

Moi-même, hier, j'étais plus tenté de gambader que d'aller au concert, même avec un joli programme.

Alors s'ils avaient mis Ouverture de la Flûte Enchantée + Chopin, Concerto n°1 + Beethoven, Symphonie n°5, ils auraient peut-être rempli, mais avec un Takemitsu-Chausson-Zemlinsky, c'était trop.

Je vais finir par ne plus rien dire sur le manque d'audace des programmateurs, si même à la Philhiarmonie, sortie de Mozart, Beethoven et Mahler, on ne parvient pas à remplir les salles.

Tu me diras, c'était Los Angeles et Dudamel, mais ce soir, il ne restait plus une place avec Salonen, Varèse et Chostakovitch.

Oui, c'est ce que je disais : pour remplir, il faut vraiment un truc exceptionnel qui attrape tous les mélomanes restants… même le 15 août, si tu fais venir Berlin, ce sera plein. Mais programmer Takemitsu et Zemlinsky à ce moment-là, c'est sans doute un peu trop ambitieux (hélas).

Sinon, pour ceux qui souhaitaient écouter Anna-Caterina Antonacci dans le Poème (qu'elle avait déjà annulé il y a quelques années au TCE d'ailleurs!), samedi a été retransmis un concert avec l'Orchestre de la Loge (Olympique!) où elle le chante dans sa version pour quatuor à corde et piano).

https://www.francemusique.fr/emissions/le-concert-du-soir/recital-anna-caterina-antonacci-et-le-concert-de-la-loge-julien-chauvin-au-musee-d-orsay-60939

Très beau concert (même si un peu trop de ballets de Gluck...)

Il est effectivement fort dommage que la Philharmonie ait été si peu remplie. C'était déjà le cas lors du concert du 25 avril avec Zemlinsky et Schoenberg au programme. Il y a une éducation du public à faire en programmant beaucoup plus régulièrement des compositeurs comme Zemlinsky, Chausson ou Takemitsu sans pour autant faire un programme uniquement constitué de raretés.
J'ai trouvé ce programme très beau, très cohérent et admirablement interprété, ce qui m'a encore plus fait de la peine quant au manque de remplissage de la salle.

m.gruber a écrit:

Le voisinage de Leipzig/Nelsons et Los Angeles/Dudamel a pu nuire au remplissage.
C'est dommage parce-que Petrenko est probablement le meilleur chef des trois, et qu'il donne toujours d'excellents concerts avec le Philharmonique de RF. Le concert d'hier soir était encore une fois très solide, avec un Zemlinsky admirablement conduit. Orchestre en forme, avec quasiment les meilleurs à chaque pupitre.

Je suis totalement d'accord avec m.gruber sur Petrenko, et dans ce concert j'ai trouvé l'orchestre magnifique. C'était scintillant et chatoyant, et je me suis laissée complètement emportée en haute mer.
Petite déception sur Marie-Nicole Lemieux dans Chausson, qui pour moi en faisait trop par moment, à la limite des trémolos dans la voix, et puis surtout on ne comprenait pas grand chose à ce qu'elle chantait, ce qui était très problématique. J'avais beaucoup écouté l'enregistrement d'Irma Kolassi avec Monteux, et clairement c'était en dessous. Il y avait un contraste entre ce que faisait l'orchestre, qui était dans un registre délicat, transparent avec une très belle respiration des musiciens qui emportaient l'auditeur dans un flux et reflux sonore à la fois beau et triste, et la chanteuse qui était dans un registre beaucoup plus lourd et appuyé.
Concernant la Petite Sirène de Zemlinsky, cela a été un émerveillement, surtout que j'avais entendu l'orchestre de Paris et Conlon une semaine auparavant. Là j'avais l'impression que l'équilibre était quasiment parfait entre une vision très claire de l'architecture globale de l'oeuvre et tous les détails qu'on pouvait parfaitement entendre. Je sentais qu'à la fois Petrenko contrôlait l'orchestre tout en laissant les musiciens très libres de donner le meilleur d'eux-mêmes, et je pense que ce soir là ils ont donné le meilleur d'eux. Cela respirait le bonheur de jouer de la musique, et un amour de cette musique.

Je ne sais pas s'il est licite de mettre un lien, mais on peut désormais écouter ce concert en podcast sur France Musique

Tu peux mettre un lien vers France Musique, bien sûr.

En parlant de ça, j'ai découvert la petite sirène de Zemlinski, c'est une merveille. Le reste du programme ne m'a guère enchanté par contre. J'aurais peut-être davantage apprécié à la philharmonie.

Voilà le lien
https://www.francemusique.fr/emissions/le-concert-du-soir/le-concert-de-20h-du-vendredi-11-mai-2018-61086

Le poème de Chausson est magnifique, mais c'était peut-être en effet mieux sur place.

andika a écrit:

En parlant de ça, j'ai découvert la petite sirène de Zemlinski, c'est une merveille. Le reste du programme ne m'a guère enchanté par contre. J'aurais peut-être davantage apprécié à la philharmonie.

Même pas le Takemitsu ?

L'oeuvre de Takemitsu était vraiment très belle, mais cela rend moins bien dans la retransmission.
J'ai été assez conquise et je compte écouter d'autres oeuvres de ce compositeur (j'avais commencé ce week-end avant de retomber dans mon addiction pour la musique russe).

Tree Line, Waves, Rain Coming, Bryce, Green, Coral Island… il y a des choses fantastiques dans des styles très différent (et un fil très fourni sur le sujet en rubrique générale).

DavidLeMarrec a écrit:

andika a écrit:

En parlant de ça, j'ai découvert la petite sirène de Zemlinski, c'est une merveille. Le reste du programme ne m'a guère enchanté par contre. J'aurais peut-être davantage apprécié à la philharmonie.

Même pas le Takemitsu ?

Vraiment bof Takemitsu, ça ne m'a pas captivé outre mesure. Mais je peux réécouter le concert à l'infini donc bon, si c'est si bien que ça, je finirai par m'en rendre compte.

Une critique est parue: http://www.altamusica.com/concerts/document.php?action=MoreDocument&DocRef=6488&DossierRef=5943

Quel dommage. Même Cape Cod (le troisième mouvement) ? Sinon, peut-être un truc un peu plus lyrique comme Tree Line, ou figuratif comme Waves ? Ou plus orchestral-moderne comme Coral Island ?

Ça vaut vraiment, vraiment la peine de s'y plonger (du Debussy en mieux).

Dommage de finir ton plaidoyer en disant quelque chose d'impossible.

Pas mieux que Pelléas, bien sûr, mais mieux que les gros machins symphoniques tout aussi flasques mais moins poétiques (Mer, Images…). C'est mieux comme ça ?

DavidLeMarrec a écrit:

Pas mieux que Pelléas, bien sûr, mais mieux que les gros machins symphoniques tout aussi flasques mais moins poétiques (Mer, Images…). C'est mieux comme ça ?

Le Mr te demande d'enlever le troll de ta phrase. Ce n'est toujours pas fait

Je n'ai rien compris à cette critique de Altamusica postée par Andika, qui me laisse extrêmement perplexe. J'ai l'impression d'avoir entendu des oeuvres presque différentes.
En plus la remarque du critique sur l'orchestre du concert précédent (Gewandhaus/Nelsons) me paraît à la fois déplacée et totalement obscure (j'ai assisté à ce concert et encore une fois je n'ai pas entendu la même chose): "Perturbée par la compression et l’incroyable densité des cordes du Gewandhausorchester Leipzig la veille dans cette même salle, l’oreille peine à trouver la même puissance dans la limpidité des cordes française." Je ne sais pas comment on peut comparer sérieusement un concert Mozart/Tchaikovski à du Chausson/Zemlinsky...
Il y avait une critique plus pertinente à mon avis mais en anglais qui a été publiée du même concert par un musicologue spécialiste de Schönberg, si cela intéresse certains (je ne peux pas la poster, je suis trop nouvelle sur le forum).

«Totalement obscur», ça semble être la marque de fabrique de ce petit jeune homme d'Altamusica (ou de son fournisseur de )

Citation :

Les soli de violoncelle du Temps des lilas montre la même distance, celle d’un son chaud jamais ardent.

Dans le genre , la «distance d'un son chaud jamais ardent», c'est bien trouvé non?

(Et encore eût-il fallu, dans les soli de violoncelle du Don Quichotte de Strauss, que le son chaud pensât.)

Citation :

[...] celui d’une mer d’huile trop peu agitée pour véritablement nous emporter, malgré l’analyse psychologique et philosophique effectuée par ce chef autour de cette partition, dont nous publierons prochainement un entretien réalisé la veille du concert.

La relative finale:

Benedictus a écrit:

(Et encore eût-il fallu, dans les soli de violoncelle du Don Quichotte de Strauss, que le son chaud pensât.)

Citation :

[...] celui d’une mer d’huile trop peu agitée

Ça c'est obscène...

Frédérique R a écrit:

Petite déception sur Marie-Nicole Lemieux dans Chausson, qui pour moi en faisait trop par moment, à la limite des trémolos dans la voix, et puis surtout on ne comprenait pas grand chose à ce qu'elle chantait, ce qui était très problématique.  
 

Écoutée à la radio elle était insupportable, elle se moque de la prosodie de la langue. On se demande même si elle
comprend le sens du texte qu'elle chante