Je ne sais pas si c'était parce qu'il s'agissait de la générale (enfin, de l'avant-première jeunes
), mais les chanteurs n'étaient pas très engagés et appliqués vocalement en première partie, tous en dessous de ce qu'ils peuvent proposer d'habitude, sauf Sempey peut-être, qui s'est donné à fond dès le début.
Sierra s'est enfin épanouie dans le troisième acte, mais auparavant, beaucoup de petites imperfections techniques, du savon dans les vocalises, des aigreurs de timbres et surtout l'impression d'entendre une voix assourdie (était-ce dû à mon placement en loge de côté ? J'avais la curieuse impression que la voix était parfaitement projetée et atteignait la fréquence idéale pour se faire entendre de partout, mais elle sonnait éloignée, en arrière). En tout cas, c'est une vraie bête de scène, elle mène le spectacle, virevolte, séduit, avec une insolence que je ne lui connaissais pas (il faut dire que ça lui change de Gilda !).
Pertusi très beau diseur, mais un peu terne de voix.
Sempey, très « Figaro », chante et joue avec un naturel confondant. La seule chose qu'on peut réellement reprocher à
Brownlee, c'est son volume un peu confidentiel (pourtant, à Bastille, du second balcon, je l'avais entendu parfaitement), car le timbre est toujours d'une riche beauté et le chant souverain.
Il y a dans la direction de
Pidó de très bons moments, et des passages à vide, mais c'est de manière générale une direction vraiment aboutie, efficace et qui soutient l'action et le chant. J'ai trouvé l'
Orchestre engagé et heureux d'être dirigé par Pidó et/ou de jouer cette oeuvre. Très beaux pupitres de vents.
On ne peut s'empêcher de comparer le travail de
Michieletto dans ce
Don Pasquale avec celui qu'il a proposé à Bastille dans
Le Barbier de Séville il y a quelques années, et cela joue un peu en la défaveur du premier. On retrouve l'idée du plateau tournant, qui impose au spectacle une dynamique soutenue, mais ici, la maison de
Don Pasquale n'est limitée par aucun mur, l'espace n'étant défini que par des quelques portes portes (qui font penser à celle que Duchamp avait aménagé chez lui, rue Larrey). On comprend vite, quand des techniciens apportent à cour un fond vert, que Michieletto perçoit ce plateau un peu comme un studio de cinéma, où les espaces se composent et se décomposent à l'envi et où les différents personnages peuvent jouer leurs rôles. L'idée est belle, la réalisation parfois un peu monotone. Il faut tout de même saluer une direction d'acteur vraiment fabuleuse, précise, les chanteurs semblant s'en donner à coeur joie.
Sinon, sur l'oeuvre : c'est charmant, il y a de très séduisants numéros, mais, si on entend bien un peu de Rossini par-là, un peu de Bellini, un peu de pré-Verdi, on sent tout de même que la musique n'est pas portée par la même inspiration que ces chez trois autres.
On passe un bon moment.
Standing ovation, délire dans la salle aux saluts, émerveillement dans les yeux de chacun : j'ai vraiment l'impression d'être devenu aigri (depuis cet
Orfeo soporifique, je m'ennuie presque partout).