Votre dernier film visionné

Emeryck a écrit:

Adalbéron a écrit:

Emeryck a écrit:

Je ne trouve pas que le Sciamma soit lisse (convenu pourquoi pas, dans le sens où la photo est assez classique - mais si belle) : il y a vraiment quelque chose d'assez rugueux, aussi bien dans les visages et par cette discontinuité omniprésente - il y a notamment un passage que je trouve remarquable, c'est lorsque le Héloïse sort et court jusqu'au bord de la falaise et il y a l'échange suivant :
"- Héloïse : J'ai toujours voulu faire ça.
- Marianne : Mourir ?
- Héloïse : Courir." et les deux s'entrechoquent de manière fabuleuse.
La fin est absolument sublime, effectivement.   

Je n'ai pas trouvé toujours la photo très belle. C'est parfois jauni, parfois sursaturé (il y a souvent des lumières bleues qui stagnent un peu sur des surfaces), je ne suis pas sûr d'avoir compris le principe. Comme ici, il y a une forme d'hyper-définition de l'image (l'abominable numérique ?) qui m'a vraiment gêné par sa propension à lustrer toutes les matières.

Ceci n'est pas une publicité L'Oréal:

Je trouve vraiment dommage qu'un film en partie sur la peinture soit si peu matiériste, que tout soit concentré dans le discours (si barthésien) au profit de l'instabilité matérielle,  de la consummation, de l'irrégularité, de la blessure ; tout glisse avec joliesse.

Mais c'est un bon film. J'ai beaucoup aimé le fait que la relation entre les deux femmes n'était pas abordée comme un problème en soi (c'est une histoire d'amour comme les autres, c'est-à-dire comme les histoires hétérosexuelles), que des questions spécifiquement féminines étaient abordées dans un film d'époque (je n'avais jamais vu, je crois, une femme avoir ses règles dans un film historique).
Mais il m'a vraiment manqué le feu.

J'ai trouvé qu'il y avait quand même une sorte de texturalité dans la photo, quelque chose de très physique ; après, c'est vrai que sorti de la première partie, le parcours des protagonistes ne comporte pas tant d'embûches que cela ; enfin, il y a quand même le final qui vient en apporter un peu.
Moi, je l'ai trouvée très belle, c'est peut-être parfois un peu terne dans les couleurs mais ça va dans la direction du mat des couleurs d'une toile. Ah oui, on reconnait bien là un membre de la #teamStefano : il faut que ça soit crachottant- et que ce ne soit pas en numérique ! Plus sérieusement, à part peut-être l'aspect jauni (que je qualifierais plutôt de terne), je ne trouve rien de tout ce que tu évoques ci-dessus. Par hyper-définition, tu veux dire que c'est trop net et intelligible ?

@Stefano, sa photographie est plutôt classique mais de très bonne tenue, tout de même : il y a en tout cas une véritable ambition plastique

En parlant d'ambition plastique, j'ai oublié de dire que l'étudiant en histoire de l'art n'a pas pu s'empêcher d'avoir mal en voyant les portraits peints dans le film, qui font bien plus Magritte pas frais que XVIIIe, mais l'exactitude historique n'était peut-être pas l'ambition...
Les couleurs d'une toile ne sont pas forcément mattes. Justement, là, elle l'était, parce que c'était une technique néo-réaliste très XXe.
Hyper-définition, c'est peut-être pas tout à fait ce que je voulais dire : c'est simplement que je trouve les carnations vraiment lissées et toutes les matières en général pas très rugueuses. J'aurais peut-être aimé plus d'aspérité dans le montage, qui coule de manière assez paisible. Quant au traitement de l'image, ce n'est pas qu'une affaire de crachotement, c'est juste que le côté papier glacé m'a refroidi (c'est propre, c'est net).

Adalbéron a écrit:

En parlant d'ambition plastique, j'ai oublié de dire que l'étudiant en histoire de l'art n'a pas pu s'empêcher d'avoir mal en voyant les portraits peints dans le film, qui font bien plus Magritte pas frais que XVIIIe, mais l'exactitude historique n'était peut-être pas l'ambition...
Les couleurs d'une toile ne sont pas forcément mattes. Justement, là, elle l'était, parce que c'était une technique néo-réaliste très XXe.

Assez d'accord avec ça par contre, mais j'ai l'impression que c'est une constante dans les peintures faites pour le cinéma, on recherche plus une sorte d'évocation vague que l'exactitude.
C'est vrai que c'est assez dommage.
Après je n'ai pas creusé la question est-ce que tu aurais des exemples de toiles peinte pour le cinéma qui retrouve vraiment l'esprit de l'art d'une époque?

Parsifal a écrit:

Adalbéron a écrit:

En parlant d'ambition plastique, j'ai oublié de dire que l'étudiant en histoire de l'art n'a pas pu s'empêcher d'avoir mal en voyant les portraits peints dans le film, qui font bien plus Magritte pas frais que XVIIIe, mais l'exactitude historique n'était peut-être pas l'ambition...
Les couleurs d'une toile ne sont pas forcément mattes. Justement, là, elle l'était, parce que c'était une technique néo-réaliste très XXe.

Assez d'accord avec ça par contre, mais j'ai l'impression que c'est une constante dans les peintures faites pour le cinéma, on recherche plus une sorte d'évocation vague que l'exactitude.
C'est vrai que c'est assez dommage.
Après je n'ai pas creusé la question est-ce que tu aurais des exemples de toiles peinte pour le cinéma qui retrouve vraiment l'esprit de l'art d'une époque?

Non, je ne vois pas ; dans mon souvenir, c'est vrai que c'est souvent toujours assez raté, mais je n'ai pas l'impression d'avoir tant vu de films intégrant un pastiche d'une toile d'une époque.
Andreï Roublev est pour moi l'un des plus beaux films sur un peintre et la peinture, mais nulle toile...

Adalbéron a écrit:

Andreï Roublev est pour moi l'un des plus beaux films sur un peintre et la peinture, mais nulle toile...

Adalbéron a écrit:

Parsifal a écrit:

Après je n'ai pas creusé la question est-ce que tu aurais des exemples de toiles peinte pour le cinéma qui retrouve vraiment l'esprit de l'art d'une époque?

Non, je ne vois pas ; dans mon souvenir, c'est vrai que c'est souvent toujours assez raté, mais je n'ai pas l'impression d'avoir tant vu de films intégrant un pastiche d'une toile d'une époque.
Andreï Roublev est pour moi l'un des plus beaux films sur un peintre et la peinture, mais nulle toile...

Pareil. Tout ce que je vois d'un peu convaincant, dans des films de fiction, comme représentation de l'acte de peindre, c'est La Belle Noiseuse de Rivette - mais, là, comme il s'agit d'une transposition contemporaine...

Sinon, je ne me rappelle plus très bien de la façon dont procèdent Pasolini dans son sketch du Décaméron, ni Pialat ou Minnelli dans leurs Van Goghs respectifs (je me souviens avoir bien aimé les deux pour des raisons opposées - alors que je ne suis vraiment pas fou du peintre.)

Schnabel en a fait un aussi sur Van Gogh, dans ce dernier et dans le Pialat, les acteurs peignent sur des repros, quand tu vois les toiles j'ai le souvenir qu'elles sont déjà bien avancées.
Jamais vu le Minelli.

Prosopopus a écrit:

Schnabel en a fait un aussi sur Van Gogh, dans ce dernier et dans le Pialat, les acteurs peignent sur des repros, quand tu vois les toiles j'ai le souvenir qu'elles sont déjà bien avancées.

C'est en effet ce dont je me souvenais pour le Pialat.

Prosopopus a écrit:

Jamais vu le Minelli.

En fait, ça fonctionne de la même manière que le Pialat.

Spoiler:

Mais, je me souviens avoir, contre toute attente, beaucoup aimé le film.

Prosopopus a écrit:

Schnabel en a fait un aussi sur Van Gogh, dans ce dernier et dans le Pialat, les acteurs peignent sur des repros, quand tu vois les toiles j'ai le souvenir qu'elles sont déjà bien avancées.

Oui, on voit des reproductions, mais Pialat a été lui-même peintre (surtout dans sa jeunesse, je crois, il a abandonné la peinture quand il est devenu cinéaste) et il est très sensible à la matière ; il y a beaucoup de plans dans Van Gogh où on voit le tableau en train de se faire et ce sont ses mains qui tiennent le pinceau. Une expo des peintures de Pialat a d'ailleurs eu lieu après sa mort, organisée par Sylvie, sa veuve.

Un petit reportage ici.

Parsifal a écrit:

Adalbéron a écrit:

Andreï Roublev est pour moi l'un des plus beaux films sur un peintre et la peinture, mais nulle toile...

Je préfère Les Galettes de Pont-Aven  

Spoiler:

Prosopopus a écrit:

Schnabel en a fait un aussi sur Van Gogh.

« At Eternity's Gate ». Tu l'as vu, Prosopopus ?
La bande annonce ne me fait pas du tout envie.

docteur mabuse a écrit:

Je préfère Les Galettes de Pont-Aven  

Spoiler:

docteur mabuse a écrit:

« At Eternity's Gate ». Tu l'as vu, Prosopopus ?
La bande annonce ne me fait pas du tout envie.

Oui, j'avais trouvé ça un peu trop gentillet, scolaire, avec le côté très naturaliste poétique de Schnabel qui me semble souvent mal amené, la nature, les gros plans granuleux sur les visages. Dans un genre proche ça m'avait fait penser au Bright Star de Jane Campion sur Keats, dans la façon de faire du panthéisme sans y toucher et de placer la nature comme une force créatrice qui irrigue l'oeuvre d'artistes mais sans vraiment proposer autre chose que des teintes un peu fanées et des rais de soleil à travers des branchages, filmés en sur-exposition.

Mounia Meddour : Papicha        2019


Le film est "librement inspiré de faits réels" et se déroule durant les années de plomb à Alger. Je suis en fait assez partagé sur ce film (même si je l'aime globalement bien) : comme les deux faces d'une étoffe, que la femme au centre du récit ne cesse de manipuler, de plier, de travailler mais aussi de déterritorialiser de façon claire puisque ces étoffes eussent tout aussi bien pu faire des hijabs, le film change sans cesse de cap. Le début du film me semble capital : deux jeunes filles montent précipitamment dans un taxi (dont on connaît la tradition subversive au cinéma notamment chez Kiarostami) où elles changent rapidement de tenue, mettent de la musique, se maquillent et font mine de porter le voile au passage du barrage de police, qu'elles tombent tout aussitôt. Le propos est en plus prudent : il ne s'agit pas de jeter de la haine sur l'Algérie mais simplement de dénoncer ce genre de dérives coercitives. J'ai toutefois trouvé les revirements parfois un peu plaqués, et certains moments un peu trop "arracheur de larmes" ; la force de la caméra est cependant très communicative et le trio à l'écran est d'un grand dynamisme.

Dans Kitty de Leisen, j'avais été impressionné par le portrait Gainsborough de Paulette Goddard (le noir et blanc aidait). Je découvre qu'il a été mis aux enchères.

https://www.christies.com/lotfinder/Lot/paulette-goddard-prop-oil-painting-from-kitty-3820231-details.aspx

J'ai vu Le Parrain de Francis Ford Coppola la semaine dernière et j'ai été un peu désarçonné car ce que j'ai vu ne correspondait pas du tout à l'image que je m'en faisais. J'imaginais quelque chose de très opératique, un Visconti mafioso, mais ce n'est pas vraiment ça en réalité. Il y a de très beaux moments, mélodramatiques ou spectaculaires (l'interlude sicilien et son idylle esquissée, fatalement, m'ont enchanté ; en général les scènes d'assassinats, dans le restaurant, dans d'improbables blés avec la statue de la Liberté en fond, à une anodine barrière de péage ; la scène qui fait s'alterner le baptême et les meurtres des traîtres très efficace également), mais je n'y ai pas trouvé le « souffle », la dimension « fresque » auquel je m'attendais. Passée cette relative surprise de ne pas arriver à faire concorder l'horizon d'attente que je m'étais formé et l'objet que j'avais sous les yeux, j'ai été frustré par le peu d'épaisseur donnée aux personnages par le scénario. Marlon Brando et Al Pacino ne sont pas falots, évidemment, mais j'ai trouvé que le scénario ne les aidait pas à livrer un portrait fouillé de leur personnage.
Un très beau film, quoi qu'il en soit, même si je le trouve un peu surestimé – eût égard à l'idée que le discours autour de lui m'en avait donnée.

Le I, c'est encore une esthétique très mixte: dedans il y a davantage de film de gangster de série B (de façon délibérée - ne serait-ce que la présence de Sterling Hayden) que d'opératisme viscontien. Le côté «fresque», c'est vraiment dans le II que ça apparaît - et le côté opéra maniériste, c'est surtout le III que ça culmine.

Benedictus a écrit:

Le I, c'est encore une esthétique très mixte: dedans il y a davantage de film de gangster de série B (de façon délibérée - ne serait-ce que la présence de Sterling Hayden) que d'opératisme viscontien. Le côté «fresque», c'est vraiment dans le II que ça apparaît - et le côté opéra maniériste, c'est surtout le III que ça culmine.

Oui, je n'ai pas revu les films depuis un bon moment, mais je me souviens que le II est nettement plus intéressant que le I ; le III est plus faiblard, mais effectivement, il y a ce côté "opéra maniériste" dont tu parles, avec notamment une séquence très emblématique au Massimo (je crois) avec l'intermezzo de Cavalleria rusticana...

Le II c'est le sommet. Mais le I est génial …
Le III plus faible, mais bon film quand même.

Comme tout le monde ici, le I est un excellent film mais le chef d’œuvre (le plus riche en tout cas) c'est le II et le trois est clairement le plus faible mais le final est absolument fantastique (et ce dernier plan! )

ces temps ci

Sam Mendes
Noces rebelles

Dans la veine déflagrante d'American Beauty


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Mathieu Amalric
La chambre bleue

Agnès Jaoui : Place publique        2018


J'ai trouvé ça assez mauvais, c'est visiblement un film de discours puisqu'il n'y a vraiment pas grand-chose à se mettre sous la dent en terme de mise en scène et à peine plus en terme de prises de vues. Ce qui m'a profondément agacé dans ce film, c'est la caricaturalité du discours qui est aussi profond qu'une liste de courses : ça fait très discours plaqué, que l'on met là pour se donner bonne conscience exposé de manière tout à fait manichéenne - à part pour la fille de Castro qui navigue dans un entre-deux - : le personnage joué par Jaoui, la gentille qui veut donner de la visibilité à une petite afghane et qui ne cesse de vanter son ami qui fait de l'agriculture biologique et en face le méchant Castro (!), en fin de piste, parfaitement cynique et en dehors de toutes ces préoccupations sociales. Le film n'a pour moi aucun intérêt puisqu'il se contente de mettre bout à bout (voire répéter) ce genre de choses sans jamais rien développer.
Petite question pour Stefano : Jaoui a-t-elle la carte ?

Emeryck a écrit:

Petite question pour Stefano : Jaoui a-t-elle la carte ?

Bon, alors, après vérification attentive par nos services, je peux te répondre : oui, mais ce n'est plus la carte Gold, et d'ailleurs ce dernier film a été plus fraîchement accueilli que d'habitude. Le système Bacri-Jaoui, ça n'a guère bougé depuis Le goût des autres, et ça commence à tourner un peu à vide. Bacri fait plus ou moins le même rôle de bougon/ronchon, et c'est de plus en plus caricatural et fatigant, même si ça marche encore par moments (Le Sens de la fête, c'était plutôt réussi, mais ce n'est pas Jaoui qui mettait en scène).

Si tu veux un point rapide sur les cartes Gold actuelles, je dirais : Sciamma, Honoré, Ladj Ly (triomphe prochainement en vue pour Les Misérables, et probable moisson de Césars)...

Sybil, de Justine Triet (tiens, encore une qui a la carte...)

Emberlificoté, et finalement assez vain : le personnage de Sybil est loin de toute crédibilité en psychanalyste (en gros, elle fait exactement tout ce que Freud (et après lui Lacan) dit de ne pas faire), et le scénario multiplie les artifices de narration pour un résultat assez maigre. Les hommes sont des caricatures (le pauvre Paul Hamy, pourtant très bon acteur, j'adore L’Ornithologue, n'est ici qu'un ectoplasme, c'en est gênant pour lui), et les femmes pas beaucoup plus intéressantes (on ne quitte guère le stade de la crise de nerfs). Je vois bien les références, mais elles fonctionnent contre le projet : Une autre femme, de Woody Allen, mais la comparaison avec Rowlands est accablante pour Efira, et Stromboli de Rossellini, dont deux plans seulement contiennent plus de cinéma que tout le film de Triet...

Etre vivant et le savoir, d'Alain Cavalier

On connait le dispositif des films de Cavalier depuis plusieurs années : plus d'équipe technique, mais une caméra légère qui correspond exactement au fameux projet de la caméra stylo au temps de la Nouvelle Vague ; plus vraiment de scénario, plus vraiment d'acteurs. C'est une sorte de journal intime filmé, et pour ce dernier film, c'est éblouissant et bouleversant. Cavalier filme la vie et donc en même temps la mort au travail : il nous montre des végétaux qui se métamorphosent, et à travers son amie Emmanuèle Bernheim, un corps que la maladie torture et épuise, mais qui continue à lutter et veut à tout prix, jusqu'au bout, rester lucide et vivant. Le thème de la passion (avec toute la polysémie du terme) est aussi au cœur du projet, avec une petite sculpture du Christ que l'on retrouve dans de nombreux plans. C'est souvent insoutenable par ce qu'il nous force à regarder en face (l'expérience de la disparition, qui fait l'objet d'une séquence impressionnante où le cinéaste imagine ce que pourrait être sa fin), mais jamais démoralisant ni désespérant, vraiment un très grand film.


Un plan du film

Stefano P a écrit:

Emeryck a écrit:

Petite question pour Stefano : Jaoui a-t-elle la carte ?

Bon, alors, après vérification attentive par nos services, je peux te répondre : oui, mais ce n'est plus la carte Gold, et d'ailleurs ce dernier film a été plus fraîchement accueilli que d'habitude. Le système Bacri-Jaoui, ça n'a guère bougé depuis Le goût des autres, et ça commence à tourner un peu à vide. Bacri fait plus ou moins le même rôle de bougon/ronchon, et c'est de plus en plus caricatural et fatigant, même si ça marche encore par moments (Le Sens de la fête, c'était plutôt réussi, mais ce n'est pas Jaoui qui mettait en scène).

Si tu veux un point rapide sur les cartes Gold actuelles, je dirais : Sciamma, Honoré, Ladj Ly (triomphe prochainement en vue pour Les Misérables, et probable moisson de Césars)...

Ah ! C'est bien ce qu'il me semblait !

Oui, mais ils ont quand même des statuts bien différents : Honoré a carrément une carte Gold Vétéran ++ alors que Sciamma n'avait aucune carte avant Portrait de la jeune fille en feu - et en plus, son cinéma est quand même très singulier. Malick a aussi une carte Gold Vétéran ++.

Emeryck a écrit:

Oui, mais ils ont quand même des statuts bien différents : Honoré a carrément une carte Gold Vétéran ++ alors que Sciamma n'avait aucune carte avant Portrait de la jeune fille en feu - et en plus, son cinéma est quand même très singulier. Malick a aussi une carte Gold Vétéran ++.

Pas d'accord avec toi sur Sciamma ; elle a la carte depuis Naissance des pieuvres, et elle est Gold depuis Bande de filles. Là, simplement, elle passe dans une catégorie plus prestigieuse, avec sujet à palme et plus-value artistique... Malick, c'est différent et plus nuancé, il n'a jamais vraiment eu la carte, c'est plus compliqué que ça (en gros, très en gros, la banque centrale, c'est Télérama-Inrocks-Le Monde-France Inter-Cahiers du cinéma, et sur Malick, il n'y a pas unanimité)...

Stefano P a écrit:

Emeryck a écrit:

Oui, mais ils ont quand même des statuts bien différents : Honoré a carrément une carte Gold Vétéran ++ alors que Sciamma n'avait aucune carte avant Portrait de la jeune fille en feu - et en plus, son cinéma est quand même très singulier. Malick a aussi une carte Gold Vétéran ++.

Pas d'accord avec toi sur Sciamma ; elle a la carte depuis Naissance des pieuvres, et elle est Gold depuis Bande de filles. Là, simplement, elle passe dans une catégorie plus prestigieuse, avec sujet à palme et plus-value artistique... Malick, c'est différent et plus nuancé, il n'a jamais vraiment eu la carte, c'est plus compliqué que ça...

Ah oui, tiens, finalement, elle a eu pas mal de prix avant, tu as raison.
Oui, c'est différent mais bon ce n'est peut-être que la vétéran +, alors : il est allé pas mal de fois à Cannes, à la Mostra. Quand je dis reprends avoir la carte, ce n'est pas toujours pour sous-entendre que le/la cinéaste n'est pas très bon. C'est vrai que Malick n'était pas très bien choisi car après The tree of life, il est parti un peu en roue libre ; j'aurais dû citer les Dardenne qui ont même une carte Gold Vétéran +++, je pense.

Stefano P a écrit:

Le système Bacri-Jaoui, ça n'a guère bougé depuis Le goût des autres, et ça commence à tourner un peu à vide.

Ah, moi j'avais détesté dès Le Goût des autres, et du coup je n'ai pas vu les suivants.

Emeryck a écrit:

Ah oui, tiens, finalement, elle a eu pas mal de prix avant, tu as raison.
Oui, c'est différent mais bon ce n'est peut-être que la vétéran +, alors : il est allé pas mal de fois à Cannes, à la Mostra. Quand je dis reprends avoir la carte, ce n'est pas toujours pour sous-entendre que le/la cinéaste n'est pas très bon. C'est vrai que Malick n'était pas très bien choisi car après The tree of life, il est parti un peu en roue libre ; j'aurais dû citer les Dardenne qui ont même une carte Gold Vétéran +++, je pense.

Les Dardenne, pas de doute, c'est la carte ad aeternam (mais y'a eu frémissement de dévaluation sur Le Jeune Ahmed, il faut qu'ils se méfient pour la prochaine fois) ! Attention : ça ne veut pas dire que tous ces gens ne sont pas bons ; simplement, quoi qu'ils fassent, ils ont la carte, autrement dit, ils sont intouchables (par exemple, Honoré fait des films souvent très réussis et des livres, des pièces ou des mises en scène d'opéra souvent foireux, mais ça n'a pas d'importance, il a la carte !). Un des signes avant-coureurs de perte de carte, c'est quand Télérama fait deux critiques pour et contre sur un film ; là, ça sent vraiment le roussi...

Stefano P a écrit:

en gros, très en gros, la banque centrale, c'est Télérama-Inrocks-Le Monde-France Inter-Cahiers du cinéma

Ça fait pas loin de vingt ans que je n'ai ouvert aucun de ces médias (un peu moins pour Le Monde en version numérique), mais dans mon souvenir, les Cahiers (peut-être parce que plus spécialisés?) ne présentaient pas le caractère prescripteur, unanimiste et bien-pensant du reste de ta liste. Il y aurait eu une convergence des lignes éditoriales depuis?

Danielle Lessovitz : Port authority        2019

 + /
Il s'agit du premier long-métrage de la cinéaste américaine Danielle Lessovitz qui porte à l'écran une histoire d'amour queer. En fait, le film prend une tonalité sociale un peu plus globale puisque l'on suit deux discriminés de la société américaine : tout d'abord, Wye, femme trans noire et Paul fraîchement placé en liberté conditionnelle. Ce qui me semble le plus intéressant dans ce film, c'est sa dimension spatiale : Paul, employé comme déménageur - en fait, il travaille pour déloger les immigrés - retire de l'espace alors qu'au contraire, Wye, dans sa salle de danse, créé de l'espace - elle dit d'ailleurs qu'elle "essaie de récupérer de l'espace", celui qu'on ne lui donne pas. Les deux protagonistes vont alors vivre une histoire d'amour mais évidemment, ce n'est pas sans compter la quête d'espace antagoniste des deux amoureux - le final est, de ce point vue, extrêmement prévisible et c'est dommage.
Le discours est également un peu plus vaste que ça puisqu'il touche également à l'identité : les protagonistes ne cessent de mentir pour dissimuler leur véritable condition - c'est en plus absurde car ils ne sont pas si loin l'un de l'autre. On voit également un autre découpage, à travers la soeur de Paul, qui ne veut pas l'héberger pour ne pas salir son image. J'ai aimé l'atmosphère très flottante du long-métrage (qui fait un peu penser à Akerman) et l'histoire d'amour est présentée dans cette lignée : on la devine par ses contours, elle s'installe de façon presque impalpable ; cependant, le propos est peut-être un peu lisse par moments ; la photographie et notamment les lumières est agréable.

Pedro Almodóvar : Mujeres al borde de un ataque de nervios        1988

 
J'ai beaucoup aimé, c'est très différent des derniers films du réalisateur, beaucoup plus emporté et fou. Des constantes traversent cependant l'oeuvre d'Almodóvar, celle qui frappe d'emblée, c'est la colorimétrie avec un usage extrêmement prononcé du rouge, il y a également l'usage très sensible de la musique mais aussi la présence majoritaire de femmes en personnages centraux. Ce qui m'a le plus séduit dans ce film, c'est son élasticité : tous les personnages sont sans cesse mus par quelque chose de très violent puis reviennent immédiatement sur leurs pas (Candela sur la terrasse, les rencontres avec Carlos, etc) et cela entraîne des chevauchements savoureux (l'alibi du téléphone et les policiers essayant de comprendre ce qu'ils se passent) conjugués à des rémanences (le taxi, le couple Marisa-Carlos) ; c'est vraiment très enlevé et plaisant. La scène finale (après l'aéroport) est vraiment très bien - et mention spéciale au très beau générique ouvrant le film.

Bertrand Blier : Calmos        1976


Le début m'a assez plu, quelque chose d'assez millimétré, très mutique, reposant entièrement sur un comique de geste puis ensuite cette scène de la rue Gustave Flaubert, aux dialogues très tranchants mais le film sombre ensuite dans un délire total qui n'a plus d'autre ligne de conduite que la surenchère et ça devient bien long et franchement de mauvais goût ; sinon même remarque que pour les blagues de mauvais goût des Valseuses même si c'est ici plus désamorcé par l'absurde ambiant ; malgré les longueurs, il y a tout de même un bon duo d'acteurs au centre : Marielle (très bon) et Rochefort et quelques scènes font sourire ; même si la fin, franchement...

Oui, le film est clairement divisé en deux !

Cololi a écrit:

Oui, le film est clairement divisé en deux !

Oui : avant et après la   .

Et pour quelques dollars de plus

+

Claude Chabrol
Jours tranquilles à Clichy

Je me demande si Henry Miller fumait sous la douche ?

Willy Braque : Amnésie 25        1967
Acteur fétiche des débuts de Jean Rollin (Lèvres de sang, Les démoniaques, Jeunes filles impudiques), Willy Braque a aussi réalisé deux longs et deux courts métrages. Dans ce court-métrage, le style est plutôt haché et obsessionnel ; on semble deviner un traumatisme issu de la seconde guerre mondiale ; ça me semblait intéressant (le générique est inventif) mais assurément trop sommaire : aucune parole, le traitement du trauma est assez classique ; ce n'est toutefois pas inintéressant.

Willy Braque : Chute libre        1969
Il s'agit ici du deuxième long-métrage de Willy Braque, moins intéressant que le premier - et d'ailleurs assez inintelligible ; certaines séquences font tout de même sourire tant elles sont inscrites dans leur époque. Mais franchement, je peine à saisir une véritable ligne directrice (pertinente) ni une quelconque envolée.

Jean Rollin : Les démoniaques        1974

 +
Un Rollin assez faible, d'une longueur nettement excessive, où le travail sur les atmosphères et les couleurs est nettement moins fouillé. Il nous offre cependant quelques scènes assez drôles, notamment un rôle de Willy Braque assez à contre-courant de ceux qu'il joue ordinairement chez Rollin mais aussi la scène où il envoie tout balader au bar. 


Jean Rollin : Les amours jaunes        1958

C'est la première réalisation de Jean Rollin, adaptation de quelques poèmes de Tristan Corbière du recueil Les amours jaunes. C'est intéressant car c'est encore assez loin des préoccupations thématiques et esthétiques vers lesquelles se tournera le réalisateur au milieu des années soixante. J'ai l'impression de quelque chose de plus intimiste - notamment avec la présence exclusive de la plage de Pourville-lès-Dieppe qui est si importante dans la filmographie de Jean Rollin. Le réalisateur privilégie un traitement global et plutôt atmosphérique même si les images sont d'une pertinence parfois relâchée.

Gore Verbinski : The weather man        2005


J'ai regardé ce film totalement au hasard, mauvaise idée. C'est parfaitement insipide, on suit un présentateur météo qui est à un point-tournant de sa vie mais le film ne parvient pas du tout à retranscrire cette angoisse situationnelle, le délitement de la famille et à la limite du grotesque et surtout : qu'est-ce qu'on s'ennuie ! Le film n'offre rien d'intéressant dans son traitement de la temporalité, ni des trajectoires des personnages ; et la fin est assez agaçante.

Gilles Grangier : Archimède le clochard        1958


Un film dont le scénario est signé Jean Gabin lui-même, dont il tient le premier rôle : un clochard qui refuse de vivre sous les ponts. Les dialogues signés Michel Audiard sonnent parfois très bien - notamment dans la scène (très critique) où Archimède rapporte le chien et finit dans un appartement un peu mondain. J'ai toutefois trouvé l'écriture globale des personnages assez peu suivie et pas follement intéressante.

Meurtres sous contrôle



Je n'attendais pas grand chose de cette série B, en fait c'est très chouette, étonnant et prenant.
A l'époque (1976) on faisait encore de bonnes BO. (ici le compositeur est Frank Cordell, remplaçant Herrmann initialement prévu mais qui est mort le lendemain de sa vision du film)

Luis Buñuel : Le fantôme de la liberté        1974

 + / 
Même si je crois que je préfère les deux films qui encadrent celui-ci (Le charme discret de la bourgeoisie avant et Cet obscur objet du désir après), j'ai bien aimé ce film. Buñuel continue sur son chemin en fustigeant de manière tout à fait amusante la bourgeoisie et de la religion ; ici, c'est la liberté qui est mise sous l’œil de la caméra. La structure que choisit Buñuel est assez classique dans sa filmographie, il s'agit de suivre les personnages sur le fil de leurs interférences : c'est-à-dire qu'il ne s'agit pas vraiment de suivre des personnages principaux canoniques mais plutôt de varier leur importance de fil en aiguille. Le film garde toujours des éléments surréalistes assez distinctifs - notamment le bestiaire qui ceint le film. En fait, j'ai trouvé que le film était un peu inégal : il y a de superbes séquences (toute l'attente autour des mystérieuses photographie qui joue sur notre morale) et d'autres plus anecdotiques ou un peu lourdes (le cours aux officiers de police, parfois - qui est éclairant sur le titre du film). Ça reste toutefois un bon film, très singulier et féroce.

Doulgas Sirk : All that heaven allows        1955

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J'ai beaucoup aimé ce film. Je crois que c'est le film de Sirk que je préfère parmi les trois que j'ai vus. Tout d'abord, les lumières et les couleurs sont superbes, très chaleureuses, avec ce jeu omniprésent sur les couleurs des vêtements de Cary vis à vis des couleurs extérieures. Cela rend le traitement du mélodrame quelque peu étonnant puisqu'il est d'ordinaire dans un monde à part, assez intemporel ; mais ici, Sirk dresse une critique assez virulente et cruelle du conservatisme américain puisque tout le monde tourne le dos à Cary dès qu'elle tombe amoureuse de ce jeune jardinier - les derniers mots de ses deux enfants sont d'ailleurs édifiants. J'ai surtout aimé le traitement des petits leitmotivs que Sirk adjoint au récit : le métier de Kirby (il s'occupe des arbres autrement dit de la vie, alors qu'on parle souvent de Cary comme une veuve ; ce traitement prend d'ailleurs toute son ampleur à la fin avec la branche qui rompt) et cette immense fenêtre dans le moulin que Kirby réhabilite, utilisée de manière très hermétique, comme paroi entre ce sublime paysage enneigé, bien illusoire et les deux protagonistes. À travers sa façon de filmer, Sirk arrive à communiquer une véritable chaleur, celle des après-midis d'hiver au crépitement des bûches.

King Vidor: "The fountainhead"   1949




Revu avec plaisir ce film.
Je ne me souvenais plus à quel point la photo du film, très belle, était si graphique, par mimétisme avec le héros architecte "moderne".
Ainsi que du rôle de Patricia Neal (son premier film), assez peu conventionnel pour l'époque.
Derrière la figure du héros arc-bouté sur ses convictions, on peut aussi voir un archétype assez détestable de l'individualiste américain forcené (ceci expliquant cela, le scénario est d'Ayn Rand, tiré de son propre roman à succès)

néthou a écrit:

King Vidor: "The fountainhead"   1949




Revu avec plaisir ce film.
Je ne me souvenais plus à quel point la photo du film, très belle, était si graphique, par mimétisme avec le héros architecte "moderne".
Ainsi que du rôle de Patricia Neal (son premier film), assez peu conventionnel pour l'époque.
Derrière la figure du héros arc-bouté sur ses convictions, on peut aussi voir un archétype assez détestable de l'individualiste américain forcené (ceci expliquant cela, le scénario est d'Ayn Rand, tiré de son propre roman à succès)

C'est un film que j'aime beaucoup aussi, mais effectivement le fond est pour tout dire assez "spécial", on y trouve également des métaphore sexuelles hilarantes dans leur absence de subtilité.

Costa-Gavras : Section spéciale        1975


C'est un film nécessaire dans le sens où il est assez éclairant sur la période de l'occupation nazie en France, je n'ai cependant pas autant accroché que d'habitude, les acteurs me semblaient moins bons et la mise en scène était plus sommaire. Il y a également quelque chose d'assez systématique dans le déroulement du récit qui ne me séduit pas tant que ça et j'ai trouvé la fin assez mal venue - même si les phrases finales sont très importantes ; les flash-back ne sont d'ailleurs pas très bien intégrés au récit, je trouve. C'est tout de même instructif à visionner malgré tout.

Diamants sur canapé

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Tod Browning : Dracula        1931


J'ai été vraiment déçu par ce film, j'avais le Nosferatu de Murnau en tête et son inventivité incroyable ; ici, j'ai été séduit par les images qui ouvrent le film, notamment celles de l'arrivée au château, très belles, notamment par la profondeur et l'éclairage des plans mais le milieu est vraiment très poussif et toute l'atmosphère anxiogène initiale a disparu. Heureusement, Lugosi est bon dans son rôle mais ç'a n'a pas suffit à susciter constamment mon intérêt tout au long du film ; la fin est cependant un peu mieux que le centre - notamment ce plan éloigné de l'immense escalier avec le pilier. C'est dommage, surtout quand on sait de quoi est capable Browning.

Emeryck a écrit:

Doulgas Sirk : All that heaven allows        1955

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J'ai beaucoup aimé ce film. Je crois que c'est le film de Sirk que je préfère parmi les trois que j'ai vus. Tout d'abord, les lumières et les couleurs sont superbes, très chaleureuses, avec ce jeu omniprésent sur les couleurs des vêtements de Cary vis à vis des couleurs extérieures. Cela rend le traitement du mélodrame quelque peu étonnant puisqu'il est d'ordinaire dans un monde à part, assez intemporel ; mais ici, Sirk dresse une critique assez virulente et cruelle du conservatisme américain puisque tout le monde tourne le dos à Cary dès qu'elle tombe amoureuse de ce jeune jardinier - les derniers mots de ses deux enfants sont d'ailleurs édifiants. J'ai surtout aimé le traitement des petits leitmotivs que Sirk adjoint au récit : le métier de Kirby (il s'occupe des arbres autrement dit de la vie, alors qu'on parle souvent de Cary comme une veuve ; ce traitement prend d'ailleurs toute son ampleur à la fin avec la branche qui rompt) et cette immense fenêtre dans le moulin que Kirby réhabilite, utilisée de manière très hermétique, comme paroi entre ce sublime paysage enneigé, bien illusoire et les deux protagonistes. À travers sa façon de filmer, Sirk arrive à communiquer une véritable chaleur, celle des après-midis d'hiver au crépitement des bûches.

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Pourquoi ça ne m'étonne pas