ANTONÍN DVOŘÁK
Carnaval, ouverture
ROBERT SCHUMANN
Concerto pour violoncelle et orchestre
JOHANNES BRAHMS/ ARNOLD SCHOENBERG
Quatuor avec piano n° 1 op. 25
EDGAR MOREAU violoncelle
ORCHESTRE NATIONAL DE FRANCE
LORENZO VIOTTI direction
Au moment de la constitution de mon abonnement de saison, le concert à la PP, dans lequel ce chef dirigeait un incroyable programme de chant choral russe (Rachmaninov, Schnittke, Rimski-Korsakov et Kedroff) et la 10ème de Chostakovitch, n'avait pas encore eu lieu. J'avais adoré ce chef charmant et charismatique, et ce concert compte parmi ceux qui laissent une trace durable.
C'est en feuilletant la brochure que je me suis rendu compte, il y a seulement quelques jours, que j'étais passé à côté de ce concert. Pour une fois, à RF, j'ai eu du mal à avoir une place. Et de fait, c'était vraiment bien plein hier soir, à part quelques places au balcon.
Avant la musique, le chef, peut-être est-ce son habitude, a présenté son programme au micro, en quelques mots. Il l'avait déjà fait à la PP au printemps. C'est habile et ça éclaire utilement la construction du programme, le choix des œuvres et la façon dont elles dialoguent en elles. Cela permet de souligner aussi ce qu'il souhaite mettre en avant dans son interprétation ; c'est un bon complément au programme de salle.
Dvorak : l'écueil de jouer ce morceau comme une fanfare est très habilement évité. Rythme vraiment très rapide (qui fait penser au tempo retenu par Paavo Järvi avec le Royal Philharmonic, sensiblement plus rapide que la moyenne). Découpage en trois sections très marqué, mais sans retombée d'intensité dans la section centrale, plus lente ou intériorisée. C'est terriblement jouissif, puissant, dansant, un vrai régal ! Viotti exulte : visage tout sourire, il se pourlèche de diriger. La connivence avec l'orchestre se ressent facilement : clins d’œil, petits sourires... Comment arrive-t-il à créer une telle complicité si rapidement (avec seulement, j'imagine, une journée de répétitions, au mieux) ?
Schumann : c'est un concerto que je connais plutôt bien, et j'ai été globalement déçu de cette interprétation. Belle projection de son de Moreau, même s'il me semblait parfois sur le fil. Je suis passé à côté du fameux dialogue entre le soliste et le violoncelle solo. Viotti nous avait parlé des changements subits de thèmes et d'ambiances, reflets des variations d'humeur de Schumann et de sa maladie. Le programme de salle revient également sur ce point, avec plus de détails. J'ai regretté de ne pas avoir entendu tout cela à l'écoute de l’œuvre. Je suis passé à côté, mais peut-être était-ce de ma faute, fatigue, petit rhume, préoccupations diverses... Un voisin tousseur aussi (aparté : je suis très fier de moi, j'ai exhalé une telle hostilité à son égard, je l'ai irradié d'ondes tellement négatives et de regards noirs que c'est lui qui est allé se replacer dans une des rares places libres, après l'entracte).
Rappel : Suite n°3 pour violoncelle de Bach (heureusement que je l'ai noté, car déjà tout oublié).
Brahms / Schoenberg : grande découverte ! Je ne connaissais ni la version chambriste de Brahms, ni la version orchestrée par Schoenberg. Pour préparer le concert, j'ai écouté le CD de Paavo Järvi (une merveille !), et quelques versions de l’œuvre originale. Trouvailles mélodiques, richesse des thèmes, orchestration réussie, à la fois moderne et respectant l'esprit de la version de chambre. On en prend plein des oreilles dès le premier mouvement, avec un climax qui arrive dès la première minute et qui revient régulièrement ; et dans le quatrième mouvement, façon czardas, qui rappelle le meilleur des Danses hongroises de Brahms : dansant, irrésistible, jouissif à souhait... Viotti amène l'orchestre au limite du jouable, dans un tempo diabolique. C'est tout ce que j'aime !
Rappel : les dernières mesures du Quatuor, environ 15 secondes, à toute vitesse. Public très enthousiaste !
La qualité de ce chef, outre son charme, son charisme et sa capacité à m'émouvoir en concert, c'est de construire des programmes qui aident à découvrir des œuvres importantes qui sortent des sentiers battus : le Concerto pour chœur de Schittke au printemps, ce "Quatuor symphonique" hier, sorte de 5ème symphonie de Brahms, pièces que je n'ai pas encore vues programmées jusqu'ici, et qui mériteraient de l'être bien plus souvent, voire très souvent.
Hâte qu'il repasse nous voir à Paris !