PP - Bruckner / Brahms - Rhorer - 07/01/22

Anton Bruckner : Symphonie n° 2
Johannes Brahms : Symphonie n° 1

Le Cercle de l'harmonie
Jérémie Rhorer, dir.

Autant le dire de suite, ce concert m'a déçu. J'y suis allé car j'étais en manque ! Et j'aimerais savoir si quelqu'un d'autre ici y était pour avoir son avis.
La 2ème de Bruckner m'a carrément ennuyé. Je ne l'avais probablement jamais entendu en concert. Il a fait beaucoup mieux ! Je pense cependant que l'interprétation de Rhorer y est pour quelque chose.
Pour reprendre une expression de David à propos de la 6ème par Salonen, "je n'ai pas compris ce qu'il voulait faire".
Et puis, j'avoue que je préfère dans Bruckner l'ampleur et la beauté de timbre des orchestres modernes, même si je sais bien qu'à l'époque, les orchestres n'avaient pas cette ampleur de son.                                                                                                                
J'ai préféré la symphonie de Brahms, mais dès le départ, les coups de timbales qui scandent le début du premier mouvement étaient beaucoup trop forts, jusqu'à empêcher d'entendre le reste de l'orchestre.
Et tout au long de la symphonie, le timbalier a été beaucoup trop bruyant, tapant sur ses timbales sans retenue ni nuances.
Et là, j'ai compris ce que voulait faire le chef : transformer cette symphonie en un concerto pour timbales !
Quant à la qualité de l'orchestre, les cordes sont très bonnes, mais les vents ne sont pas du tout du même niveau. Les départs ne se font pas toujours bien ensemble, et j'ai eu une désagréable impression
que ça n'était pas au point, sans être toujours capable de dire pourquoi. Il y a une fragilité qui met mal à l'aise.
Pour comparer deux orchestres du même type, l'orchestre de Roth entendu la semaine précédente est cent fois meilleur.
Mais ce n'était pas le même genre de musique et je n'ai jamais entendu Les Siècles dans ce répertoire.

Fritelli a écrit:

La 2ème de Bruckner m'a carrément ennuyé. Je ne l'avais probablement jamais entendu en concert. Il a fait beaucoup mieux !

Très discutable: à mon sens, c'est au contraire une des plus abouties du corpus (et qui plus est une des plus spontanément abouties, un de celles que Bruckner a le moins révisées.) Mais aussi, structurellement (ne serait-ce qu'à cause des silences - Bruckner lui-même l'avait surnommée sa «Pausen-Symphonie»!), c'est une de celles qui se prêtent le moins à la mélasse spiritualiste au legato systématique, aux spectres orchestraux homogènes, aux battues lentes et régulières.

(Après, je ne suis généralement pas très fan de ce que fait Rohrer hors opéra.)

J'y étais... et j'ai adoré.

Mais ce n'est pas très étonnant, nos points de départ sont très différents : j'adore les versions sur crincrins et petits ensembles (4 contrebasses pour Bruckner, c'est pas beaucoup en effet, et puis c'était 5 violoncelles, 6 altos… il n'y avait pas grand'monde sur scène !). J'aime beaucoup la Deuxième de Bruckner. Et je suis particulièrement sensible au Bruckner discontinu, cravaché, ronchon, plutôt qu'à celui très continu et étale.

Ce qui m'a surtout frappé était le sens de la couleur : superbe petite harmonie, que les cordes en petit nombre et sur boyaux laissaient s'épanouir. Lecture qui jouait vraiment la carte des interruptions et qui filait vite, très inhabituelle dans Bruckner (un peu Venzago, mais sans la violence et avec beaucoup de séduction sonore qui manque au Tapiola Sinfonietta).

Et dans Brahms 1, l'impression d'entendre… la Cinquième de Beethoven ! La transparence faisait disparaître l'impression de doublures opaques : on perdait en poésie dans le III (vraiment rapide), mais on y gagnait en énergie et en lisibilité partout.

C'est une vision parmi d'autres, je ne dis pas que ce serait forcément la plus construite ou la plus satisfaisante, mais elle est assurément différente et m'a vivement convaincu !

J'ai beaucoup aimé la présence dramatique du timbalier, moi, qui parvenait à faire sonner les timbales anciennes, souvent timorées.

(Difficile de comparer aux Siècles : le centre de gravité du Cercle de l'Harmonie est la fin du XVIIIe, là où Les Siècles sont plutôt sur la fin du XIXe… Et puis Roth est un très grand chef traditionnel, alors Rhorer est très intéressant, mais encore en cours d'apprentissage lorsqu'il est invité par d'autres orchestres.)

Benedictus a écrit:

Fritelli a écrit:

La 2ème de Bruckner m'a carrément ennuyé. Je ne l'avais probablement jamais entendu en concert. Il a fait beaucoup mieux !

Très discutable: à mon sens, c'est au contraire une des plus abouties du corpus (et qui plus est une des plus spontanément abouties, un de celles que Bruckner a le moins révisées.) Mais aussi, structurellement (ne serait-ce qu'à cause des silences - Bruckner lui-même l'avait surnommée sa «Pausen-Symphonie»!), c'est une de celles qui se prêtent le moins à la mélasse spiritualiste au legato systématique, aux spectres orchestraux homogènes, aux battues lentes et régulières.  

(Après, je ne suis généralement pas très fan de ce que fait Rohrer hors opéra.)

Tu es très indulgent. Ce que fait Rohrer à l'opéra est franchement très / trop brouillon et met à mal mes oreilles. Très honnêtement, je préfère Roth (qui était très en forme lundi soir à La Rochelle) ou Langrée ou Minkowski, par exemple. Après, peut-être le répertoire symphonique convient il mieux à Rohrer

Je ne sais pas ce que tu as écouté de Rhorer, mais entre Lodoïska, son Requiem de Verdi avec l'ONF, par exemple, et ce qu'il fait aujourd'hui, il a énormément progressé.

J'ai un mauvais souvenir d'un Idomeneo donné au Théâtre des Champs Elysées (fin des années 2000) et j'étais sortie assez mitigée de Dialogues des carmélites (2018). Je ne suis pas certaine d'avoir envie de le suivre plus que ça; perso, j'aurais tendance à le considérer comme une roue de secours plus que comme un premier choix. Cela étant dit, ça n'engage que moi

Pour ma part, j'ai beaucoup aimé son Don Giovanni et sa Clémence (et surtout je ne vois pas du tout ce que ça a de «brouillon»: trop sec, parfois un peu raide, un peu acide dans les dynamiques élevées, d'accord, mais la mise en place me semble au contraire tout à fait au cordeau.) En revanche, ses symphonies salzbourgeoises m'avaient paru d'un style HIP-qui-claque assez passe-partout.

Benedictus a écrit:

Pour ma part, j'ai beaucoup aimé son Don Giovanni et sa Clémence (et surtout je ne vois pas du tout ce que ça a de «brouillon»: trop sec, parfois un peu raide, un peu acide dans les dynamiques élevées, d'accord, mais la mise en place me semble au contraire tout à fait au cordeau.) En revanche, ses symphonies salzbourgeoises m'avaient paru d'un style HIP-qui-claque assez passe-partout.

C'est mon ressenti et comme je l'ai précisé, il n'engage que moi ; cela étant dit, c'est surtout sa gestuelle que j'ai trouvé désordonnée, d'où le terme de brouillon.

Je n'ai pas aimé ce concert non plus. La 2e symphonie de Bruckner m'a paru interminable et l'orchestre bien faiblard, en particulier les vents, dont je n'ai pas aimé la sonorité maigrelette et souvent fausse, comme l'orchestre de Savall récemment dans Beethoven.
Très bonnes cordes en revanche, mais manquant beaucoup trop d'ampleur.
Je n'ai pas non plus saisi le point de vue de Rhorer, dont l'interprétation m'a semblé finalement assez douce et classique, à part une coda furibarde très réussie.

J'ai davantage aimé la 1ère de Brahms avec un premier et un dernier mouvement assez fougueux, mais toujours un manque de volume préjudiciable dans cette grande salle.
Il aurait fallu donner ce concert à la Seine Musicale ou à Radio France.

Ah, et timbalier excellent ! C'était Rodolphe Théry, titulaire au Philhar' de Radio France par ailleurs.