Votre dernier film visionné

Tod Browning : White tiger        1923


Il y avait longtemps que je n'avais pas vu un Browning, ayant été assez déçu par les derniers que j'avais vus (Dracula, Mark of the vampire) ; White tiger les précède dans la filmographie du réalisateur américain et j'avoue que j'ai été encore plus déçu. En terme de récit, il n'y a pas grand-chose à se mettre sous la dent : un trio décide d'arnaquer des gens en leur présentant un prétendu robot joueur d'échec (alors qu'il s'agit tout simplement d'un gars qui est caché et qui guide les coups à faire) ; ça va marcher un temps puis iels vont se bouffer tou(te)s les trois ensemble avec un fond de romance ; pas plus. En plus de cet aspect un peu moralisateur (une arnaque finit forcément toujours mal), rien n'est vraiment marquant - même l'aspect huis-clos n'est pas très prenant.

Juho Kuosmanen : Olli Mäki        2016

 +
C'est le premier film de Kuosmanen que je vois (qui a été plus largement découvert l'an dernier à Cannes avec Compartiment n°6), c'est d'ailleurs son premier long-métrage ; le film prend pour point de départ la vie du boxeur finlandais Olli Mäki qui est le premier finlandais à être engagé en championnat du monde de boxe. J'ai aimé la manière dont le film prend totalement le contrepied de films très performatifs sur la boxe (par exemple : Raging bull de Scorsese ou la série des Rocky qui sont vraiment des films de boxe) : il y a beaucoup de séquences où, pour les journaux ou la télévision, on lui demande de faire des enchaînements de coups ; en plus de ça, il y a également un propos (assez peu original maintenant, peut-être) sur le milieu du sport professionnel, la manière dont ils contraignent le personnage pour ruser des catégories (sa perte de poids forcée pour passer dans la catégorie poids plumes et maximiser ses chances de victoire). En fait, le film n'est presque pas intéressé par le boxeur Mäki (contrairement à Raging bull, par exemple) : ce dernier est avant tout présenté (et développé) comme un boulanger amoureux qui aime bien la boxe comme ça mais qui a envie de vivre sa petite vie tranquillement avec sa copine ; du coup, le film a parfois des élans de comédie romantique (qui sont assez chouettes - notamment la fin, assez mignonne). D'un point de vue global, le film n'est pas mal, assez agréable à regarder mais tout de même pas extrêmement marquant : les deux composantes du film s'annulent un peu l'une l'autre.

Cyril Leuthy : Godard, seul le cinéma        2022

 +
J'avais vu le documentaire de Leuthy sur Jean-Pierre Melville, je l'avais apprécié mais je n'en ai pas non plus un souvenir extrêmement marqué. Je ne sais pas si c'est parce que la trajectoire cinématographique de Godard est beaucoup plus faite de méandres mais j'ai trouvé ce documentaire nettement plus marquant ; en plus de ça, il prend son temps et s'étire sur une bonne heure et demi - il fallait au moins ça. Il est constitué de quatre chapitres : la période nouvelle vague (qui, pour les longs métrages va de À bout de souffle à Masculin féminin), la période où la politique se diffuse davantage dans ses films (de Made in USA au Gai savoir), la période du groupe Dziga Vertov (de 68/69 au début de la seconde moitié des années 70) puis la rencontre avec Anne-Marie Miéville comme transition vers la dernière période où il revient à la fiction (à partir de Sauve qui peut (la vie), essentiellement). Le documentaire interviewe pas mal de personnes qui ont connu Godard (et/ou qui connaissent bien ses films) : Thierry Jousse, Macha Méril, Marina Vlady, Christophe Bourseiller, Nathalie Baye, David Faroult - et d'autres qu'on aurait aimé ne pas voir comme Dany le rouge - ; il y a également pas mal d'archives de Godard, d'Anna Karina et d'Anne-Marie Miéville et de Jean-Pierre Gorin, je crois. Le documentaire est principalement centré sur Godard et sur l'articulation de ces quatre périodes entre elles (et pas tellement sur les films individuellement - si bien qu'il ne parle quasiment pas des années 2000, j'ai trouvé ça dommage) ; j'ai beaucoup aimé la partie sur le rapport entre l'histoire et les images chez Godard (qui m'a rappelé le très beau (et intéressant) texte de Rancière sur les Histoire(s) du cinéma - il faut que je voie ça absolument !), je trouve cette facette vraiment très intéressante. Sinon, ça m'a aussi donné envie de revoir les films qu'il a réalisés après Sauve qui peut (la vie) que j'ai vus il y a longtemps mais que je n'ai en général pas aimé (à part Prénom Carmen, Je vous salue Marie et For ever Mozart - voire Soigne ta droite).


Le documentaire est d'ailleurs visible (temporairement, j'imagine) sur la chaîne Youtube d'Arte : https://www.youtube.com/watch?v=BlFzUwVCtMk

Christine Dory : La fille d'Albino Rodrigue - 2023 [Galatea Bellugi, Emilie Dequenne, Samir Guesmi]
***

Des profils psychologiques fouillés et servis par un remarquable jeu d'acteurs (Emilie Dequenne formidable en mère irresponsable et manipulatrice), un environnement social réaliste dépeint sans caricature. Mais le film semble hésiter entre chronique sociale et intrigue policière, ne s'engageant pleinement dans l'une ou l'autre de ces options et peinant à mener les deux de front.

Jean-Luc Godard : Les enfants jouent à la Russie        1993

 +
Je trouve que ce film est vraiment un film-carrefour des années 90 pour Godard : c'est une sorte de croisement entre Soigne ta droite (le rapport avec L'idiot de Dostoïevski, King lear dont le personnage principal aurait croisé le film précédent (alors même que ce film arrive avant dans la filmographie de Godard) et les Histoire(s) du cinéma pour le rapport aux images. Dans le film, Godard joue le rôle d'un cinéaste français connu engagé par un producteur hollywoodien (interprété par László Szabó) pour réaliser un documentaire sur la Russie après la guerre froide ; il envoie alors sa directrice de la photographie (qui est celle des Enfants jouent à la Russie, bien sûr) en Russie et Godard se donne le rôle principal de L'idiot de Dostoïevski ; Godard va ensuite s'interroger sur plusieurs trucs, notamment la volonté occidentale d'envahir la Russie (pour lui, c'est très clair : c'est parce que c'est la terre de la fiction (?) et que l'occident ne sait plus quoi inventer), s'ensuit une étude de quelques films et textes russes/soviétiques. Franchement, le regard est assez daté (une vibe un peu gauche-pcf-des-années-60 (?) antiaméricaine jusqu'au bout des ongles) mais visuellement, c'est parfois assez fulgurant et il y a tout de mêmes des idées, là-dedans.

Ari Aster : Beau is afraid        2023


J'avais assez apprécié les deux premiers longs-métrages d'Aster (Hereditary et Midsommar), même si j'avais trouvé que la fin du premier le gâchait pas mal. Ici, c'est à nouveau le cas mais j'ai trouvé que ça entachait nettement plus le film car personnellement, c'est quasiment la dernière heure (ou plus certainement la dernière demi-heure qui m'a semblé vraiment mauvaise). J'ai trouvé le reste assez réussi (voire vraiment réussi pour le début) : le film arrive vraiment à faire passer l'anxiété, notamment à travers tout ce jeu d'espaces enchâssés dans lesquels le personnage ne peut jamais se poser ; il y a également tout ce truc autour de l'eau : elle semble toujours être une échappatoire et finalement, elle se retrouve (via des baignoires qui débordent ou via les quelques séquences avec des étendues d'eau ; il y a aussi la scène avec les médicaments à prendre avec de l'eau - et puis bon, le nom de famille du gars est Wassermann, quand même...) à renforcer l'aspect anxiogène ; en plus, il y a tout ces espaces obscurs (infinis) qui apparaissent à travers la vidéo ou les personnages sur lesquels on sait peu de choses ; tout ça marche vraiment bien, surtout que la direction d'acteurs est très bonne. Par contre, dès la séquence avec la mère à l'hôtel, ça se gâte sérieusement, c'est éventuellement un peu drôle mais honnêtement, j'ai pas du tout compris l'intérêt, peut-être que le film essaie de mettre en place une sorte d'étape survoltée dans l'anxiété mais pour moi, ça ne marche pas du tout. Le film traîne ensuite comme jamais et à chaque fois qu'on croit que le film va se terminer, il repart pour un tour - le film dure au final trois heures. Ensuite vient la fin du film qui est vraiment d'un ridicule superlatif : une sorte de jugement dernier arbitré par un psychanalyste. En résumé, j'ai trouvé ça vraiment frustrant : le film commence puis s'ouvre puis ensuite, il se localise (en plus sur un truc au fond vaguement œdipien/psychanalytique complètement éclaté) pour arriver à quelque chose de complètement merdique à la fin ; c'est vraiment un suicide cinématographique d'anthologie.

Mars Attacks!

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Emeryck a écrit:

Ari Aster : Beau is afraid        2023


...pour arriver à quelque chose de complètement merdique à la fin ; c'est vraiment un suicide cinématographique d'anthologie.

Pour moi c'est tout le contraire, de la poésie cinématographique pure, et en trois films (mais déjà dès son sublime Midsommar), un réalisateur qui apparaît comme un des plus grands génies que le cinéma ait connu ces dernières années. La maîtrise est totale.

Charlym a écrit:

Emeryck a écrit:

Ari Aster : Beau is afraid        2023
...pour arriver à quelque chose de complètement merdique à la fin ; c'est vraiment un suicide cinématographique d'anthologie.

Pour moi c'est tout le contraire, de la poésie cinématographique pure, et en trois films (mais déjà dès son sublime Midsommar), un réalisateur qui apparaît comme un des plus grands génies que le cinéma ait connu ces dernières années. La maîtrise est totale.

Qu'est-ce qui te fait dire que ce film est de la poésie cinématographique pure ?

Alien Covenant

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Jean-Marie Straub : Où en êtes-vous, Jean-Marie Straub ?        2016


Les Où en êtes-vous ? est une série de films commandés par le Centre Pompidou aux réalisateurices qu'ils invitent. Ici, pas trop grand chose à dire : le film est filmé dans la maison de Straub à Rolle (J. M. S. et J. L. G. écrivait Bonitzer) ; triptyque absolument épique où l'on y voit son chat bronzer, puis se faire brosser par une femme (que je ne connais pas) puis se faire caresser par Straub. C'est mignon mais voilà, pas plus ; ça nous dit pas trop où il en est.

Emeryck a écrit:

ça nous dit pas trop où il en est.

Bah si: à faire des vidéos de chat.
(Enfin, où il en était: maintenant, il est au cimetière de Saint-Ouen.)

Jim Jarmusch
Paterson

Xavier a écrit:

Alien Covenant

+

Je ne suis pas le seul à l'apprécier

Alain Mazars : Rouges silences        1979


Je ne connaissais pas Mazars (même pas de nom), ses documentaires sur l'Asie sont apparemment un peu connus, je ne sais pas du tout ce que ça vaut. Ici, c'est un moyen-métrage d'une bonne cinquantaine de minutes et il s'agit par ailleurs de sa première réalisation ; j'ai trouvé ça assez chouette : une sorte de film d'épouvante morcelé, parfois drôle avec des motifs récurrents (le rouge en tête) et des passages qui sont presque de l'ordre de la transe ; tout ça arrive à installer une ambiance (et même à mettre en place une dramaturgie) en dépit du refus manifeste de suivre une logique narrative. Le film me fait en fait pas mal penser à Brakhage (du moins, à mes souvenirs de Brakhage) pour son aspect très organique et sa dramaturgie essentiellement visuelle - pas mal de trouvailles visuelles, je pense par exemple à cette séquence où l'on entends des pleurs synchronisées avec l'égouttement d'un liquide rouge sur une vitre derrière laquelle on peut voir des marguerites. Je ne sais pas si ses autres courts/moyens-métrages sont de la même trempe, ça serait bien.

xoph a écrit:

Jim Jarmusch
Paterson

Oui : (et je ne suis pas un fanatique de Jarmusch)

Golisande a écrit:

xoph a écrit:

Jim Jarmusch
Paterson

Oui : (et je ne suis pas un fanatique de Jarmusch)

il est pourtant très proche de ses premiers films et d'"Only lovers left alive" , par beaucoup d'aspects, je trouve

xoph a écrit:

Golisande a écrit:

xoph a écrit:

Jim Jarmusch
Paterson

:heart

Oui : (et je ne suis pas un fanatique de Jarmusch)

il est pourtant très proche de ses premiers films et d'"Only lovers left alive" , par beaucoup d'aspects, je trouve

Oui, c'est incontestablement du Jarmusch, mais je trouve qu'il y a un petit truc en plus dans ce film, un charme bien spécifique... En tout cas je l'ai adoré, alors que je ne suis pas forcément le cœur de cible pour ce type de cinéma contemplatif s'attardant sur de petites choses...

xoph a écrit:

Golisande a écrit:

xoph a écrit:

Jim Jarmusch
Paterson

Oui : (et je ne suis pas un fanatique de Jarmusch)

il est pourtant très proche de ses premiers films et d'"Only lovers left alive" , par beaucoup d'aspects, je trouve

Ah oui, tu trouves ? C'est vrai que la singularité des personnages pourrait rapprocher les films cités mais je ne vois pas trop autre chose.
Sinon, Paterson est chouette, oui ! J'aime beaucoup le rythme du film.

Abnegor a écrit:

Xavier a écrit:

Alien Covenant

+

Je ne suis pas le seul à l'apprécier

Alors, oui, mais quand même moins que les 5 autres films de la franchise.
Mais je l'ai un peu plus aimé lors de ce 2è visionnage.

Claude Pinoteau : Cache cash        1994


J'ai lancé ce film un peu par hasard, ne connaissant pas grand-chose de Pinoteau excepté ses deux tubes et quelques trucs par ailleurs (Le silencieux et Les palmes de M. Schultz parce qu'Isabelle Huppert joue dedans) ; je n'avais aucune idée de quoi ça parlait et ne savais rien de la distribution. Finalement, même s'il n'est pas extraordinaire, le film m'a surpris par certains aspects notamment par le fait qu'il aborde très explicitement les violences intrafamiliales, la chasse et le sexisme - et même les prisons dans la dernière scène ; je trouve ça pas mal que ce soit abordé dans un film où les personnages principaux sont des enfants. J'ai également beaucoup aimé la photographie (de Jean Tournier, je ne connaissais pas ce directeur de la photographie) qui est extrêmement colorée et lumineuse - on pense forcément à Wes Anderson dans ce début, heureusement dépourvu du style qu'il déroule maintenant au kilomètre - et ça rend vraiment justice aux (très beaux) paysages de la Sologne. Malheureusement, cela ne suffit pas à faire de ce film un véritable bon film : l'histoire n'est pas extrêmement intéressante (un garçon passe ses vacances d'été en Sologne (sans son père journaliste, qu'il ne voit d'ailleurs pas beaucoup) et y rencontre une fille de son âge avec qui il se lie d'amitié ; parallèlement, un hold-up au butin de quarante millions de francs est commis dans les environs, les auteurs planquent le butin mais le garçon le trouve (au moins en partie) et décide de fuir avec son amie pour s'amuser et revenir sur les lieux où il avait jadis passé de bons souvenirs avec ses parents), sa résolution est assez attendue (même si la séquence dans le train fantôme est tout de même assez nawak) ; en plus, les acteurices ne sont pas extraordinaires (Dreyfus qui cabotine comme pas possible), les deux enfants exceptés ; je n'ai également pas apprécié la musique qui est vraiment mielleuse et qui fait un peu "bon, c'est un film avec des enfants alors on va mettre une musique culcul".

Xavier a écrit:

Abnegor a écrit:

Xavier a écrit:

Alien Covenant

+

Je ne suis pas le seul à l'apprécier

Alors, oui, mais quand même moins que les 5 autres films de la franchise.
Mais je l'ai un peu plus aimé lors de ce 2è visionnage.

Mes préférés sont ceux de Scott. Le seul que je n'aime pas beaucoup est celui de Jeunet (mais je ne déteste pas non plus).
J'ai découvert Prometheus / Covenant à la suite, en BluRay. J'avais eu une petite frustration sur Prometheus, avec trop de trucs sans réponse, puis Covenant explique et complète bien, et au final j'ai adoré ce diptyque, poème noir sur l'humain

Emeryck a écrit:

Charlym a écrit:

Emeryck a écrit:

Ari Aster : Beau is afraid        2023
...pour arriver à quelque chose de complètement merdique à la fin ; c'est vraiment un suicide cinématographique d'anthologie.

Pour moi c'est tout le contraire, de la poésie cinématographique pure, et en trois films (mais déjà dès son sublime Midsommar), un réalisateur qui apparaît comme un des plus grands génies que le cinéma ait connu ces dernières années. La maîtrise est totale.

Qu'est-ce qui te fait dire que ce film est de la poésie cinématographique pure ?

Drôle de question...
Définition de poésie : Art d'évoquer et de suggérer les sensations, les impressions, les émotions les plus vives par l'union intense des sons, des rythmes, des harmonies, en particulier par les vers.

Si on remplace "par les vers", par le langage cinématographique : mise en scène, photo, montage, musique, etc, tu as ma réponse

Ari Aster connait définitivement son art.

Abnegor a écrit:

Xavier a écrit:

Alien Covenant

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Je ne suis pas le seul à l'apprécier

J'aime bcp Covenant aussi, je n'ai jamais compris les critiques si négatives.
Pour moi largement au dessus de celui de Jeunet, mais aussi de celui de Fincher.
Même si le meilleur reste à mon sens le 1 évidement, puis le 2 de Cameron.

Emeryck a écrit:

xoph a écrit:

Golisande a écrit:

xoph a écrit:

Jim Jarmusch
Paterson

Oui : (et je ne suis pas un fanatique de Jarmusch)

il est pourtant très proche de ses premiers films et d'"Only lovers left alive" , par beaucoup d'aspects, je trouve

Ah oui, tu trouves ? C'est vrai que la singularité des personnages pourrait rapprocher les films cités mais je ne vois pas trop autre chose.
Sinon, Paterson est chouette, oui ! J'aime beaucoup le rythme du film.

Et zut, encore une faribole me suis-je dit dans le RER en envoyant depuis un smartphone ce post précédent…

Mais tout de même, un même goût pour les personnages décalés, la dérive (qu'elle soit ici immobile - pour un conducteur de bus ! - n'y change pas grand chose) ; les travellings cycliques de Mystery train, sont proches des plans fixes récurrents de Paterson (le réveil). Une même forme d'attachement aux étrangetés ordinaires et incongrues (on pourrait gloser sur le thème de la gémellité par exemple dans Paterson - Carlo William Carlos - non je plaisante, ou le double Paterson, etc.) mais qui tient avant tout de ces raccords humoristiques, ouverts aux énigmes : les damiers dans Coffe and Cigarettes, les deux tasses de café dans The Limits of Control. Le goût récurrent pour la littérature, souvent comme maximes à plat (qui semblent souvent ridicules, mais formulées tellement à plat qu'on n'est pas si loin de la poésie terre à terre, et si belle, de Paterson). Et puis ce fond de mélancolie, et pourtant de tendresse pour ceux et celles qu'il filme.
C'est un ton, qui parcourt pour moi la plupart de ses œuvres (et Paterson), sauf les films qui sont nettement du côté du film de genre décalé et que j'aime nettement moins (Ghost Dog, The Dead Don't Die) ; Only lovers left alive conjuguant par contre très bien cette veine Jarmusch et le film de genre détourné.

PS : @Golisande
J'avais pas vu ta réponse
"Un charme en plus", le propos est sans doute plus resserrè à contrario, ce qui permet au charme d'opérer d'autant plus. Mais charme c'est vraiment ça !
On est presque dans ce film dans l'"idée" que je me fais de ce cinéaste. Je croyais bien le connaître, et si je n'avais pas revu Annette il y a quelque jours, je n'aurais pas forcément vu Paterson ! (en fait je n'en connaissais même pas l'existence - dans quel monde suis-je ?)

Claude Zidi : La moutarde me monte au nez        1974


L'année dernière, j'avais regardé La course à l'échalote, c'est-à-dire le film qui vient juste après celui-ci dans la filmographie de Zidi et qui remet en scène le tandem Richard-Birkin ; puisque j'avais trouvé ce film pas si mal, j'avais envie de voir à quoi il faisait suite. Malheureusement, son prédécesseur est tout de même moins bon : si l'histoire de La course à l'échalote avait de la tenue, j'ai trouvé que celle de La moutarde me monte au nez se délitait complètement et le film partait trop dans tous les sens ; en plus, je l'ai trouvé globalement moins drôle mais aussi plus cringe car pas mal de choses reposent essentiellement sur de la sexualisation plus ou moins explicite. Il y a tout de même quelques séquences que j'ai appréciées notamment les cours de maths donnés par Pierre Richard qui sont débités à une vitesse supralumineuse et aussi les séquences de tournage du western ; j'ai également bien aimé Claude Piéplu dans le rôle du père du personnage de Pierre Richard - par contre, le fait qu'ils soient père et fils ne marche pas.

Je n’ai pas vu ces films depuis environ trente-cinq ans, mais je me souviens que je préférais la moutarde à l’échalote (il faut dire qu’à l’époque la notion de cringe était inconnue, d’ailleurs je ne crois même pas qu’il existait quelque chose de comparable pour juger les films des années 40 et 50, sans doute parce qu’on n’avait encore rien compris).

Cela dit, même si Pierre Richard était mon idole, je n’ai pas spécialement envie de revoir ces films aujourd’hui (je n’ai même pas peur d’être déçu, ce sont les souvenirs que j’en ai qui sont eux-mêmes décevants rétrospectivement )…

Golisande a écrit:

Je n’ai pas vu ces films depuis environ trente-cinq ans, mais je me souviens que je préférais la moutarde à l’échalote (il faut dire qu’à l’époque la notion de cringe était inconnue, d’ailleurs je ne crois même pas qu’il existait quelque chose de comparable pour juger les films des années 40 et 50, sans doute parce qu’on n’avait encore rien compris).

Cela dit, même si Pierre Richard était mon idole, je n’ai pas spécialement envie de revoir ces films aujourd’hui (je n’ai même pas peur d’être déçu, ce sont les souvenirs que j’en ai qui sont eux-mêmes décevants rétrospectivement )…

Oui, probablement qu'il n'existait alors rien de similaire, tout au plus la distinction esthétique instaurée par la nouvelle vague.
Mais même au-delà de ça, je trouve que La course à l'échalote se barre moins dans tous les sens - et la dispersion de La moutarde me monte au nez est plus de l'ordre du délitement que de l'explosion.

Il y en a tout de même des vraiment bons dans le lot, je pense par exemple au Grand blond avec une chaussure noire.

Emeryck a écrit:

Oui, probablement qu'il n'existait alors rien de similaire, tout au plus la distinction esthétique instaurée par la nouvelle vague.

Il y avait bien la prise de conscience de la question du racisme, mais cela concernait essentiellement le cinéma américain…

Citation :

Il y en a tout de même des vraiment bons dans le lot, je pense par exemple au Grand blond avec une chaussure noire.

Tout à fait, et celui-là en particulier; je parlais seulement des deux Zidi, et par ailleurs la plupart de ceux que j’ai revus (y compris les Francis Weber avec Depardieu) m’ont plutôt gonflé…
Yves Robert, globalement c’est plutôt la classe au-dessus (même si ça n’échappe pas forcément au cringe).

Pierre Étaix : Tant qu'on a la santé        1966

 +
Les films de Pierre Étaix ont (je crois) mis du temps à être vraiment connu à cause de question de nature juridique : pendant un temps, il y a eu un litige et ce n'est qu'à partir de la fin des années 2000 qu'il récupère les droits et parallèlement, plusieurs de ses films ont fait l'objet d'une restauration car ils n'ont pas toujours été très bien conservés. Ce film est un peu particulier car il s'agit en fait de l'assemblage de quatre courts-métrages (l'un d'eux ayant donné au film son titre) ; d'ailleurs, deux versions de ce film existent : dans la première, le premier court est remplacé par un autre. Au-delà de ça, j'ai trouvé ce film assez curieux parce que d'ordinaire, là où les films à sketches pèchent, c'est dans les raccords entre les sketches mais là, même si les thématiques de chacun des sketches sont assez différentes (une lecture suivie de Dracula dans le premier, un jeu de chaises musicales au cinéma dans le deuxième, une critique de la hiérarchie entre docteur et pharmacien dans le troisième, une partie de campagne dans le quatrième), j'ai trouvé qu'ils allaient contre toute attente finalement assez bien ensemble ; le petit point négatif, il se trouve plutôt au sein même des sketches qui sont parfois tout de même un peu trop longs et répétitifs. Je n'ai fait que dire des choses négatives jusque-là qui pourraient laisser penser que je n'ai pas aimé le film mais ce n'est pas le cas : même s'ils sont parfois un peu longuets, les sketches sont tout de même drôles (et l'aspect répétitif les sert parfois - en particulier dans le dernier sketch avec la tension des barbelés qui gouvernent à eux seuls le récit ; et je crois que si le film n'a pas tant vieilli que ça (à part peut-être le film critiquant le consumérisme), c'est parce qu'il ne fait quasiment pas appel à la parole - du coup, critique du consumérisme et comique de gestes, on pense forcément pas mal à Tati mais je trouve ça moins spécifique. Je suis curieux de voir à quoi ressemblent ses autres longs.

Le Charme discret de la bourgeoisie

+

Louis Delluc : La femme de nulle part        1922


De Delluc je ne connaissais que Fièvre et L'inondation qui ont une trajectoire dramatique assez similaire (une sorte d'ivresse progressive qui emporte tout) ; ici, c'est assez différent : au centre du film, on a une femme qui revient dans une maison qu'elle avait habitée avec son mari (et qu'elle avait quittée), elle y rencontre une jeune femme s'apprêtant à faire la même chose, elle lui parle et lui dit qu'il ne faudrait pas qu'elle parte parce que sinon, elle va se retrouver comme elle (en gros) ; pour donner des éléments de contexte, le film aligne les flashbacks. J'ai trouvé ça vraiment long et ennuyeux : il n'y a vraiment pas grand-chose d'autre et on dirait que le film essaye de mettre l'accent sur la composante mélodramatique du personnage principal (en plus interprétée par une Ève Francis qui en fait des caisses mais qui n'a rien à jouer) qui se fait vraiment larguer par tous le monde. Franchement, c'est oubliable.

Marianne Tardieu : Qui vive        2014


Ce film est le premier film de Marianne Tardieu, il met en scène un trentenaire issu des quartiers populaires (interprété par Reda Kateb) qui travaille en tant que vigile dans un supermarché et qui aspire à être infirmier. J'ai trouvé le film assez mal écrit : tout d'abord, les autres personnages ne sont pas du tout développés (le personnage d'institutrice interprété par Adèle Exarchopoulos n'est pas du tout développé et, pire encore, les adolescents auxquels est confronté le personnage principal sont définis comme des obstacles pour le personnage principal, je trouve ça d'autant plus pénible qu'ils s'agit d'adolescents racisés issus de quartiers populaires) et finalement, il ne se passe rien de véritablement intéressant notamment parce que le film ne montre aucune dynamique notamment parce que les personnages n'ont aucun contexte. En plus, j'ai trouvé pénible que la trajectoire dramatique du film repose sur le transfuge du personnage de Kateb : si tous les personnages racisés venant des quartiers populaires étaient déjà définis comme de la nuisance, ils n'ont maintenant d'autres espaces que ceux de la criminalité comme issues ; en plus, ce concours d'infirmier est vraiment articulé comme la lumière au bout du tunnel - ce point n'est d'ailleurs pas articulé autrement. Enfin bref, pour moi, en plus d'être problématique, ce scénario est assez mal écrit ; c'est dommage car la distribution partait bien (même si quand on la rapporte au scénario on souffle un peu) ; en fait, je me demande ce qu'espérait dire la réalisatrice avec ce film...

Jacques Rozier : Oh, oh, oh, jolie tournée        1984

 +
Voilà que la Cinémathèque nous met à disposition un truc assez improbable dans la filmographie (hétéroclite) de Jacques Rozier : le podium d'Europe 1 (une tournée organisée par la radio en été, d'après ce que j'ai compris) de 1984 filmé au caméscope par Rozier, il y suit Bernard Menez (bon, là, ç'a un peu de sens parce que c'est quand même un acteur récurrent dans sa filmographie) sur scène et en coulisses ; il a été invité à cet évènement suite au succès de sa chanson Jolie poupée - heureusement qu'il n'a pas beaucoup chanté... Le documentaire est assez amusant, Menez est plutôt drôle et énergique et d'un point de vue global, je trouve amusant d'avoir un truc filmé au caméscope par Rozier, ça fait un peu film fait avec les moyens du bord par les/des parents pour immortaliser un évènement. Malgré tout, je l'ai trouvé peut-être un peu répétitif.

Anne-Marie Miéville & Jean-Luc Godard : The old place        2000


Ce moyen-métrage est une commande passée par le MoMA de New-York à Miéville et Godard, il s'agit d'une discussion entre ceux-ci, parfois glissant vers le commentaire. À nouveau, j'ai trouvé ça assez inégal : j'ai plus aimé les œuvres choisies que les commentaires ; cela dit, j'ai aimé que Miéville et Godard discutent ensemble, ça change.

Giornata nera per l'ariete (1971)

https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Journ%C3%A9e_noire_pour_un_b%C3%A9lier

Friedrich Wilhelm Murnau : Die Finanzen des Großherzogs        1924


Ce film est un des rares essais de Murnau sur le terrain de la comédie : le film met en scène un duc fauché dont les terres tombent aux mains d'un prêteur sur gages ; il espère tirer de l'argent d'un mariage avec une grande comtesse russe et parallèlement, un industriel lui propose de racheter son île pour en extraire du souffre ; parallèlement, plusieurs autres personnages plus ou moins utiles sont introduits pour mener à des jeux entremêlés de chantages divers et variés. Je crois que c'est un des principaux défauts de ce film : le récit est mal dégrossi, on dirait presque une adaptation mal découpée, pas mal de personnages sont assez inutiles et ne font qu'alourdir l'histoire ; en plus de ça, pour que ça soit un minimum compréhensible, il faut ajouter de lourds intertitres assez régulièrement : ça freine vraiment le film ; je trouve ça assez dommage parce que visuellement, le film est assez chouette (l'utilisation des différents filtres de couleur fonctionne bien) et malgré tout, c'est tout de même assez drôle par moment. Je trouve assez frappant le fait que Murnau passe de ça à Der letzte Mann qui ne comporte quasiment pas d'intertitres - mais bon, ce film, c'est un peu une folie.

Patrice Leconte : Les grands ducs        1996

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Ce film ressemble un peu à Salut l'artiste d'Yves Robert qui aurait été remixé par Patrice Leconte, on y retrouve cette trajectoire fuyante que l'on retrouve dans pas mal de Leconte de la fin des années 80 ou des années 90 (Tandem, Tango, La fille sur le pont, etc.) et le centre du film est occupé par un assemblage hétéroclite de personnages - ici, trois vieux acteurs (interprétés par Philippe Noiret (qui ressemble à Pierre Perret...), Jean-Pierre Marielle et Jean Rochefort) qui reviennent au théâtre ; il me semble que ce motif des retrouvailles sera repris dans Une chance sur deux. J'ai été assez ennuyé par les scènes tournant autour du théâtre mais j'ai malgré tout trouvé le film assez sympathique notamment en raison du cabotinage généralisé des acteurs (et puis qu'est-ce que c'est que cette perruque pour Michel Blanc) et de l'aspect assez invraisemblable que prend le film : c'est comme si le producteur-escroc interprété par Blanc essayait de liquider le spectacle et que celui-ci se propageait carrément au-delà de la scène du théâtre et contaminait tout le film ; dit comme ça, ça a de la gueule mais finalement, pas tant que ça : c'est amusant mais pas plus.

Valeska Grisebach : Sehnsucht        2006

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Ce film est le premier long-métrage de la réalisatrice allemande Valeska Grisebach (qui sera davantage connue pour son second long-métrage Western), il s'agit d'un film mettant en scène un trio dans la campagne allemande : un serrurier, sa femme Ella et Rose, une serveuse qu'il rencontre à une soirée à l'occasion d'un évènement auquel il se rend en tant que sapeur pompier volontaire ; lorsqu'il dit à cette dernière qu'il est marié et qu'il ne reviendra plus, elle chute du balcon de son appartement ; il essaie ensuite de se suicider à l'aide d'un fusil de chasse ; les deux sont au final vivants. La trajectoire est peut-être un peu maladroite mais j'ai bien aimé l'aspect très mutique du film, les scènes sont assez chouettes ; globalement, tout est assez simple et fonctionne plus ou moins selon une logique de miroir : Ella et Rose, le film et Roméo et Juliette, les deux suicides et la discussion autour de ceux-ci  - et même au sein même de ces discussions, la polarisation des avis : courage ou lâcheté, etc. D'ailleurs, c'est amusant, le titre pour l'exploitation en France est "Désir(s)" alors que la traduction littérale est "désir". En fait, ce film est un film d'interpolation : il nous montre ce qu'il y a à l'intérieur ; c'est un chouette premier film.

Emeryck a écrit:

le titre pour l'exploitation en France est "Désir(s)" alors que la traduction littérale est "désir".

Allo les germanistes,
mais je crois que Sehnsucht est un peu intraduisible, désir, aspiration, mais aussi sa nostalgie, le sentiment de son évanouissement. On rapproche parfois de "saudade". Une si belle et récente découverte (merci Alifie) de "Sehnsucht" (pour moi) serait Barbara Haniggan, filmée par Amalric, chantant un tango à la noix (et magnifique) de Kurt Weill (Youkali - C'est presque au bout du monde). En ce sens le pluriel lui va bien (même si "désir" c'est déjà pas si simple)

Dernièrement, en soirée, Les Tontons Flingueurs et Les Barbouzes de Georges Lautner, puis Les Compagnons de la Marguerite de Jean-Pierre Mocky.

Sinon, pendant la nuit, je me farcis volontairement petit à petit la filmographie de Keanu Reeves...

Анастасия231 a écrit:

Dernièrement, en soirée, Les Tontons Flingueurs et Les Barbouzes de Georges Lautner, puis Les Compagnons de la Marguerite de Jean-Pierre Mocky.

Sinon, pendant la nuit, je me farcis volontairement petit à petit la filmographie de Keanu Reeves...

C'est un programme contre la déprime ?

Deux courts métrages muets : Charlot fait une cure (Charlie Chaplin - 1917) et La maison démontable (Buster Keaton - 1915) avec une pensée pour Xavier car ces deux pépites étaient accompagnées par le pianiste Paul Lay

Cololi a écrit:

Анастасия231 a écrit:

Dernièrement, en soirée, Les Tontons Flingueurs et Les Barbouzes de Georges Lautner, puis Les Compagnons de la Marguerite de Jean-Pierre Mocky.

Sinon, pendant la nuit, je me farcis volontairement petit à petit la filmographie de Keanu Reeves...

C'est un programme contre la déprime ?

Exactement ! J'ai un fort tropisme pour les comédies françaises des années 60 et 70.

Par contre, la filmograhie de Keanu Reeves, c'est moins rigolo. M'enfin il y a deux-trois films qui sont excellents.

xoph a écrit:

Emeryck a écrit:

le titre pour l'exploitation en France est "Désir(s)" alors que la traduction littérale est "désir".

Allo les germanistes,
mais je crois que Sehnsucht est un peu intraduisible, désir, aspiration, mais aussi sa nostalgie, le sentiment de son évanouissement. On rapproche parfois de "saudade". Une si belle et récente découverte (merci Alifie) de "Sehnsucht" (pour moi) serait Barbara Haniggan, filmée par Amalric, chantant un tango à la noix (et magnifique) de Kurt Weill (Youkali - C'est presque au bout du monde). En ce sens le pluriel lui va bien (même si "désir" c'est déjà pas si simple)

Oui, je crois que tu as raison - c'est en tout cas ce qui est écrit sur Wikipédia.

Je suis tombé là-dessus depuis

Peut-on traduire le mot allemand Sehnsucht ?
https://books.openedition.org/pup/7851

xoph a écrit:

Emeryck a écrit:

le titre pour l'exploitation en France est "Désir(s)" alors que la traduction littérale est "désir".

Allo les germanistes,
mais je crois que Sehnsucht est un peu intraduisible, désir, aspiration, mais aussi sa nostalgie, le sentiment de son évanouissement. On rapproche parfois de "saudade". Une si belle et récente découverte (merci Alifie) de "Sehnsucht" (pour moi) serait Barbara Haniggan, filmée par Amalric, chantant un tango à la noix (et magnifique) de Kurt Weill (Youkali - C'est presque au bout du monde). En ce sens le pluriel lui va bien (même si "désir" c'est déjà pas si simple)

Emeryck a écrit:

xoph a écrit:

Emeryck a écrit:

le titre pour l'exploitation en France est "Désir(s)" alors que la traduction littérale est "désir".

Allo les germanistes,
mais je crois que Sehnsucht est un peu intraduisible, désir, aspiration, mais aussi sa nostalgie, le sentiment de son évanouissement. On rapproche parfois de "saudade". Une si belle et récente découverte (merci Alifie) de "Sehnsucht" (pour moi) serait Barbara Haniggan, filmée par Amalric, chantant un tango à la noix (et magnifique) de Kurt Weill (Youkali - C'est presque au bout du monde). En ce sens le pluriel lui va bien (même si "désir" c'est déjà pas si simple)

Oui, je crois que tu as raison - c'est en tout cas ce qui est écrit sur Wikipédia.

xoph a écrit:

Je suis tombé là-dessus depuis

Peut-on traduire le mot allemand Sehnsucht ?
https://books.openedition.org/pup/7851

D'une point de vue strictement linguistique, je pense que le mot anglais longing traduit au mieux le Sehnsucht allemand : c'est un désir sourd et presque douloureux qui souffre de son propre parachèvement.

Cependant, je crois que la meilleure expression du concept trouve sa forme en musique (pour une fois!). Le Sehnsucht, c'est très exactement le désir dans le Tristan de Wagner (Im Sterben mich zu sehnen, vor Sehnsucht nicht zu sterben!).
https://www.youtube.com/watch?v=FcQeTCsQ5w4&list=PL78TsyiiZjhGGJhndz_P-8EbshbYcFDxB

Masahiro Shinoda : Killers on parade        1961

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Je découvre Shinoda par ce film, c'est un film assez typique de la nouvelle vague japonaise : on y suit un groupe assez hétéroclite de tueurs qui se racontent leur vie, ils sont ensuite sollicités par un promoteur immobilier corrompu qui leur demande d'assassiner une journaliste ayant des choses qui pourraient le compromettre ; ils prennent part à un concours et c'est un gars un peu random qui le remporte et il va ensuite s'enamourer de la journaliste et donc la défendre ; le groupe va donc essayer d'assassiner les deux. L'histoire est vraiment extrêmement balisée (dans les grandes lignes, mais assez bordélique de l'intérieur) mais c'est finalement pas mal car il y a un écart assez plaisant entre cette ligne de récit très nette et la manière dont le film la distend, que ce soit à travers des intermèdes musicaux ou des séquences assez fantasques (qui sont souvent assez chouettes visuellement - je pense particulièrement à la fin avec la lune rouge) ; après, ça n'est pas non plus aussi jouissif que dans Branded to kill de Suzuki ou Funeral parade of roses de Matsumoto qui dissolvent carrément le récit mais c'est tout de même un chouette film.

Gérard Oury : Fantôme avec chauffeur        1995


On est dans la fin de la filmographie d'Oury, il a déjà perdu le succès en salles depuis le début des années 90 et c'est pas avec ce film qu'il va le regagner (il ne tournera d'ailleurs plus qu'un film après celui-ci) : il s'agit d'une comédie un peu loufoque dans laquelle un chauffeur et celui qu'il conduit (interprétés respectivement par Gérard Jugnot et Philippe Noiret) meurent à quelques jours d'intervalle (le premier ayant été tué à la place de l'autre) et se retrouvent ensuite tous les deux réincarnés en fantômes, ils apprennent alors un peu à peu connaître la vie de l'un et de l'autre : le chauffeur avait gagné au tiercé et du coup, un gars essaie de tourner autour de la femme du défunt chauffeur pour lui soutirer de l'argent en lui promettant monts et merveilles ; du côté du patron, il était impliqué dans de la fraude fiscale et avait dissimulé des confessions dans un œuf de Fabergé qui finit par se balader à droite à gauche - ça dénonce ! Le film ne raconte vraiment pas grand-chose et n'est même pas vraiment drôle, les effets spéciaux pour les fantômes ont pris un sacré coup de vieux (peut-être même qu'ils apparaissaient déjà comme vieillots à la sortie du film) ; franchement, y aurait eu moyen de faire une sorte de road-movie amusant - surtout avec cette histoire d'œuf de Fabergé, y aurait pu avoir un truc mais non, on préfère suivre des conneries. En plus de ça, j'ai trouvé que les deux personnages n'étaient pas extrêmement bien articulés : le film s'intéresse à eux à tour de rôle mais du coup, ça ralentit le film et finalement, c'est presque comme s'il n'y avait pas trop d'interaction entre les deux personnages principaux.

Filippo Meneghetti : Deux        2019

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Ce film est le premier long-métrage de Meneghetti, c'est un des rares films (à ma connaissance) qui met en scène un couple de femmes non hétérosexuelles et sans que ce soit sexualisé. Elles sont voisines de palier, l'une d'entre elles a vécu avec un mari (interprétée par Martine Chevallier), l'autre (interprétée par Barbara Sukowa) visiblement pas, elles ont toujours vécu leur relation dans le secret mais elles ont décidé de faire leur coming-out auprès de leur famille et de s'installer toutes les deux dans un appartement à Rome. Lors de la vente de l'appartement du personnage de Chevallier, il y a déjà des réticences de la part de la famille et puis vient (hélas !) l'évènement-pivot du film : la femme fait un AVC. Encore une fois, si le film se démarquait au début, il tombe dans cette série de films où l'expérience minoritaire est avant tout une expérience de la douleur et de la violence : au-delà de l'aspect purement scénaristique (sa copine s'obstine mais la famille ne l'accepte pas du tout et essaie de l'exclure - ça ressort d'autant plus qu'il ne se passe pas grand-chose d'autre), le film met beaucoup l'accent sur ça par un montage assez sec, des ruptures d'intensité sonore et une ribambelle de scènes où l'on toque très violemment à une porte - qui permet à la fois de rendre compte de la séparation des personnages et de la violence. En plus de ça, les personnages sont encore une fois assez peu développés. La fin vient un peu tempérer cette approche mais ça semble aussi tardif que téléphoné (en plus, le fait qu'elle soit ouverte n'aide pas à la rendre moins téléphonée) ; je me demande bien ce que veut raconter ce film, "c'est pas facile de ne pas être hétérosexuel(le) mais bon, il faut garder espoir" : quelle découverte ! C'est en tout cas assez décevant au final.