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| | Massenet-Thaïs | |
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Auteur | Message |
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bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| | | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 15 Aoû 2016 - 15:27 | |
| Courtisane ou sainte : https://www.opera-online.com/fr/articles/thais-courtisane-ou-sainte ? |
| | | luisa miller Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5650 Age : 924 Date d'inscription : 27/11/2008
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 15 Aoû 2016 - 23:25 | |
| Article intéressant après une lecture en diagonale, mais je le lirai plus attentivement un peu plus tard, ayant du travail en retard dans l'écriture de mes portraits |
| | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Jeu 18 Aoû 2016 - 8:46 | |
| La version de Salzburg avec Rebeka/Domingo sous la baguette de Fournillier est disponible ici : https://www.br-klassik.de/themen/salzburger-festspiele/salzburger-festspiele-thais-massenet-oper-uebertragung-100.html . |
| | | luisa miller Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5650 Age : 924 Date d'inscription : 27/11/2008
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Dim 11 Sep 2016 - 20:16 | |
| Quand on a Hampson, Tézier et Pertusi dans l'oreille, Papi Placido ne peut soutenir la comparaison Tézier : /watch?v=F3DIkcMgCJM Hampson : /watch?v=InJL-1006QU Pas d'extraits de Pertusi sur ToiTube |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20753 Age : 41 Date d'inscription : 03/07/2009
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Dim 11 Sep 2016 - 20:44 | |
| Et quand on a Michel Dens ou Ernest Blanc dans les oreilles, même Tézier et Hampson (jeune... au MET c'est très difficile quand même!) font un peu pâle figure... |
| | | luisa miller Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5650 Age : 924 Date d'inscription : 27/11/2008
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Dim 11 Sep 2016 - 21:52 | |
| Houla, tu as des références anciennes là . |
| | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 9:21 | |
| - Polyeucte a écrit:
- Et quand on a Michel Dens ou Ernest Blanc dans les oreilles, même Tézier et Hampson (jeune... au MET c'est très difficile quand même!) font un peu pâle figure...
Ou Roger Bourdin ; Fondary, en scène, affichait à la fois des moyens insolents et une authentique passion (mais une passion au sens étymologique, soit : une douleur) dans Athanaël. Tézier est droit comme pouvait l'être Dens, Hampson ne m'a jamais complètement convaincu. Domingo, à Salzburg ou à San Francisco avec Machaidze, sans être (toujours pas, et pas plus mais pas moins, même si de-toute-façon-jamais ) un baryton, parvient à composer (et cette idée de composition dit bien que, pour moi, on n'est pas dans un terrain naturel) un Athanaël convaincant, je trouve : avec une forme d'onction, qui est celle d'un père de compassion plus que d'un fou de Dieu. De ce point de vue, je trouve même que son chant est moins "de bois" (comme il y a une langue de bois) que celui de Hampson. Quant à valider in petto toute novlangue qui se présente, j'ajoute que Domingo n'est pas et ne sera jamais à mes yeux, le premier venu ; et j'imagine que c'est la limite de mon raisonnement . (Il n'empêche : retour urgent au références françaises des décennies 50-60, pour moi comme tu le disais !) |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20753 Age : 41 Date d'inscription : 03/07/2009
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 9:50 | |
| - luisa miller a écrit:
- Houla, tu as des références anciennes là .
Oui... on a les références de son âge dans sa tête que veux-tu! - bAlexb a écrit:
-
Ou Roger Bourdin ; Fondary, en scène, affichait à la fois des moyens insolents et une authentique passion (mais une passion au sens étymologique, soit : une douleur) dans Athanaël. Oui, j'imagine bien Fondary... - Citation :
- Tézier est droit comme pouvait l'être Dens, Hampson ne m'a jamais complètement convaincu.
Domingo, à Salzburg ou à San Francisco avec Machaidze, sans être (toujours pas, et pas plus mais pas moins, même si de-toute-façon-jamais ) un baryton, parvient à composer (et cette idée de composition dit bien que, pour moi, on n'est pas dans un terrain naturel) un Athanaël convaincant, je trouve : avec une forme d'onction, qui est celle d'un père de compassion plus que d'un fou de Dieu. De ce point de vue, je trouve même que son chant est moins "de bois" (comme il y a une langue de bois) que celui de Hampson. Quant à valider in petto toute novlangue qui se présente, j'ajoute que Domingo n'est pas et ne sera jamais à mes yeux, le premier venu ; et j'imagine que c'est la limite de mon raisonnement . (Il n'empêche : retour urgent au références françaises des décennies 50-60, pour moi comme tu le disais !) Dens est droit oui, mais il a le mot qui claque, la hauteur d'un Ahtanaël fier de sa mission... Pour Hampson, il était en effet un peu plus gentil dans le studio mais proposait quelque chose de vraiment bien quand même. Au MET il n'est plus que l'ombre de lui-même malheureusement surtout face à Fleming qui reste sur les mêmes hauteurs que le studio d'une quinzaine d'année précédent! Actuellement, plutôt que Tézier, je préfèrerai un Dupuis pour Athanaël... Mais bon, mon grand regret est quand même de ne pas avoir d'Athanaël entier de Blanc (faudra que je regarde d'ailleurs si il l'a chanté... mais le truc c'est que je risque de baver en voyant la distribution... ) |
| | | bAlexb Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 9:56 | |
| - Polyeucte a écrit:
- Dens est droit oui, mais il a le mot qui claque, la hauteur d'un Ahtanaël fier de sa mission...
[...]
Actuellement, plutôt que Tézier, je préfèrerai un Dupuis pour Athanaël...
C'est exactement ça, c'est une affaire de mordant, de tranchant ; Dupuis s'impose naturellement, de ce point de vue (Bou, Degout, Naourit pourraient proposer quelque chose d'une densité textuelle et colorée assez brûmante à mon avis ; Sempey dans quelques années, peut-être aussi). |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 10:06 | |
| - bAlexb a écrit:
- C'est exactement ça, c'est une affaire de mordant, de tranchant ; Dupuis s'impose naturellement, de ce point de vue (Bou, Degout, Naourit pourraient proposer quelque chose d'une densité textuelle et colorée assez brûmante à mon avis ; Sempey dans quelques années, peut-être aussi).
IL faut de l'arrogance pour Athanaël... qui se pose quand même que le défenseur de Dieu et qui est loin du gentil moine qui vient sauver une dame pécheresse... il va surtout pour sa gloire essayer de convertir une courtisane... et s'y brûle les ailes! Ah oui... Bou ça pourrait être chouette... Naouri j'ai plus de doutes maintenant, trop croque mitaine. Degout en effet... Par contre, je doute que Sempey n'ait jamais cette façon arrogante de chanter. la voix est quand même bien ronde et manque d'angles je trouve. Sinon, Christoyannis bien sûr!! |
| | | bAlexb Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 10:20 | |
| - Polyeucte a écrit:
- Sinon, Christoyannis bien sûr!!
Justement pas ; à l'aune de son Chorèbe, par exemple, ça reste à mon sens un "phraseur" incomparable (et ce n'est pas un reproche ) mais plus un post-tridentin, un jésuite qu'un cénobite. C'est un chanteur qui gagne à habiter de longues périodes poétiques, je trouve, dans des dynamiques médianes qu'il sait varier à l'infini avec un potentiomètre vocal d'une justesse, d'une précision, d'une acuité chirurgicale rare ; ce qui n'en fait pas un Athanaël naturel, pour moi (de ce point de vue on serait plus dans l'ordre d'une composition, comme chez Domingo ; toutes choses égales par ailleurs ). (Et certains Russes avec cette raideur implacable des starets, Seigneur : Nikitin, Putilin, Ulyanov ...) |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
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| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 11:08 | |
| Oui, un phraseur, mais aussi un timbre brillant et qui sait claquer... donc on aurait un Athanaël plus réfléchit oui, mais pas moins vaniteux... Ah... Hvorostovsky si il voulait bien se donner la peine de travailler son français et son style! Bon après je me précipiterai plus pour une Thaïs que pour un Athanaël... mais avoir les deux serait tellement bien! Je rêve en secret d'un enregistrement avec Manfrino en grande forme et Dupuis... |
| | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 11:16 | |
| - Polyeucte a écrit:
- Je rêve en secret d'un enregistrement avec Manfrino en grande forme et Dupuis...
Je regrette toujours tellement de ne pas avoir pu voir à Saint-Etienne le concert qui était allé ensuite à Paris avec Manfrino/Werba ! ( Idem pour la production tourangelle cornaquée par Ossonce avec Marin-Degor ...) |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20753 Age : 41 Date d'inscription : 03/07/2009
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Lun 12 Sep 2016 - 11:39 | |
| - bAlexb a écrit:
- Je regrette toujours tellement de ne pas avoir pu voir à Saint-Etienne le concert qui était allé ensuite à Paris avec Manfrino/Werba !
(Idem pour la production tourangelle cornaquée par Ossonce avec Marin-Degor ...) Manfrino y était royale : timbre, tessiture, drapé (et vibrato parfaitement contrôlé... jusque au sur-aigu à la fin de l'air du miroir si je me souviens bien!)... tout était là pour une Thaïs d'exception! Werba moins à son aise mais de bonne facture... Par contre, c'était quand même très frustrant ces extraits... D'autant plus qu'on en a jamais eu une intégrale avec Manfrino... D'ailleurs, je crois que je n'avais pas mis mon compte rendu ici... Je viens de le relire et le voici : - Spoiler:
Thaïs : 07/12/2012
Paris, Opéra-Comique
Jules Massenet (1842-1912) : Visions... Thaïs : - Voilà donc la terrible citée !... - Ah ! Je suis seule, seule enfin !... Dis-moi que je suis belle... - Étranger, te voilà, comme tu l'avais dit !... Je suis Athanaël, Moine d'Antinoé... - Méditation... - Non loin d'ici vers l'occident... L'amour est une vertu rare... - L'ardent soleil m'écrase...Baigne d'eau tes mains et tes lèvres... - Tu sais, Ô Palémon... Qui te fait si sévère... Thaïs va mourir !... - La course dans la nuit... - Te souvient-il du lumineux voyage ?
Nathalie Manfrino, soprano Markus Werba, baryton Arièle Butaux, narratrice
Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire Laurent Campellone, direction
Pour clore la Biennale Massenet de Saint-Étienne, Thaïs était mise à l'honneur avec deux concerts : l'un à Saint-Étienne et l'autre à Paris sous la direction de Laurent Campellone. A l'origine, le concert devait réunir Nathalie Manfrino et Thomas Hampson : deux grands titulaires des rôles principaux de l'œuvre dans de très larges extraits. Rapidement, Hampson s'est désisté pour laisser sa place à Markus Werba. Même si le sommet de la Biennale était la re-création du Mage, ce concert promettait beaucoup !
Pour commencer la soirée, le chef nous propose une pièce très rare de Massenet : Visions..., un poème symphonique pour orchestre et électrophone. Composé peut de temps avant l'opéra Thaïs, Massenet nous montre déjà ce qui fera la force des interludes de l'opéra : une peinture des ambiances et des sentiments qui nous emportent vers un autre monde. Ici, nous sommes au sommet du Simplon et un homme y rêve d'une présence à la fois sensuelle et effrayante. Pour personnifier cette entité, Massenet décida d'utiliser un instrument des plus récents : l'électrophone. Malheureusement, cette invention n'était pas encore au point et donc la partition ne fut jamais jouée telle qu'elle avait été pensée par le compositeur... jamais avant ces concerts puisque le chef a voulu essayer de recréer l'instrument. L'orchestre développe un beau climat nocturne où la tourmente alterne avec la sérénité des montagnes... mais ceci est rapidement troublé par cette voix qui dialogue avec un violon et une harpe. Car la musique de l'électrophone est tout sauf uniforme... tour à tour voix chantée, souffle aérien, grognement ou effet choral, l'instrument semble protéiforme. Sa présence et cette malléabilité font de cette pièce quelque chose d'assez fascinante, mais l'orchestre n'est pas en reste, nous montrant que le compositeur qui n'est maintenant connu que pour ses opéras pouvait aussi donner de superbes partitions dans un répertoire non lyrique.
Mais la partie principale de la soirée restait l'opéra Thaïs ou du moins les larges extraits qui nous sont proposés. Partition exigeante créée alors que Massenet pouvait compter sur les plus grands chanteurs de la scène parisienne, elle requiert avant tout deux chanteurs très charismatiques et à la voix longue. Pour le rôle titre, il faut rien de moins qu'un médium très fourni, des aigus assurés et des graves aisés… le tout avec un timbre qui doit se faire immédiatement charmeur et sensuel, tout en sachant aller vers une simplicité religieuse après l'illumination. Si Athanaël fait le chemin inverse de la courtisane, il n'en demande pas moins lui aussi beaucoup de qualités : déjà cette spécificité des barytons français de l'époque avec une voix longue où sonnent de noires graves et d'éclatants aigus… mais aussi la stature noble du moine qui doit pouvoir se libérer et s'effacer devant la passion de l'homme. Face à ces impératifs vocaux et interprétatifs, se dresse l'orchestre riche et brillant de Massenet. Toujours très à l'aise avec les peintures orientalisantes de l'orchestre, le compositeur déploie les ors de la courtisane ou la rugueuse tunique de moine. Composé alors que le Mage venait d'être créé à l'Opéra de Paris, la partition de Thaïs en conserve sa démesure, tout en approfondissant la psychologie des personnages et surtout le parcours en miroir des deux . Le parti pris de ce concert était de ne présenter que deux rôles dans un format qui ferait presque penser à un oratorio s'il n'était pas si immédiatement lyrique. Pour situer les spectateurs, Arièle Butaux proposait des résumés avant chaque partie sur un ton plutôt acide qui n'aidait pas à prendre au sérieux une pièce jugée trop marquée par son temps. A force de simplification extrême, on pourrait en venir à partager cette idée et à ne pas aller chercher la finesse des sentiments qui émaillent la partition. Tout au long de la soirée, Laurent Campellone nous a démontré son amour de la musique de Massenet. Depuis 2003, une relation particulière semble s'être tissée entre le chef et l'élément central du Festival Massenet de Saint-Étienne : l'ensemble des musiciens répondent avec précision à une direction particulièrement mouvementée. Et il n'y a pas que les gestes qui sont larges et un peu violents... tout au long de la soirée, le chef insuffle une grande passion et une belle largeur à l'orchestre mais n'y met pas en valeur tous les détails que nous montrent d'autres lectures. Plutôt qu'une Thaïs ouvragée et finement nuancée, c'est un opéra qui se dessine avec passion et violence. L'orchestre peut sonner jusqu'à la saturation lors de la "Course dans la Nuit", mais il propose aussi de belles délicatesses comme lorsque l'on entend au loin la musique de la fête de Nicias. Au centre de la soirée, la fameuse Méditation est fort bien jouée avec des nuances rythmiques et dynamiques bien appliquées à l'orchestre, mais étrangement, c'est le violoniste Lionel Schmidt qui dépareille avec une vision beaucoup plus sèche et moins lyrique qu'à l'habitude. Malgré les réserves exprimées, on ne peut que saluer l'implication magnifique du chef et de l'orchestre qui donnent une puissance rare à la partition en y engageant toutes leurs forces, d'un bout à l'autre, pour culminer sur une mort de Thaïs qui emmène tous les spectateurs vers d'autres mondes. La plus grande inconnue de la soirée était la prestation de Markus Werba. Peu habitué au répertoire français et chantant beaucoup de Mozart, on pouvait se demander comment il chanterait Athanaël... et les débuts du concert n'ont fait que renforcer ces craintes. La voix sonne peu et le chanteur semble très mal à l'aise avec le grand air du moine : à des soucis rythmiques s'ajoute l'impression que la voix est forcée pour donner un caractère impérieux au personnage. Mais rapidement, les choses s'améliorent : si tout au long de la soirée, l'impact de la voix reste limité et le chanteur un peu en sur-régime, Athanaël prend peu à peu de l'épaisseur avec un baryton qui se trouve plus à l'aise avec l'homme qu'avec le moine. Bien sûr, le personnage est peuplé de fantômes prestigieux pour qui le rôle semblait avoir été taillé, comme Ernest Blanc ou Michel Dens... mais même plus proche de nous, Gerald Finley ou Thomas Hampson avaient réussi à donner plus de nuances dans le portrait du moine. Ici, Markus Werba doit d'abord penser à son chant avant de pouvoir véritablement fouiller le rôle. L'évolution se fait plus erratique dans le parcours émotionnel de l'homme et on sent bien que le chanteur n'a pas encore pris possession du rôle (son attachement à la partition en est un autre indice). Question diction enfin, là aussi le travail est manifeste… mais n'arrive pas vraiment à convaincre, palissant devant ce que fait sa partenaire. Beaucoup de reproches… mais avouons tout de même de beaux efforts tout au long de la soirée, une voix très belle et un chanteur qui pourrait faire sûrement beaucoup mieux dans quelques années. Et pour être franc, il faut bien avouer que l'optique de direction du chef n'aide par le chanteur à nuancer son chant : il lui faut d'abord passer cette masse sonore qui risque de l’engloutir régulièrement. Face à lui se trouvait une Nathalie Manfrino en grande forme. Fréquentant le rôle de Thaïs depuis quelques années, la soprano française nous a gratifiés d'un grand portrait et d'un chant de très haut niveau. Venons-en tout de suite au sujet qui fâche souvent : le vibrato. Vu la largeur de la voix, il arrive que le vibrato s'invite de manière trop importante. Rien de tel ici où il reste totalement sous contrôle, ne déformant jamais la ligne de chant. Tout au long de la soirée, la voix est large et ronde, avec un médium particulièrement nourri et épanoui, ainsi qu'un aigu lumineux. La chanteuse semble à l'aise dès son entrée où l'air redoutable de la courtisane démontre immédiatement les facilités dans ce médium large qui est si souvent sollicité et de beaux aigus (seuls vraiment les extrêmes aigus montrent un effort). Autre point fort : la diction. Dès que la soprano ouvre la bouche, que ce soit dans un récitatif ou dans un air, le texte coule avec facilité dans un français limpide et naturel. Détails de la prononciation peut-être, mais qui ajoute au charme et au naturel de la déclamation, les R sont prononcés de façon naturelle, et non à l'italienne ! Il est extrêmement rare d'entendre ce genre de diction où la difficulté est de réussir à faire sonner ces lettres si souvent escamotées ou alors trop mises en avant. Tout le texte est ici parfaitement dit, avec une légère exception pour le haut de la tessiture lors de la dernière scène où le texte perd en clarté. Avec toutes ces qualités (tessiture, diction, phrasé), il ne lui manquait que les nuances et la musicalité... et c'est ce que l'on entendre aussi ce soir : vivant le texte comme dans une production scénique, la soprano déploie énormément d'intelligence pour habiter le rôle et créer ce personnage si complexe. Dès les premières paroles, cette Thaïs proposée démontre une psychologie fouillée : non pas coquète et frivole, mais intelligente et troublée. Son parcours initiatique est magnifiquement rendu depuis la dérision jusqu'à cette illumination vocale en passant par la terreur et l'émotion de la découverte. L'extase finale est particulièrement troublante et puissante puisque là où Markus Werba semble luter contre l'orchestre, Nathalie Manfrino possède la projection et la puissance nécessaires pour se fondre dans l'orchestre et y rayonner. Cette soirée restera dans les mémoires pour la prestation magistrale de la soprano française. C'est avec des soirées comme celle-ci qu'elle démontre qu'elle a toute sa place sur les plus grandes scènes mondiales, quelque soit ses soutiens artistiques.
Ce concert clôt en beauté la Biennale Massenet de Saint-Étienne, réunissant une partition fascinante et une chanteuse resplendissante dans le rôle principal. Si Markus Werba n'est pas totalement au niveau, il n'en tient pas moins son rôle avec intelligence et aplomb. On saluera encore le travail de Laurent Campellone qui continue à faire découvrir Massenet au plus grand nombre avec un amour manifeste pour le compositeur et ses partitions, comme le démonte la direction de ce concert. Bien sûr, on sort légèrement frustrés de ne pas avoir entendu l'œuvre en entier, mais espérons qu'un directeur d'opéra aura la bonne idée de monter une production de Thaïs autour de Nathalie Manfrino dans les saisons qui viennent !
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| | | luisa miller Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5650 Age : 924 Date d'inscription : 27/11/2008
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Mar 13 Sep 2016 - 22:26 | |
| - Polyeucte a écrit:
- Et quand on a Michel Dens ou Ernest Blanc dans les oreilles, même Tézier et Hampson (jeune... au MET c'est très difficile quand même!) font un peu pâle figure...
Ca sonne quand même terriblement clair et ancien je trouve |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20753 Age : 41 Date d'inscription : 03/07/2009
| | | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Mer 14 Sep 2016 - 9:03 | |
| - Polyeucte a écrit:
- Parce que la diction est parfaitement claire et le chant bien en avant?
La diction, notamment, n'est d'aucun temps ; elle ne devrait pas l'être. C'est par la force des choses, sans doute, qu'elle est devenue un marqueur chronologique ; mais c'est contingent (et un Dupuis, aujourd'hui, par exemple, un Tézier, un Christoyannis aussi ont relevé le gant sans bruit mais avec quel panache). Pour Dens, son duo de Traviata avec Mado Robin, ses extraits de Rigoletto, son Zurga aussi et, très largement, tout ce qu'il a laissé au disque, sont des modèles de formation de la langue, de droiture stylistique . |
| | | Polyeucte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20753 Age : 41 Date d'inscription : 03/07/2009
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Mer 14 Sep 2016 - 9:24 | |
| - bAlexb a écrit:
- La diction, notamment, n'est d'aucun temps ; elle ne devrait pas l'être. C'est par la force des choses, sans doute, qu'elle est devenue un marqueur chronologique ; mais c'est contingent (et un Dupuis, aujourd'hui, par exemple, un Tézier, un Christoyannis aussi ont relevé le gant sans bruit mais avec quel panache).
Oui, je suis d'accord... mais disons que pour moi Dens est encore un petit cran au dessus... il y a un naturel dans la façon de dire le texte qui n'est pas tout à fait le même que celui de nos contemporains. Un peu comme quand j'entends Vanzo puis Alagna... quelque chose d'immédiat et de presque parlé pour le premier... et quelque chose de beaucoup plus chantant chez le deuxième. - Citation :
- Pour Dens, son duo de Traviata avec Mado Robin, ses extraits de Rigoletto, son Zurga aussi et, très largement, tout ce qu'il a laissé au disque, sont des modèles de formation de la langue, de droiture stylistique .
ça... on ne le dira jamais assez... Admirables aussi ses extraits d'opérette! |
| | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Mer 14 Sep 2016 - 10:18 | |
| - Polyeucte a écrit:
- quelque chose d'immédiat et de presque parlé pour le premier... et quelque chose de beaucoup plus chantant chez le deuxième.
La question (mais la question, vraiment ; à laquelle je n'ai pas de réponse toute faite, personnellement), c'est : est-ce qu'une déclamation dramatique, le port du mot en fait, fût-il lyrique, appelle systématiquement quelque chose d'immédiatement chantant ? |
| | | luisa miller Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5650 Age : 924 Date d'inscription : 27/11/2008
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Mer 14 Sep 2016 - 12:50 | |
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| | | bAlexb Mélomane chevronné
Nombre de messages : 8514 Age : 43 Localisation : Rhône-Alpes Date d'inscription : 18/10/2010
| Sujet: Re: Massenet-Thaïs Mer 14 Sep 2016 - 13:22 | |
| - luisa miller a écrit:
Diction parfaite oui, c'est vrai . Mais style assez ancien Mais on peut retourner l'argument : à l'aune d'une certaine tradition ( traditio = transmission) et même par la relative discrétion de sa formation, à Roubaix auprès d'un ancien maître de chapelle, on peut se dire qu'avec son émission extrêmement naturelle, son chant vers l'avant, etc., il est sans doute plus proche d'un Massenet authentique/authentifié que beaucoup de titulaires actuels dans son répertoire . Alors je ne sais pas si ça fait objectivement un Massenet "AOP", mais on a connu plus frelaté depuis ... (Je n'ose pas citer la vieille cire déplorable qui rend une image déformée pour ne pas dire difforme de Faure, mais vois par exemple Maurel dans Massenet, justement, ou encore dans Hahn : /watch?v=ZNXtJQR6r5A & /watch?v=WI_9f6Kl0tc .) |
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