RF - ON - Collon - Kantorow - 30/09/21

Hector Berlioz : Le Corsaire
Camille Saint-Saëns : Concerto pour piano et orchestre n° 2
Edward Elgar : Symphonie n° 1

Très belle ouverture du Corsaire, avec une interprétation pleine de fougue du chef, Nicholas Collon.
Je sais qu'on dit beaucoup de bien de lui, mais je n'ai pas vraiment été convaincu par Alexandre Kantorow.
Il en fait vraiment trop dans le premier mouvement du concerto, trop de rubato. cela manque de sobriété tout simplement. Il a peut-être confondu avec Tchaikovski !
Je me souviens de Chamayou en avril à la Philharmonie, qui le tirait vers le romantisme allemand, mais avec beaucoup plus de retenue.
Les deux mouvements suivants étaient plus sobres, mais je ne suis pas rentré dedans.
Pour moi, Chamayou a le premier prix !! Nous verrons ce jeudi la suite dans le 5ème concerto du même Saint-Saëns par le même Kantorow.
Quel plaisir ensuite d'entendre une symphonie d'Elgar, rarissime à Paris ! Barenboim avait donné il y a quelques années à Pleyel la deuxième. C'est un peu gras, un peu pompier, un peu ampoulé, mais j'adore !
On pense un peu à Brahms, un peu à Strauss, mais cette musique reste pourtant très originale et ce style n'appartient qu'à Elgar.
Seul problème à mon avis : ce genre de musique n'est pas faite pour cette salle. C'est trop fort, ça sature. Peut-être le chef aurait-il pu modérer son orchestre ?
Le mieux évidemment serait de jouer cela à la Philharmonie.

D'accord avec Fritelli : ouverture de Berlioz vivante et précise. Je ne suis pas très sensible au concerto (que je trouve plaisant sans plus), mais Kantorow m'a aussi semblé trop 'romantique' (j'ai pensé à Rachmaninov), et je n'ai pas retrouvé son 'son' singulier, puissant et mobile, entendu en salle dans un concerto de Prokofiev, et en retransmission dans ses récitals. Deux bis, fin de l'Oiseau de feu arrangé pour piano et Pétrarque/Liszt.

Interprétation d'Elgar intéressante : je crois justement que le chef essayait de la dégraisser et la dépompièriser autant que possible, et de découper et de rendre lisible la forme plutôt que de s'attarder sur les épanchements (qui restent néanmoins présents, par la force des choses). Très belle œuvre en tout cas, peu naturelle dans certains de ses développements et de ses tournures, avec une couleur d'ensemble qui fait penser à un Schumann british (assez opaque) tout en étant assez brillamment orchestrée.

Je désespérais un peu d'être le premier à commenter ce concert, tant je suis partagé depuis jeudi.

Berlioz : RAS, j'étais ailleurs, déconcentré par mon replacement. C'est un morceau que je n'ai jamais vraiment pris le temps d'écouter, et force est de constater qu'il ne s'impose pas à mes oreilles.

Saint-Saëns : la raison de ma réservation. C'est mon concerto préféré, et il n'est pas si souvent joué, même si c'est un des tubes de Saint-Saëns. Assez réservé également sur ce pianiste, qui, au disque, me fait l'effet d'être le pianiste à la mode, c'est son tour, après avoir été celui de Lucas Debargue, Kathia Buaniatishvili… Mais, il m'avait impressionné dans Prokofiev 2 à la PP au printemps, avec un son très dur, voire métallique, qui se prêtait particulièrement bien à ce morceau. Son disques des concertos de Saint-Saëns ne m'avait pas convaincu, mais… pourquoi pas !
L'interprétation de jeudi n'a pas renversé la table : je crois que Fritelli a fait le bon diagnostic, premier mouvement un peu trop maniéré à mon goût. Et au fond, une interprétation assez terne. Le job est fait, le tempo et les notes sont en place, mais ça manque d'urgence, de plaisir de jouer, de vie. J'ai toujours en tête l'indépassable Fazil Say qui rend ce concerto fleuri, plein d'inventivité, de fantaisie, et en fait ressortir beaucoup plus de couleurs.
Alexandre Kantorow me paraît toujours un peu endormi, je disais au printemps "oiseau mazouté", jeudi c'était plutôt Droopy ralenti, entrant sur scène avec un air mi-ailleurs mi-surpris, le regard mi-éteint mi-triste. Col roulé noir, pantalon de ville, chaussures usées… Bizarre.

Deux rappels :
- finale de l'Oiseau de feu, de Stravinsky,
- Sonnet de Pétrarque, de Liszt.
Très sympa ! Mais, je ne suis pas sûr qu'il fut autant rappelé qu'attendu.

Elgar : mon problème de la soirée. Je ne connaissais pas du tout cette symphonie et quelques écoutes au disque ne m'avaient rien laissé.
J'ai envie de dire du bien du chef : très engagé, vivant, sautillant, toujours souriant, il a donné son maximum pour ce morceau de près d'une heure. Tempo plutôt rapide, mené avec force et conviction.
Mais, le problème était plutôt dans la partition. Le mot "pompier" choisi par Fritelli est très juste. On pense aux hymnes anglais, aux musiques officielles lorsque la Reine sort de son palais. Il s'agit d'une succession de passages fortissimo, assez épuisante, sans véritablement de thème qui ressorte, sans début ni fin. On ne sait jamais vraiment où on est, si ce n'est que c'est très chouette, très fort et assez épuisant. Ce n'est pas une musique qui emporte quelque-part ou qui délivre un message, ni qui appelle à réfléchir. Chaque minute découpée pourrait être fort plaisante, comme transition dans un autre morceau, mais près d'une heure de divagations fortissimo sans but ni profondeur, c'est un peu fatiguant. Je suis probablement passé à côté de quelque-chose, et je le regrette. Première fois de la saison où j'ai regardé l'heure.
Et pourtant, je ne voudrais pas retenir qu'une impression négative, car objectivement, c'est de la belle musique !

De retour dans le bus, avec deux violonistes : elles se demandaient si elles n'allaient pas aller chez l'ostéo le lendemain, car visiblement épuisées physiquement par la symphonie. Et je les comprends ! Les cordes n'ont, à peu près, aucun moment de répits !

Rocktambule a écrit:

Berlioz : RAS, j'étais ailleurs, déconcentré par mon replacement.

Tentative sauvage de ta part, ou imposé par RF ?

Citation :

Assez réservé également sur ce pianiste, qui, au disque, me fait l'effet d'être le pianiste à la mode, c'est son tour, après avoir été celui de Lucas Debargue, Kathia Buaniatishvili… Mais, il m'avait impressionné dans Prokofiev 2 à la PP au printemps, avec un son très dur, voire métallique, qui se prêtait particulièrement bien à ce morceau. Son disques des concertos de Saint-Saëns ne m'avait pas convaincu, mais… pourquoi pas !
L'interprétation de jeudi n'a pas renversé la table : je crois que Fritelli a fait le bon diagnostic, premier mouvement un peu trop maniéré à mon goût. Et au fond, une interprétation assez terne. Le job est fait, le tempo et les notes sont en place, mais ça manque d'urgence, de plaisir de jouer, de vie. J'ai toujours en tête l'indépassable Fazil Say qui rend ce concerto fleuri, plein d'inventivité, de fantaisie, et en fait ressortir beaucoup plus de couleurs.

Say est formidable là-dedans (comme ailleurs), évidemment.

Mais Kantorow, je lui trouve tout de même une sobriété dans l'aisance très délectable. J'avais bien aimé son cycle Saint-Saëns avec le Tapiola Sinfonietta et J.-J. Kantorow. Ce n'est pas aussi marquant qu'Ashkenazy ou Thibaudet, j'en suis d'accord, et on peut aimer plus extraverti dans ces pages, mais de là à lui trouver un aspect Droopy, je suis surpris (ce n'est pas l'Orchestre de l'Opéra dans Donizetti, tout de même ).

Rocktambule a écrit:

Mais, le problème était plutôt dans la partition. Le mot "pompier" choisi par Fritelli est très juste. On pense aux hymnes anglais, aux musiques officielles lorsque la Reine sort de son palais. Il s'agit d'une succession de passages fortissimo, assez épuisante, sans véritablement de thème qui ressorte, sans début ni fin. On ne sait jamais vraiment où on est, si ce n'est que c'est très chouette, très fort et assez épuisant. Ce n'est pas une musique qui emporte quelque-part ou qui délivre un message, ni qui appelle à réfléchir. Chaque minute découpée pourrait être fort plaisante, comme transition dans un autre morceau, mais près d'une heure de divagations fortissimo sans but ni profondeur, c'est un peu fatiguant. Je suis probablement passé à côté de quelque-chose, et je le regrette. Première fois de la saison où j'ai regardé l'heure.

La structure n'est pas claire et l'orchestration très opaque, toute en doublures, c'est d'accord… mais je ne ressens pas ce que tu dis. (Du moins quand je l'écoute dans les versions qui ont ma faveur.)

Rocktambule a écrit:

Saint-Saëns : la raison de ma réservation. C'est mon concerto préféré, et il n'est pas si souvent joué, même si c'est un des tubes de Saint-Saëns. Assez réservé également sur ce pianiste, qui, au disque, me fait l'effet d'être le pianiste à la mode, c'est son tour, après avoir été celui de Lucas Debargue, Kathia Buaniatishvili… Mais, il m'avait impressionné dans Prokofiev 2 à la PP au printemps, avec un son très dur, voire métallique, qui se prêtait particulièrement bien à ce morceau. Son disques des concertos de Saint-Saëns ne m'avait pas convaincu, mais… pourquoi pas !
L'interprétation de jeudi n'a pas renversé la table : je crois que Fritelli a fait le bon diagnostic, premier mouvement un peu trop maniéré à mon goût. Et au fond, une interprétation assez terne. Le job est fait, le tempo et les notes sont en place, mais ça manque d'urgence, de plaisir de jouer, de vie. J'ai toujours en tête l'indépassable Fazil Say qui rend ce concerto fleuri, plein d'inventivité, de fantaisie, et en fait ressortir beaucoup plus de couleurs.
Alexandre Kantorow me paraît toujours un peu endormi, je disais au printemps "oiseau mazouté", jeudi c'était plutôt Droopy ralenti, entrant sur scène avec un air mi-ailleurs mi-surpris, le regard mi-éteint mi-triste. Col roulé noir, pantalon de ville, chaussures usées… Bizarre.

Deux rappels :
- finale de l'Oiseau de feu, de Stravinsky,
- Sonnet de Pétrarque, de Liszt.
Très sympa ! Mais, je ne suis pas sûr qu'il fut autant rappelé qu'attendu.

Ah j'ai énormément aimé ce qu'il a fait dans ce deuxième... virtuose mais sans esbroufe (bon, il ne faut pas trop le regarder, les bras au ralenti, les mouvements "inspirés"...)
Et pour les BIS, il a quand même été très applaudi... et pour moi il ne les a pas vraiment imposés, ils étaient quand même assez demandés par le public.

DavidLeMarrec a écrit:

Ce n'est pas aussi marquant qu'Ashkenazy ou Thibaudet, j'en suis d'accord...

Ashkensazy dans Saint-Saëns ? Tu ne voulais pas dire Ciccolini plutôt ?
Il y a une intégrale qui est moins citée, et que je trouve très bonne, c'est Rogé / Dutoit.

DavidLeMarrec a écrit:

La structure n'est pas claire et l'orchestration très opaque, toute en doublures, c'est d'accord… mais je ne ressens pas ce que tu dis. (Du moins quand je l'écoute dans les versions qui ont ma faveur.)

Quelles sont ces versions ? J'ai besoin d'évoluer sur cette symphonie.

Polyeucte a écrit:

Et pour les BIS, il a quand même été très applaudi... et pour moi il ne les a pas vraiment imposés, ils étaient quand même assez demandés par le public.

Ce que je voulais dire, c'est qu'il en avait peut-être prévu d'autres, mais que les applaudissements se sont interrompus d'un coup.

Je voulais dire Rogé-Dutoit, en effet. Mais Collard-Previn ou Descharmes-Soustrot me convainquent encore davantage.

Citation :

Quelles sont ces versions ? J'ai besoin d'évoluer sur cette symphonie.

Oramo, limpide et coloré. En concert, évidence folle de Norrington (justement pas du tout lourd, parfaitement élégant et dosé), je ne sais plus s'il l'a enregistrée.

DavidLeMarrec a écrit:

Je voulais dire Rogé-Dutoit, en effet. Mais Collard-Previn ou Descharmes-Soustrot me convainquent encore davantage.

Tous sont très bien, mais Jeanne-Marie Darré avec Louis Forestier et l'Orchestre de l'ORTF, c'est encore mieux.

Benedictus a écrit:

DavidLeMarrec a écrit:

Je voulais dire Rogé-Dutoit, en effet. Mais Collard-Previn ou Descharmes-Soustrot me convainquent encore davantage.

Tous sont très bien, mais Jeanne-Marie Darré avec Louis Forestier et l'Orchestre de l'ORTF, c'est encore mieux.

Qui elle-même est un peu moins convaincante que Paderewski avec Coppola et l'Orchestre des Bouffes-Parisiens.

(Mais l'intégrale des concertos pour piano de Saint-Saëns Darré / Forestier / ORTF, ça existe en vrai, et c'est vraiment super - bien sûr, c'est très typé «français années 50», le style de pianisme comme les timbres orchestraux, mais passionnant dans ce style.)

Citation :

Quelles sont ces versions ? J'ai besoin d'évoluer sur cette symphonie.

Oramo, limpide et coloré. En concert, évidence folle de Norrington (justement pas du tout lourd, parfaitement élégant et dosé), je ne sais plus s'il l'a enregistrée.[/quote]

Je serais assez attiré par Barbirolli (même si je ne l'ai jamais écouté). Il y a Boult aussi.

Benedictus a écrit:

(Mais l'intégrale des concertos pour piano de Saint-Saëns Darré / Forestier / ORTF, ça existe en vrai, et c'est vraiment super - bien sûr, c'est très typé «français années 50», le style de pianisme comme les timbres orchestraux, mais passionnant dans ce style.)

Oui, j'ai découvert il y a peu, cherchant une intégrale qui me plaise... et c'est vraiment superbe.
Bientôt en version moderne on aura Kantorow qui a déjà enregistré les 1 et 2 alors que 3, 4 et 5 sont déjà parus. Et en bonus on devrait avoir des trucs comme la Rapsodie d'Auvergne, Africa... bref toute la musique pour piano et orchestre!