Autour de la musique classique Le but de ce forum est d'être un espace dédié principalement à la musique classique sous toutes ses périodes, mais aussi ouvert à d'autres genres. |
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| Salvatore Sciarrino | |
| | Auteur | Message |
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Barbajuan Mélomaniaque
Nombre de messages : 876 Date d'inscription : 20/01/2009
| Sujet: Salvatore Sciarrino Mer 21 Jan 2009 - 21:15 | |
| Je viens de découvrir ce compositeur qui m'a souvent été vanté, par l'intermédiaire de deux de ses œuvres : La boca, i pedi e il suono, pour quatre saxophones solistes et cent saxophones en mouvement, et Studi per l'intonazione del mare, pour quatre flûtes, quatre saxophones, percussions, orchestre de cent flûtes et orchestre de cent saxophones (rien que ça). Déçu déçu déçu. Ça m'a paru assez spécieux. Hormis quelques effets amusants tirés des saxophones, ces pièces me paraissent vite dépourvues d'intérêt. On dirait que dans chaque mouvement, quelques notes, souvent les mêmes, sont égrenées de temps à autres pour rompre l'hébétude de l'auditeur. Les effets disons inhabituels que l'on peut espérer de ces instruments sont quand même assez limités donc bâtir tout un morceau sur ce seul principe, ça me semble au pire malhonnête, au mieux minimaliste, mais d'une indigence crasse. Peut-être que ces pièces ne s'apprécient qu'en concert, étant donné que la spatialisation du son semble y intervenir, et qu'il est vain de n'en entendre que des enregistrements que sur CD (mais alors pourquoi les avoir gravées ?). Peut-être qu'une fois refoulée son obsession pour les saxophones, il s'est consacré à autre chose ? Peut-être je suis un con ?
Ma question aux musiciens éclairés de ce distingué forum est donc la suivante : puis-je me contenter de cet avis dépréciatif et pas très éclairé, ou bien est-ce que d'autres compositions pourraient m'en faire changer ? |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97900 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Salvatore Sciarrino Mer 21 Jan 2009 - 21:34 | |
| Oui, compositeur à la mode. Il est d'abord connu pour ses opéras, il me semble ; enfin, tout au moins pour Luci mie traditrici. Pour avoir par-dessus le marché fréquenté Macbetto, tre atti senza nome lors de sa création, je partage ta perplexité. Il est vrai qu'à la radio, je ne disposais pas du livret ; que prosodie bizarre aidant, et surtout que mon italien n'étant vraiment pas ce qu'il est devenu, je n'ai pas encadré grand'chose à l'action, ce qui peut tout changer.
J'avais moi aussi trouvé ça plutôt pas beau et plutôt plat. Pas du tout indigne en revanche, mais ça ne m'a absolument pas parlé, soit que je sois passé à côté, soit que ce soit effectivement secondaire.
[Par ailleurs, le répertoire pour ensemble de saxophones contient quelques sérieux nanars... J'ai, entre autres, un souvenir assez décevant de pièces déjà anciennes de Christian Rossé en concert (pour grand effectif de saxophones, près d'une trentaine).] |
| | | Barbajuan Mélomaniaque
Nombre de messages : 876 Date d'inscription : 20/01/2009
| Sujet: Re: Salvatore Sciarrino Mer 21 Jan 2009 - 21:54 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Pas du tout indigne en revanche, mais ça ne m'a absolument pas parlé
J'ai bien dit indigent, hein, pas indigne, je ne me serais pas permis . Bon ben on lui redonne quand même une chance au Salvatore, non ? J'écoute ton opéra, tu écoutes mes saxophoneries. Quant au répertoire pour saxophones, je n'en ai jamais espéré grand chose, donc je m'en remets aux enregistrements doucereux du Quatuor Ars Gallica : mon père a écouté récemment un de leur disques que je lui avait passé et m'a dit texto : "Épatant tes saxophonistes, j'ai encore rien trouvé de mieux pour faire la sieste"... Dans sa bouche c'était un sacré compliment. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97900 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Salvatore Sciarrino Mer 21 Jan 2009 - 22:01 | |
| Il y a de très belles choses pour saxophone solo en revanche (je suis dingue des Dialogues pour la nuit de Pascal Gaigne - pour accordéon et saxosoprano). |
| | | / Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20537 Date d'inscription : 25/11/2012
| Sujet: Re: Salvatore Sciarrino Jeu 16 Juil 2015 - 13:43 | |
| J’ai mis un certain temps à appréhender l’univers de Sciarrino. Aujourd’hui, sa musique me plait beaucoup, même si je la connais encore mal. Maitre des musiques bruitistes en Italie, son importance est considérable, l’équivalent de ce qu’est Lachenmann en Allemagne, et beaucoup de jeunes compositeurs ont d’ailleurs étudié avec les deux. Pourtant, leur musique et leur parcours sont très différents. Il faut distinguer deux périodes, où en tout cas remarquer un tournant important autour de la fin des années 70. Tout en revendiquant un certain rapport à la tradition, Sciarrino a toujours recherché le renouvellement et l’innovation sonore, et ceci prend des formes assez radicales au cours de la première période, violentes et virtuoses. Le cd chez Accord avec les Caprici pour violon seul et Un’immagine di Arpocrate, une sorte de concerto pour piano, illustre très bien cela. À partir de la fin des années 70, Sciarrino va surtout travailler sur des sonorités biologiques ou organiques, et souvent très ténues : des souffles, des battements fragiles, des bourdonnements quasi inaudibles, échos, silences. Ceci est particulièrement frappant dans les œuvres orchestrales, où le résultat minimal contraste avec les effectifs parfois colossaux utilisés. C’est pour l’instant Morte di Borromini, pour orchestre avec récitant (Moni Ovadia chez Kairos), qui m’a le plus marqué. Le texte est constitué des paroles de Borromini récoltées par un médecin sur son lit de mort. La majeure partie de l’œuvre est très silencieuse, faite de respirations, de grondements lointains, et des sons diaphanes de la nuit, cordes aériennes et chants plaintifs des vents. Après vingt minutes environ, l’orchestre s’agite par saccades, mêlant bruits de la villes et cris du délire de Borromini, qui prononce ses dernières paroles sous un gigantesque acouphène puis parmi les tintements de quelques cloches. |
| | | Bateleur131 Néophyte
Nombre de messages : 15 Age : 29 Localisation : Boston Date d'inscription : 23/11/2015
| Sujet: Re: Salvatore Sciarrino Mar 24 Nov 2015 - 20:06 | |
| J'ai vu il y a deux ans un pianiste jouer la Cathédrale Engloutie suivie directement - sans applaudissements - le Perduto in una citta d'acque de Sciarrino. C'est un peu à la Messiaen, des permutations d'"accords" (à deux sons, éclatés dans les registres) alternant avec des points sourds au fond du grave, comme une bulle d'air sombre au milieu de ce legato impassible. Il y a un peu comme dans Kurtag ce coté expressionniste de repousser les limites de l'instrument (le legato tel qu'il est écrit est un peu impossible). C'est très statique au niveau des couleurs - miracle de la musique, ces éléments cohabitent sans conflit, suivent leur logique. Seul élément perturbateur: une bribe de mélodie - courte comme un filon de lumière qui passerait dans la réflexion d'une vitre engloutie, un faible rayon, muon de vie amorphe et sans émotion, mais bourre d'envie de vie - s’échappe, piano, de ce silence pppp. Je n'ai vu nulle part dans la partition une connexion au Prélude de Debussy - meme si les titres sont connectes - mais la présentation cote a cote des deux œuvres a aide la compréhension des deux - le faste oppressant et la benediction de lumiere, l'irrigation de l'eau par le soleil, une vision d'un instant étiré, et chez Sciarrino les relents, l’écho de ces vagues de photons, écho errant dans les rues de l'Ys de Debussy. Vraiment un moment rare de concert. |
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| Sujet: Re: Salvatore Sciarrino | |
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| | | | Salvatore Sciarrino | |
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