Les noces de Figaro - Amsterdam - Février 2010

Des noces un peu anecdotiques, légèrement au rabais (recyclage de la version 2007 de la même chose, en gagnant un chérubin et une suzanne que je trouve plus en style, mais se retrouvant avec une direction musicale consternante et une comtesse inécoutable) [dans la production Wieler/Morabito, comme on disait.]

Pour mémoire: il faut s'armer de bonne volonté pour accepter le traitement, déjà les coupures, trois scènes dans l'acte IV mais aussi au moins deux dans l'acte III (il faudrait vérifier exactement, wolferl ou david savent peut-être). Acte I et II fusionnés et enchaînés sans coupure (sauf pour de brefs applaudissements), ni changement de décor ou de quoi que ce soit. (Wolferl et David savent déjà ça). Acte III et IV enchaînés modulo un baissé de rideau le temps de vider (totalement) la scène de ses fioritures (nombreuses) et du petit monde qui l'occupe pour un acte IV toujours le même décor mais vidé, pour passer l'essentiel en vidéo. De I à III, Le tout est très bariolée et l'acte IV explore à l'inverse une sorte d'épuration, ça pourrait fonctionner, mais dans le contexte de cette mise en scène, ça donne complète surtout une impression de noces en conserve (au propre comme au figuré), calibrées et compactées, service rapide, il ne faudrait pas que ça traîne...

Pour ceux qui ne connaissent pas la mise en scène: ça transpose sérieusement. On est chez dans une structure hybride un peu étrange mélange de centre de création automobile, de centre administratif (peut-être) surtout de concessionnaire (de la marque) automobile (familiale) Almaviva. La comtesse fait apparemment dans le design automobile. Figaro doit être responsable des ventes. Le statut de Suzanne est un peu indéterminée (assistante de la comtesse? du comte?), Chérubin fait dans la mécanique... Parmi les choix de lecture une comtesse qui n'est pas une victime innocente. Bon. Super.

Je n'aurais pas dit quasi-désastre, si la musique avait sauvé l'ensemble. Malheureusement... Un équilibre musical très très très moyen. Constantinos Carydis est le grand coupable, il propose des cordes vraiment massives (et effectif bizarrement élargi pour un Kamerorkest), comte et comtesse plutôt format lourd, qui couvre une suzanne petit format (et les vents au passage). Dommage déjà parce que suzanne (quand on l'entend encore) est hyper musicale (l'italien est nettement plus virtuel), le jour et la nuit par rapport au comte et surtout par rapport à la comtesse. Après il faut s'accrocher sur l'optique "instrumentation moderne", pas de clavecin, mais du piano... et face à des tempi absurdes de rapidité par moment et un volume sonore sans nuances, toujours fort, un mozart bourrin...

La comtesse (Michaela Kaune) est le naufrage de cette production, une voix inécoutable, ça vibre, c'est large (et lent), ça beugle, qu'on lui coupe un air dans l'acte III(?) est rétrospectivement une sorte de réalisme vis à vis de l'état de la voix...

suzanne (Marie Arnet), merveille de musicalité quand on l'entend, avec aussi un grand sens du texte (c'est intelligemment chantée et jouée), mais italien comme je disais assez inexistant et très allégé en consonnes (et toute petite voix, qui ne projette pas du tout du tout, donc je ne peux la juger que sur des fragments du rôle...)

figaro (Luca Pisaroni), tient la maison, italien parfait (et pour cause), grand diseur, les accentuations hyper pertinentes, et surtout un texte limpide (du bonheur de ce point de vue là), et dramatiquement c'est habité. La voix n'était pas toujours très savoureuse, mais bon c'était une dernière et aucun défaut à signaler, donc c'est un point très positif de la production.

Cherubin (Marina Comparato), à l'exception du premier air, baclé dans des tempi stupides de rapidité, (pourtant personne ne semblait avoir de train à prendre le soir même...) c'était très bien, très belle musicalité, le plus souvent plein d'humour (parfois il y a peut-être trop d'intention visible de ce côté là).

Le comte (Garry Magee) finalement pas grand-chose à en dire. (dans mes notes je lis "c'est bien mais j'ai rien à en dire. pas renversant, il fait le travail.") bon bah je vais croire mes notes. c'est bizarre parce qu'il semble apporter quelque chose au moins comme acteur, mais disons qu'entre les réussites (figaro, cherubin, marceline, barberina et, quand on l'entend, suzanne) et les gros ratés (direction musicale, comtesse, mise en scène) on l'oublie un peu. (est-ce que la mise en scène contribue à l'effacer?)

Marceline (Charlotte Margiono) c'était bien et le public a beaucoup aimé (et l'a montré). et je crois que c'était mérité. Impressionnant si on considère que c'était (si j'ai bien compris le speech final) la dernière de sa carrière.

Barberina (Floor van der Sluis) très bien.

poisson a écrit:

La comtesse (Michaela Kaune) est le naufrage de cette production, une voix inécoutable, ça vibre, c'est large (et lent), ça beugle, qu'on lui coupe un air dans l'acte III(?) est rétrospectivement une sorte de réalisme vis à vis de l'état de la voix...

Méforme, ou peut-être inadéquation à l'évolution de sa voix. Elle était fantastique en Agathe (en français du Freischütz), encore plus que ça dans le Arme Heinrich de Pfitzner. Elle a prouvé aussi de très grandes qualités en Freia et va tenir Eva à Bayreuth cet été je crois.
Maintenant, c'est un peu large pour la Comtesse sans doute, et je ne l'ai pas entendue en italien. Sans doute un peu opaque. Mais vibrato large et beuglant, elle devait en plus être enrhumée.

Citation :

figaro (Luca Pisaroni), tient la maison, italien parfait (et pour cause),

Tous les italiens, loin s'en faut, non pas celui-ci. Comme tu le dis, c'est en plus ultra-inspiré, à chaque fois que je l'ai entendu, dans les intentions expressives. Avec ça, voix pleine, homogène, mordante, et grand acteur.

Citation :

Le comte (Garry Magee) finalement pas grand-chose à en dire. (dans mes notes je lis "c'est bien mais j'ai rien à en dire. pas renversant, il fait le travail.") bon bah je vais croire mes notes. c'est bizarre parce qu'il semble apporter quelque chose au moins comme acteur, mais disons qu'entre les réussites (figaro, cherubin, marceline, barberina et, quand on l'entend, suzanne) et les gros ratés (direction musicale, comtesse, mise en scène) on l'oublie un peu. (est-ce que la mise en scène contribue à l'effacer?)

Il faut dire que c'est une voix mate, un peu grise, sans beaucoup de mordant ; un peu lisse en effet.

Citation :

Marceline (Charlotte Margiono) c'était bien et le public a beaucoup aimé (et l'a montré). et je crois que c'était mérité. Impressionnant si on considère que c'était (si j'ai bien compris le speech final) la dernière de sa carrière.

Ca fait longtemps qu'elle chante, et elle a tenu des rôles lourds. Elle termine dans une belle forme vocale.

Citation :

Barberina (Floor van der Sluis) très bien.

Ah... les notes de programme indiquent-elles si elle un lien de parenté avec Mike ?


Merci pour le compte-rendu. Effectivement, j'avais trouvé l'espace (pourtant très découpé) pas très bien employé, et surtout la transposition dans les "rapports de force" actuels était tellement téléphonée (et assez bancale) qu'on s'ennuyait ferme.

Je n'avais décidément pas bien lu, je croyais que Margiono jouait le rôle de la Comtesse ! Mais ça semble logique qu'elle ne soit plus que Marcelline en fait, elle ne doit plus être toute jeune.

Sinon, c'est étonnant ce que tu dis par rapport à l'air de la Comtesse au III qui aurait été coupé, Dove sono c'est quand même un des gros tubes de l'opéra !

Pisaroni, je trouve le timbre très beau, sombre et un peu granuleux, m'enfin c'est subjectif ça.


Je précise tout de même que je n'ai vu que des extraits de cette production des Noces qui, après un début de Don Giovanni affreux, ne donnait as très envie. Tu confirmes ce que je pensais.

Euh j'avoue que je n'ai pas acheté le programme

Donc je ne sais pas trop qui si Floor a des liens avec Mieke... je passerai voir à l'occasion, s'il leur en reste...

Je me suis demandée si c'était bien Michaela Kaune (ou une doublure), mais je crois que oui. Oui une méforme ça paraît assez plausible, ça expliquerait une des coupures un peu inattendue et l'impression de naufrage...

En tout cas, il y a deux ans, elle chantait parfaitement.

La coupure a peut-être été convenue à l'entracte, mais ça paraît invraisemblable. Heureusement que ce n'était pas à Milan, déjà qu'ils huent lorsqu'ils n'ont pas les contre-notes absentes de la partition.

Wolferl a écrit:

Sinon, c'est étonnant ce que tu dis par rapport à l'air de la Comtesse au III qui aurait été coupé, Dove sono c'est quand même un des gros tubes de l'opéra !

oui je confirme ça et le bout de récitatif qui va avec à la trappe.

Cette production existe en DVD à ma connaissance. C'est paru chez Opus Arte.
Voici la distribution :
Figaro : Luca Pisaroni
Susanna : Danielle De Niese
Conte Almaviva : Gary Magee
Contessa Almaviva : Cellia Costea
Cherubino : Maite Beaumont
Marcellina : Charlotte Margiano
Bartolo : Mario Luperi
Basilio : Marcel Reijans
Curzio : Norman Shankle
Antonio : Roberto Accurso
Barbarina : Channah Malkin

DavidLeMarrec a écrit:

En tout cas, il y a deux ans, elle chantait parfaitement.

La coupure a peut-être été convenue à l'entracte, mais ça paraît invraisemblable. Heureusement que ce n'était pas à Milan, déjà qu'ils huent lorsqu'ils n'ont pas les contre-notes absentes de la partition.

je ne sais pas pour la coupure. j'avais le livret ouvert et on s'est regardé avec des yeux tout ronds avec la personne qui m'accompagnait, donc coupure il y a bien eu

en DVD c'est 2007, certaines choses ont évolué entre les deux. (pas la mise en scène )

poisson a écrit:

DavidLeMarrec a écrit:

En tout cas, il y a deux ans, elle chantait parfaitement.

La coupure a peut-être été convenue à l'entracte, mais ça paraît invraisemblable. Heureusement que ce n'était pas à Milan, déjà qu'ils huent lorsqu'ils n'ont pas les contre-notes absentes de la partition.

je ne sais pas pour la coupure. j'avais le livret ouvert et on s'est regardé avec des yeux tout ronds avec la personne qui m'accompagnait, donc coupure il y a bien eu

Quand je disais invraisemblable, c'était développé par la phrase suivante : ça paraît impossible, comme si on coupait la Habanera dans Carmen. Mais je me doute bien que tu es capable de reconnaître Dove sono et de ne pas le confondre avec Il capro e la capretta.

poisson a écrit:

en DVD c'est 2007, certaines choses ont évolué entre les deux.

Le chef est différent en 2007 je crois et la distribution n'est pas la même pour plusieurs chanteurs. As tu vu le DVD avant de voir la production en salle? La mise en scène semble effectivement très étrange.

Pisaroni dans "Se vuol ballare" : /watch?v=vaK_QBa6Leo
C'est très bien interprété et investi sur le plan théâtral.

De Niese en Susanna en 2006 : /watch?v=B2r_Pv0OUXE

Je n'aime pas spécialement cette chanteuse que je trouve très minaudante. C'est joli mais sans plus.

j'essaye de les découvrir sur place quand c'est possible. pourtant la tentation de repartir de là-bas les bras chargés de DVD est toujours assez tentante.