Autour de la musique classique Le but de ce forum est d'être un espace dédié principalement à la musique classique sous toutes ses périodes, mais aussi ouvert à d'autres genres. |
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| Maryla Jonas | |
| | Auteur | Message |
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Invité Invité
| Sujet: Maryla Jonas Mer 5 Oct 2011 - 11:40 | |
| Maryla Jonas (1911-1959)Au détour d'une discussion à propos d'un très bel avatar de Percy, consacré à Clara Haskil, nous avons parlé un peu de l'art de Maryla Jonas (31 mai 1911 -- 3 juillet 1959), immense pianiste polonaise née en Pologne, à Varsovie, et décédée de manière très prématurée à New York, aux États-Unis. Élève d'Ignacy Jan Paderewski, où elle eut comme camarades d'études Witold Małcużyński et Halina Czerny-Stefańksa, et lauréate du concours international Frédéric Chopin en 1932 (l'année d'Aleksandr Uninsky) et du prix Beethoven de Vienne l'année suivante, sa « première carrière » fut brisée par la guerre et l'invasion de la Pologne par les armées nazies. Arrêtée pour insoumission (refus de jouer à Berlin) dans Varsovie bombardée, elle put profiter, après une période de détention, de la pitié d'un officier allemand, qui avait eu l'occasion de l'entendre jouer en Allemagne avant la guerre, et s'enfuir de Pologne -- à pied -- pour aller, sur son conseil, chercher de l'aide à l'ambassade du Brésil à Berlin. Un calvaire de plusieurs centaines de kilomètres et d'autant de privations, qui ébranla sans doute sa santé. Grâce aux faux papiers établis pour elle par l'ambassade du Brésil (des documents qui la présentaient comme l'épouse du fils de l'ambassadeur), elle put rejoindre Rio de Janeiro via Lisbonne. C'est au Brésil, où elle semblait en voie de guérison, qu'elle apprit la mort de son mari (pour faits de résistance) et celle de ses parents, annonces précédées de celle de la mort d'un de ses frères. C'est en particulier grâce à sa sœur, Bertha Holin, et à Artur Rubinstein, qui réussit à faire en sorte qu'elle joue quatre heures durant, tandis que lui-même prétendait tester l'acoustique de la salle de concert où il allait donner un récital à Rio de Janeiro au début des années 1940, que Maryla Jonas put enfin remonter sur scène et enregistrer quelques disques, aux États-Unis, à partir du milieu des années 1940 (Carnegie Hall, février 1946, après quelques années de tournées en Amérique du sud et en Amérique centrale). Mais cette « seconde carrière » fut bientôt oblitérée, dès 1952, par une maladie rare du sang, dont elle fut, semble-t-il, la seule survivante, mais qui conduisit à son décès prématuré en 1959. Durant ces dernières années, elle ne donna d'ailleurs que de rares récitals, à partir de 1956 seulement. Sources biographiques : http://en.wikipedia.org/wiki/Maryla_Jonas http://nettheim.com/jonas/index.html Source discographique : http://nettheim.com/jonas/jonas-discography.html Son legs discographique est donc peu nombreux, mais capital : à l'époque, sept disques vinyles parus chez Columbia (les LP sont des transferts de disques 78 tours) ; de nos jours, un disque compact monographique somptueux édité jadis par Pearl (référence : Pearl GEM 0077 [avril 2000], collection Piano Masters), sa contribution à un boîtier de quatre disques compacts édités par Andante et consacrés à Chopin (référence : Andante AN1190 [mars 2005], boîtier intitulé Chopin -- Solo Piano) et un disque compact consacré par Naxos aux Women at the Piano (référence : Naxos 8.111120 [2006], disque intitulé Women at the Piano: Volume 1). À noter que le CD Naxos ne contient que la seule Passacaille en sol mineur de la suite n°7 de Haendel. (Pearl, 2000) (Andante, 2005) (Naxos, 2006) Extrait du fil sur les avatars : - Scherzian a écrit:
- [...] De mon côté, puisqu'on parle de la sensibilité au discours artistique, j'ai envie de mentionner une [...] prodigieuse pianiste, pour laquelle il existe malheureusement très peu d'enregistrements (elle est morte très jeune, après que sa carrière ait été brisée une première fois par la guerre), mais qui a servi la musique de Chopin comme quasi personne, dans un pan de l'œuvre de Chopin qui n'a pas été toujours ressenti et exprimé comme il le méritait : celui des Mazurkas. C'est Maryla Jonas. [...] Si vous avez l'occasion d'écouter ses enregistrements d'une poignée de Mazurkas de Chopin ([un peu plus] d'une vingtaine en tout, je crois), je ne peux que vous le conseiller. Il y a là une mélancolie qui étreint, une nostalgie inextinguible, par-delà une grande rigueur et vigueur rythmique. Quelques exemples (sans doute libres de droits, mais dans le doute...) :
/watch?v=zckYkWxDByk (Chopin, Mazurka opus 68 n°4) /watch?v=varjpUwyJn4 (Chopin, Mazurka opus 63 n°3) /watch?v=Yme65tBO1i8 (Chopin, Mazurka opus 59 n°1) /watch?v=JQPjsSOPC6o (Chopin, Mazurka opus 56 n°3) /watch?v=jkjbsjj8gPc (Chopin, Mazurka opus 41 n°2) /watch?v=3qoePTOfm-E (Chopin, Mazurka opus 41 n°4) /watch?v=4gKgWvtJAkA (Chopin, Mazurka opus 30 n°1) /watch?v=BNB6ywOk_2o (Chopin, Mazurka opus 30 n°4) /watch?v=r9eC8mXAxB4 (Chopin, Mazurka opus 17 n°4)
On peut y ajouter son interprétation de la Passacaille en sol mineur de Haendel et celle des Scènes d'enfants (opus 15) de Schumann :
/watch?v=TwYhXNQbbGs (Haendel, Passacaille) /watch?v=BpUJQbZN0hc (Schumann, Scènes d'enfants) Je me permets aussi de recopier ici les propos de Percy dans le fil des avatars, en espérant ne pas commettre d'erreurs[*] (Percy m'indiquera[*] comment corriger si besoin est) : - Percy Bysshe a écrit:
- [...] Effectivement, c'est [le corpus des Mazurkas] certainement le pan de la production de Chopin qui est le moins estimé - à tort, à mon avis, il y a de vrais joyaux.
J'ai commencé l'écoute de ta sélection [de Mazurkas de Chopin], c'est effectivement remarquable: d'une noblesse, d'une préciosité remarquable, et pour autant sans affectation. [...] - [*] À propos de Rosa Tamarkina (mais ça s'applique aussi bien à Maryla Jonas), Percy Bysshe a écrit:
- Quelle aisance dans toutes la gamme de nuances (et quelle palette), c'est fabuleux! Tout n'est qu'évidence, un vrai cours de transcendance pratique.
Dernière édition par Scherzian le Mer 5 Oct 2011 - 11:57, édité 2 fois |
| | | Percy Bysshe Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9940 Date d'inscription : 06/04/2009
| Sujet: Re: Maryla Jonas Mer 5 Oct 2011 - 11:45 | |
| La seconde citation se référait à Tamarkina, mais comme ça s'applique aussi bien à Jonas tu peux la laisser. |
| | | Invité Invité
| | | | Percy Bysshe Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9940 Date d'inscription : 06/04/2009
| Sujet: Re: Maryla Jonas Mer 5 Oct 2011 - 12:11 | |
| La postérité de Jonas sur ce forum est en jeu, ce n'est pas le moment d'avoir des scrupules. Plus sérieusement, c'est vraiment un point commun entre ces deux pianistes: elles ne vont pas chercher la transcendance comme un au-delà musical mais au contraire elles jouent simple, évident. La cohérence au niveau microcosmique si je puis dire (rapport harmonique, rythmique...) se fond dans une cohérence macrocosmique (enchaînement thématique, dynamique...), tout cela parce que l'intuition est bonne et que les moyens techniques ne sont pas limitant. Beaucoup de pianistes qui n'ont pas une technique transcendante cherchent la transcendance au niveau musical, au niveau rythmique, au niveau mélodique, au niveau des inflexions, l'exact contraire. La technique doit être transcendante dans le sens où son au-delà est la musique. En revanche, l'au-delà de la musique, si l'on doit en considérer un, n'appartient pas à l'interprète mais au compositeur et au destinataire qui lieront un certain nombre de choses à ces sonorités musicales. Encore une envolée lyrique sur ce sujet, désolé. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Maryla Jonas Mer 5 Oct 2011 - 13:55 | |
| - Percy Bysshe a écrit:
- [...] La technique doit être transcendante dans le sens où son au-delà est la musique. En revanche, l'au-delà de la musique, si l'on doit en considérer un, n'appartient pas à l'interprète mais au compositeur et au destinataire qui lieront un certain nombre de choses à ces sonorités musicales.
D'accord avec tout ça. L'interprète lui-même est un des destinataires de l'œuvre du compositeur, mais seulement pendant qu'il l'étudie et la travaille (en coulisses, en cuisine). Heinrich Neuhaus, et d'ailleurs aussi Samuil Feinberg, parle beaucoup de la technique totale comme quelque chose qu'il faut maîtriser de manière transcendante, si l'on ne veut pas que l'univers possible se réduise d'autant (avec le risque ou la tentation, comme tu le dis, d'aller chercher la transcendance au-delà, à la manière d'un paratexte) : si le musicien-interprète, en tant que destinataire « momentané » de l'œuvre, perçoit ce qui doit être fait pour l'œuvre, alors selon Neuhaus il percevra aussi, de manière automatique, comment le faire, en tant que technicien accompli. En revanche, quand les interprètes jouent sur scène, c'est tout autre chose puisqu'il faut s'oublier (Neuhaus disait en substance : tout savoir quand on travaille, pour tout oublier quand on monte sur scène). J'aime aussi beaucoup l'apparente simplicité de leur jeu, son évidence. Parce que ce dénuement de l'artisanat rend possible, pour nous, un contact direct avec la musique. Dans le cas des Mazurkas de Chopin jouées par Maryla Jonas, je trouve que nous y sommes en plein. |
| | | Percy Bysshe Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9940 Date d'inscription : 06/04/2009
| Sujet: Re: Maryla Jonas Mer 5 Oct 2011 - 14:20 | |
| Tu as tout dit. |
| | | Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Maryla Jonas Mer 10 Mai 2017 - 22:01 | |
| A paraître, petit coffret de 4 CDS : https://www.amazon.co.uk/Maryla-Jonas-Story-Complete-Recordings/dp/B072KY1H9B |
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| | | | Maryla Jonas | |
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