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 Graciela Paraskevaídis (1940–2017)

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MessageSujet: Graciela Paraskevaídis (1940–2017)   Graciela Paraskevaídis (1940–2017) EmptyVen 15 Fév 2019 - 1:43

Graciela Paraskevaídis (1940–2017) Unknow10

Graciela Paraskevaídis

Graciela Parskevaídis est une compositrice argentine née de parents grecs. Elle vivait en Uruguay avec son mari Coriún Aharonián, également compositeur. Hors d’Amérique latine elle était semble-t-il surtout connue en Allemagne. C’est d’ailleurs auprès d’une revue allemande que j’ai pu commander ses disques.

Dans un article de 1994 Aharonián essaie de définir la musique contemporaine latino-américaine à partir d’un corpus d’œuvres significatives et dégage les tendances suivantes (voir ici) :
1. Un sens du temps plus court et plus concentré chez les compositeurs d’Amérique latine par rapport à leurs collègues européens.
2. Un processus non discursif qui préfère une structure faite de zones expressives au classique enchainement de cellules en développement.
3. Corrélativement, l’utilisation de blocs expressifs non directionnels à l’intérieur desquels des microprocessus ont lieu.
4. Parmi ces microprocessus, la présence d’éléments réitérés, c’est-à-dire une répétition non mécanique enrichie par des ostinati.
5. L’austérité, une certaine esthétique de la « pauvreté ».
6. La violence et le gout pour les « petites choses ».
7. Le silence comme un élément musical à part entière.
8. Présence du « primitif », bien au-delà d’un aimable exotisme.
9. Tentative de faire siennes les nouvelles technologies, en particulier l’électronique.
10. Percée à travers les frontières, notamment vers la musique populaire.
11. Conscience idéologique. Ainsi face au minimalisme mécanique du Nord qualifié de réactionnaire et fasciste, le minimalisme latino-américain combat la passivité de l’auditeur et est d’avantage une économie de moyen.
12. La magie et la fonction magique de la musique.
13. Une préoccupation pour l’identité culturelle (en particulier dans un contexte impérialiste et colonial) : la musique est le résultat de son environnement social, qu’elle matérialise.

Beaucoup de ces traits peuvent s’appliquer à la musique de Graciela Parskevaídis. Son parti pris radical est une économie de moyen au service d’une expressivité sans concession. Par facilité je vais laissez la parole à Cergio Prudencio, compositeur et chef d’orchestre bolivien (à défaut d’avoir le temps pour proposer une traduction valable à partir de l’original espagnol et de sa traduction anglaise, ce qui suit est une paraphrase libre).

Son œuvre propose une esthétique radicale, où le son est toujours élaboré comme une texture dans un espace-temps non discursif. Cette radicalité s’exprime par des aspects techniques et en particulier le matériau austère : ses œuvres germent et se développent à partir d’idées très concrètes, qui peuvent être de caractère intervallique ou timbral, par une restriction de la matière organique sonore qui suscite en elle-même un rendement expressif maximal. (...) Les idées ne coulent pas ni se répètent : elles demeurent et s’interposent, parvenant à abstraire la sensation d’un temps chronologique.

Si ses œuvres sont autonomes et ne nécessitent aucun préalable ni aucun argumentaire, elles ont cependant un sens humain profond, et elles témoignent de la conscience politique de son autrice. Si on lit l’espagnol, on lira à ce propos un extrait important que j’avais déjà cité ici : classik.forumactif.com/t538p224- (j’ai mis la traduction anglaise un peu plus bas).

Pour conclure on pourrait, en bien des points, comparer son esthétique à celle de Galina Ustvolskaya, surtout dans les pièces pour piano, mais la comparaison la plus évidentes hors du continant sud-américain est sans doute Luigi Nono, le dernier Nono (si tant est que cette expression signifie encore quelque chose). C’est pas pour autant la même musique ni tout à fait le même langage, mais il y a des ponts évidents. Quant à moi je n’ai pas beaucoup de mots mais pense que c’est une compositrice essentielle.

Pour la discographie on trouve, à côté de pièces isolées dans des anthologies latino-américaines, allemandes ou polonaises, quatre monographies : trois chez Tacuabé (à peu près chronologiques) et une chez Wergo.

Graciela Paraskevaídis (1940–2017) Paraskevaidis1

magma I (1966/67) pour neuf cuivres
E desidero sono colori (1969) pour chœur féminin
huauqui (1975) composition électroacoustique
todavía no (1979) pour trois flutes et trois clarinettes
un lado, otro lado (1984) pour piano
magma VII (1984) pour quatorze vents
dos piezas para pequeño conjunto (1989) pour cinq instruments
sendas (1992) pour sept vents et piano
algún sonido della vida (1993) pour deux hautbois

Graciela Paraskevaídis (1940–2017) Libres_en_el_sonido_front_cover

libres en en sonido presos en el sonido (1997) pour cinq instruments
el nervio de arnold (1992) pour guitare
pero están (1994) pour flute, hautbois et voix
solos (1998) pour flute et guitare
...a hombros del ruiseñor (1997) pour piano
Doz piezas para oboe y piano (1995) pour hautbois et piano
No quiero oír ya más campanas (1995) pour ensemble

Graciela Paraskevaídis (1940–2017) Paraskevaidis3

discordia (1998) pour neuf voix
otra vez (1994) pour piano
“... y allá andará, según se dice...” (2005) pour orchestre d’instruments natifs
en abril (1996) pour piano
ático (2006) pour piccolo et flute à bec
contra la olvidación (1998) pour piano
piezas de bolsillo (1998) pour quatuor de percussion
dos piezas para piano (2001) pour piano
álibi (2008) pour quatuor de saxophone

Graciela Paraskevaídis (1940–2017) Folder

libres en en sonido presos en el sonido (1997) pour cinq instruments
¿Y si fuera cierto? (2003) pour flute alto, cor anglais et piano
un lado, otro lado (1984) pour piano
tris (2006) pour hautbois, basson et contrebasse
... il remoto silenzio (2002) pour violoncelle
sin ir más lejos (2013) pour flute alto, piano et percussion
sendas (1992) pour sept vents et piano
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MessageSujet: Re: Graciela Paraskevaídis (1940–2017)   Graciela Paraskevaídis (1940–2017) EmptyMer 6 Mar 2019 - 18:12

J'ai reçu la monographie Wergo, au fait. Je ne l'ai écoutée qu'une fois ... Il faudra que j'y revienne, mais ça m'a bien plu thumleft
Il y a un petit côté archaïsant qui m'a fait bizarrement penser à la musique de Janacek, mais c'est tout de même très différent bien sûr.

Ils sont très mal connus ces compositeurs sud-américains d'"avant-garde". Je ne me rends pas compte si Paraskevaídis est plutôt un cas isolé, ou bien s'il y en beaucoup d'autres comme elle. Il va falloir enquêter  study

En tout cas, merci pour la découverte lulu !
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MessageSujet: Re: Graciela Paraskevaídis (1940–2017)   Graciela Paraskevaídis (1940–2017) EmptyMer 6 Mar 2019 - 19:28

Il a bel et bien existé une avant-garde sud-américaine. Parmi les noms que j’ai croisés le plus souvent il y a Mariano Etkin, Gerardo Gandini et Alcides Lanza, mais je connais à peine leur musique.
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MessageSujet: Re: Graciela Paraskevaídis (1940–2017)   Graciela Paraskevaídis (1940–2017) EmptyJeu 28 Nov 2019 - 11:53

À toutes fins utiles je signale la parution de ce disque de Coriún Aharonián (1940–2017).


Graciela Paraskevaídis (1940–2017) Front15

Gente (1990) pour flute, hautbois, clarinette en la, basson, cor, trompette, trombone, contrebasse, marimbula et steeldrum
Música para cinco (1972) pour flute alto, cor, trompette, trombone et toms
Música para tres (1968) pour flute, violon et piano
¿Y ahora? (1984) pour piano
¿De qué estamos hablando? (2006) pour clarinette basse et en mi bémol, basson et violoncelle
Los cadadías (1980) pour clarinette, trombone, violoncelle et piano
Una canción (1998) pour flute, clarinette, alto, violoncelle et piano
Una carta (2001) pour 15 instrumentistes
Mestizo (1993) pour orchestre


It is clear, therefore, that Latin American artists such as Aharonián define their role in an inherently different way than composers in other regions. In Latin America, this sense of identity is related to an awareness of the foreign colonial influences that continue to permeate all aspects of society. (...) Two possibilities seem to be available: one involves comfortable and derivative imitation parroting the models of the Euro-American avant-garde and producing exportable musical exoticisms. The other is music like Aharonián’s music, which leaves such folly behind. With an authentic desire for radical change, this music seeks a personal form of musical expression with a high degree of artistic integrity, “never divorced from the reality that produced it, and always a direct contemporary expression of the deep layers of changing human experience through the ages” (paraphrased from Wolfgang Rüdiger).

This is not European or even Eurocentric music, but something different. The signature of this composer is a kind of
música pobre (as Oscar Bazán has described it), where everyday musical reality and influences from the indigenous population are incorporated with seriousness, respect, and great economy of means. Aharonián’s entire aesthetic philosophy can be discovered in the smallest space, like a nutshell. His music is characterized by short sequences within a small range, rigorous use of material, lively sound gestures, explosively dramatic densifications, a non-discursive character, stringent rhythmic organization, block-like static constructions, repetition combined with stringent motivic transformation, suspense-filled silence as an aesthetic resource, and richly suggestive activity.
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