Stockhausen - Stimmung, Les Métaboles, Strasbourg 18-IX-2020

Dans le cadre du Festival Musica (festival de musique contemporaine parmi les plus importants en Europe), a eu lieu hier une interprétation fort surprenante d'un des chefs-d'œuvre de Stockhausen, Stimmung par l'ensemble Les Métaboles de Leo Warynski.

Surprenante dans le sens négatif du terme : est-il effectivement normal de ne pratiquement pas entendre une seule harmonique de la soirée alors que l'œuvre repose sur cette technique inspirée du chant diphonique mongol ? Les chanteurs respectent bien les changements de voyelle supposés créer ces harmoniques mais rien n'y fait, à aucun moment elles ne sont saillantes comme les le devraient. L'œuvre en perd singulièrement de son identité et l'exécution en deviendrait presque "comique" à voir les chanteurs s'escrimer à vouloir faire sonner des harmoniques qui ne viennent pas... On a peine à comprendre ce qui se passe car il ne s'agit pas d'harmoniques qui devraient ressortir à l'exécution d'une justesse pure et parfaite mais bien d'une technique vocale individuelle qui vise à faire sortir chez les seuls chanteurs les harmoniques...

Un bourdon électronique de Si bémol résonne tout du long de l'œuvre de manière étonnamment forte pour permettre une parfaite justesse (ce qui n'est d'ailleurs pas le cas, là encore de manière très étonnante...). Cependant, pour moi qui en suis à ma troisième exécution de "Stimmung" en live, je n'ai jamais entendu un bourdon aussi sonore et dérangeant d'autant que le son est celui d'un réfrigérateur ronronnant... Peut-être la présence incongrue de ce bourdon a-t-elle perturbée l'audition des harmoniques ? A discuter avec des amis présents en salle, et tout aussi consternés que moi, ils n'ont pas davantage entendu d'hamoniques...

Est-ce dû alors à la sonorisation ? A l'acoustique du lieu ? Les chanteurs sont sur un podium, le public est tout autour. Chaque chanteur a son micro, et l'enceinte de projection dans son dos. Pas d'autres enceintes pour projeter le son ce qui rend certaines voix très lointaines, la salle étant immense (et pas destinée au concert puisqu'il s'agit d'un immense hall qui accueille des salons, expositions, etc.).  

L'interprétation est par ailleurs assez lisse et, pour tout dire, ennuyeuse, ne provoquant pas l'hypnotisme que l'on peut ressentir dans d'autres versions. L'œuvre ne m'a paru jamais aussi longue et vaine. En me précipitant sur le disque de Singcircle en rentrant à la maison, je me suis réconcilié avec l'œuvre... et mes oreilles ! (car j'en suis venu à me demander si c'était moi qui avaient les oreilles faiblardes au point de ne plus entendre les harmoniques). Avec le recul, les Métaboles m'ont semblé être complètement à côté de la plaque...

Comment expliquer une interprétation par Les Métaboles aussi peu convaincante ? (le mot est faible...). Incompréhension de l'œuvre ? Manque de technique vocale adaptée pour créer des harmoniques ? Manque de travail tout simplement ? Quand on voit que l'ensemble n'a prévu en tout et pour tout que 2 performances de cette œuvre particulièrement exigeante d'1h15, c'est hélas la piste qui semble expliquer une telle déception...

Technique très spécifique, ça ne s'apprend pas en un jour. (Et vu les conditions, Warynski, pourtant très bon jeune chef qui a le vent en poupe, n'a pas forcément pu recruter les chanteurs adéquats, répéter comme il l'a voulu aussi…)

Ce peut biensûr être une erreur de conception générale du concert comme tu le soulignes, mais l'hypothèse « il faut manger, on n'a pas de temps, on fait au mieux » est peut-être à creuser.

DavidLeMarrec a écrit:

Technique très spécifique, ça ne s'apprend pas en un jour. (Et vu les conditions, Warynski, pourtant très bon jeune chef qui a le vent en poupe, n'a pas forcément pu recruter les chanteurs adéquats, répéter comme il l'a voulu aussi…)

Ce peut biensûr être une erreur de conception générale du concert comme tu le soulignes, mais l'hypothèse « il faut manger, on n'a pas de temps, on fait au mieux » est peut-être à creuser.

"répéter comme il l'a voulu aussi" ... Mouais.... Le confinement était une excellente occasion pour les 6 chanteurs de se perfectionner en chant diphonique.

Si l'hypothèse du "il faut manger, on n'a pas le temps, on fait au mieux" est la bonne, alors c'est du f..... de g..... ce concert... Triste.