PP – Chostakovitch, Beethoven – van Zweden, OP – 7-8/04/22

JEUDI 7 ET VENDREDI 8 AVRIL 2022 – 20H30
Grande salle Pierre Boulez, Philharmonie de Paris

Dmitri Chostakovitch — Symphonie n° 5

Ludwig van Beethoven — Symphonie n° 5


Orchestre de Paris
Jaap van Zweden, direction
Igor Yuzefovitch, violon solo (invité)


Ces concerts remplacent ceux que devait diriger Gergiev, consacrés à Prokofiev.

La Philharmonie a lancé une initiative qui doit permettre à des musiciennes d'orchestres ukrainiens d'être accueillies au sein de formations françaises, au moins jusqu'au mois de juin. Cinq figurent dans les rangs de l'OP, venues de l’Orchestre de chambre de Kyiv, de l’Orchestre symphonique national d’Ukraine, de la Kyivska Camerata et de la Philharmonie d’Odessa (deux violons I, deux violons II et une violoncelliste).

Quatrième apparition comme konzertmeister de Igor Yuzefovitch. Sans doute faut-il y voir une série de tests pour un poste que cherche à pourvoir l'orchestre. Certainement un excellent musicien, mais le hasard a voulu qu'il joue dans des œuvres qui ne lui donnent pas ou peu la parole comme soliste (Mahler 2, Bruckner 7, Duruflé Requiem). On devrait plus pouvoir l'apprécier dans Chosta. Par ailleurs on peut noter que Serge Pataud, deuxième violon solo, qu'on ne voit plus sur scène depuis un long moment, est désormais indiqué comme violon du rang dans le programme.

Michel Bénet, hautbois solo de l'OP pendant quarante ans, qui a pris sa retraite en 2019, est décédé cette semaine, et ces concerts lui sont dédiés.

(comme vous l'avez compris, je dois y aller demain soir.)

Superbe concert!
j'ai adoré le dernier mouvement de la 5eme de Beethoven, pourtant pas ma symphonie préférée.
Au contraire de celle de Chosta que j'adore.
Une chose que je n'avais jamais vu en concert: un faux départ! le chef a recommencé du début la 5eme de Chostakovitch au bout de 10 secondes environ. Difficile de savoir ce qui ne lui a pas plu. Si quelqu'un présent peut me dire...
Il a fait se lever les 4 musiciennes ukrainiennes à la fin, triomphe de la salle.

Ça arrive bien sûr, mais c'est très rare pour un concert symphonique.

C'est d'autant plus surprenant si la cause n'était pas flagrante.

J'ai posé la question autour de moi et certains n'avaient même pas remarqué.
Il faut dire que Van Zweden a stoppé les musiciens puis repris du début un peu comme si de rien n'était, très rapidement.
Le concert était enregistré, diffusion prochaine sur France musique il me semble. A voir si ça sera coupé au montage ou pas

(ça tourne au concert des Stones là !)

Zweden a dû rater ou n'être pas satisfait de sa première entrée ? Je n'ai jamais vu ça à un concert symphonique, déçu de l'avoir raté.

Sinon l'orchestre a mis en ligne tout le premier mouvement de Beethoven, filmé à la générale : https://youtu.be/w7Rq5sygkyY

Le faux départ vaut à l'OP et Jaap un article sur le site de Norman Lebrecht : https://slippedisc.com/2022/04/jaap-puts-paris-orchestra-in-a-flap/

D'après la "source" de Lebrecht le problème venait des premiers violons.

Ma mère y était, elle n'a rien remarqué évidemment.

La mienne non plus

(mais ça montre que van Zweden a fait ça proprement.)

J'avais déjà assisté à une scène identique avec Emmanuel Krivine et la Chambre Philharmonique, à Grenoble : il avait arrêté l'orchestre après le premier accord du 2e mouvement de la 7e de Beethoven (effectivement très faux ) et redonné le départ dans la continuité, si bien que quasiment personne n'avait remarqué.
Ca pouvait se comprendre : le concert faisait l'objet d'une captation donnant lieu à un CD.

Déception vendredi : le concert s'est déroulé sans incident particulier.

C'était bien quand même : le Chosta m'a paru très précis, van Zweden a contrôlé toutes les inflexions comme c'est son habitude. Bel équilibre entre les cordes, les vents, les percussions, y compris dans les grands tutti. La lecture m'a semblé plutôt classique, habitée et engagée. Très beau Largo aux dynamiques finement gérées. Le caractère grinçant et les échos de cirque des mouvements II et IV étaient gommés au profit d'une lecture virtuose. J'ai trouvé le début du IV peut-être trop tonitruant. Tempo du final modéré, ni lent ni rapide, ça marchait bien.

À l'orchestre on a eu droit à une petite harmonie de toute beauté, Miriam Pastor au hautbois en particulier nous a gratifié d'un petit festival de nuances et de couleurs. Gros effectif de cordes, de huit contrebasses à 18 violons I, dans lequel se fondaient les musiciennes ukrainiennes (Zweden ne les a pas fait saluer à part donc on n'a pas pu les identifier précisément). Effectif conservé pour le Beethoven.

Beethoven : comme la dernière fois, un très beau moment, une lecture conquérante, à la fois large et mordante. Comment résister à cette œuvre quand elle est bien jouée : de larges sourires aussi bien dans le public qu'à l'orchestre.

Ah jeudi il les a fait se lever les ukrainiennes. Elles paraissaient ravies.
J'ai lu ailleurs qu'apparemment ce sont les violons qui sont mal partis dans le Chostakovitch, d'où l'arrêt du chef d'orchestre.

kevrad a écrit:

Ah jeudi il les a fait se lever les ukrainiennes. Elles paraissaient ravies.

J'ai lu ailleurs qu'apparemment ce sont les violons qui sont mal partis dans le Chostakovitch, d'où l'arrêt du chef d'orchestre.

Dommage de ne pas les avoir fait lever le deuxième soir. Peut-être une manière de dire qu'elles étaient déjà intégrées.

Sur Slipped Disc il y a aussi un commentaire qui parle d'un problème chez les violons : https://slippedisc.com/2022/04/jaap-puts-paris-orchestra-in-a-flap/

Les micros de Radio Classique étaient encore de sortie vendredi, le faux départ ne sera pas immortalisé à la radio.

Concert exceptionnel ! Merci Mickt d'avoir attiré mon attention, car j'étais parti pour me faire rembourser le Gergiev/Matsuev initialement prévu, n'étant pas forcément alléché par ce programme très tradi et ne connaissant pas ce chef. J'avais envie de tout sauf d'aller au concert ce vendredi soir, il faisait froid, il pleuvait, je n'étais pas en forme. J'avais revendu ma bonne place trop chère pour de la catégorie 5 (finalement, ma place initiale était vide et je suis allé m'y asseoir... satisfaction d'avoir économisé plus de la moitié du prix du billet pour revenir à la case départ !).

Chosta : quelle intelligence dans l'interprétation ! La partition est fouillée, le chef réussit à faire ressortir des choses enfouies, jamais entendues jusque-là. Pourtant, c'est une symphonie que j'aime bien, et que j'ai entendue de nombreuses fois en concert, et des centaines de fois au disque. Le premier mouvement, qui a tendance, comme souvent avec Chosta, à tirer en longueur, avec des passages plus ou moins statiques ou immobiles, m'a profondément bouleversé vendredi. J'étais en larmes quasiment toute la symphonie. Ambiance magnétique dans toute la salle d'ailleurs, nous n'avons presque pas eu de tousseurs (je reste persuadé que la toux est un indicateur de l'ennui des spectateurs). Le chef nous avait tous hypnotisés, musiciens inclus ! Il faut dire qu'il a une présence particulièrement charismatique, virile, un peu brute, en tous cas impressionnante. Il ne lâche pas un sourire facilement, mais il dirige tout, est attentif à tout, ne se relâche jamais. Sa direction est proprement fascinante à regarder. Orchestre qui a donné le meilleur de lui-même, à un niveau vraiment exceptionnel ! Cordes d'une densité incroyable, cuivres sublimes, percussions parfaites... Je n'aurais pas cru que cette symphonie puisse sonner comme ça !
Miriam Pastor a salué vers le ciel, un hommage à Michel Bénet auquel ces deux concerts étaient dédiés.

Beethoven : c'est un répertoire dont je pensais avoir déjà tout entendu, et ce n'était, encore une fois, pas le cas. Certes, j'ai été moins enthousiasmé et moins surpris que par la 5ème de Chosta, mais quel plaisir à voir et à entendre ! Pas de fioriture, une lecture habitée, puissante, forte, énergique, dense, intense. Un régal !

Voilà un chef que j'aurais dû connaître depuis longtemps ! Ça sent la razzia sur ses disques dans les prochains jours !

Ses disques sont plutôt dans la norme, tradi plutôt clair et rapide, beaucoup de choses très bien chez Challenge Classics (avec le Symphonique de la Radio, orchestre de Hilversum & Amsterdam, je crois ?), mais rien de particulièrement singulier ou furieux comme tu sembles l'avoir vécu.

Ca dépend où on est placé sans doute, mais pour ma part j'ai bien été ennuyé par les tousseurs vendredi dans le largo du Chosta, comme toujours avec ce mouvement d'ailleurs, pourtant un des plus beaux de toute l'oeuvre de Chostakovitch.

J'ai trouvé le concert très réussi moi aussi, mais peut-être pas au même degré d'enthousiasme que Rocktambule.

Moi je suis allé au CNSM écouter un soir les lauréats de la Fondation de France (dans Facinelli, Glazunov, Ysaÿe…) et l'autre soir Trouble in Tahiti.

J'avoue que je commence à tellement entendu ces œuvres que je vais finir par ne plus venir du tout lorsque c'est programmé. Je conçois bien que ce n'est pas le cas de la majorité du public, mais il y a tellement à découvrir par ailleurs que ça me semble peu indispensable pour moi…

DavidLeMarrec a écrit:

J'avoue que je commence à tellement entendu ces œuvres que je vais finir par ne plus venir du tout lorsque c'est programmé. Je conçois bien que ce n'est pas le cas de la majorité du public, mais il y a tellement à découvrir par ailleurs que ça me semble peu indispensable pour moi…

Je raisonnais comme toi jusqu'à ce que Mickt m'incite à garder ce concert à mon agenda, et j'ai passé une excellente soirée !
Il faut préciser que le concert vu la veille au TCE était une catastrophe, alors par comparaison...

On se plaint mais au bout du compte il y a tout de même plusieurs membres du forum qui ont trouvé la force d'aller voir ces concerts.

Rocktambule a écrit:

il faisait froid, il pleuvait

Il a même neigé une quinzaine de minutes pendant que je pédalais jusqu'à la salle.  

Citation :

Voilà un chef que j'aurais dû connaître depuis longtemps ! Ça sent la razzia sur ses disques dans les prochains jours !

Sa réalisation la plus importante au disque ça doit être sa Tétralogie avec Hong Kong. On trouve aussi un Parsifal sur Internet.

Un chef assez paradoxal, à la réputation de bourrin (que ne confirment pas vraiment ses disques néerlandais, mais c'était plus tôt dans sa carrière), et constamment critiqué à New York, mais dont je n'ai eu qu'à me féliciter en concert (uniquement avec l'OP jusqu'à présent). Je trouve surtout qu'il a tendance à tout contrôler (même pendant une longue intervention solitaire de flûte il marque de multiples inflexions).

Pas bourrin du tout en effet, son Parsifal est très beau, son Ring est bien aussi, surtout le Crépuscule.

mickt a écrit:

On se plaint mais au bout du compte il y a tout de même plusieurs membres du forum qui ont trouvé la force d'aller voir ces concerts.

Rocktambule a écrit:

il faisait froid, il pleuvait

Il a même neigé une quinzaine de minutes pendant que je pédalais jusqu'à la salle.  

Ah mais ce soir-là j'ai traversé toute l'Île-de-France pour aller écouter une visite chantée au château de Maisons, après être resté dehors sous la neige pendant deux heures. C'est surtout que le programme ne me convenait pas – entendu les deux œuvres récemment dans de très bonnes conditions.