Antanas Rekasius (1928-2003) génial compositeur lituanien

Encore une fois, un compositeur ,comme beaucoup de ces compositeurs des anciens pays de l'est, qui sont restés dans l'ombre ou n'ont pas vraiment pas la place qu'ils méritent .C'est le cas de Antanas Rekasius (1928-2003)),prononcer reh-kah-shooss, qui même s'il est connu de certains amateurs,pas assez du grand public.C'est l'occasion de faire un post sur lui et d'essayer d'en savoir plus ,si possible sur son oeuvre .On a la chance, dans le très peu et très mince filet de littérature critique sur lui, d'avoir une interwiew de Bruce  Duffie, le célèbre critique américain, avec Antanas Rekasius, qui nous livre quelques petits secrets sur sa musique.C'est toujours mieux que rien.
.

Antanas Rekasius, Symphony No.7 In Memoriam (1987)
Lithuanian State Philharmonic Orchestra, Juozas Domarkas (cond.)

J'avoue  avoir connu Rekasius, par cette superbe symphonie,très impressionnante même, pour celui ou celle qui l'écoute pour la première fois.Comme il est signalé dans le titre ,cette symphonie a été crée,pour honorer la mémoire de quelqu'un ,ou de quelque chose et sa lente et progressive ascension tout au long de cette symphonie, ne peut qu'aller dans ce sens.Toute marche funèbre ne peut que célèbrer l'inexorable destin final de chaque humain.Mais cette symphonie est très riche musicalement et ne manque pas de surprendre l'auditeur, par sa force intérieure farouche et décidée.
C'est là que je fais intervenir Bruce Duffie, à la question ,Écrivez-vous sous toutes les formes ?

AR : Symphonique La musique est la partie principale de ma production. J’écris pour un grand, Orchestre moderne surchargé. Il y a déjà six symphonies enregistré. J’écris aussi pour la scène; Il y a quatre ballets et un opéra, et quand j’écris pour la scène, il y a aussi un énorme, explosion orchestrale surchargée. Un autre domaine est la musique de chambre ce qui me permet de me reposer de la palette orchestrale massive. En écrivant de la musique de chambre, j’acquiers une certaine légèreté et un esprit qui compense le tragique de ma musique orchestrale. Le troisième champ est des chansons; J’essaie aussi d’écrire des chansons pour enfants parce que je peux Gardez la même légèreté et le même enjouement. Étais-je Écrire des chansons pour adultes, cela me rapprocherait trop du tragique et le sentiment lourd que j’exprime dans mes œuvres orchestrales.

BD : C’est la vie si tragique que cela devient la seule chose que vous souhaitez exprimer dans vos symphonies?

AR : Peut-être « Tragédie » n’est pas le mot correct parce que tout est lumineux. Je signifiait une certaine lourdeur et une certaine densité d’expression. Je suis moi-même une personne légère et frivole et j’aime plaisanter, Mais ma musique s’avère être lourde.

BD : Trop lourd ?

AR : Oui. Il y a un contraste. Beaucoup de gens ne comprennent pas pourquoi ma musique est si lourde et dense, alors que dans la vraie vie je suis un joyeux et jovial personne. C’est ma situation créative.

BD : Qui sont les Les grandes influences dans votre monde de composition ?

AR : C’est un Il m’est difficile de répondre à cette question, et je suis toujours surpris que les gens pensent que je peux identifier ces influences. Pour vous dire La vérité, toute la musique est une influence. J’absorbe toute la musique et c’est le mieux que je puisse répondre.

Bon tout ça n'est qu'une traduction Google qui vaut ce qu'elle vaut.Pour ceux qui veulent lire l'original
http://bruceduffie.com/rekasius.html

Le mieux pour se faire son idée est de l'écouter cette 7ème symphonie.
www.youtube.com/watch?v=XvU3XOpY2M8

En fouillant un peu sur le net,et cherchant des informations sur Rekasius.Je me suis trouvé ,devant cet article de la BBC , qui m'a beaucoup surpris et même un peu choqué ,je dois dire .Je le cite, in texto.

"Un vieux compositeur lituanien qui avait connu des moments difficiles a été retrouvé tué par balle dans son appartement de Vilnius.
Une arme à feu a été trouvée près du corps d’Antanas Rekasius qui avait une blessure par balle à la tête et la police soupçonne un suicide.

Rekasius, 75 ans, vivait dans la pauvreté et pouvait à peine payer les factures de son appartement de trois chambres.
Son travail, qui comprenait des symphonies et de la musique de ballet, a été joué à la fois dans l’ex-URSS et à l’étranger, et était connu pour ses touches humoristiques.
Inquiet de son manque de revenus, il souffrait de dépression, a déclaré la police de la capitale lituanienne.
Les compositions de Rekasius avaient une qualité anticonformiste et étaient pleines d’humour et de grotesque, écrit le Centre lituanien d’information et d’édition musicales.


ANTANAS REKASIUS
Antanas Rekasius Né en 1928
Diplômé du Conservatoire d’État lituanien
Les œuvres comprennent neuf symphonies, 12 ballets, sept concertos et un opéra-oratorio
Outre de nombreuses symphonies et ballets, il a écrit de la musique pour enfants, y compris des cycles de chansons et des pièces pour piano.

Le Centre d’information sur la musique balte l’a décrit comme « le compositeur le plus controversé de la scène lituanienne... son penchant pour le clown éclipse parfois le sérieux de son travail ».

Parmi les cascades qu’il a employées, mentionnons l’extinction des lumières pour la finale de sa cinquième symphonie et une fois que les chanteurs ont montré des dents en or au public.

Le travail d’Antanas Rekasius a été joué aux États-Unis, en Italie, en France, en Finlande, en Suède, en Allemagne et en Hongrie, ainsi qu’en Lituanie et en Russie."

Changement complet d'atmosphère avec la 6ème symphonie.C'est une symphonie moins tendue et moins oppressante, plus jazzy qui semble reposer plus ,sur de l'improvisation et pourtant, elle est aussi passionnante que la 7ème.L'influence du jazz est palpable tout au long et le mélange subtil qu'opère Rekasius,dans cette oeuvre est déroutant,mais aussi naturel.On a l'impression que Rekasius s'est inspiré,de grands concerts de Jazz,des années 60, genre Herbie Mann ,pour cette oeuvre assez courte,qui semble improvisée ,et le mélange ,avec la réflexion classique, est parfaitement réussi .Il y a dans cette symphonie des instants très jazzy, avec un jeu très subtil, des instruments, courant au jazz, la flûte ,les cuivres et les percussions,renforcés par un discours musical plus solide et profond.Vraiment une belle réussite que je conseille, si mes conseils servent à, quelque chose.Vraiment ,une joie personnelle,d'avoir découvert ce merveilleux compositeur.


Pour l'écouter/
www.youtube.com/watch?v=jOOklAuB484

Pour l'instant,c'est la symphonie N°5 de Rekasius,qui me séduit le plus.Il y a, pour moi,un équilibre parfait entre l'introduction du jazz et la musique dite classique en général.L'osmose se fait parfaitement et Rekasius, n'est pas du tout dans la caricature ou l'excès, au contraire, il y a chez lui,un grand respect de cette musique de jazz,qui ,pour finir ,est aussi importante ,que l'autre ,dite plus sérieuse. Il réussit même parfaitement ce mélange de deux mondes qui s'étaient souvent opposés .Dans l'interview de Duffie, Rekasius, dit ,qu'il est quelqu'un de joyeux et on le ressent ,fondamentalement dans sa musique.Pour finir, j'aime beaucoup, le parcours assez original de ce compositeur , qui nous a laissé des oeuvres de très belle qualité, comme cette symphonie N°5.

Pour l'écouter/
www.youtube.com/watch?v=/lYuhqW-idQ0

Symphonie N°4 de Antanas Rekasius.

Là encore , Rekasius sait totalement dominer son sujet,et en l'espace de 13 minutes, nous fait passer ,par tout un panel de sensations et d'espaces musicaux différents.Tout comme Havergal Brian, il sait parfaitement utiliser la forme symphonique ,dans un espace de temps très court.Je pense ,que son côté excentrique ,dont on parle ici ou là, a dû jouer en sa défaveur ,et faire un peu ,dévaluer sa musique, qui cache pour moi,aussi une profonde solitude ou même de dépassement métaphysique.Dieu merci, cette inquiètude et cette profondeur musicales, n'apparaissent ,que par certains moments, et sont entremélés de musique de cirque ou de foire, ce que réussit d'ailleurs parfaitement Rekasius.Il faut souligner le génie et la richesse de son orchestration,dans chaque symphonie et particulièrement dans celle-là.C'est une musique puissante et dynamique,pleine de surprises et de coups d'éclat,qui joue sur la tension et l'éclatement,pour revenir à l'apaisement.Bref ,une très belle découverte encore...IL faut absolument écouter ses symphonies,même si j'en parle assez mal.

Pour l'écouter/
www.youtube.com/watch?v=YhzA-WIo33o

On a pas ,hélas d'enregistrements de la 3ème symphonie et c'est bien dommage.Mais je n'ai pu m'empêcher en écoutant sa seconde symphonie, de penser à quelles merveilleuses musiques de films, il aurait pu faire.Sa musique est très physique et très présente, il situe formidablement ,avec une grande facilité,les atmosphères différentes, tendues ou énergiques,ou bien romantiques,comme dans cette deuxième symphonie, que cela aurait très bien pu servir à souligner la qualité d'une image ou d'une situation au cinéma.Peut être l'a t'il fait et qu'on ne le sait pas.Peut être aussi dis-je une ânerie, j'en sais rien. Mais une chose est sûre ,pour moi, c'est qu'on va découvrir, encore de très belles choses dans sa musique.

Du fil «Playlist»:

Benedictus a écrit:

• Symphonie n°5 «Segments» (1981)
Vladimir Tarasov (percussion), Arnoldas Gurinavičius (contrebasse), Juozas Domarkas / Orchestre Symphonique de la RSS de Lituanie
s.d.
Melodiya

Bon, désolé pour les inconditionnels, mais ça m’a franchement gavé.  
Vraiment une musique pas du tout pour moi.

arnaud bellemontagne a écrit:

Je connais (de nom) Tarasov : c'est une figure du free-jazz européen (Ganelin Trio)

Benedictus a écrit:

Oui, justement: toute la première moitié de cette symphonie est une espèce de fausse suite de free jazz - enfin, entendons-nous: quelque part entre les compos «ambitieuses» de Mingus et un free relativement sage et surtout très écrit (plutôt du côté de Conquistador ou des Heliocentric Worlds de Sun Ra que du festival panafricain d'Alger, quoi.)

(En fait, quand je dis «fausse suite de jazz», j'exagère: en fait, même si ça sonne ponctuellement un peu contraint / carré / raide, ça témoigne quand même d'une maîtrise du langage du jazz tout à fait remarquable pour un compositeur «classique.»)

EDIT: Je ne pense pas que cette symphonie puisse être tellement ta came; en revanche, je la recommanderais à Alifie (s'il ne la connaît pas déjà.)

Анастасия231 a écrit:

Tu risques de ne pas aimer ma 4e symphonie non plus...

Alifie a écrit:

Benedictus a écrit:

Bon, désolé pour les inconditionnels, mais ça m’a franchement gavé.  

Benedictus a écrit:

en revanche, je la recommanderais à Alifie (s'il ne la connaît pas déjà.)

Hum, je te fais dire que ça ne donne pas franchement envie d'y aller.

Spoiler:

Анастасия231 a écrit:

Mais elle est géniale cette symphonie... la mauvaise pub fait des ravages...

Benedictus a écrit:

Alifie a écrit:

Hum, je te fais dire que ça ne donne pas franchement envie d'y aller.

Non, mais attention: je n'ai pas dit que c'était une grosse bouse, juste que c'était le genre de musique faite pour me gaver, moi. (Je pense à l'inverse qu'elle devrait te plaire.)

Анастасия231 a écrit:

Tu risques de ne pas aimer ma 4e symphonie non plus...

Ça dépend: si c'est comme le troisième mouvement (disons: gros bordel de gestes et de textures très typés fin années 70), pourquoi pas; en revanche, si c'est comme les deux premiers «alla jazz», je le crains; a fortiori si c'est comme le dernier (qui m'a fait penser à une symphonie de Kantcheli: l'espèce de mélopée statique gémissante ponctuée de cuivres et de percussion qui se mettent à enfler méchamment et retombent presque aussitôt.)

Alifie a écrit:

survolée, puisqu'elle dure moins de 20 minutes : exactement le genre de pièce montée totalement indigeste pour moi également (pour ce qui est de l'inspiration jazz, on est aux antipodes du Gil Evans d'Individualism par ex.).

Анастасия231 a écrit:

Benedictus a écrit:

Анастасия231 a écrit:

Tu risques de ne pas aimer ma 4e symphonie non plus...

Ça dépend: si c'est comme le troisième mouvement (disons: gros bordel de gestes et de textures très typés fin années 70), pourquoi pas; en revanche, si c'est comme les deux premiers «alla jazz», je le crains; a fortiori si c'est comme le dernier (qui m'a fait penser à une symphonie de Kantcheli: l'espèce de mélopée statique gémissante ponctuée de cuivres et de percussion qui se mettent à enfler méchamment et retombent presque aussitôt.)

Disons qu'il y a un peu de tout ça avec en plus la Passion Selon Saint-Matthieu de Bach et une narratrice qui récite un poème de Pasternak. Voici un lien, si jamais : https://soundcloud.com/nastia_vinogradova94/symphony-no-4-op-34-2022

Анастасия231 a écrit:

Alifie a écrit:

Benedictus a écrit:

Alifie a écrit:

Hum, je te fais dire que ça ne donne pas franchement envie d'y aller.

Non, mais attention: je n'ai pas dit que c'était une grosse bouse, juste que c'était le genre de musique faite pour me gaver, moi. (Je pense à l'inverse qu'elle devrait te plaire.)

survolée, puisqu'elle dure moins de 20 minutes : exactement le genre de pièce montée totalement indigeste pour moi également (pour ce qui est de l'inspiration jazz, on est aux antipodes du Gil Evans d'Individualism par ex.).

gluckhand a écrit:

Benedictus a écrit:

arnaud bellemontagne a écrit:

Je connais (de nom) Tarasov : c'est une figure du free-jazz européen (Ganelin Trio)

Oui, justement: toute la première moitié de cette symphonie est une espèce de fausse suite de free jazz - enfin, entendons-nous: quelque part entre les compos «ambitieuses» de Mingus et un free relativement sage et surtout très écrit (plutôt du côté de Conquistador ou des Heliocentric Worlds de Sun Ra que du festival panafricain d'Alger, quoi.)

(En fait, quand je dis «fausse suite de jazz», j'exagère: en fait, même si ça sonne ponctuellement un peu contraint / carré / raide, ça témoigne quand même d'une maîtrise du langage du jazz tout à fait remarquable pour un compositeur «classique.»)

EDIT: Je ne pense pas que cette symphonie puisse être tellement ta came; en revanche, je la recommanderais à Alifie (s'il ne la connaît pas déjà.)

Je pense que la 7ème symphonie de Rekasius te conviendrait plus.C'est la plus novatrice de toutes .Je ne pense pas ,qu'il cherchait dans la 5ème,non plus à concurrencer Gil Evans ou Mingus,il se sert du jazz ,comme un discours de notre époque, c'est tout, pas plus, pas moins.Et ne voir que la partie jazz, dans cette oeuvre, c'est un peu la réduire , à mon avis.C'est aussi ,un orchestrateur génial, comme on l'entend dans la 4ème qui ne dure que 15minutes.Mettre autant de musique en un temps aussi court, il faut le faire.Le forum est là, pour partager nos avis.Tout comme tu n'as pas aimé Jephté de Montéclair , que moi, je trouve formidable.C'est bien d'en parler,et d'échanger, merci.

Bon, alors, voilà ce que j'avais écrit à l'origine mais que je n'avais pas posté:

Durant la première moitié de la symphonie (deux mouvements notés «sempre alla jazz»), j’ai entendu une espèce de délayage raidi du Mingus «ambitieux» mêlé de premier free des années 60 encore un peu modalisant et surtout très écrit (le Cecil Taylor de Conquistador ou le Sun Ra des Heliocentric Worlds) - ce qui m’a paru un peu long, alors que ça ne dure même pas dix minutes.
Ensuite, dans le troisième mouvement, le même genre de langage s’hybride (via la pulsation) avec du gros bordel moderniste typique des années qui précèdent immédiatement, entre effets cinétiques ligétiens et collages schnittkiens (du coup, j’ai davantage aimé, même si c'est quand même assez bavard et bruyant.) Ce qui m’a achevé, c’est le quatrième mouvement, qui fait penser aux symphonies de Kantcheli: une séquence répétée où une interminable mélopée statique-gémissante à basses dynamiques est ponctuée de cuivres et de percussion qui se mettent à enfler méchamment et retombent presque aussitôt.

Antanas Rekasius - Autocollage No 2 (Malheureusement pas d'orchestre et pas d'interprète sur YT

Pour l'auditeur lambda comme moi, je ne vois pas  à quoi Rekasius fait référence ,exactement dans cet autocollage N°2. Mais comme j'aime bien cette oeuvre, justement pour sa grande varièté orchestrale et hétérogène . Il faut aussi savoir maintenir l'intèrêt de l'auditeur et il s'en sort très bien  .
Pour l'écouter/
www.youtube.com/watch?v=VPpRhsWgkUU

Venez vous promener avec Antanas Rekasius

J'avais pas vu, mais il y a un très bon docu sur YT,de 30 minutes,Venez vous promener avec Antanas Rekasius, c'est sous-titré en anglais, mais en anglais assez basique, alors assez abordable pour moi.Une découverte interessante de ce grand compositeur ,qui parle de ses oeuvres.Je trouve sa musique extrêmement visuelle et ce docu, me le confirme encore plus, avec certains extraits.
Pour le voir
www.youtube.com/watch?v=Ea9hBcTutns

gluckhand a écrit:

(Malheureusement pas d'orchestre et pas d'interprète sur YT)

Orchestre symphonique de la Philharmonie d’État de Lituanie sous la direction de Juozas Domarkas.