ONP - Ballet Maurice Béjart - Stravinski/Mahler/Ravel 22/04

ONP Bastille
Stravinski : L'oiseau de feu
Mahler : Le Chant du compagnon errant
Ravel : le Boléro.

Direction : Patrick Lange.

Difficile de faire un programme plus classique ! Réservé pour compléter l'abonnement de saison, je suis toujours curieux d'assister à un ballet, et de redécouvrir les musiques que l'on connaît tant, ainsi illustrées. Soirée finalement très courte, avec presque autant de temps d'entracte (deux entractes) que de temps sur le plateau. Salle ultra-complète.

Stravinski : j'ai manqué une bonne partie de l'Oiseau de feu, à cause d'un métro (L1) coupé... Heureusement, un gentil ouvreur a consenti à m'ouvrir la galerie latérale, depuis laquelle j'ai pu suivre debout une petite moitié (celles avec les extraits que je préfère de cette suite), et découvrir cette belle chorégraphie, opposant un oiseau de feu vêtu de rouge et un groupe de danseurs vêtus de gris, rejoints à la fin par plusieurs danseurs en tenue d'oiseau de feu. Ça mérite d'être vu !

Mahler : après avoir rejoint ma place, très beau ballet sur des lieder de Mahler, dans lesquels je me suis amusé à reconnaître des extraits des symphonies (notamment la 4ème), par un duo de danseurs, très sensuels et expressifs. Magnifique !

Ravel : toujours aussi facile de se laisser emporter par un beau Boléro ! Une danseuse, sur une immense table rouge, petit à petit entourée par un groupe d'hommes torses nus, d'abord disposés assis en carré sur les contours du plateau, puis rejoignant le bord de la table, sans jamais monter dessus. Danse extrêmement expressive et émouvante de la danseuse Dorothée Gilbert. Fin avec tous les danseurs formant un seul corps tout autour de la table, comme un gigantesque gâteau d'anniversaire rouge avec une seule bougie. Effet saisissant !

Belle soirée, et spectacle à recommander aux néophytes de la musique classique et du ballet.

Rocktambule a écrit:

Salle ultra-complète.

Toujours pour le ballet.

Avec un public particulièrement conservateur (qui veut revoir les dix grands ballets, joués dans la même production), il est donc facile de raccrocher les wagons si l'on veut s'y mettre.

J'avoue ne pas avoir été particulièrement touché par le Mahler... La danse était très belle, mais comment les raccrocher aux textes des Lieder si l'ONP ne se donne même pas la peine de mettre les textes en sur-titre, ou au moins les titres! Déjà que le baryton dans la fausse, c'est pas forcément génial pour l’acoustique...

Sinon superbe Oiseau de Feu. Là on comprend tout de ce qu'il se passe!
Et pour le Bolero, c'est toujours aussi fascinant... Je l'avais vu avec Marie-Agnès Gillot il y a 5 ans (avec le très beau Daphnis et Chloé chorégraphié par Millepied!) et j'avais été impressionné par le caractère oppressant. Avec Le Riche, on avait un danseur fier, une sorte d'idole qui en imposait. Avec Gillot c'était plus étrange avec cette impression d'une danseuse idole malgré elle qui s'effondrait à la fin. Et là c'était encore un peu différent, plus jeune et moins en souffrance (Attention, Gillot était parfaite mais montrait comme une souffrance sur la fin par sa danse) mais qui s'effondre de façon plus étonnante. Du coup un peu moins oppressé car je n'avais pas autant l'impression de cette idole obligée à danser jusqu'à l'épuisement par des hommes possessifs.
ça reste un superbe ballet!

Niveau direction d'orchestre, c'était pas mal. Pas fou, mais ça se tenait très très bien.

Pour le public, oui c'est hyper tradi pour les ballets classiques. Moins pour ce genre de production.
Et sinon en effet, niveau timing c'est limite quand même... 56 minutes de musique pour 40 minutes d'entracte. Ils auraient peut-être pu nous ajouter un petit quelque chose... ou ne faire qu'un seul entracte!

Tu es en train de dire que, pour un ballet, ce n'était que la suite de l'Oiseau de feu??

J'adore Xavier qui découvre comment fonctionne une soirée de ballet.

Oui, ce sont des vignettes avec en général trois petits ballets de chorégraphes parfois différents (ou une soirée monothématique autour d'un seul chorégraphe). Donc on ne peut pas jouer l'Oiseau en entier, il faut que ça fasse 20-30 minutes.

Je te rassure, personne n'écoute la musique – et vu comment c'est joué (pour des raisons techniques de battue dansable, mais aussi d'investissement minimale de l'orchestre), ce n'est pas forcément très grave.

Bah, quand même, je suis allé voir un certain nombre de ballets, et à chaque fois j'ai pu voir et entendre Roméo et Juliette (de Berlioz et de Prokofiev) en entier, Daphnis et Chloé en entier, le Sacre du printemps en entier, le Boléro, et un certain nombre d'autres... et je n'ai jamais eu d'oeuvres tronquées.
Ils avaient même donné Psyché de Franck en entier à Garnier...

Là c'est quand même particulièrement absurde pour l'Oiseau de feu, on dit "ballet intégral", et en condition de ballet, on joue la suite "de concert".

Résultat: un spectacle de 56 minutes...

Oui, parce que tu es allé voir des ballets en regardant le programme musical. Mais ce n'est pas fait pour.

Je veux dire, les gars lorsqu'ils mettent Eugène Onéguine en chorégraphie, ils prennent la musique de Tchaïkovski, mais rien d'Onéguine et orchestrent (très mal) des pièces pour piano.

Il y a aussi des pièces supposément très dramatiques accompagnées par un bout de piano solo gentiment romantique qui n'a rien à voir…

Il ne faut pas penser que ça a été conçu du point de vue du mélomane, c'est tout.

C'est vrai, en plus je sais tout ça mais évidemment je fais attention et j'évite ces spectacles-là.

Là sur le site de l'ONP rien n'est indiqué pour l'Oiseau de feu... donc si est "logique" on peut penser que pour un ballet, c'est la version ballet qui est donnée.
Il faut bien regarder pour s'apercevoir qu'il est indiqué 20 minutes en première partie et en déduire que ce n'est pas le ballet intégral.

(à l'inverse, comment font-ils un Boléro de 25 minutes?)

Xavier a écrit:

Bah, quand même, je suis allé voir un certain nombre de ballets, et à chaque fois j'ai pu voir et entendre Roméo et Juliette (de Berlioz et de Prokofiev) en entier, Daphnis et Chloé en entier, le Sacre du printemps en entier, le Boléro, et un certain nombre d'autres... et je n'ai jamais eu d'oeuvres tronquées.
Ils avaient même donné Psyché de Franck en entier à Garnier...

Là c'est quand même particulièrement absurde pour l'Oiseau de feu, on dit "ballet intégral", et en condition de ballet, on joue la suite "de concert".

Résultat: un spectacle de 56 minutes...

Après là j'imagine que Béjart avait uniquement utilisé la suite pour sa chorégraphie. Donc sur le principe ça ne me choque pas vraiment (même si j'aurai bien aimé avoir l'Oiseau de Feu en entier!).
Mais par contre, c'est plus les 56 minutes qui sont un peu limites.

Xavier a écrit:

(à l'inverse, comment font-ils un Boléro de 25 minutes?)

Dans le programme de salle, il était indiqué 16 minutes. Ils ajoutent les applaudissements pour avoir un horaire de sortie plutôt qu'un horaire de fin de musique j'imagine.

Ah oui, une fois j'ai vécu ce type d'entourloupe : les ballets de Rodolphe & Noverre au Comique.

Deux ballets de 20 minutes, séparés par un entracte de 30 minutes. Clairement ils cherchaient à donner l'impression de ne pas avoir trop escroqué le public.

(Meilleure soirée de ballet de ma vie au demeurant, c'était incroyable.)

DavidLeMarrec a écrit:

Rocktambule a écrit:

Salle ultra-complète.

Toujours pour le ballet. Avec un public particulièrement conservateur (qui veut revoir les dix grands ballets, joués dans la même production), il est donc facile de raccrocher les wagons si l'on veut s'y mettre.

Je ne sais pas si cette réputation d'ultraconservatisme est si méritée que ça. Déjà le ballet contemporain a un public nombreux et connaisseur (à Garnier c'est toujours plein ou presque pour les créations). Et pour le classique l'ONP programme systématiquement les mêmes ballets, et il est vrai que les amateurs y retournent, parfois en ronchonnant un peu. Mais il y en a quand même beaucoup qui réclament d'autres productions de pièces du répertoire de la maison. Et l'ONP remplirait sans doute tout aussi bien en sortant des placards de grands ballets narratifs. Mais ce genre de production coûte cher à (re)monter, tandis que le Lac des cygnes affiche complet à tous les coups, alors pourquoi se gêner...

Cela dit le nouveau directeur de la danse a annoncé son intention de créer ou de recréer plus de pièces sur pointes, qui exploitent la formation classique de la maison.

D'accord avec tout ça. Néanmoins (mais le biais est peut-être que je fréquente des mélomanes pointus et des balletomanes peut-être plus généralistes ?) j'ai l'impression d'une obsession pour la comparaison des danseurs dans les mêmes rôles, là où même les glottophiles tradis râleraient si on entendait coup sur coup Kaufmann, Alagna et Calleja dans la Traviata.

La tolérance à la répétition semble bien plus grande. Bien sûr que tout le monde serait content s'il y avait de beaux retours ou de belles nouveautés.

Numériquement aussi, le fonds de répertoire de tubes c'est bien une quarantaine de titres, contre une quinzaine pour le ballet (en tout cas à l'échelle de Paris).