Schwarzkopf ou Callas ?

bAlexb a écrit:

Et est-ce que tu penses qu'on peut parler d'un "mariage" Callas/Legge ? A entendre dans le sens d'une "union" directionnelle tendant, d'un point de vue créatif, vers un but particulier. Ou que Callas représentait, dans le projet de Legge, une importante part de marché qu'il a exploitée jusqu'à plus-soif ?

Pour moi, c'est plutôt de l'exploitation quand on voit les conditions d'enregistrement (rapides, en fin de saison de préférence histoire qu'elle soit bien fatiguée, des collègues pas forcément au niveau...)
Après, c'est bien d'avoir fait ça. Mais il aurait été bien de faire les choses de manière un peu plus soignées je trouve...

Legge en 1955 a beaucoup sollicité Callas, trop sans doute. Ce n'est pas lui qui s'est occupé de la production de "Callas at La Scala" enregistré en juin. En revanche, il lui a fait enregistrer Cio-Cio-San et Aida en août, Gilda en septembre. Je pense que cela peut compléter la remarque de Polyeucte.

Mariefran a écrit:

On a dit qu'on ne mêlait plus art et politique, Sud… 

ça n'a rien de politique, c'est de la morale comme disait comme disait Mme SK. Je n'ai en aucun cas abordé l'aspect de sa punition, son "mariage" avec Legge. On ne peut pas raisonnablement parler de SK sans évoquer ce qui la manipulait... Son art? je n'en vois aucun, une imitation simiesque de ce que pouvait être une grande dame dans son esprit étroit de petite bourgeoise bidermayer. Mozartienne? allons donc, un véritable assassinat que ses rôles "mozartiens". Seul le ridicule la conserve encore en cette époque d'admirations faciles. Une voix pure, poussée sur l'ordure dans le ruisseau nourri du sang de ses compatriotes...
Le travail? coucher avec tous les puissants, c'était sans doute du travail en effet... Si ça a amélioré sa voix, tant mieux pour les gogos.

sud273 a écrit:

Mariefran a écrit:

On a dit qu'on ne mêlait plus art et politique, Sud… 

ça n'a rien de politique, c'est de la morale comme disait comme disait Mme SK. Je n'ai en aucun cas abordé l'aspect de sa punition, son "mariage" avec Legge. On ne peut pas raisonnablement parler de SK sans évoquer ce qui la manipulait... Son art? je n'en vois aucun, une imitation simiesque de ce que pouvait être une grande dame dans son esprit étroit de petite bourgeoise bidermayer. Mozartienne? allons donc, un véritable assassinat que ses rôles "mozartiens". Seul le ridicule la conserve encore en cette époque d'admirations faciles. Une voix pure, poussée sur l'ordure dans le ruisseau nourri du sang de ses compatriotes...
Le travail? coucher avec tous les puissants, c'était sans doute du travail en effet... Si ça a amélioré sa voix, tant mieux pour les gogos.

Un détail : ça s'écrit Biedermeier ! Après, je suis d'accord avec toi : une approximation de plus ou de moins...
Et si j'ajoute que le Biedermeier est l'un des arts décoratifs les plus aboutis sur le plan technique, qui plus est sous-tendu par une réelle théorie ; qu'enfin, dans le catalogue français de l'exposition qui a eu lieu au Louvre il y a quelques années, déjà,, les différents essais ont pour titre "Une simplicité aristocratique", "L'invention de la simplicité", "Une culture de l'harmonie", etc. ; bref, tu ne trouves que ça a une saveur particulière ?

Polyeucte a écrit:

bAlexb a écrit:

Et est-ce que tu penses qu'on peut parler d'un "mariage" Callas/Legge ? A entendre dans le sens d'une "union" directionnelle tendant, d'un point de vue créatif, vers un but particulier. Ou que Callas représentait, dans le projet de Legge, une importante part de marché qu'il a exploitée jusqu'à plus-soif ?

Pour moi, c'est plutôt de l'exploitation quand on voit les conditions d'enregistrement (rapides, en fin de saison de préférence histoire qu'elle soit bien fatiguée, des collègues pas forcément au niveau...)
Après, c'est bien d'avoir fait ça. Mais il aurait été bien de faire les choses de manière un peu plus soignées je trouve...

On sait si la pratique valait pour toutes les productions Legge ? Ou si, simplement, il y avait une liaison très pragmatique, dans la série "Teatro alla Scala", avec les contraintes et les disponibilités du théâtre, par exemple ?

sans doute, mais ça ne correspond pas à ma vision du kitsch qui fait plaisir. Callas beaucoup plus déjà, et elle a chanté plus de Rossini et moins de Richard Strauss (sans parler de la musique française que SK ne chantait pas parce qu'il y avait trop d'affreux homosexuels -c'est elle qui le disait- parmi les compositeurs et interprètes de ce répertoire).

sud273 a écrit:

sans doute, mais ça ne correspond pas à ma vision du kitsch qui fait plaisir. Callas beaucoup plus déjà, et elle a chanté plus de Rossini et moins de Richard Strauss (sans parler de la musique française que SK ne chantait pas parce qu'il y avait trop d'affreux homosexuels -c'est elle qui le disait- parmi les compositeurs et interprètes de ce répertoire).

Toutes les interprètes straussiennes sont des bourgeoises étriquées ?

je n'ai jamais dit ça... je ne lui reproche pas ses Strauss, c'était parfaitement dans ses cordes,(pour moi Richard Strauss, après Salomé c'est complètement ringard, donc il y a une certaine logique) ses Mozarts plutôt, encore qu'elle se soit cantonnée à des rôles involontairement comiques.

Ca alors! Moi qui croyais que tous les
amateurs d'opera aimaient Callas... Je ne vois honnetement pas ce qu il y a de laid dans son timbre a part certains aigus vers la fin de sa carriere mais sinon c est sublime pour moi. Sa voix m a tout de suite plu, alors que je ne connaissais pas grand chose a l opera! Schwarkopf est bien sur une tres bonne chanteuse mais dans son repertoire il y a beaucoup de chanteuses que je prefere comme Della Casa, Gruemmer ou Seefried pour ne citer que parmi ces contemporaines. Callas avait peut etre un repertoire restreint mais elle chantait des roles qui exigaient des qualites tres differentes, c est ceci qui est remarquable. Je ne suis pas sur qu il y ait beaucoup de chanteuses qui aient chante a la fois "La Gioconda" et "Armida" (Monserrat Caballe peut etre? ou Christina Deutekom?).
Par contre pour les masterclass, je prefere largement Schwarzkopf qui avait vraiment des choses interessantes a dire.
Elle ne laissait rien passer aux eleves mais je ne l ai jamais vue s exprimer de facon incorrecte a un eleve (sur les videos dispos en tout cas, on ne voit peut etre pas tout...).
Les masterclass de Callas, je les trouve beaucoup moins interessants. Elle etait faite pour chanter et etre sur scene mais pas vraiment pour enseigner...

twizzle a écrit:

Je ne suis pas sur qu il y ait beaucoup de chanteuses qui aient chante a la fois "La Gioconda" et "Armida" (Monserrat Caballe peut etre? ou Christina Deutekom?).

Cristina

twizzle a écrit:

Je ne vois honnetement pas ce qu il y a de laid dans son timbre a part certains aigus vers la fin de sa carriere mais sinon c est sublime pour moi.

Ah ben quand même... sa voix était assez roque, plutôt instable selon les soirs (une fois ça pouvait être clair et une autre sombre au possible), la vibrato était toujours présent dans les aigus...

Pour moi c'est tout sauf un beau timbre (contrairement à Tebaldi par exemple! ) mais par contre, Callas est pour moi une voix fascinante et un chanteuse passionnante.

Otello a écrit:

twizzle a écrit:

Je ne suis pas sur qu il y ait beaucoup de chanteuses qui aient chante a la fois "La Gioconda" et "Armida" (Monserrat Caballe peut etre? ou Christina Deutekom?).

Cristina

Désolé pour cette faute...et toutes mes excuses à Cristina Deutekom!

Polyeucte a écrit:

Pour moi c'est tout sauf un beau timbre (contrairement à Tebaldi par exemple! ) mais par contre, Callas est pour moi une voix fascinante et un chanteuse passionnante.

On peut trouver la voix de Tebaldi sans séduction particulière niveau timbre, c'est mon cas. La Tebaldi dans les années 1950 et disons jusqu'au début des années 1960 avait peut être un "beau timbre" mais je n'adhère pas à celui-ci tout en reconnaissant des qualités de musicienne à cette soprano. Callas est fascinante dramatiquement et vocalement malgré les imperfections et les problèmes qui ont affecté sa voix au fur et à mesure des années.

Polyeucte a écrit:

Ah ben quand même... sa voix était assez roque, plutôt instable selon les soirs (une fois ça pouvait être clair et une autre sombre au possible), la vibrato était toujours présent dans les aigus...

Pour moi c'est tout sauf un beau timbre (contrairement à Tebaldi par exemple! ) mais par contre, Callas est pour moi une voix fascinante et un chanteuse passionnante.

Oui mais dans ces bonnes années, donc jusqu à 1958, je ne connais pas d'enregistrements studio ou sa voix me paraisse désagréable. Certaines notes sont forcées dans des enregistrements comme Gioconda ou Medea, mais je crois que c'est un choix interprétatif et du coup ca ne me dérange pas du tout.

Une voix rauque pour moi c'est Bonnie Tyler donc du coup je ne vois pas comment appliquer ce terme a la voix de Callas.

La voix de Tebaldi est plus homogène et son expression est beaucoup plus lyrique, c est sur.

Disons que c'est le côté vraiment non homogène de la voix qui m'empêche de trouver le timbre beau... Pour moi, un beau timbre, c'est plus Tebaldi, Leontyne Price, Nina Stemme, Anna Moffo, Mirella Freni... des voix où jamais on ne sent de tension dans la façon de chanter disons (ou presque jamais...)

après, c'est une façon de voir les choses...

Stemme, Moffo, Price (avec son grave qui n'a jamais été très beau) et Freni, je suis d'accord. Tebaldi me fait trop souvent penser à une femme mure, une mamie, sauf dans les 15 premières années de ce qu'on possède comme enregistrements de la dame même si je n'ai pas tout entendu évidemment. La Tebaldi dramatique de La Gioconda est intéressante, rôle dans lequel je préfère toutefois Callas.

Pour Price jeune, je suis d'accord, moi aussi je trouve son timbre sublime. A partir de 1970 par contre, je trouve ca assez moche, ca me donne une impression de lourdeur extreme.
Freni c'est très beau très rond comme voix c'est sur!

Que pensez-vous du timbre de Schwarzkopf? Moi je ne trouve pas son timbre particulièrement beau, surtout par rapport a beaucoup d'autres soprano lyriques. Ce que j'aime bien chez elle, c'est l'importance qu'elle accorde aux mots. Enfin surtout dans l'opera car dans les lieds, je trouve ses interprétations souvent trop sophisitiquées...

twizzle a écrit:

Pour Price jeune, je suis d'accord, moi aussi je trouve son timbre sublime. A partir de 1970 par contre, je trouve ca assez moche, ca me donne une impression de lourdeur extreme.

Ah ben oui, ça s'est épaissi... mais il reste des choses miraculeuses... Son Aïda de 85 par exemple est vraiment sublime par moments (son "Qui Radames verra" ou encore le "O terra addio" ) qui cotoient des choses assez moches...

Citation :

Que pensez-vous du timbre de Schwarzkopf? Moi je ne trouve pas son timbre particulièrement beau, surtout par rapport a beaucoup d'autres soprano lyriques. Ce que j'aime bien chez elle, c'est l'importance qu'elle accorde aux mots. Enfin surtout dans l'opera car dans les lieds, je trouve ses interprétations souvent trop sophisitiquées...

Jeune, j'aime beaucoup le timbre. Après, le timbre s'efface devant une froideur qui m'énerve...

Polyeucte a écrit:

Jeune, j'aime beaucoup le timbre. Après, le timbre s'efface devant une froideur qui m'énerve...

La Schwarzkopf "jeune", c'est à quelle époque pour toi?

Je ne crois pas que je connaisse beaucoup ces enregistrements précoces. Les noces de figaro, Ariadne auf Naxos, Cosi fan tutte, c'est la Schwarzkopf "vieille" pour toi?

En comtesse je n'aime pas trop (Lisa della casa ) mais en primadonna, je la trouve quand meme hilarante et aussi émouvante dans la partie "Ariadne".

Disons la chanteuse du début des années 50 de préférence...
Après, il y a aussi eu des choses très bien après (sa Liu avec Callas... retour au sujet! ou le Don Giovanni avec Leontyne Price et Karajan...)

twizzle a écrit:

Polyeucte a écrit:

Jeune, j'aime beaucoup le timbre. Après, le timbre s'efface devant une froideur qui m'énerve...

La Schwarzkopf "jeune", c'est à quelle époque pour toi?

Je ne crois pas que je connaisse beaucoup ces enregistrements précoces. Les noces de figaro, Ariadne auf Naxos, Cosi fan tutte, c'est la Schwarzkopf "vieille" pour toi?

En comtesse je n'aime pas trop (Lisa della casa ) mais en primadonna, je la trouve quand meme hilarante et aussi émouvante dans la partie "Ariadne".

Au moins trois timbres tout au long de la carrière. La donnée reste la même mais les moirures, les plis de la voix s'enflent au gré de l'âge. Argent très pur, brillant jusqu'à 50 ; lyrique étoffé jusqu'en 60 ; automne tiède et moelleux ensuite. Le léger vibrato, cette espèce de palpitation, de frémissement a duré longtemps et fait tout le prix, pour moi, des premiers enregistrements (jusqu'au milieu des années 50, cf. le superbe récital au Carnegie Hall, les Wolf avec Fürtwängler). Mais c'est la décennie 60 et, peut-être plus encore, les rousseurs des années 70 (l'album "To my friends", les inédits du "Songbook") qui me séduisent immédiatement : dans la Maréchale (et quelle compréhension intime du texte), dans la superbe scène du Saule à Paris (67, j'aurais dit de mémoire), dans les Mahler en concert (Amsterdam par exemple), etc.
L'avantage, l'excitation vient de ce que l'on peut parcourir le chemin avec elle à mesure des enregistrements (tellement de Comtesse et finalement tellement diverses, je trouve ; idem pour Elvira, pour la Maréchale, pour des brassées entières de lieder) ; là, réside pour moi le vrai défi artistique et la vraie valeur-ajoutée : savoir qu'un geste créateur ne surgit pas ex-nihilo même si l'intuition, elle, est fulgurante (quel que soit le degré de fabrication du naturel, je l'ai déjà écrit).