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Mélomaniac Mélomane chevronné
Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012
| Sujet: Re: Webern Mar 8 Oct 2019 - 18:19 | |
| - Mélomaniac, in playlist, a écrit:
Catégorie orchestrale -rang 221°/250
James Levine (1943-)
Anton Webern (1883-1945) :
Sechs Stücke für Orchester, Op. 6
= James Levine, Orchestre philharmonique de Berlin
(DG, juin 1986)
- Spoiler:
À un âge où je me documentais sur les œuvres avant de pouvoir les écouter (les CD étaient chers, internet n'existait pas, et j'avais beaucoup à découvrir !), l'opus 6 de Webern fait partie de ces répertoires qui alimentèrent mon imaginaire. Je fus notamment intrigué par la disproportion entre le gigantesque orchestre et le chiche usage qui en est tiré. Après avoir pu entendre les corpus emblématiques de la Seconde École de Vienne, ma préférence alla aux Drei Orchesterstücke de Berg, plus rassasiantes, que je découvris en même temps que ces Six pièces grâce au CD de James Levine. Avouons qu'au départ, j'eus l'impression d'échantillons lyophilisés ; ce n'est qu'au fil des ans que j'ai appris à en admirer la transparence, le sens de l'épure, les vertus épigrammatiques. Je me suis toujours plu à me représenter ces pièces de 1909 (donc à une époque où Sigmund Freud fourbissait sa théorie de l'inconscient et sa panoplie psychanalytique) comme un « autre côté du miroir », comme des énigmes à déchiffrer, comme un univers parallèle à décoder, dont les clés échappent à la conscience mais obéissent à une logique autre. Il y aurait beaucoup à philosopher voire à fantasmer sur cette esthétique, notamment la débauche de moyens (une des plus vastes nomenclatures de l'histoire de la musique, avec cuivres par six) pourtant jamais utilisés au complet ! L'ascétique raréfaction du matériau, l'éviction des affects (s'il en est), le raffinement relèvent d'une économie d'écriture comme atomisée, presque instantanéiste, qui n'exclut pas l'hédonisme mais le condamne à des vestiges fugaces et insaisissables. Si on osait une exégèse socio-anthropologique, ne pourrait-on y entendre une sorte de dystopie, typique de la crise de la modernité ? : un vertigineux contraste entre le champ des possibles, et l'interdiction de s'épanouir, de prendre chair, prisonnière d'un formalisme décapitalisé, abstrait et castrateur, qui se laisse entrevoir par facette mais ne s'assouvit jamais. Ou du moins l'unique pièce qui accomplit une intelligible construction est la Marcia funebre, cloitrée dans ses ruminations dont la seule échappatoire s'avère un abasourdissant rictus, forcené et irréel, comme un masque sclérosé par l'horreur. Une fiction uchronique qui réinvente un langage sui generis, tournant le dos à la tradition mais en recyclant certains aspects, tels la séduction texturaliste ? Car si la signification échappe parfois, « l'emploi de la couleur instrumentale est d'une beauté tellement directe qu'il n'y a aucune difficulté pour l'auditeur à la goûter » comme disait Pierre Boulez. Toutefois, cette œuvre n'échappe pas à une dimension aubiographique et a pu s'inspirer par le décès de la mère du compositeur : autour de la Marcia funebre qui constitue le quatrième morceau, « une prémonition anxieuse de la mort dans le premier, un accès d'hystérie et d'angoisse dans le second, un fond délicat de tendresse et de nostalgie dans le troisième, et finalement l'acceptation tranquille de l'inéluctable dans les cinquième et sixième pièces » selon le musicologue Erik Levi.
D'emblée, le Etwas bewegt donne idée du minimalisme webernien : les fragments expressifs sont disposés en arche autour d'un furtif climax. Deux flûtes élèvent une phrase, qui décline après deux miroitements du célesta. Altos et violoncelles apportent une césure qui laisse place à la clarinette (0'11) filigranée par la trompette, la harpe, un violoncelle. Un treillis d'alto en trémolo serré sul ponticello (0'21) se propage aux seconds violons, émancipe les flûtes, hautbois, clarinette basse, basson, excités par quelques pizzicati des violoncelles. Dans une de leur rare intervention marquante au sein des Six Pièces, les violons gonflent une intervention (0'29) dans un climat « assez pressant » qui reflue rapidement : un arpège s'échappe de la harpe (0'45) qui dissipe tout nuage, tandis que la trompette (0'52) éteint le ciel sous une blafarde pédale de cor.
Page très curieuse que le Bewegt : clarinette basse, basson, cors, harpe gigotent confusément, comme une mussitation dont on ne percevrait que des bribes. Trombone et tuba (0'06) calment ces trépignements. Une levée de flûte (0'19) impatiente une épidermique trémulation des cordes. Une figuration entrecoupée par les trompettes (0'29) s'attise sur des pizzicati de plus en plus empressés et résonne crescendo dans une semonce en triolets. Les hautbois s'inquiètent et tentent de ramener le calme (0'45-0'51). Peine perdue : les quatre trompettes vocifèrent, pavillons bouchés mais fortissimo ! (0'54), déclenchant une abrupte escalade déployée des contrebasses jusqu'aux violons. Les bois affolés s'égosillent dans l'aigu (0'59), grosse caisse et fouet scandent la panique qui se réactive encore plus stridente (1'06). Les cuivres époumonent un trémolo (1'13) martelé par la cymbale frappée à la baguette de bois, qui vagit encore, relancé par la grosse caisse (d'abord piano puis fortissimo) dont les fracas expulsent les spasmes de cuivres jusqu'à une ultime expectoration.
Pièce la plus concise du recueil, le Zart bewegt se confine à une ascèse extrêmement décantée. Un alto exhale une phrase qu'auréolent les quatre trompettes pianissimo, conclue par un motif de clarinette (0'13) « aussi tendre que possible ». Flûte, cor et glockenspiel ânonnent un bref tintinnabulement (0'22) que nimbe un liseré des violons (0'27) perché en harmoniques. Un basson (0'31) puis un violoncelle soliloquent sur de frêles diaprures de harpe. Un voile descend sur le célesta (0'40) et se dissout par des effleurements de trompette (0'45).
L’imperturbable et impassible Langsam développe une marche funèbre, vidée de toute émotion, exsangue, progressant au ralenti, percluse dans l'asthénie, enfermée dans un sépulcre de glace. Tremblement de grosse caisse (avec sourdine), résonance du tam-tam, d'un glas dans le lointain : la première minute laisse frémir un grondement d'abysse, souhaité « à peine audible », enclos dans un tombeau sans secours. Les quatre flûtes émettent un accord pianissimo (1'03) auquel font écho les six cors, puis les quatre trompettes, pavillons bouchés, les deux clarinettes basses. Les quatre trombones mugissent imperceptiblement, la clarinette en mi bémol exhale une plainte désincarnée (1'29-1'53) à l'aigu du registre, crispée dans son cauchemar, qui plane au-dessus des lugubres miasmes du deuil. On trouve une sorte d'équivalent pictural dans Der Todessturz des Karl Buchstätters de Franz Radziwill, cet insoutenable contraste entre la nuit d'ébène et l'avion épinglé dans l'improbable éclat de sa chute fatale, figé dans sa tragique trajectoire. Dans une atmosphère d'une absolue désolation, prostrée dans une détresse pauci-relationnelle, la flûte alto commence une pâle litanie (2'28) escortée par les sombres murmures des trombones et tuba, que ponctue sobrement la grosse caisse : cet effet dont la contraction ténue s'affaisse aussitôt signalise le pas très lent du convoi et va se répéter tel un marqueur d'espace à échelle microscopique. On peut aussi songer à un infime battement de cœur. Un cor prolonge ce thrène (2'44-3'07), puis une livide trompette (-3'36). Flûtes, les deux cors anglais, clarinettes basses, et deux bassons émergent languissamment (4'08). Trombones et tuba élèvent une menace sur un inquiet roulement de timbale (4'17-4'23, et encore à 4'38), amplifiée par les six cors (4'46), les six trompettes (4'55), clarinettes et piccolo (5'04) : ce chorus hurle une série d'accords, tandis qu'enfle un terrifiant tsunami des percussions (grosse caisse, cymbale suspendue, cloche, tam-tam), auquel s'ajoute la caisse claire (5'14) pour un crescendo asséné jusqu'au fortissimo, que suit un soudain et tétanisant silence (5'30). Notons que dans cet enregistrement, la cloche n'est pas très audible (vraisemblablement placée en coulisse, comme y invite la partition).
L'ambiance sépulcrale de la pièce précédente se prolonge dans l'onirique Sehr langsam qui semble en méditer les pulsions morbides, comme un rescapé errant dans les décombres : sur un trémolo au grave des archets, trombones et cors râlent convulsivement, rampent dans la noirceur fuligineuse du catafalque, que vient seulement percer le frémissement d'une cymbale suspendue. Quelques bribes solistes se succèdent ensuite : hautbois (0'34), cor (0'54), clarinette (0'59), cor anglais (1'04), flûte (1'09), violons nimbés par un crénelage de harpe (1'20). Une gamme ascendante du trombone (1'27), un accord du célesta et un tintement du triangle initient un passage plus mobile : dans un subtil maillage tressé par les quatre trompettes pianissimo, le glockenspiel chorégraphie un diaphane carillon (1'33). À l'extrême-grave de la tessiture, une contrebasse, le contrebasson, et deux cors ancrent un plancher de ténèbres (1'50-2'31) sur lequel vient luire le violon solo à l'aigu de son registre, écartelant cet épisode entre le gouffre et les étoiles.
Tout en teintes translucides et impalpables, l'ultime Zart bewegt s'avère encore un triomphe de l'ellipse et de la litote. Sur une pédale tréfilée par quatre violoncelles, le cor anglais délivre un mystérieux oracle, qu'interrogent un alto et un basson (0'20). Un grisâtre camaïeu de cor (0'33) puis trompette distille la clarinette (0'40) dont les lueurs se fondent à l'opalescent écrin minutieusement diffracté par les six cors. Un violon vient s'émouvoir (1'26) avant que harpe et célesta (1'37) ne résonnent dans les limbes amuïes du néant, comme une brèche sur le silence des espaces infinis, qui fascine et effraie tout à la fois.
En considérant la discographie, on vérifie que ces pages sont plutôt affaire de spécialiste. Chez Emi, Ingo Metzmacher et Simon Rattle sont disqualifiés par leur prise de son (et par une certaine superficialité pour le chef anglais). Plutôt que les lectures romantisantes de Claudio Abbado à Vienne ou Karajan à Berlin (chacun chez DG), on privilégiera donc le jalon historique de Robert Craft (Columbia, 1960), l'amer brulot d'Ernest Bour (Astrée), les radiographies de Pierre Boulez (CBS, préférable à DG), les architectures en acier trempé d'Herbert Kegel (Eterna), ou plus récemment Giuseppe Sinopoli à Dresde (Teldec). La version que j'ai retenue se recommande pour l'ensemble de son programme et s'affirme pour sa perfection lapidaire, sa droiture sans concession, son intelligence, la précision miniaturiste, et une distanciation quasi-brechtienne. Le maestro américain réalisait là un de ses meilleurs disques ; sa conception analytique obtient un graphisme impeccable, prodigieusement concentré, et volontiers hiératique. Les couleurs adéquatement froides, la géométrie parfaitement contourée du Berliner Philharmoniker nous exposent une série de rébus comme autant de diamants denses et purs.
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Webern Mer 9 Oct 2019 - 16:36 | |
| - Mélomaniac a écrit:
- On privilégiera donc le jalon historique de Robert Craft (Columbia, 1960)
Columbia Masterworks (1957) Cet enregistrement a été distribué en Europe par Philips semble-t-il : Philips (1957) Je n'ai pas trouvé de réédition en CD. Mais dans les années 2000, Robert Craft réenregistrera ces oeuvres chez Naxos. |
| | | Prestissimo Mélomaniaque
Nombre de messages : 671 Date d'inscription : 21/01/2024
| Sujet: Re: Webern Dim 21 Jan 2024 - 10:28 | |
| L'intégrale Webern par Craft réalisée fin des années 50 aide à comprendre la structure de la musique plus que la totale Boulez qui fait référence (et à juste titre, car en comparaison elle a ses élans poétiques). Je la recommande sans effort aux débutants qui voudraient saisir la musique de ce mousquetaire de l'Ecole de Vienne (ils étaient 3, mais on cherche encore le D'Artagnan qui mettra tout le monde d'accord). |
| | | Prometeo Mélomane averti
Nombre de messages : 146 Date d'inscription : 22/02/2024
| Sujet: Webern Mar 28 Mai 2024 - 16:12 | |
| - Golisande a écrit:
- yannig a écrit:
- J'apprécie particulièrement l'antologie par Robert Craft, en partie en mono, enregistrée avec les micros collés aux instruments.
C'est mat, et physique. En effet, peut-être un peu trop pour moi : ça réalise sans doute une sorte d'idéal d'"objectivité sèche" pour les dernières œuvres, mais je n'en suis pas encore là (je le garde en réserve )...
Ceci dit, je ne suis pas sûr que l’objectivité sèche soit la bonne manière d’aborder cette musique en tant qu’interprète… ( Webern lui-même n’était pas du tout comme ça et se plaignait des exécutions de sa musique qui allaient déjà à son époque dans ce sens ; "une note en haut, une note en bas, la musique d'un fou" aurait-il dit après une exécution non satisfaisante selon lui de son trio ) Dans mon souvenir, Craft cherche aussi à respecter avec le plus de littéralité possible les indications de tempo de Webern, alors que de nombreuses fois elles sont juste irréalisables telles quelles ( et n’éclaircissent pas du tout le discours musical à mon sens ). Ce sont des enregistrements impressionnants mais je les considère plus comme un témoin de la manière que l’on avait d’interpréter cette musique dans les années 50/60 que comme une référence aboutie… |
| | | yannig Mélomane averti
Nombre de messages : 109 Age : 59 Date d'inscription : 20/10/2008
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 16:47 | |
| - Prometeo a écrit:
- Golisande a écrit:
- yannig a écrit:
- J'apprécie particulièrement l'antologie par Robert Craft, en partie en mono, enregistrée avec les micros collés aux instruments.
C'est mat, et physique. En effet, peut-être un peu trop pour moi : ça réalise sans doute une sorte d'idéal d'"objectivité sèche" pour les dernières œuvres, mais je n'en suis pas encore là (je le garde en réserve )...
Ceci dit, je ne suis pas sûr que l’objectivité sèche soit la bonne manière d’aborder cette musique en tant qu’interprète… ( Webern lui-même n’était pas du tout comme ça et se plaignait des exécutions de sa musique qui allaient déjà à son époque dans ce sens ; "une note en haut, une note en bas, la musique d'un fou" aurait-il dit après une exécution non satisfaisante selon lui de son trio )
Dans mon souvenir, Craft cherche aussi à respecter avec le plus de littéralité possible les indications de tempo de Webern, alors que de nombreuses fois elles sont juste irréalisables telles quelles ( et n’éclaircissent pas du tout le discours musical à mon sens ). Ce sont des enregistrements impressionnants mais je les considère plus comme un témoin de la manière que l’on avait d’interpréter cette musique dans les années 50/60 que comme une référence aboutie… Je suis assez d'accord que c'est assez représentatif des années 50/60. Et précisément, personnellement, j'adore ça. Et j'aime beaucoup moins les habitudes d'aujourd'hui de mettre parfois trop de réverbération. Je pense (je vais faire hurler, mais tant pis) que les sonorités des enregistrements de l'époque sont en partie due à certaines qualités particulières des matériels d'enregistrement de l'époque. |
| | | Songeur Mélomaniaque
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| | | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7894 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 17:03 | |
| - yannig a écrit:
- Je pense (je vais faire hurler, mais tant pis) que les sonorités des enregistrements de l'époque sont en partie due à certaines qualités particulières des matériels d'enregistrement de l'époque.
Je ne vois pas pourquoi, je pense que c'est même une évidence !... (À condition que tu ne suggères pas que le matériel de l'époque était meilleur, ça je ne le pense pas, en revanche ses caractéristiques étaient différentes et spécifiques...) |
| | | yannig Mélomane averti
Nombre de messages : 109 Age : 59 Date d'inscription : 20/10/2008
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 17:25 | |
| - Golisande a écrit:
- yannig a écrit:
- Je pense (je vais faire hurler, mais tant pis) que les sonorités des enregistrements de l'époque sont en partie due à certaines qualités particulières des matériels d'enregistrement de l'époque.
Je ne vois pas pourquoi, je pense que c'est même une évidence !... (À condition que tu ne suggères pas que le matériel de l'époque était meilleur, ça je ne le pense pas, en revanche ses caractéristiques étaient différentes et spécifiques...) je réaffirme donc : sur certains points bien précis, le matériel de l'époque était réellement meilleur. (à mon avis, mais aussi de mes expériences, dont certaines très troublantes, mais je ne vais pas détailler ici). |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7894 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 17:33 | |
| - yannig a écrit:
- sur certains points bien précis, le matériel de l'époque était réellement meilleur.
Là je le crois sans problème. |
| | | Songeur Mélomaniaque
Nombre de messages : 1940 Age : 15 Localisation : Paris Date d'inscription : 17/04/2024
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 17:44 | |
| - Golisande a écrit:
- yannig a écrit:
- sur certains points bien précis, le matériel de l'époque était réellement meilleur.
Là je le crois sans problème. Sur quels points en particulier ? Produire un son agressif (ce qui est parfois important) ? Je ne comprends pas du tout ce que vous voulez dire (Cependant, je pourrais admettre que le materiel d’aujourd’hui se concentre peu sur des aspects très importants de l’époque, il se généralise, mais d’une manière admirable sans perdre non plus de vue ce qu’on avait trouvé avant. Maintenant j’arrête de dire des bêtises ) |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7894 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 17:52 | |
| yannig saura mieux que moi te répondre puisque c'est son affirmation , mais disons que (comme dans tous les domaines) la qualité ne s'est pas systématiquement améliorée depuis cette époque – loin de là même, parfois –, en dépit de la technologie et parfois à cause d'elle... |
| | | yannig Mélomane averti
Nombre de messages : 109 Age : 59 Date d'inscription : 20/10/2008
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 18:00 | |
| - Golisande a écrit:
- yannig saura mieux que moi te répondre puisque c'est son affirmation , mais disons que (comme dans tous les domaines) la qualité ne s'est pas systématiquement améliorée depuis cette époque – loin de là même, parfois –, en dépit de la technologie et parfois à cause d'elle...
j'ai dit plus haut que je ne donnerai pas de détails, mais bon : Avec le (bon) matériel de l'époque, la dynamique était bien plus conséquente. Même si certaines mesures semblent indiquer le contraire, pendant un enregistrement, au vu-mètre, en utilisant ce genre de matériel, 20dB (!) de plus sur les forté n'est pas rare. (en se calibrant sur le niveau moyen). Et malgré cela, il n'y avait pas d'agressivité particulière, au contraire, même. Je pourrais aussi parler des textures sonores, des matières, des couleurs, des effets de rythme, de la perception des intentions des musiciens et surtout de l'effet de présence... Par contre, la bande passante était un peu plus réduite, mais perso, ce n'est pas ce qui me gène le plus. |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7894 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Webern Mar 28 Mai 2024 - 19:38 | |
| Cela dit je suis en train d'écouter l'op.6 dans la version de Craft, et j'aime beaucoup ! (C'est effectivement "mieux" que Boulez et Sinopoli en un sens...) |
| | | Prometeo Mélomane averti
Nombre de messages : 146 Date d'inscription : 22/02/2024
| Sujet: Re: Webern Mer 29 Mai 2024 - 3:07 | |
| - Golisande a écrit:
- Cela dit je suis en train d'écouter l'op.6 dans la version de Craft, et j'aime beaucoup ! (C'est effectivement "mieux" que Boulez et Sinopoli en un sens...)
La première intégrale ? Je me rends compte qu'en réalité je ne l'ai jamais écouté dans son entièreté ( la deuxième si par contre ), et mon commentaire se référait surtout aux oeuvres tardives, op 21/24/30 etc... Pour l'op 6, est-ce que tu as écouté Dohnanyi et Abbado ? Ce sont les deux versions que j'écoute le plus régulièrement. Elles ont en plus l'avantage d'utiliser la révision que Webern a réalisé dans les années 20 et qui est bien plus efficace que l'original. |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7894 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Webern Mer 29 Mai 2024 - 8:55 | |
| J'avais écouté plusieurs versions il y a quelque temps, et comme il n'y en a pas 36 je pense que j'ai dû entendre Dohnanyi et Abbado; mais es-tu sûr que le second a bien enregistré la version révisée ? Parce que sur ce disque-là : c'est celle de 1909, et je n'ai pas repéré d'autre enregistrement du chef... Pour Craft c'est en effet 1957 que j'ai écouté; c'est vintage à fond, ça gratouille même (le son du vinyle n'a pas été nettoyé) mais c'est effectivement d'une présence assez extraordinaire... Ça m'avait légèrement effrayé lors de ma première écoute, mais je vais réessayer les op. 21 et suivants car ça doit parfaitement leur convenir. |
| | | Prometeo Mélomane averti
Nombre de messages : 146 Date d'inscription : 22/02/2024
| Sujet: Re: Webern Mer 29 Mai 2024 - 9:55 | |
| - Golisande a écrit:
- J'avais écouté plusieurs versions il y a quelque temps, et comme il n'y en a pas 36 je pense que j'ai dû entendre Dohnanyi et Abbado; mais es-tu sûr que le second a bien enregistré la version révisée ? Parce que sur ce disque-là :
c'est celle de 1909, et je n'ai pas repéré d'autre enregistrement du chef...
Pour Craft c'est en effet 1957 que j'ai écouté; c'est vintage à fond, ça gratouille même (le son du vinyle n'a pas été nettoyé) mais c'est effectivement d'une présence assez extraordinaire... Ça m'avait légèrement effrayé lors de ma première écoute, mais je vais réessayer les op. 21 et suivants car ça doit parfaitement leur convenir. Je viens de réécouter cette version Abbado en suivant avec la partition de la version révisée et en effet ça ne la suit pas du tout... J'ai encore une fois parlé trop vite... en ne me fondant que sur mes souvenirs... excuse-moi En suivant avec cette partition, on voit que Webern a vraiment éclairci et simplifié l'écriture orchestrale dans cette seconde version, dans le meilleur sens possible. Il est allé directement à l'essentiel sans rien perdre de la substance de l'original. Je ne comprends pas trop le choix de beaucoup de chefs de prendre la première version ( surtout qu'elle demande un plus gros orchestre... ) ( Bon, au moins, ce qui reste toujours vrai est que cette version Abbado est excellente... La fin de la marche funèbre est impressionnante ! )
J'ai aussi réécouté le deuxième mouvement de l'op 21 dans la première version de Craft et non, non... La variation avec les ostinati de cordes et harpe par exemple est tellement précipitée qu'elle en devient presque méconnaissable, idem pour la suivante ( où les ralentis prescrits ne s'entendent quasiment pas alors qu'ils devraient vraiment former comme des "parenthèses" dans le flux musical )... |
| | | DerivedRelations Mélomane du dimanche
Nombre de messages : 45 Date d'inscription : 29/05/2024
| Sujet: Re: Webern Mer 29 Mai 2024 - 10:31 | |
| - Prometeo a écrit:
- Golisande a écrit:
- Cela dit je suis en train d'écouter l'op.6 dans la version de Craft, et j'aime beaucoup ! (C'est effectivement "mieux" que Boulez et Sinopoli en un sens...)
La première intégrale ? . Je trouve que cette intégrale ne ressemble à rien d'autre, au point que parfois on dirait franchement une autre musique. Ca devait être quelque chose d'enregistrer ça à cette époque. |
| | | Prestissimo Mélomaniaque
Nombre de messages : 671 Date d'inscription : 21/01/2024
| Sujet: Re: Webern Mer 29 Mai 2024 - 12:12 | |
| J'ai lu quelque part que les interprètes de la version Craft/Sony étaient des musiciens de sessions habitués à jouer sur les enregistrements de bandes originales de films hollywoodiens de la fin des années 50. Ça a dû leur faire très bizarre d'arriver sur un tel projet. Quoiqu'il en soit, c'est une bonne version analytique, idéale pour découvrir l'œuvre. |
| | | Prometeo Mélomane averti
Nombre de messages : 146 Date d'inscription : 22/02/2024
| Sujet: Re: Webern Mer 29 Mai 2024 - 14:14 | |
| Bon tout le monde semble être à l’unisson sur cette première intégrale Craft... quant à moi, je continue à en écouter des bouts et décidément je n’y arrive pas… En tout cas, c’est vraiment pas ce que je recommanderais pour une découverte. Voici le dernier mouvement de la 2ème cantate chez Craft I et Boulez II. Déjà Craft est littéralement deux fois plus rapide que Boulez ! Gelockert aus dem Schosse Craft I : https://www.youtube.com/watch?v=ruEP_13nTCg Gelockert aus dem Schosse Boulez II : https://www.youtube.com/watch?v=mkecMoW1114&list=OLAK5uy_krBBbmeQv4ajwMMldrpdFoMKC1qIOlY7Q&index=37 Mais surtout, je trouve la version Craft vraiment peu musicale… Ce n’est même pas phrasé, presque tout est écrit lié sur la partition ( ça devrait donc être très chanté non ? pas martelé comme on l’entend là ), certes ces phrasés ne sont pas reportés sur les parties vocales ( certainement à cause de la prosodie ) mais celles-ci doublant les parties instrumentales je ne vois pas pourquoi elles ne s’y appliqueraient pas. Ensuite il y a aucune nuance, alors que dans l’ensemble du mouvement Webern indique une progression pp vers f sur le pic de tessiture des sopranos puis sur la fin pp vorlöschend ( en s’éteignant )… Et puis le tempo évidemment… Il y a plein de furtives évocations tonales là-dedans, tout particulièrement sur la fin après le climax ( quand on les saisit c’est absolument magique, comme un vieux spectre qui resurgit malgré lui ) mais comment les percevoir pleinement à ce tempo frénétique ? ( Je sais Webern lui-même a demandé un tempo extrêmement rapide mais je ne fais plus confiance aux indications métronomiques de Webern… J'ai l'impression qu'il cherche toujours à mettre des bâtons dans les roues à sa musique... Parfois c’est le contraire, il indique à la fin des variations op 27 que le total de l’oeuvre devrait durer 10 minutes… Pour l’instant je n’ai pas entendu d’enregistrement aussi long… ) |
| | | Golisande Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7894 Age : 50 Localisation : jeudi Date d'inscription : 03/03/2011
| Sujet: Re: Webern Mar 4 Juin 2024 - 19:45 | |
| J'écoute l'op.6 dans les versions Dohnanyi, Abbado, Sinopoli et Boulez II, et c'est clairement la première que j'aime le moins (sans partition je n'entends pas de différence entre les versions 1909 et 1928, mais je trouve Dohnanyi beaucoup moins expressif, plus froid et distant que les trois autres)... Abbado en revanche est très coloré, d'une grande intensité, mais presque trop avenant — son approche mahléro-debussyste (selon les moments) édulcore un peu l'étrangeté de cette musique... Mes préférés restent donc Sinopoli et Boulez (avec une légère préférence pour le second qui réussit à concilier neutralité "objective" et expressivité, je trouve ça très impressionnant)... |
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