Haydn - œuvres pour voix avec accompagnement

J'ai failli intituler facétieusement ce titre Hob.X, XI, XII, XIII, XXIV.b, XXV, XXVI, XXXI, tant les contorsions du catalogue Hoboken me font toujours hésiter entre l'ahurissement et l'amusement, mais passons. Ce topic est pour parler, donc, des œuvres vocales de Haydn avec accompagnement : airs, lieder, canzonnettas, divertimenti, duos et trios avec baryton, chants et cantates pour voix seule avec instrument(s), arrangements de chants écossais et gallois... Une production assez diverse au sujet de laquelle seront bienvenues les considérations en priorité généralistes - mais aussi, à l'occasion, discographiques, parce que je ne crois pas qu'il y ait pléthore d'enregistrements de toute façon.



J'ai découvert récemment ce disque paru au printemps dernier sous le label Ambronay, et présentant un choix de lieder et de canzonettas anglaises autour de la cantate pour soprano avec piano Arianna a Naxos. Stéphanie d'Oustrac se montre à peu près parfaite, alliant la clarté, l'engagement, le "jeu" pour interpréter les textes. (Je serais plus réservé sur son accompagnatrice, mais le pianoforte doit jouer.) Malgré cela, je n'ai pas vraiment été séduit par ce répertoire à première écoute, je restais assez froid, extérieur à la chose. Mais mes sentiments ont évolué positivement à la 2e, et je suis progressivement rentré dans ces pièces. Je pense les apprécier plus encore si je persiste dans cette voie.

Sinon, un enregistrement qui fait mes délices depuis un bon moment déjà, l'intégrale des arrangements de folksongs écossaises, réalisée pour Brilliant par le Haydn Trio Eisenstadt avec Lorna Anderson et Jamie McDougall (six volumes séparés, réunis depuis en un seul). Un ensemble d'œuvres très étonnant : quand Haydn faisait du cross-over, c'était quand même autre qu'Alagna faisant du flamenco! La partition allie miraculeusement la spontanéité de ces mélodies avec la subtilité précieuse de l'écriture haydnienne pour trio (je trouve que Haydn fait bien mieux ici que Beethoven ensuite, d'après ce que j'ai entendu de sa contribution au genre), et les interprètes de cette version portent le tout avec beaucoup de fraîcheur.

Spoiler:

Détrompe-toi, il y a énormément d'enregistrements. Souvent en couplage, mais pas seulement.

N'étant pas spécialement fanatique de Haydn dans ce créneau, je n'ai pas trop le courage de me lancer, mais dans les oeuvres de langue anglaise, il y a des choses originales et assez belles, bien classique comme il te faut.

DavidLeMarrec a écrit:

bien classique comme il te faut.

Ça veut dire quoi cette petite perfidie, là ?

Pour le reste, dans le disque d'Oustrac / Zylberajch, je crois bien que j'ai été en effet un peu plus rapidement sensible aux canzonettas anglaises qu'aux lieder allemands...

Octavian a écrit:

Ça veut dire quoi cette petite perfidie, là ?

Ah non, pas du tout. Mais lorsqu'on s'intéresse au second XVIIIe, ça me paraît assez intéressant, plutôt personnel et avec une dose raisonnable de musique.

Après, si tu me demandes mon avis profond : laisse tomber Haydn et réécoute les folksongs de Bétove.

DavidLeMarrec a écrit:

Après, si tu me demandes mon avis profond : laisse tomber Haydn et réécoute les folksongs de Bétove.

Bien d'accord : je trouve également que ceux de Beethoven sont un cran supérieur. J'adore Haydn, pourtant, mais ici il y a moins d'originalité que chez "Bétove". Il est vrai que je suis loin d'avoir tout écouté parmi les quelque 300 arrangements de Haydn !

Les mélodies allemandes, peu connues par rapport aux canzonettes anglaises, méritent vraiment l'écoute. Dans ce domaine, je préfère Haydn à Beethoven, ou du moins je les place à égalité.

Une oeuvre presque inconnue, c'est sa grande cantate Applausus. Ces cantates Applausus étaient typiquement autrichiennes, des oeuvres de circonstance pour célébrer tel ou tel événement, et plusieurs compositeurs ont reçu des commandes. Ici il s'agit de la célébration du cinquantenaire des voeux de l'abbé du monastère cistercien de Zwett, composée par Haydn pour cette célébration ayant eu lieu le 17 avril 1768.

L'oeuvre est très longue (1 heure et 40 minutes). Cette durée comprend "seulement" 5 airs, un duo et un quatuor vocal, entrecoupés de récitatifs, plus un choeur final. C'est dire la durée des airs (da capo) et des récitatifs !

L'auteur du texte est inconnu, mais il s'agit très probablement d'un des pères du cloître. Elle est rédigée en latin, avec des personnages allégoriques nommés Temperentia, Prudentia, Justicia, Fortitudo et Theologia. En résumé, tous sont très heureux d'habiter dans la maison du jubilé et en déclament leur bonheur.

Une oeuvre éclatante qui, même si elle semble un peu longuette par moments, montre le génie de Haydn dans le genre cantate profane.
Les airs de Justitia (ténor) sont particulièrement remarquables : "O pii patres patria" avec clavecin obligé (une partie de clavecin solo qui doit être difficile), et "O beatus incolatus" avec violon obligé.