Philharmonie - Bartok BB Ligeti Kurtag - Pintscher 28/01/17

C'est samedi soir et apparemment ça ne remplit pas du tout.
Pour ma part je suis impatient de goûter au Château de Barbe-Bleue dans cette salle.

Samedi 28 janvier 2017
20:30

György Ligeti
San Francisco Polyphony

György Kurtág
Stèle

Béla Bartók
Le Château de Barbe-Bleue

Ensemble intercontemporain
Orchestre du Conservatoire de Paris
Matthias Pintscher, direction
Michelle DeYoung, Judith
John Relyea, Barbe-Bleue

Pas de stars. Une œuvre jouée tous les ans. L'Orchestre du Conservatoire (excellent, mais ça sonne « amateur » pour le grand public et trop peu prestigieux pour les snobs). Du contemporain. Forcément.

J'avais pas fait attention au fait qu'on jouait Ligeti et Kurtág avant, ça me motiverait assez, mais je suppose qu'il ne reste plus de places abordables.

(De toute façon, je dois aller voir Strindberg en italien ce soir-là…)


Ah oui, j'avais pas vu, c'est Pintscher qui dirige ! Deal breaker. Quand on peut rendre l'Oiseau de feu terne, on peut tout abîmer, je crois.

DavidLeMarrec a écrit:

J'avais pas fait attention au fait qu'on jouait Ligeti et Kurtág avant, ça me motiverait assez, mais je suppose qu'il ne reste plus de places abordables.

Non, on peut prendre toutes les places qu'on veut dans toutes les catégories, c'en est presque effrayant par rapport à tous les concerts courants.

Et pour Pintscher, je ne serais pas aussi définitif que toi, je viens d'entendre la Mer de Debussy qu'il a dirigée à Berlin, et c'est pas mal du tout.

Oh, je ne prétends pas être définitif, simplement, rendre l'Oiseau ni tendu, ni dansant, ni chatoyant, j'y voyais une forme d'exploit. (En plus, il avait programmé une de ses propres œuvres, et en étant gentil on peut dire que ce n'est pas le visionnaire du siècle qui s'annonce.)

D'ordinaire, il ne dirige pas beaucoup de musique du répertoire, donc on s'en rend moins compte (et ce sont des musiques qui laissent en général moins de liberté, aussi, très écrites). Donc personnellement, je me suis dit qu'on ne m'y reprendrait pas. Ça ne veut pas dire qu'il est mauvais, ni qu'il soit mauvais tout le temps.

De toute façon, je dois faire des choix : comme il est hors de question que je rate le Ropartz de Stéphanie Moraly jeudi, ni le double concert Bauer-Immerseel / Gerhaher-Huber vendredi, c'est un peu ma seule solution pour voir le Strindberg italien…

Mais oui, c'est un beau programme, bien bâti, avec ces deux pièces très atmosphériques pour ouvrir un opéra qui est, lui aussi, tout en chatoyances mystérieuses.

DavidLeMarrec a écrit:

Oh, je ne prétends pas être définitif, simplement, rendre l'Oiseau ni tendu, ni dansant, ni chatoyant, j'y voyais une forme d'exploit. (En plus, il avait programmé une de ses propres œuvres, et en étant gentil on peut dire que ce n'est pas le visionnaire du siècle qui s'annonce.)

D'ordinaire, il ne dirige pas beaucoup de musique du répertoire, donc on s'en rend moins compte (et ce sont des musiques qui laissent en général moins de liberté, aussi, très écrites). Donc personnellement, je me suis dit qu'on ne m'y reprendrait pas. Ça ne veut pas dire qu'il est mauvais, ni qu'il soit mauvais tout le temps.

Un chef incompétent qui a juste réussi à donner un immense Erwartung l'an dernier avec l'Orchestre de Paris.

Sinon, sur qui joue quoi, d'après ce que je lis sur le site de la Philharmonie et dans le programme publié, il s'agit d'un seul orchestre qui va jouer l'ensemble du programme, constitué de l'orchestre du Conservatoire de Paris renforcé d'une dizaine de solistes de l'Ensemble InterContemporain.

Très beau concert, et original pour sa première partie.
Salle finalement très bien remplie. (au 9/10 environ)

Je n'avais jamais entendu en concert le Ligeti et le Kurtag, et j'ai été impressionné bien que ce ne soient pas des oeuvres que j'adore au disque.

Stele notamment m'intéresse vraiment peu en enregistrement, là c'était super de voir cet orchestre géant, avec les tubas wagnériens, la clarinette contrebasse, etc...
Assez saisissant de bout en bout.
San Francisco Polyphony, un peu pareil, je trouve ça assez peu expressif par rapport à Atmosphères ou Lontano, mais c'est chouette en live. (il n'y a que le passage en "grigris" de claviers qui j'ai été tout près de trouver un peu lassant)
Bravo aux étudiants du CNSM pour cette première partie exigeante.

J'ai eu un peu peur au début du Château de Barbe-Bleue, surtout à cause des cordes pas nettes, pas en place, toujours quelqu'un qui part trop tôt ou qui laisse trop traîner à un autre moment... en plus l'acoustique de la salle a tendance à rajouter du flou si les choses ne sont pas bien nettes.
Heureusement ça s'est amélioré par la suite, même si ça n'a pas été impeccable de bout en bout (un des plus beaux passages gâchés par un corniste décalé), c'était très bien mené par Pintscher, dans une direction plutôt tendue, et le son de l'orchestre était très beau à tous les pupitres.
Bon, ils manquent encore surement de discipline et d'expérience de l'orchestre, mais sinon on se rapproche évidemment déjà du haut niveau.
Dommage pour la Judith de Michelle DeYoung, pour moi vraiment à côté de la plaque ici, beaucoup trop opératique, souvent dégoulinante rythmiquement, un nombre incalculable de rythmes amollis, ralentis, de notes trop tenues, vibrato assez important et jamais varié... très éloigné de mon idéal dans cette musique et dans ce rôle. (sans compter qu'elle était parfois couverte par l'orchestre)
Magnifique contre-ut, tenu 3 mesures au lieu d'une blanche, mais bon.
Bien que dans une optique très lyrique aussi, le Barbe-Bleue de Relyea était finalement bien meilleur et plus sobre.

Xavier a écrit:

Magnifique contre-ut, tenu 3 mesures au lieu d'une blanche, mais bon.

Décidément, ce n'est pas demain la veille qu'on verra Xavier appeler les chanteurs par leurs prénoms...

Ceci dit, je ne l'ai pas regretté, ça fonctionne toujours bien quand cette note est tenue assez longtemps, c'est impressionnant et sur ce moment précis ça ne me gêne vraiment pas.

Dans la première partie, j'ai préféré la pièce de Kurtag, très séduisante, où l'on entendait des réminiscences de Bartok. C'est même la première fois que j'accroche à un oeuvre de ce compositeur, un morceau de plus de 10 minutes très abordable, moi qui n'avais le souvenir que de pièces minimalistes durant 2-3 minutes maximum.

J'ai beaucoup mieux entendu l'orchestre de Barbe Bleue que la saison dernière à Garnier, où de ma place en fond de baignoire, l'orchestre sonnait très étouffé.
Je les ai trouvé très bons et ai beaucoup aimé John Relyea.
Seul bémol, Michelle DeYoung, très éloignée aussi de mon idéal (j'avais réécouté l'enregistrement de Boulez avec Tatiana Troyanos avant de venir), voix trop lourde chargée de vibrato (Xavier en parle techniquement beaucoup mieux que moi), rien de catastrophique quand même.
Globalement, une bonne soirée.

En effet, Troyanos est précisément l'inverse de ce que fait DeYoung.

Et oui, un des intérêts de cette soirée, c'était de profiter de cet orchestre bartokien à la Philharmonie, j'en ai trop peu parlé, mais c'est quand même un régal.

Chouette de lire ça... Je vais justement entendre pour la première fois en salle cette œuvre cette année (également en version de concert)... J'ai toujours trouvé Bartok un peu compliqué pour moi, mais Barbe-Bleue, j'adore... L'orchestre est si beau...
Ce sera avec Nadja Michael et Mikhail Petrenko... (à Liège).

Voilà un concert qui tranche  : un orchestre constitué à l'occasion qui réussit à avoir un très beau son, un programme original qui bouscule les habitudes et qui mêle le très connu Chateau de Barbe bleu avec des pièces assez confidentielles et un public très nombreux parmi lequel j'ai vu beaucoup de jeunes.

J'y allai pour le Bartok avant tout et cette musique est vraiment passionnante.

A la fin j'ai eu le sentiment que les trois pièces ménageaient chacune un espace esthétique, une recherche de la beauté et la plénitude du son, du timbre, une verticalité qui produisait une cohérence qui ne m'avait pas paru évident à la lecture du programme.

Une très belle réussite

Moi aussi je suis preneur de cette recette: un orchestre d'étudiants de très bon niveau, ou bien un orchestre pas forcément très prestigieux mais enthousiaste, des oeuvres exigeantes et originales, et un prix des places plus bas que d'habitude!

nugava a écrit:

Chouette de lire ça... Je vais justement entendre pour la première fois en salle cette œuvre cette année (également en version de concert)... J'ai toujours trouvé Bartok un peu compliqué pour moi, mais Barbe-Bleue, j'adore... L'orchestre est si beau...
Ce sera avec Nadja Michael et Mikhail Petrenko... (à Liège).

J'y serai aussi… Vivement le 10 mars!

Mêmes impressions sur l'orchestre pas très précis mais finalement séduisant. Sauf les cuivres en coulisse (pour la 5e porte), qui font les clowns pour leurs voisins d'en face en attendant leur entrée, sans se douter qu'on les voit depuis les places sur les côtés. La dernière fois que j'avais vu l'orchestre du Conservatoire, j'avais justement trouvé leur décontraction sympathique, mais cette fois-ci, c'était simplement idiot et irrespectueux pour leurs collègues qui devaient les voir aussi.

Direction très convaincante de Pintscher, énergique, rendant bien les variations de la tension et l'arc général. Les voix étaient certes assez lourdes et l'expression emphatique, mais elles avaient l'avantage de bien passer l'orchestre, ce qui n'est pas évident dans cette disposition de concert.

Pas compris grand chose au Ligeti, mais j'ai beaucoup admiré les flamboyances de Stèle, effectivement proches de Bartók, et aussi de Berg.

(Avec un peu de retard,) très beau concert en effet : aucun moment d'ennui dans la première partie (deux pièces très contrastées mais aussi captivantes l'une que l'autre dans ces conditions, même si en disque j'écouterais plus volontiers le Kurtág que le Ligeti), et surtout un des plus beaux Barbe-Bleues que j'aie jamais entendus — d'autant que, si imperfection technique de l'orchestre il y avait, à ce niveau-là j'ai plutôt tendance à trouver que c'est un plus.

Il y a effectivement mieux en Judit (Troyanos clairement, oui), mais si j'aie eu un peu peur au tout début, De Young ne m'a pas finalement pas du tout gêné (je ne savais pas que le contre-ut était censé ne durer qu'une blanche, mais je trouve ça bien trop court )...
En revanche, elle était d'autant plus souvent couverte par l'orchestre que j'étais placé tout en haut à gauche de la scène ; toutefois globalement je n'ai rien eu à redire sur l'acoustique.

Et je ne saurais dire que du bien du Kékszakállú "wotanesque" de Relyea – si ce n'est à la rigueur qu'il sonne un peu trop "gentil", mais je ne vois pas d'option qui ne puisse pas se défendre dans ce rôle si elle est bien assumée et réalisée, ce qui était largement le cas.

( ) Oui, très beau concert, 'ai beaucoup apprécié la 1e partie !