Votre déception du jour... (2)

Le plan du quadragénaire coincé dans un mariage à l'agonie depuis des années qui voit soudain débarquer dans son bureau une toute nouvelle collègue, bardée de diplômes, douce, belle, 10 ans plus jeune que lui. Une nouvelle collègue qui commence à venir lui rendre visite dans son bureau tous les jours et y reste de plus en plus longtemps. Une nouvelle collègue qui lui envoie des e-mails et des textos en soirée et le weekend, arrive au boulot tôt pour lui laisser des petits mots sur son clavier, lui apporte un lunch surprise qu'elle a préparé exactement à son goût. Une nouvelle collègue qui l'invite à passer chez elle après le travail...

Que reste-t-il de tout ça plus de deux ans et demi après ?

- Un divorce, évidemment
- Deux filles que je n'ai plus vues depuis presque deux ans et qui n'ont plus trop envie de me parler
- Un amour qui, après un décollage merveilleux, n'a jamais pu prendre pleinement son envol et a vite entamé une lente, si lente descente à l'issue prévisible, si prévisible.

Le retour sur terre a eu lieu il y a deux semaines. Même pas un bon gros crash bien cathartique, non. Juste un mollasson plop-plop-plop, comme si de rien n'était. Comme si ces deux ans et demi n'avait été qu'un souffle léger.

Je me dis que tout ceci est bien futile. Alors que des milliards de gens se cloîtraient chez eux et que des centaines de milliers d'autres mourraient, elle et moi, on était bien contents d'être confinés ensemble pendant la première vague. Égoïsme ordinaire des nouveaux amants.

Ce n'est pas le divorce qui est difficile. Il avait déjà été décidé quelques semaines avant que ma collègue n'entre dans ma vie, même si mener en parallèle la fin d'un mariage et le début d'un autre amour comme je l'ai fait a provoqué des scènes pénibles.

Ce n'est pas non plus la fin de cette histoire qui me trouble. Après 6 mois ensemble, j'avais déjà compris qu'on n'allait probablement pas durer. On ne se disputait jamais, mais quelque chose de fondamental clochait. J'avais déjà fait mon deuil de la relation avant qu'elle ne finisse. Et puis, on s'est quittés en se demandant pardon de ne pas avoir été à la hauteur de ce qu'on avait cru, et se disant "Je t'aime".

Ce qui m'attriste, c'est la fin de l'illusion que cette rencontre avait fait naître. Arrivé au milieu de la quarantaine et avec un divorce initié, je n'aurais jamais imaginé vivre quelque chose d'aussi intense. Retrouver quelqu'un, oui. Mais cette impression que soudain la vie me donnait tout simplement une seconde chance, avec une femme exceptionnelle à bien des égards, ça, je ne m'y attendais pas. Et puis, l'exaltation confiante de nos premiers mois a laissé la place à la distance et au doute. On a tenu deux ans de plus parce qu'il y avait beaucoup de tendresse entre nous, mais la conclusion était déjà écrite.

J'ai eu mes filles au téléphone il y a quelques jours. Ce sera bientôt l'anniversaire de la petite. Je leur ai proposé de venir manger des pizzas chez moi. Elles étaient surprises. Mais contentes aussi, je crois.