Autour de la musique classique Le but de ce forum est d'être un espace dédié principalement à la musique classique sous toutes ses périodes, mais aussi ouvert à d'autres genres. |
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| Musique et dissonance | |
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Auteur | Message |
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Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Jeu 27 Nov 2008 - 21:53 | |
| - sud273 a écrit:
- Luc 06 a écrit:
Une musique sans tension contredit le principe même de la vie qui repose sur des rapports d'antagonismes, de compétition et de complémentarité ... Nietszche est l'un des premiers à avoir créé un lien entre l'énergie sexuelle et la puissance artistique. Qui dit énergie dit à priori tension intérieure. Le loup fascisant sort du bois, oui compétition, guerre et suprématie... triste réalité que celle-là, et o combien éloignée de l'harmonie! Triste réalité peut-être mais consubstantiel de l'harmonie. L'homéostasie du corps humain fonctionne de la même façon ainsi que tous les organismes sociaux. Conseil de lecture : la méthode d'Edgar Morin Le loup fascisant, c'est moi ou Nietzsche? |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Jeu 27 Nov 2008 - 22:05 | |
| J'aime beaucoup la musique sérielle. Pas par snobisme comme tu le sous-entends dans ta réponse à Spiritus. Et tu cherche à réduire l'atonalité et ses avatars à une escroquerie qui permet de "devenir célèbre". Tes insinuations sont pénibles. Tu n'aimes pas, certes, tu n'arrives visiblement pas à ressentir la beauté et le plaisir que cette musique peut provoquer. Dis-le simplement au lieu de le rationnaliser de façon maniérée et de chercher à démontrer par A + B que notre cerveau n'est certainement pas fait pour ça. |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Jeu 27 Nov 2008 - 22:49 | |
| - natrav a écrit:
- J'aime beaucoup la musique sérielle. Pas par snobisme comme tu le sous-entends dans ta réponse à Spiritus. Et tu cherche à réduire l'atonalité et ses avatars à une escroquerie qui permet de "devenir célèbre". Tes insinuations sont pénibles. Tu n'aimes pas, certes, tu n'arrives visiblement pas à ressentir la beauté et le plaisir que cette musique peut provoquer. Dis-le simplement au lieu de le rationnaliser de façon maniérée et de chercher à démontrer par A + B que notre cerveau n'est certainement pas fait pour ça.
Ai-je parler d'escroquerie? Non, seulement d'originalité. La démarche sérielle et plus largement l'atonalité ne sont pas une démarche d'escroc d'autant plus que je considère Schoënberg comme un compositeur majeur qui aura marqué le 20ème siècle. En plus, dans un précédent commentaire, j'ai précisé que ma démarche avait évolué et j'y prenais un certain plaisir. Tu sais ce que j'écoute en ce moment .... le concerto pour violon de Schoënberg. Un partout, la balle au centre. Oui, je cherche à rationnaliser le pourquoi de cette désaffection, à la comprendre. Et que cela te plaise ou non!! Si être maniéré, c'est utiliser un langage précis (ou qui tente de l'être) alors oui, j'accepte ta remarque car je préfère être précis plutôt qu'approximatif. Je travaille avec des neurologues, des neuro-cognitivistes à longueur de journées, il est normal que cela déteigne sur mon vocabulaire. Pour éviter des approximations et éviter des jugements erronés, il est toujours préférable de ne pas préjuger de la pensée des autres en leur attribuant de fausses arrières pensées. C'est justement pour éviter les sous-entendus que j'essaie d'être précis. Alors merci de ne pas m'en attribuer et de projeter sur mes propos, ta propre façon de raisonner par sous-entendus. De plus, la majorité des propos que j'ai rapportés sont une synthèse d'un travail de lecture, d'études et de réflexion qui reposent sur un corpus d'ouvrages dont la liste serait trop longue à exposer ici (génétique, neuro-cognition, phénoménologie musicale, ethno-musicologie, psychologie de la musique, histoire de la musique, philosophie et j'en passe....) Je ne cherche pas la guerre, je suis un pacifique qui souhaite simplement valider des hypothèses de travail. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Musique et dissonance Jeu 27 Nov 2008 - 22:55 | |
| je pense que tes hypothèses de travail sont erronées, ou plutôt elles prennent comme acquis le résultat de la démonstration. Je ne vois pas qu'il y ait une quelconque désaffection pour la musique atonale ou sérielle, c'est uniquement dans ta tête que ça se passe, parce que tu as déjà décidé que c'était le cas. La bibliothèque que tu sembles apporter comme un justificatif absolu t'explique peut-être ta perception de la musique, mais elle est conditionnée par le poids culturel de ses présupposés; Je conçois que tu ne puisses pas ressentir ni penser autrement, mais tu fais de ton exemple une généralisation visiblement non conforme à d'autres perceptions de la réalité. Reprenons à la base: "Le non-être est" |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Jeu 27 Nov 2008 - 23:28 | |
| - sud273 a écrit:
- je pense que tes hypothèses de travail sont erronées, ou plutôt elles prennent comme acquis le résultat de la démonstration.
Je ne vois pas qu'il y ait une quelconque désaffection pour la musique atonale ou sérielle, c'est uniquement dans ta tête que ça se passe, parce que tu as déjà décidé que c'était le cas. La bibliothèque que tu sembles apporter comme un justificatif absolu t'explique peut-être ta perception de la musique, mais elle est conditionnée par le poids culturel de ses présupposés; Je conçois que tu ne puisses pas ressentir ni penser autrement, mais tu fais de ton exemple une généralisation visiblement non conforme à d'autres perceptions de la réalité. Reprenons à la base: "Le non-être est" J'accepte tout à fait l'idée qu'il puisse y avoir d'autres perceptions de la réalité, c'est une question de proportion. Il y a du général et du particulier. J'accepte volontiers le particulier mais il me paraît intéressant de le confronter au général et de chercher à comprendre les différences qui peuvent les expliquer. Quant à mes présupposés culturels, c'est bien pour les éviter que je m'intéresse à l'ethno-musicologie qui tente elle-même de les évacuer par une approche méthodologique rigoureuse. Et toi-même, as tu pris du recul par rapport aux tiens?? Quant à la désaffection, il suffit de disposer de quelques statistiques sur la fréquentation des concerts ou des ventes de disques (le rayon de ce que je vais appeler par raccourci "musique contemporaine" est bien fourni et donc disponible pour un public intéressé. Il suffit d'aller à la Fnac de la rue de Rennes pour le voir). Je comprends tout à fait que vous vouliez défendre vos points de vue mais comme tu me l'as reproché, vous devez, vous aussi, arrêter de penser que votre approche de la musique est partagée par tous. Tant mieux si vous aimez la musique sérielle et atonale (moi aussi, j'apprécie la musique atonale), il n'y a aucune honte à cela et loin de moi l'idée d'émettre un quelconque jugement de valeur par rapport à ça. |
| | | Stanlea Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5834 Age : 66 Localisation : Fly me to the moon Date d'inscription : 22/02/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 4:34 | |
| Alors relis-toi soigneusement : à ton avis, comment peut se lire ta démarche ? Ta sincérité n'est pas en cause, simplement, comme dit Sud, ce que tu poses au départ t'amène inévitablement à une conclusion prévisible. Peut-être y a-t-il d'autres approches. En tout cas le sujet est toujours intéressant. |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 9:45 | |
| - Stanlea a écrit:
- Alors relis-toi soigneusement : à ton avis, comment peut se lire ta démarche ? Ta sincérité n'est pas en cause, simplement, comme dit Sud, ce que tu poses au départ t'amène inévitablement à une conclusion prévisible. Peut-être y a-t-il d'autres approches. En tout cas le sujet est toujours intéressant.
Merci Stanlea. En effet, le sujet est intéressant et soulève toujours des polémiques. Je ne saurai trop vous conseiller la lecture d'un article de synthèse paru dans l'encyclopédie "Musiques : une encyclopédie du 21ème siècle" qui est constituée de 5 tomes, éditée par Actes Sud sous la direction de Jean-Jacques Nattiez. Vous trouverez cet article dans le tome 5 (L'unité de la musique) pages 337 à 398 et intitulé "Typologies et universaux" co-écrits par Jean Molino et Jean-Jacques Nattiez (tous les 2, éminents musicologues). Cet article fait un tour d'horizon de la littérature sur ce sujet (c'est une sorte de méta-analyse). Je ne vais pas le résumer ici mais il se trouve en substance dans mes précédents commentaires. Je cite celui-ci plus que tout autre car il fait véritablement une synthèse de cette problématique. Je vous livre la conclusion : "On pourrait ainsi mieux comprendre que la musique ait un fondement dans notre nature - c'est ce qui explique son universalité et son unité - mais qu'elle soit, dès ses origines, riche de toutes les possibilités qu'exploiteront les diverses cultures."La musique est sous la dépendance à la fois de la nature (c'est cela que vous avez un peu de difficultés à accepter) et de la culture. Nous sommes ici dans une pensée non pas dissociative mais associative qui tente d'expliquer le phénomène musical à partir de ces deux composantes Nature/culture. Être d'un côté ou de l'autre est une erreur et ne permet pas de comprendre la globalité du phénomène. Il faut prendre de la hauteur et essayer de faire une synthèse. Ce constat d'une double composante intègre le double principe Unité/diversité. Du côté de la nature, on apprend quoi : que notre système cérébral (commun à l'espèce humaine) est limité par un certain nombre de contraintes acoustiques, perceptives et cognitives (exemple simple et personnel : peut on avoir une représentation précise de l'infini?). Parmi ces limites, j'en cite deux (p377) " les capacités de discrimination de l'oreille humaine expliquent que l'on ne trouve pas d'échelles réelles - par opposition à des échelles purement théoriques - dans lesquelles l'écart entre 2 hauteurs structurelles soit inférieur au demi-ton. Il semble que le nombre d'éléments que l'esprit humain soit capable de discriminer s'explique selon le "nombre magique 7, plus ou moins 2", popularisé par le psychologue George Miller (1956), et cela semble régir non seulement le nombre de hauteurs dans une échelle, mais aussi le nombre de motifs dans les phrases, de phrases dans les thèmes, de thèmes dans les sections, etc... (Meyer 1998)..." Je suis allé moi-même vérifier la véracité de ces propos et je n'ai pu que les valider. Néanmoins, il convient de les moduler par les capacités d'adaptation de notre cerveau du fait de sa plasticité ce qui rend possible l'évolution de nos capacités cognitives et perceptives. Du côté de la culture et on le voit notamment avec les échelles, toutes ne sont pas équivalentes à notre système tempérée et utilisent pour certaines des 3/4 de tons. C'est une variable culturelle. Il faudrait y rajouter les variables en rapport avec l'esthétique, les timbres sous la dépendance des instruments utilisés. Il y a des variables affectives également ; un raga indien, une mélodie chinoise ou arabe risquent avoir mois d'impact émotif sur nous et vice versa par rapport aux oeuvres occidentales. Mon propos n'est pas de dénigrer l'atonalité ou le sérialisme (si vous l'avez compris ainsi, c'est que je me suis mal exprimé et je vous prie de m'en excuser) mais d'essayer de comprendre à partir d'une multitude de variables pourquoi cette musique (à laquelle, je le répète encore, je suis aussi sensible quoiqu'un peu moins au sérialisme) n'a pas la réussite qu'elle mériterait. Je suis prêt à modifier mon point de vue si quelqu'un m'apporte une preuve formelle, scientifiquement et méthodologiquement rigoureuse, du contraire. L'attirance pour ces musiques reste réservée à une minorité de personnes mais rien n'interdit de penser (mais cela reste une hypothèse) que le particulier d'aujourd'hui deviendra une généralité demain. D'une façon générale, les évolutions ne peuvent se faire que par étapes progressives. L'atonalité de Bartok va plus dans ce sens que le sérialisme dodécaphonique, beaucoup plus radical dans son approche du phénomène sonore.
Dernière édition par Luc 06 le Ven 28 Nov 2008 - 16:55, édité 1 fois |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 10:50 | |
| - Citation :
- que le particulier d'aujourd'hui deviendra une généralité demain
Donc on sera forcé d'aimer le contemporain ? |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 12:49 | |
| Quelques remarques de Charles Ives sur la tonalité et la micro-tonalité: « J’avais entendu dans mon enfance certaines expériences de mon père (avec des verres d’eau accordés dans des intervalles plus ou moins larges que le demi-ton) et certaines divisions du ton m’étaient familières. Dans la salle du catéchisme à l’Eglise Centrale Presbytérienne de New York, il y avait deux pianos qui se trouvaient accordés à des hauteurs variant à peu près d’un quart de ton, et j’essayai d’y plaquer simultanément quelques accords. Mais l’un de ces pianos fut déplacé avant que je puisse vraiment y habituer mes oreilles. »(Scrapbook) Premières pièces en quart de ton d'Ives vers 1912.
« Père répondit : « Dis à Parker que toute dissonnance n’appelle pas forcément une résolution, si on n’en éprouve pas le besoin, pas plus qu’il n’est obligatoire de tresser la queue d’un cheval simplement parce que c’est la mode en vogue » (Memos 116) « Pourquoi devrait-on se débarrasser définitivement de la tonalité ? je ne vois pas. Pourquoi devrait-elle être constamment présente ? je ne vois pas non plus. A mon sens, cela dépend… de ce qu’on essaye de faire, de l’état d’esprit, du moment de la journée ou d’autres accidents de la vie quotidienne » (Essays 117) « Dans quelques siècles, quand les enfants des écoles siffleront des mélodies populaires en quart de ton –quand l’échelle diatonique sera aussi obsolète que l’échelle pentatonique l’est aujourd’hui- peut-être ces expériences d’avant-garde seront-elle aussi facilement reconnues qu’aisément exprimées. Mais peut-être la musique n’est-elle pas destinée à satisfaire la bizarre finitude de l’humain. Peut-être est-il préférable d’espérer que la musique demeurera un langage transcendental, au sens le plus extravagant du terme ».(Essays 71). |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 16:01 | |
| Artusi écrivait en 1600:
"Les sens sont devenus fous. Les nouvelles règles qui sont maintenant en usage [la seconde pratique de Monteverdi et ses chromatismes] et les nouveaux modes qui en découlent font que la musique moderne est désagréable à l'oreille. On entend une diversité de sons, un mélange de voix, une rumeur d'harmonies insupportables aux sens. Franchement, ces compositions sont contraires à tout ce qu'il y a de beau et de bon dans l'art de la musique; elles sont intolérables à l'ouïe et la blessent au lieu de la charmer"
Monteverdi choquait comme l'atonalité choque encore aujourd'hui... L'histoire se répète... Monteverdi s'est vendu comme aucun autre compositeur de son temps. Aujourd'hui il est rare et le madrigal est réservé à une élite de gens tordus. Mais il est sans doute moins répandu encore que la musique atonale. Mais on peut reprendre les termes d'Artusi et élaborer des théories similaires en partant du postulat que c'est une musique qui n'a pas un grand public. Je ne vois pas comment on pourrait définir la musique comme objet d'étude extérieur à l'homme et qui devrait répondre à son oreille d'un point de vue physiologique selon des critères acoustiques précis alors qu'elle n'est que l'expression de sa propre pensée, la création d'un homme et de son oreille, comme si elle était susceptible d'être autre que ce qu'elle est. Pour cela il serait intéressant d'écouter la musique martienne, on pourrait juger alors des limites de la musique terrienne. Le serpent se mord la queue. Elle n'est que l'expression de la culture je crois et pas une production divine capable ou non de tomber dans l'oreille selon ses qualités. Les "pires" productions absconses de Stockhausen ou de Webern seront toujours des oeuvres d'art totalement compréhensibles à un autre être humain, même s'il n'y en a qu'un seul, c'est la démonstration que ces musiques sont faites pour le psychisme (humain). |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 18:40 | |
| Heureux de constater que les esprits s'échauffent moins et que le débat prend une tournure plus "apaisée". - natrav a écrit:
Je ne vois pas comment on pourrait définir la musique comme objet d'étude extérieur à l'homme et qui devrait répondre à son oreille d'un point de vue physiologique selon des critères acoustiques précis alors qu'elle n'est que l'expression de sa propre pensée, la création d'un homme et de son oreille, comme si elle était susceptible d'être autre que ce qu'elle est. Tout ce que nous produisons, faisons, pensons, est le fruit d'une pensée dont le substrat est notre cerveau. En ce sens, je suis d'accord avec toi. Mais rien n'empêche une pensée de produire des choses qui soient incohérentes ou inexploitables. Notre imagination est excessivement fertile et peut dessiner des animaux fantasmagoriques qui n'ont aucune réalité, des personnages à 2 ou 3 têtes et bâtir des théories qui ne reposent sur aucun fondement réel. La théorie musicale n'échappe pas à cette imagination d'où la création d'échelles théoriques ou conceptuelles créées indépendamment de nos possibilités perceptives. N'importe qui peut écrire une musique sans l'entendre, il suffit de prendre une partition, de poser des notes les unes derrière les autres avec n'importe quel rythme, tu auras ainsi une oeuvre musicale mais sera t'elle pour autant audible?. Mon exemple est caricatural mais se rapproche de la "loi de la série" qui répond avant tout à un procédé arithmétique d'agencements des notes et des phrases musicales puis avec Messiaen, des tempo, des rythmes, des timbres etc... Une musique est toujours le produit d'une pensée mais pas nécessairement d'une oreille et autre problème sur lequel insiste Ansermet (les fondements de la musique dans la conscience humaine p 839 Coll Bouquins), elle est nécessairement le produit d'une intelligence mais pas toujours d'une affectivité. Merci Mr Descartes qui est en partie à l'origine de cette dichotomie entre raison et émotion. Or, la musique a pour objectif de susciter des émotions, pour utiliser un langage plus trivial de parler au coeur avant de s'adresser à la raison. Or, l'écriture dodécaphonique sérielle (ce qui n'est pas obligatoirement le cas avec l'atonalité) repose plus, du fait de ses impératifs d'écriture, sur une conception hyper rationnelle indépendamment de tout contexte affectif. Schoënberg, contrairement à Milhaud l'un des maîtres de la polytonalité, ne se posait pas la question de savoir si c'était beau mais conforme à sa théorie. C'est pour cela qu'Ansermet et d'autres insistent sur l'importance de partir de la musique et la perception que nous en avons plutôt que de lui imposer les lois de notre intelligence, lois théoriques. Un cheval reste un cheval et même si ton intelligence imagine qu'il puisse sauter des obstacles de 4 ou 5 mètres de hauteur, il est peu probable qu'il y réussisse car il a ses limites comme nous avons les nôtres. - natrav a écrit:
Elle n'est que l'expression de la culture je crois et pas une production divine capable ou non de tomber dans l'oreille selon ses qualités. Oui, la musique est une expression de la culture mais en relation avec notre nature. Elle n'est pas extérieure à nous et certainement pas le fruit d'une quelconque divinité. Le croire serait dénier aux hommes leurs possibilités intellectuelles et les beautés de notre humanité qu'ils magnifient avec leurs oeuvres. Par contre ce qui peut arriver, comme expliqué plus haut, c'est une écriture coupée de ses racines "naturelles" par excès d'abstraction ou d'intellectualisme. - natrav a écrit:
- Les "pires" productions absconses de Stockhausen ou de Webern seront toujours des oeuvres d'art totalement compréhensibles à un autre être humain, même s'il n'y en a qu'un seul, c'est la démonstration que ces musiques sont faites pour le psychisme (humain).
Excuse moi mais je crois qu'il y a une petite incohérence dans tes propos. "Un" n'est pas "Tous". Le particulier est un complément au général mais il ne saurait se substituer à lui. Croire que parce qu'il y en aurait "un", cela s'appliquerait à "tous" est un raccourci un peu rapide. La nature est diverse et c'est ce qui rend la vie si belle et si éblouissante. Les perceptions peuvent être multiples, ce qui explique pourquoi certains prennent du plaisir à écouter une oeuvre sérielle ou atonale et d'autres des oeuvres à la facture plus classique. Néanmoins, derrière cette multiplicité, se trouvent des tendances générales ou lourdes parce que partagées par une majorité et d'autres particulières, plus minoritaires. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 19:21 | |
| - Citation :
- [quote="Luc 06"] N'importe qui peut écrire une musique sans l'entendre, il suffit de prendre une partition, de poser des notes les unes derrière les autres avec n'importe quel rythme, tu auras ainsi une oeuvre musicale mais sera t'elle pour autant audible?. Mon exemple est caricatural mais se rapproche de la "loi de la série" qui répond avant tout à un procédé arithmétique d'agencements des notes et des phrases musicales puis avec Messiaen, des tempo, des rythmes, des timbres etc...
C'est de l'art conceptuel, en ça rien de bien intéressant mais susceptible d'émouvoir ceux pour qui l'idée est plus passionnante que le résultat. - Citation :
Une musique est toujours le produit d'une pensée mais pas nécessairement d'une oreille et autre problème sur lequel insiste Ansermet (les fondements de la musique dans la conscience humaine p 839 Coll Bouquins), elle est nécessairement le produit d'une intelligence mais pas toujours d'une affectivité. Tout ça est bien relatif et subjectif, comment juger de l'affectivité d'une composition et de sa capacité à émouvoir ? - Citation :
- Or, la musique a pour objectif de susciter des émotions, pour utiliser un langage plus trivial de parler au coeur avant de s'adresser à la raison.
Qui a décidé ça ? S'il me plaît plus à moi de jouir (et d'être ému) des structures complexes des fugues de Bach ou des séries de Webern que du résultat expressif ? Pourquoi vouloir réduire la musique à ses aspects particuliers "affectifs" du coeur (entre nous je ne vois pas ce que cet organe vient faire dans cette galère ) - Citation :
- Or, l'écriture dodécaphonique sérielle (ce qui n'est pas obligatoirement le cas avec l'atonalité) repose plus, du fait de ses impératifs d'écriture, sur une conception hyper rationnelle indépendamment de tout contexte affectif. Schoënberg, contrairement à Milhaud l'un des maîtres de la polytonalité, ne se posait pas la question de savoir si c'était beau mais conforme à sa théorie.
Ce qu'uil dit est une chose, ce qu'il compose une autre, tu parles beaucoup des livres et peu de musique, écoute les florentins qui disaient composer en respectant strictement les théories platoniciennes, blabla ! Ils truandent ces soit-disantes lois immuables pour lancer le madrigal et la monodie naissante dans l'aventure de l'opéra. Les musiciens écrivent beaucoup de conneries. - Citation :
- C'est pour cela qu'Ansermet et d'autres insistent sur l'importance de partir de la musique et la perception que nous en avons plutôt que de lui imposer les lois de notre intelligence, lois théoriques. Un cheval reste un cheval et même si ton intelligence imagine qu'il puisse sauter des obstacles de 4 ou 5 mètres de hauteur, il est peu probable qu'il y réussisse car il a ses limites comme nous avons les nôtres.
Pour composer selon l'école académique c'est certainement parfait. Pour inventer et débusquer la poésie, c'est loupé. Artusi employait les mêmes arguments pour condamner la musique de la Renaissance. - Citation :
- Par contre ce qui peut arriver, comme expliqué plus haut, c'est une écriture coupée de ses racines "naturelles" par excès d'abstraction ou d'intellectualisme.
Certains ne supportent pas Rothko ou Soulages pour ces raisons. Je dis qu'ils ont tort puisque ça m'émeut. L'art n'est pas étalonnable. - Citation :
- natrav a écrit:
- Les "pires" productions absconses de Stockhausen ou de Webern seront toujours des oeuvres d'art totalement compréhensibles à un autre être humain, même s'il n'y en a qu'un seul, c'est la démonstration que ces musiques sont faites pour le psychisme (humain).
Excuse moi mais je crois qu'il y a une petite incohérence dans tes propos. "Un" n'est pas "Tous". Le particulier est un complément au général mais il ne saurait se substituer à lui. Croire que parce qu'il y en aurait "un", cela s'appliquerait à "tous" est un raccourci un peu rapide. Non, c'est toi qui ne comprends pas ce que je veux dire. L'art n'a pas à séduire à la masse, l'oeuvre d'art n'a pas à être reconnue par une majorité pour être définie comme telle. Ce n'est pas un produit de consommation. C'est une expression, une oeuvre lancée aux hommes par un seul. Si un seul est capable de la recevoir et d'en être ému c'est suffisant pour parler d'oeuvre d'art alors. - Citation :
- La nature est diverse et c'est ce qui rend la vie si belle et si éblouissante. Les perceptions peuvent être multiples, ce qui explique pourquoi certains prennent du plaisir à écouter une oeuvre sérielle ou atonale et d'autres des oeuvres à la facture plus classique.
Néanmoins, derrière cette multiplicité, se trouvent des tendances générales ou lourdes parce que partagées par une majorité et d'autres particulières, plus minoritaires Une infime proportions de gens sont capables de jouer au basket, et pourtant le basket est un sport. Qu'est-ce que la majorité vient faire dans cette histoire ? Je comprends bien que l'expression des musiques complexes soit moins accessible au commun des mortels peu accoutumé à explorer ces répertoires, mais une fois constaté ça, qu'en dire de plus ? Qu'est-ce que cela prouve ? Si on fait l'effort d'approcher ces musiques, les oreilles s'ouvrent toutes seules, ce forum le montre assez facilement. C'est une quastion d'habitude. Bon, Guillaume est encore à convaincre. D'ailleurs si tu demandes à beaucoup ici comment ils ont approché la musique, tu pourrais t'apercevoir que beaucoup des plus jeunes sont venus au classique par le répertoire supposé le plus difficile, le XX° siècle (et pas Poulenc ou RVW). De même, j'ai été sensibilisé très tôt dans l'enfance à l'art abstrait, au cubisme, à l'expressionnisme le plus cru, affaire de milieu sensibilisé à l'art contemporain. Ces langages picturaux demeurent mes préférés et j'ai mis longtemps à pouvoir apprécier ce que tout le monde semblait admirer sauf moi comme Rembrandt, Vinci, Le Titien, Delacroix... La peinture figurative ne me parlait pas. Question culturelle à mon avis. Je pense qu'il en est de même pour la musique. |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 19:38 | |
| - sud273 a écrit:
- Quelques remarques de Charles Ives sur la tonalité et la micro-tonalité:
« J’avais entendu dans mon enfance certaines expériences de mon père (avec des verres d’eau accordés dans des intervalles plus ou moins larges que le demi-ton) et certaines divisions du ton m’étaient familières. Dans la salle du catéchisme à l’Eglise Centrale Presbytérienne de New York, il y avait deux pianos qui se trouvaient accordés à des hauteurs variant à peu près d’un quart de ton, et j’essayai d’y plaquer simultanément quelques accords. Mais l’un de ces pianos fut déplacé avant que je puisse vraiment y habituer mes oreilles. »(Scrapbook) Premières pièces en quart de ton d'Ives vers 1912.
« Père répondit : « Dis à Parker que toute dissonnance n’appelle pas forcément une résolution, si on n’en éprouve pas le besoin, pas plus qu’il n’est obligatoire de tresser la queue d’un cheval simplement parce que c’est la mode en vogue » (Memos 116) « Pourquoi devrait-on se débarrasser définitivement de la tonalité ? je ne vois pas. Pourquoi devrait-elle être constamment présente ? je ne vois pas non plus. A mon sens, cela dépend… de ce qu’on essaye de faire, de l’état d’esprit, du moment de la journée ou d’autres accidents de la vie quotidienne » (Essays 117) « Dans quelques siècles, quand les enfants des écoles siffleront des mélodies populaires en quart de ton –quand l’échelle diatonique sera aussi obsolète que l’échelle pentatonique l’est aujourd’hui- peut-être ces expériences d’avant-garde seront-elle aussi facilement reconnues qu’aisément exprimées. Mais peut-être la musique n’est-elle pas destinée à satisfaire la bizarre finitude de l’humain. Peut-être est-il préférable d’espérer que la musique demeurera un langage transcendental, au sens le plus extravagant du terme ».(Essays 71). Merci Sud. Existe t'il un enregistrement de cette oeuvre d'Ives? Je serais très désireux de l'entendre. Excuse moi, je suis fatigué et j'ai un peu de mal à comprendre la fin de Essays 71. "Pas destinée à satisfaire la bizarre finitude de l'humain??" Langage transcendantal?? , sous entendu au dessus de tout langage ou langage qui permet de sentir la transcendance ou bien que le langage musical est d'origine transcendantale?? En ce qui concerne la 3ème idée, personnellement, je ne l'approuve pas. Je préfère penser que la musique est immanente c'est à dire un pur produit de notre intelligence sans aucune intervention d'une quelconque transcendance. Quant à l'accés à une certaine forme de transcendance, oui probablement mais encore faudrait il s'entendre sur le mot "transcendance". Beaucoup y verront Dieu mais je préfère imaginer Dieu comme un concept qui peut prendre pour chacun d'entre nous des réalités différentes (la nature, une super conscience humaine voire un bigorneau ou un couteau à fromages. ). J'aime bien l'idée exprimée par Malher quand il parle d'un autre monde. Oui, un autre monde, celui de notre profonde humanité, des merveilles de notre Univers, un autre monde avec lequel nous fusionnons. Cette idée de fusion entre le monde et soi est la définition même du sentiment océanique défini par Romaind Rolland et Freud. |
| | | Passage De passage pour longtemps
Nombre de messages : 2134 Localisation : Paris Date d'inscription : 06/07/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 19:41 | |
| - Luc 06 a écrit:
La théorie musicale n'échappe pas à cette imagination d'où la création d'échelles théoriques ou conceptuelles créées indépendamment de nos possibilités perceptives. Je ne suis pas d'accord: nos possibilités perceptives sont façonnées par notre culture et évoluent au fur et à mesure de l'éducation de l'oreille de chaque individu. - Luc 06 a écrit:
Or, la musique a pour objectif de susciter des émotions, pour utiliser un langage plus trivial de parler au coeur avant de s'adresser à la raison. Or, l'écriture dodécaphonique sérielle (ce qui n'est pas obligatoirement le cas avec l'atonalité) repose plus, du fait de ses impératifs d'écriture, sur une conception hyper rationnelle indépendamment de tout contexte affectif. Schoënberg, contrairement à Milhaud l'un des maîtres de la polytonalité, ne se posait pas la question de savoir si c'était beau mais conforme à sa théorie. Là encore, l'idée que la musique s'adresse au cœur (qu'est ce que c'est?) ne me paraît pas du tout pertinente. Quant à Schoenberg, on peut voir dans son système dodécaphonique une tentative désespérée de rationaliser une écriture atonale proche de l'écriture automatique (Vienne est la ville de la psychanalyse), de contrôler des affects et des pulsions débordantes, de classiciser l'atonalité: la marge de manoeuvre du compositeur reste énorme, et si certaines œuvres de Schoenberg peuvent paraître militantes et dogmatiques elles sont l'exception. La musique s'adresse aux oreilles et chacun y entend ou pas les affects qu'il lui attribuera, pour de bonnes ou de mauvaises raisons, peu importe. - Luc 06 a écrit:
C'est pour cela qu'Ansermet et d'autres insistent sur l'importance de partir de la musique et la perception que nous en avons plutôt que de lui imposer les lois de notre intelligence, lois théoriques. Mais notre perception est elle-même modelée par notre intelligence... - Luc 06 a écrit:
Oui, la musique est une expression de la culture mais en relation avec notre nature. Par contre ce qui peut arriver, comme expliqué plus haut, c'est une écriture coupée de ses racines "naturelles" par excès d'abstraction ou d'intellectualisme. Il faudrait m'expliquer ce qu'est notre nature et ce que sont ces racines "naturelles" de la musique. Je ne vois pas du tout ce que c'est. Les harmoniques? Les intervalles liés à l'acoustique? |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 19:42 | |
| - Citation :
- sentiment océanique défini par Romaind Rolland et Freud.
C'est plutôt Ferenczi dans Thalassa qui a défini ce concept je pense, Freud l'a repris ensuite si c'est bien ce dont tu parles ? |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:05 | |
| - DePassage a écrit:
Je ne suis pas d'accord: nos possibilités perceptives sont façonnées par notre culture et évoluent au fur et à mesure de l'éducation de l'oreille de chaque individu.
Merci de lire ou relire un de mes commentaires plus haut. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:09 | |
| Il est vrai q'une sonate en ultrason ça ne doit pas avoir beaucoup de sens... Quoique, Cage s'y est peut-être déjà adonné ? |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:17 | |
| - natrav a écrit:
-
- Citation :
- sentiment océanique défini par Romaind Rolland et Freud.
C'est plutôt Ferenczi dans Thalassa qui a défini ce concept je pense, Freud l'a repris ensuite si c'est bien ce dont tu parles ? Cette notion aurait été inventée par Romain Rolland. Après concernant son histoire, Ferenczi ou Freud??, je ne sais pas. http://fr.wikipedia.org/wiki/Sentiment_oc%C3%A9anique |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:22 | |
| Réponse à Natrav / Je n'ai pas le temps ni - je dois t'avouer - le courage de répondre point par point à chacune de tes remarques. Je le ferai plus tard. |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:41 | |
| - Luc 06 a écrit:
Il peut y avoir des cas particuliers dont tu fais partie mais la grande majorité du public mélomane a quand même certaines difficultés à y ressentir des émotions aussi fortes qu'avec une musique tonale. Y adhères-tu vraiment d'un point de vue perceptif ou plutôt par adhésion symbolique à une cause artistique, celle de la modernité ? C'est bien la première fois qu'on me traite de cette façon. Je ne suis pas du tout un chantre de la modernité, bien au contraire, j'ai des goûts musicaux très réactionnaires et il y a peu de contemporains qui me séduisent vraiment (à part les sériels genre Boulez ou les néoromantiques genre Pärt ou Penderecki). Non, sérieusement et en toute sincérité, j'aime la musique dodécaphonique d'un point de vue purement perceptif, je trouve ça (comme Vartan) d'une beauté infinie, je trouve que ça sonne vrai, que ça me parle en tant qu'homme et que ça dit quelque chose. C'est stupide, cette façon de s'exprimer en faisant de la musique un discours signifiant, ça n'est pas ainsi qu'il faut l'envisager premièrement, mais c'est pour te dire que je trouve cette musique infinimement belle et séduisante et que ce n'est pas par dogmatisme antitonal (je suis l'un des plus grands amateurs, dans ce forum, de musique ultratonale facile et larmoyante) que j'affirme que cette musique a une valeur intrinsèque autre que celle d'une extravagance anti-naturelle. |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:42 | |
| - sud273 a écrit:
- « Père répondit : « Dis à Parker que toute dissonnance n’appelle pas forcément une résolution, si on n’en éprouve pas le besoin, pas plus qu’il n’est obligatoire de tresser la queue d’un cheval simplement parce que c’est la mode en vogue » (Memos 116)
« Pourquoi devrait-on se débarrasser définitivement de la tonalité ? je ne vois pas. Pourquoi devrait-elle être constamment présente ? je ne vois pas non plus. A mon sens, cela dépend… de ce qu’on essaye de faire, de l’état d’esprit, du moment de la journée ou d’autres accidents de la vie quotidienne » (Essays 117) « Dans quelques siècles, quand les enfants des écoles siffleront des mélodies populaires en quart de ton –quand l’échelle diatonique sera aussi obsolète que l’échelle pentatonique l’est aujourd’hui- peut-être ces expériences d’avant-garde seront-elle aussi facilement reconnues qu’aisément exprimées. Mais peut-être la musique n’est-elle pas destinée à satisfaire la bizarre finitude de l’humain. Peut-être est-il préférable d’espérer que la musique demeurera un langage transcendental, au sens le plus extravagant du terme ».(Essays 71). quel génie, ce Ives! |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 20:49 | |
| - Citation :
- Or, la musique a pour objectif de susciter des émotions, pour utiliser un langage plus trivial de parler au coeur avant de s'adresser à la raison.
Encore une assertion universelle et nécessaire sans fondement! sur quelle légitimité te fondes-tu pour affirmer ça? - Citation :
- Or, l'écriture dodécaphonique sérielle (ce qui n'est pas obligatoirement le cas avec l'atonalité) repose plus, du fait de ses impératifs d'écriture, sur une conception hyper rationnelle indépendamment de tout contexte affectif.
Je ne vois pas pourquoi. La volonté de Schönberg de rationnaliser son écriture à travers l'élargissement du sérialisme à l'ensemble des processus compositionnels ne me semble absolument pas incompatible avec la génération d'émotions et la volonté de faire autre chose que des mathématiques appliquées. Ca me semble inopportun, réducteur et franchement bêta de réduire la musique de Schönberg ou de Webern à un jeu arithmétique, à une expérimentation de pur logicien, sans fondements musicaux! - Citation :
- Schoënberg, contrairement à Milhaud l'un des maîtres de la polytonalité, ne se posait pas la question de savoir si c'était beau mais conforme à sa théorie.
Ah oui? et pourquoi orchestrait-il avec la richesse, la couleur et l'originalité qu'il s'efforçait (avec succès) de rechercher? pour servir son arithmétique aride et intellectuelle, ça ne tient pas. Schönberg, comme tous les compositeurs, cherchait à faire de la musique, pas des maths. Il cherchait d'autres moyens d'expression de ce qu'il sentait être la possibilité d'une révélation. Et s'il a théorisé tout cela et constitué le sérialisme en dogme, ce n'est pas par stupidité bornée mais parce qu'il estimait que les compositeurs avaient besoin d'une théorie pour fonder un nouvel ordre d'intelligibilité du langage musical - ce qui est, en soi, une intention évidemment contestable mais qui ne doit pas servir de prétexte à la remise en cause de la capacité de Schönberg à composer, et non pas seulement à appliquer bêtement et aveuglément des théories mathématiques... |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:00 | |
| - DePassage a écrit:
- Quant à Schoenberg, on peut voir dans son système dodécaphonique une tentative désespérée de rationaliser une écriture atonale proche de l'écriture automatique (Vienne est la ville de la psychanalyse), de contrôler des affects et des pulsions débordantes, de classiciser l'atonalité: la marge de manoeuvre du compositeur reste énorme, et si certaines œuvres de Schoenberg peuvent paraître militantes et dogmatiques elles sont l'exception.
Personnellement, aucune oeuvre de Schönberg ne me paraît tout à fait militante: même s'il y a toujours une dose évidente de volonté de démontrer la possibilité même d'une écriture sérielle, elle s'assortit toujours d'un effort de recherche artistique (dans l'orchestration, les timbres, la richesse polyphonique, etc) qui me semble largement compenser les quelques vélleités dogmatisantes (au demeurant très discutables, aucune oeuvre de Schönberg ou presque n'étant entièrement soumise au principe a priori de l'écriture sérielle) que peut manifester épisodiquement le compositeur. Je crois que pour comprendre Schönberg, il faut dissocier ses écrits et sa musique: les premiers, comme je l'ai dit, prétendent fonder un système, et donc, nécessairement, se déploient sur le mode inévitable du dogme, mais la seconde n'est en rien assujettie aux premiers. Excusez-moi d'insister là-dessus mais Schönberg est un de mes compositeurs préférés et je trouve ce que dit Luc (que je tiens par ailleurs à remercier pour ses contributions vraiment intéressantes, bien sûr contestables mais qui permettent justement pour cela de débattre, ce qui est très bienvenu) très réducteur et récusable... |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:19 | |
| - Spiritus a écrit:
-
- Citation :
- Or, la musique a pour objectif de susciter des émotions, pour utiliser un langage plus trivial de parler au coeur avant de s'adresser à la raison.
Encore une assertion universelle et nécessaire sans fondement! sur quelle légitimité te fondes-tu pour affirmer ça? Je reconnais que l'allusion au coeur était maladroite. C'était comme je l'ai écrit une expression triviale (une image populaire) Au passage, mais j'espère que vous le savez, je vous rappelle que la musique stimule plus le cerveau droit que le cerveau gauche, siège du langage et des opérations mathématiques et logiques. Le droit est plus intuitif, empirique, serait en partie le siège des émotions et de la perception globale. C'est la neuro-imagerie qui permet de visualiser les zones stimulées. La plus grande stimulation de notre cerveau droit indique que c'est le cerveau des émotions qui est surtout stimulé à l'écoute de la musique, le gauche est stimulé quand nous recherchons à reconnaître l'oeuvre par exemple. Pour en revenir à toi Spiritus, peux tu me dire pourquoi tu écoutes de la musique si ce n'est pas une recherche d'émotion?? |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:22 | |
| - Luc 06 a écrit:
Pour en revenir à toi Spiritus, peux tu me dire pourquoi tu écoutes de la musique si ce n'est pas une recherche d'émotion?? Parce qu'elle procure aussi (mais les deux approches, "sensible" et "intellectuelle" ne sont pas exclusives l'une de l'autre) un plaisir strictement mental, celui de comprendre des structures, un fonctionnement, une forme... c'est aussi pour ça que j'aime la musique communément considérée comme "intello", je trouve ça délicieux de se stimuler l'esprit. |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:25 | |
| Considerée comme "intello"...toute la musique classique peut étre considéré comme ça... même Mozart, oui je sais c'est dur à entendre, mais c'est la vérité...Mozart est hyper-complexe. Ca vaut 1000 Strauss, Mozart ! (Johann hein...pas taper) |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:28 | |
| Il y a des musiques plus ou moins intellectuelles. |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:29 | |
| Musique contemporaine = Musique intellectuelle c'est ça ? |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:34 | |
| Pas forcément. La musique de Mozart, tout comme celle de Verdi, n'est pas intellectuelle. Je ne dis pas qu'il faut juste avoir la capacité d'une moule pour la comprendre, mais elle est nettement moins cérébrale (et parfois moins ch...) que certaines autres musiques. Tout simplement qu'à l'époque, ce n'était pas forcément concevable de faire de la musique cérébrale. Verdi, il voulait parler au peuple (et puis même, les bourges, heu, les aristocrates n'étaient pas forcément les plus intelligents Descartes sera d'accord avec moi), donc... Seulement, sa musique aussi facile aurait pu être triviale, et comme pour Mozart, ce n'est pas le cas.
Et tu pourras m'affubler de carton rouge, de smiley injecté de sang, je m'en fous. |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:38 | |
| Je suis sur que plein de grands fans de Mozart te diront qu'il est infiniment complexe. A commencer par moi. La fantaisie K. 475 par exemple, est ce là une oeuvre facile ? Une préfiguration de Beethoven en plus... |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:43 | |
| Mais je ne te dis pas que ce n'est pas complexe ! Je te dis juste que ce n'est pas le compositeur le PLUS complexe. Verdi aussi a des oeuvres complexes, mais est-ce pour autant un compositeur complexe ? Non. |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:52 | |
| Le plus complexe, oui mais le but en musique c'est l'émotion...et je pense que Mozart est un trés grand sur ce coup là. |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:55 | |
| Retour à la case départ : pas forcément. On peut avoir deux approches. |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 21:59 | |
| Mais du coté musical je trouve Mozart jubilatoire...ses modulations, ses cadences (mais je m'y connais pas trop hein) |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:06 | |
| Mais oui !! Mais je ne te dis pas le contraire !! |
| | | Guillaume lapineau huguenot
Nombre de messages : 17530 Age : 31 Localisation : Paris Date d'inscription : 27/06/2006
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:08 | |
| Enfin bon, pour ne pas créer une énième polémique, moi je pense, que Mozart c'est génial ! Tout. Il y a des choses inégalables, d'autres charmantes, d'autres formidable, mais ça ne tombe jamais dans le médiocre. (il sort discrètement de la scène) |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:15 | |
| Là, c'est ton droit le plus absolu de le croire (surtout que tu n'es pas le seul) mais après, ne t'offusque pas que les autres ne soient pas d'accord avec toi. |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:18 | |
| vous êtes HS! j'aimerais bien qu'on continue la polémique sur Schönberg, c'était autrement plus intéressant. |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:20 | |
| - DePassage a écrit:
- Excusez-moi d'insister là-dessus mais Schönberg est un de mes compositeurs préférés et je trouve ce que dit Luc (que je tiens par ailleurs à remercier pour ses contributions vraiment intéressantes, bien sûr contestables mais qui permettent justement pour cela de débattre, ce qui est très bienvenu) très réducteur et récusable...
Merci, ta remarque me fait plaisir. Je comprends que tu ne puisses pas être d'accord avec moi. De là à dire que mes propos sont réducteurs et récusables, de ton point de vue, certainement et je le comprends. Mais le dire ne suffit pas, encore faut il pouvoir apporter la preuve de leur invalidité? Ce n'est pas une attaque personnelle, seulement le souci de respecter une méthode. Pour ma part, j'essaie d'étayer mes propos avec des références. Nous sommes dans ce domaine dans le subjectif le plus absolu. La meilleure façon de tendre vers une certaine objectivité (même si l'objectivité absolue est impossible mais on peut y tendre), c'est par l'apport de travaux assez rigoureux réalisés dans des conditions les plus objectives possibles comme on le fait en médecine dans les évaluations des traitements. Je ne cherche pas à bouleverser vos certitudes, garder les mais à attirer votre attention sur d'autres réalités. Il existe un tel cloisonnement entre les disciplines qu'il me paraît au contraire très intéressant de les relier entre elles, de créer des ponts entre les sciences de la nature et les sciences humaines en y intégrant la philosophie et autres domaines de réflexion. La musique est de ce point de vue un extraordinaire laboratoire d'analyse qui touche à tous les niveaux, de sa structure organisationnelle interne aux rapports sociologiques, économiques, politiques, philosophiques qu'elle entretient avec la société en passant par son pouvoir sur nos affects. La musique est un concentré de complexité, un microcosme à l'image du macrocosme et qui possède le pouvoir rare de nous faire accéder à d'autres plans de conscience. La musique est une des plus hautes réalisations humaines. Comme le dit si bien Jankélévitch, la musique humanise et civilise. Elle aide les esprits à communier dans une même unité de temps et d'espace sans souci partisan, nationaliste ou confessionnel. J'ai une très haute opinion de cet art majeur et c'est pour cela que je cherche à en connaître tous les ressorts et à comprendre d'où elle tire son universalité. |
| | | Pison Futé patate power
Nombre de messages : 27496 Age : 33 Localisation : CAEN, la meilleure ville de toute la Normandie. Date d'inscription : 23/03/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:23 | |
| - Spiritus a écrit:
- vous êtes HS! j'aimerais bien qu'on continue la polémique sur Schönberg, c'était autrement plus intéressant.
Toi, va réviser pour ton concours blanc ! |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:27 | |
| - Spiritus a écrit:
- Luc 06 a écrit:
Pour en revenir à toi Spiritus, peux tu me dire pourquoi tu écoutes de la musique si ce n'est pas une recherche d'émotion?? Parce qu'elle procure aussi (mais les deux approches, "sensible" et "intellectuelle" ne sont pas exclusives l'une de l'autre) un plaisir strictement mental, celui de comprendre des structures, un fonctionnement, une forme... c'est aussi pour ça que j'aime la musique communément considérée comme "intello", je trouve ça délicieux de se stimuler l'esprit. Tout à fait d'accord mais tu reconnais quand même que l'aspect sensible est présent. Tu me rassures. En plus s'il y a un universel accepté par quasiment tous les spécialistes de la musique, c'est celui de l'importance des affects ( émotion sentiment, humeur) en musique. |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:28 | |
| ce que tu dis me semble très juste mais je ne suis encore pas d'accord. Je ne vois pas pourquoi faire appel à des références plus ou moins scientifiques légitimerait des arguments dans un domaine qui, comme tu le dis toi-même, est éminemment subjectif.
Personnellement, quand je dis que Schönberg fait de la musique et non des mathématiques, je prends un argument très simple: il y a un évident souci de beauté dans ses instrumentations. Quand on entend les Variations op.31, je ne vois pas comment on peut passer à côté de cette dimension esthétique. De même, Webern recherche l'épure et se sert pour cela d'une orchestration diaphane et limpide qui n'a rien à voir avec ses recherches sérielles. Je n'ai rien à apporter de plus au débat: je me contente de musique. |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 22:46 | |
| - Spiritus a écrit:
- ce que tu dis me semble très juste mais je ne suis encore pas d'accord. Je ne vois pas pourquoi faire appel à des références plus ou moins scientifiques légitimerait des arguments dans un domaine qui, comme tu le dis toi-même, est éminemment subjectif.
Personnellement, quand je dis que Schönberg fait de la musique et non des mathématiques, je prends un argument très simple: il y a un évident souci de beauté dans ses instrumentations. Quand on entend les Variations op.31, je ne vois pas comment on peut passer à côté de cette dimension esthétique. De même, Webern recherche l'épure et se sert pour cela d'une orchestration diaphane et limpide qui n'a rien à voir avec ses recherches sérielles. Je n'ai rien à apporter de plus au débat: je me contente de musique. C'est justement pour diminuer la subjectivité et tendre vers plus d'objectivité. Mon propos était assez clair, il me semble. En ce qui concerne la 2ème partie, nous sommes dans la subjectivité la plus absolue et qui n'a de valeur que pour toi. Une fois de plus, ce n'est pas une critique. La tentation est toujours grande de penser que l'on détient la vérité et que ce que l'on ressent est partagé par tous. Pour avoir une idée plus juste des choses, il est nécessaire d'étudier beaucoup, de lire, de s'intéresser à d'autres domaines, de s'ouvrir l'esprit à d'autres disciplines qui permettent de prendre du recul pour essayer de comprendre la complexité. Je ne prétends pas être dépositaire d'une vérité quelconque, je m'interroge comme tout le monde et je cherche à comprendre en ouvrant mon champ de réflexion à d'autres disciplines. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Ven 28 Nov 2008 - 23:19 | |
| - Luc 06 a écrit:
- natrav a écrit:
-
- Citation :
- sentiment océanique défini par Romaind Rolland et Freud.
C'est plutôt Ferenczi dans Thalassa qui a défini ce concept je pense, Freud l'a repris ensuite si c'est bien ce dont tu parles ? Cette notion aurait été inventée par Romain Rolland. Après concernant son histoire, Ferenczi ou Freud??, je ne sais pas.
Pas vraiment, Freud semble très circonspect devant les conceptions de Rolland, son ami, dont il débat dans "Malaise dans la civilisation" que je cite - Citation :
- L'un de ses hommes éminents se déclare dans ses lettres mon ami. Je lui avais adressé le petit livre où je traite la religion d'illusion ; il me répondit qu'il serait entièrement d'accord avec moi s'il ne devait regretter que je n'eusse tenu aucun compte de la source réelle de la religiosité. Celle-ci résiderait, à ses yeux, dans un sentiment particulier dont lui-même était constamment animé, dont beaucoup d'autres lui avaient confirmé la réalité, dont enfin il était en droit de supposer l'existence chez des millions d'être humains. Ce sentiment, il l'appellerait volontiers la
sensation de l'éternité, il y verrait le sentiment de quelque chose d'illimité, d'infini, en un mot : d' “ océanique ”. Il en ferait ainsi une donnée purement subjective, et nullement un article de foi. Aucune promesse de survie personnelle ne s'y rattacherait. Et pourtant, telle serait la source de l'énergie religieuse, source captée par les diverses Eglises ou les multiples systèmes religieux, par eux canalisée dans certaines voies, et même tarie aussi. Enfin la seule existence de ce sentiment océanique autoriserait à se déclarer religieux, alors même qu'on répudierait toute croyance ou toute illusion. Cette déclaration de la part d'un ami que j'honore, et qui a lui même décrit en termes poétiques le charme de l'illusion, m'a fort embarrassé. En moi-même, impossible de découvrir pareil sentiment “ océanique ”. Et puis, il est malaisé de traiter scientifiquement des sentiments. On peut tenter d'en décrire les manifestations physiologiques.Mais, quand celles-ci vous échappent - et je crains fort que le sentiment océanique lui aussi ne se dérobe à une telle description -, il ne reste qu'à s'en tenir au contenu des représentations les plus aptes à s'associer au sentiment en question. Si j'ai bien compris mon ami, sa pensée aurait quelque analogie avec celle de ce poète original qui, en guise de consolation, en face d'une mort librement choisie, fait dire à son héros : “ Nous ne pouvons choir de ce monde ” ( I ). Il s'agirait donc d'un sentiment d'union indissoluble avec le grand Tout, et d'appartenance à l'universel. Mais, à mon sens, il s'agirait plutôt d'une vue intellectuelle, associée à un élément affectif certain, lequel, comme on sait, ne fait jamais défaut dans des pensées de si vaste envergure. Je faisais plutôt allusion aux conceptions de Ferenczi sur ces états de rêverie et de plaisir liés à la capacité de fantasmatisation. Après, on peut considérer ques Klein et Winnicott iront préciser tout cela de façon plus opérante. - Citation :
- Sándor Ferenczi s'intéresse au coït comme métaphore du retour dans le ventre maternel. L'idée d'un désir de retourner dans le ventre de la mère sera développée par Otto Rank, et existe également dans le taoïsme ; pour en rester à Ferenczi, celui-ci comprend la grossesse comme stade de toute-puissance réelle pour le nourrisson, comme époque où tous les désirs sont immédiatements satisfaits, d'où l'idée que, par la suite, l'adulte fantasmera un retour dans le ventre de la mère.
C'est dans Thalassa que Ferenczi précise cette idée. Dans le coït, le retour s'effectuerait de trois manières :
* Il y a retour imaginaire dans le ventre : l'homme rentre dans le ventre au niveau du fantasme, lequel s'avérerait déterminé par une situation, réelle, de plaisir antérieur. Le fantasme vise à la répétition d'une expérience de satisfaction, si l'on veut historique. (wikipedia) |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Sam 29 Nov 2008 - 0:12 | |
| - natrav a écrit:
- Luc 06 a écrit:
- natrav a écrit:
-
- Citation :
- sentiment océanique défini par Romaind Rolland et Freud.
C'est plutôt Ferenczi dans Thalassa qui a défini ce concept je pense, Freud l'a repris ensuite si c'est bien ce dont tu parles ? Cette notion aurait été inventée par Romain Rolland. Après concernant son histoire, Ferenczi ou Freud??, je ne sais pas.
Pas vraiment, Freud semble très circonspect devant les conceptions de Rolland, son ami, dont il débat dans "Malaise dans la civilisation" que je cite
- Citation :
- L'un de ses hommes éminents se déclare dans ses lettres mon ami. Je lui avais adressé le petit livre où je traite la religion d'illusion ; il me répondit qu'il serait entièrement d'accord avec moi s'il ne devait regretter que je n'eusse tenu aucun compte de la source réelle de la religiosité. Celle-ci résiderait, à ses yeux, dans un sentiment particulier dont lui-même était constamment animé, dont beaucoup d'autres lui avaient confirmé la réalité, dont enfin il était en droit de supposer l'existence chez des millions d'être humains. Ce sentiment, il l'appellerait volontiers la
sensation de l'éternité, il y verrait le sentiment de quelque chose d'illimité, d'infini, en un mot : d' “ océanique ”. Il en ferait ainsi une donnée purement subjective, et nullement un article de foi. Aucune promesse de survie personnelle ne s'y rattacherait. Et pourtant, telle serait la source de l'énergie religieuse, source captée par les diverses Eglises ou les multiples systèmes religieux, par eux canalisée dans certaines voies, et même tarie aussi. Enfin la seule existence de ce sentiment océanique autoriserait à se déclarer religieux, alors même qu'on répudierait toute croyance ou toute illusion. Cette déclaration de la part d'un ami que j'honore, et qui a lui même décrit en termes poétiques le charme de l'illusion, m'a fort embarrassé. En moi-même, impossible de découvrir pareil sentiment “ océanique ”. Et puis, il est malaisé de traiter scientifiquement des sentiments. On peut tenter d'en décrire les manifestations physiologiques.Mais, quand celles-ci vous échappent - et je crains fort que le sentiment océanique lui aussi ne se dérobe à une telle description -, il ne reste qu'à s'en tenir au contenu des représentations les plus aptes à s'associer au sentiment en question. Si j'ai bien compris mon ami, sa pensée aurait quelque analogie avec celle de ce poète original qui, en guise de consolation, en face d'une mort librement choisie, fait dire à son héros : “ Nous ne pouvons choir de ce monde ” ( I ). Il s'agirait donc d'un sentiment d'union indissoluble avec le grand Tout, et d'appartenance à l'universel. Mais, à mon sens, il s'agirait plutôt d'une vue intellectuelle, associée à un élément affectif certain, lequel, comme on sait, ne fait jamais défaut dans des pensées de si vaste envergure.
Je faisais plutôt allusion aux conceptions de Ferenczi sur ces états de rêverie et de plaisir liés à la capacité de fantasmatisation. Après, on peut considérer ques Klein et Winnicott iront préciser tout cela de façon plus opérante.
- Citation :
- Sándor Ferenczi s'intéresse au coït comme métaphore du retour dans le ventre maternel. L'idée d'un désir de retourner dans le ventre de la mère sera développée par Otto Rank, et existe également dans le taoïsme ; pour en rester à Ferenczi, celui-ci comprend la grossesse comme stade de toute-puissance réelle pour le nourrisson, comme époque où tous les désirs sont immédiatements satisfaits, d'où l'idée que, par la suite, l'adulte fantasmera un retour dans le ventre de la mère.
C'est dans Thalassa que Ferenczi précise cette idée. Dans le coït, le retour s'effectuerait de trois manières :
* Il y a retour imaginaire dans le ventre : l'homme rentre dans le ventre au niveau du fantasme, lequel s'avérerait déterminé par une situation, réelle, de plaisir antérieur. Le fantasme vise à la répétition d'une expérience de satisfaction, si l'on veut historique. (wikipedia) Merci 1000 fois pour cette citation de Freud. C'est par rapport à un livre que je viens d'écrire, j'en avais une définition que j'ai transposé en utilisant un autre vocabulaire mais je m'aperçois que la définition freudienne colle parfaitement. Je n'avais pas cet extrait. C'est super 1000 mercis. Apparemment, le terme de "sentiment océanique" est bien de Romain Rolland même si Freud tente de le préciser. Par contre, je ne vois pas bien le rapport avec Ferenczy. Est ce qu'il a repris le même terme dans Thalassa en lui attribuant une autre définition? |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Sam 29 Nov 2008 - 0:19 | |
| Non, ça se situe à des niveaux différents pour exprimer la même chose je pense. La capacité de rêverie, de se plonger dans des fantaisies imaginaires, d'halluciner un plaisir plus archaïque (Ferenczi le voit comme originaire, intra-utérin), les indépendant (Klein, Winnicott, Bion) iront moins loin et feront le lien entre ces moments d'intense plaisir lié à la relation maternelle, la capacité à les halluciner (les revivre) dans les rêveries et la gratitude et l'amour de l'art (Lire à ce sujet Envie et gratitude et Rêve, art et fantasme d'Hannah Segal) |
| | | Luc 06 Mélomane averti
Nombre de messages : 148 Localisation : Côte d'Azur Date d'inscription : 22/11/2008
| Sujet: Re: Musique et dissonance Sam 29 Nov 2008 - 0:27 | |
| - natrav a écrit:
- Non, ça se situe à des niveaux différents pour exprimer la même chose je pense. La capacité de rêverie, de se plonger dans des fantaisies imaginaires, d'halluciner un plaisir plus archaïque (Ferenczi le voit comme originaire, intra-utérin), les indépendant (Klein, Winnicott, Bion) iront moins loin et feront le lien entre ces moments d'intense plaisir lié à la relation maternelle, la capacité à les halluciner (les revivre) dans les rêveries et la gratitude et l'amour de l'art (Lire à ce sujetEnvie et gratitude et Rêve, art et fantasme d'Hannah Segal)
D'accord, c'est intéressant, l'approche du sentiment océanique est ici plus psychanalytique. Peut-être qu'il existe un lien entre la sensation de fusion avec le Tout et un souvenir lié à la vie intra-utérine. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Musique et dissonance Sam 29 Nov 2008 - 0:36 | |
| Ça je ne saurais dire... |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Sam 29 Nov 2008 - 10:51 | |
| l'idée est plutôt séduisante en tous cas! |
| | | Tus Gentil corniste
Nombre de messages : 15293 Date d'inscription : 31/01/2007
| Sujet: Re: Musique et dissonance Sam 29 Nov 2008 - 10:53 | |
| - Luc 06 a écrit:
En ce qui concerne la 2ème partie, nous sommes dans la subjectivité la plus absolue et qui n'a de valeur que pour toi. Non: mon propos possède une valeur d'objectivité incontestable: les orchestrations de Schönberg ne sont pas assujetties à ses théories sérielles: on ne peut donc pas réduire la musique de Schönberg aux dites théories. Je ne vois pas en quoi ce raisonnement est conditionné par une subjectivité. A moins que tu veuilles me démontrer que l'instrumentation des compositeurs sériels obéit aussi au sérialisme? |
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