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| Wozzeck - Berg | |
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Auteur | Message |
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Stanlea Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5840 Age : 66 Localisation : Fly me to the moon Date d'inscription : 22/02/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Ven 10 Juil 2009 - 22:34 | |
| C'est tout à fait vrai, dans la musique de Berg, comme dans celles d'autres compositeurs, plus il y a d'instruments qui jouent ensemble, moins on entend d'instruments qui jouent seuls. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97928 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Ven 10 Juil 2009 - 22:45 | |
| Je sens Stanlea en forme ce soir... |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97928 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Ven 10 Juil 2009 - 22:47 | |
| Mince, je voulais répondre au posteur disparu. |
| | | frere elustaphe Aurelia Aurita
Nombre de messages : 10071 Age : 64 Date d'inscription : 17/12/2006
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Ven 10 Juil 2009 - 23:07 | |
| Je voulais juste dire que j'ai écouté Wozzeck et je suis allée le voir à Bastille. C'est pas que ça me plaît pas mais le thème ne passe pas. Du coup, j'ai dû mal à l'écouter à nouveau. Je ne suis toujours pas remise de Lady M. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97928 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Ven 10 Juil 2009 - 23:09 | |
| Lady, c'est encore pire, parce qu'ils sont tous abjects. Musicalement, c'est sans doute plus extérieur. Mais c'est vrai qu'il faut aimer être secoué... |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mar 14 Juil 2009 - 20:48 | |
| Variation 21: On se calme7 mesures de 638 à 644 [6'35 à 6'46]Dernières manifestations d'une excitation quasiment sexuelle de Doktor qui atteint l'acmé de son exaltation sur un dernier "Unsterblich" lancé dans l'aigu pour s'achever une onzième plus bas dans l'apaisement, enfin. Pendant ces quatre mesures, l'orchestre entier va marteler 12 accords en triolet de blanches pour chacune des notes du thème de la passacaille enfin rétabli en entier et à tous les pupitres, Doktor y compris pour les 7 premières notes. Tout l'orchestre se tait brutalement, en dehors d'un roulement de tam-tam et de timbale sur un Mib (1° note du thème). Le médecin ayant enfin repris ses esprits interroge Wozzeck sur son état de santé: " Wozzeck, montrez-moi votre langue maintenant !" [6'43]La ligne mélodique utilisée (pas reconnaissable dans la version Boulez par un Doench qui semble bien improviser son chant !) est quasiment identique à celle qu'il employait dans l'énoncé du thème (mesure 490) [0'08] " Wozzeck vous avez encore toussé (pissé)" Sur le Mib tenu du violoncelle comme ici par les timbales. L'interlude orchestrale [6'46 à 7'48] maintient une certaine tension dramatique malgré la fin de la scène de torture à laquelle nous avons assisté et dont la forme musicale diaboliquement employée ici, la Passacaille, n'est pas le moindre des outils utilisés pour figurer l'aliénation mentale de Wozzeck et de son médecin, prisonniers de leurs obsessions et instrument de torture lui-même (non, je ne parle pas ici du temps que j'ai passé sur ces %%%%%% de variations). Le roulement de timbales se poursuit pour soutenir le motif x qui file d'un pupitre à l'autre comme un oiseau qui saute de branche en branche, du grave à l'aigu. On sent le petit plaisir que s'est offert Berg à colorer les dernières secondes d'une scène si pénible par cette citation rafraichissante des notes 10-11-12. 6'46 contrebasse 6'48 contrebasson 6'50 clarinette basse 6'51 cor anglais 6'52 hautbois 6'54 piccolo 6'56 celesta ! |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 15 Juil 2009 - 0:14 | |
| ACTE I Scène 5La scène de la séduction. Très courte , faite essentiellement des refus de Marie et des vantardises du Tambour-major, elle semble plus proche d'une scène qui débouche sur un coït forcé qu'un réel moment , pour Marie, de tendresse (qu'elle retrouve avec son enfant) et d'amour (qu'elle attendait de Wozzeck). Seul moment d'action, si l'on peut dire, qui est vite baclé, en moins de trois minutes l'irréparable est commis, Marie est une fille adultère alors qu'elle n'est pas mariée ! Le Tambour-Major est un goujat. Au lieu d'adresser des compliments à celle qu'il convoite, il se rengorge et s'admire avec son " grand plumet". Il lui déclare qu'elle est un "beau morceau de femme" dont il aurait un "élevage de tambour-majors". Il la traite de "sauvage animal" quand elle se refuse à lui, de "diable". De son côté, Marie admire un peu sottement son aspect viril: "un taureau" avec une "barbe de lion", mais rapidement "laisse-moi", "Ne me touche pas" puis la défaite: "Après tout qu'est-ce que ça change ?" avant de se laisser entraîner dans la maison. (sous les yeux de son enfant ?) Forme 'Quasi-Rondo' forme musicale strophique en 4 parties 1- Fin de l'interlude: "L'Andante affetuoso" mes. 656 à 666 [7'00 à 7'48 (piste 4)] Après la sèche et clinique scène médicale, le climat est modifié radicalement avec un orchestre plus fondu, réellement symphonique dans la partie introductive de l'interlude dévolue à cette dernière scène. Tout le matériel thématique sur lequel repose celle-ci y est exposé. Une pâte riche et tendre envahit tout l'espace, des cordes chromatiques dans un mouvement de berceuse amoureuse et des vents plus diatoniques et incisifs. Le mouvement s'accélère et dissipe cette impression de tendresse avant la première intervention de Marie. Dès le début apparaissent deux motifs liés à l'entreprise érotique du soldat: un motif tendre qui se fait remarquer aux flûtes et aux corde ( motif de la séduction) constitué d'une montée en tierce mineure puis quarte juste avec notes répétées et un autre qui débute après la longue tenue de Si par les clarinettes plus ironique [7'06] que nous appellerons " enjôleur", constitué sur les notes d'une gamme par tons. Le motif de la séduction est largement le plus répandu dans cette partie. Mais le cor [7'11] semble entamer ce motif qu'il termine par une descente diatonique, qu'il répète une quarte juste supérieur pour donner... le thème de la science ! Les hautbois reprennent cette entrée [7'14] pour enchaîner par le motif presque identique mais chromatique ce qui nous donne... le motif de la frayeur de Wozzeck ! (Acte I scène 2) (je n'ai pas de référence sur la pertinence de ces rapprochements, si quelqu'un avait lu quelque chose à ce sujet...) Les trois cellules motiviques interviennent aux différents pupitres toujours sur la base de la berceuse du thème tendre donné par les cordes et les trompettes. Le motif descendant, tour à tour chromatique ou diatonique devient petit à petit envahissant [7'35], accélérant le tempo jusqu'au brusque silence orchestral qui permet d'exposer à nu le thème du Tambour major [7'45], mélange de marche militaire et de caquettement un peu ridicule. 2- Première partie: Marie admire le Tambour-Major mes. 667 à 676 [0'00 à 0'31] (piste 5)Elle est introduite par le motif du T-M [si ce n'est que dans la version Boulez, Mademoiselle Isabel Strauss ayant probablement loupé son entrée, le raccord rajouté après l'enregistrement oublie de rajouter la fin de la phrase des hautbois sur "Geh einmal" !]. C'est le motif ascendant de la séduction qui constitue le matériel principal de cette première strophe, aux cors d'abord [0'04], aux flûtes puis aux cordes [0'16], culmine sur "Stolz" [0'25] avant d'amorcer une descente des vents et des cordes pour accompagner la dernière phrase de Marie qu'on retrouvera citée par le Tambour-Major plus loin, le motif de la fierté de Marie: Auparavant, on aura reconnu aux violons la descente chromatique de la frayeur combiné au motif enjôleur sous le " Stier" chanté par Marie [0'10]. Le passage se clôt comme il s'est ouvert, par le motif du Tambour-Major [0'28] cité par le xylophone et les trombones sur Do-Fa#. 3- Deuxième partie: Tambour-Major se pavane mes. 677 à 683 [0'32 à 0'52]20 secondes de fanfaronnades, outil du séducteur en brandebourgs. Il débute son chant en reprenant le thème de la séduction mais sur Do-Fa# et Si. [0'32] Phrase notée cantabile puis molto cantabile doublée par le violon, ça roucoule sec, déroulant une ligne mélodique ondulante, des vagues exaltées qui s'appuient à trois reprises sur le thème de la séduction. Il est réduit aux deux notes extrêmes du motif sur " Mensch !" Il termine par le motif de la fierté de Marie: Cette deuxième partie s'achève comme la précédente par le motif du Tambour-Major, ici aux clarinettes et à la harpe [0'51]4- Troisième partie: Tambour-Major attaque mes. 684 à 701 [0'53 à 1'43] Les gestes du tambour-major se font plus insistants, Marie se défend un peu puis plus fermement. Au début, le thème de la séduction est à peine évoqué par une montée arpégée des bois [0'53] plus dissonante que le thème et qu'on retrouve au chant de Marie et T-M comme à l'orchestre. Le climat de la scène devient grinçant. Quand Marie tente de se dégager, le thème du T-M envahit brutalement tout le discours de l'orchestre [1'19], tonitruant, imposant jusqu'au silence brutal provoqué par le hurlement de Marie : "Rühr mich nicht an!" (Laisse-moi !) Hurlement sur un Si qui résonne immédiatement aux cuivres dans des dissonances inquiétantes. [1'37]5- Quatrième partie: La reddition de Marie et consommation [1'44 à 2'53] mes. 702 à 717 A la quarte augmentée inférieure, T-M reprend le thème de la fierté de Marie pour la traiter de diablesse [1'44]Cors et cordes l'accompagnent dans des assauts d'intervalles en train d'enfoncer les défenses de Marie [1'52 à 2'00] qui cède enfin sur ce même thème de la fierté mais haché, écourté, douloureux, distendu sur deux octaves [2'03]. L'orchestre se lance alors dans une débauche post-romantique dramatique qui culmine sur un Si [2'20] sur l'indication de la disparition du couple entrant dans la maison, puis il s'apaise, et s'efface momentanément, le temps de laisser à nu le thème du T-M au xylophone [2'34], histoire qu'il ne laisse pas de paraître bien ridicule. C'est alors que grotesque, massif, vulgaire eut égard avec ce qu'on devine de ce qui se passe chez Marie, tout l'orchestre se cale sur un balancement allant accélérant, chaque voix oscillant sur un intervalle de seconde, quarte ou quinte sur une pédale des cordes de Sol-Ré. Etrangement, parmi la trentaine de voix synchrones [lignes du haut, en prenant les flûtes pour exemple] qui suivent cette marche implacable, seul les trois trombones [lignes du bas] restent en retard de la diminution rythmique proposée. Sans doute un petit moyen technique pour ménager un peu de désordre expressif dans cette fin qui paraîtrait trop carrée ou plate et laisser cette impression caricaturale. A noter que chacun des deux actes suivant verront leur organisation cadentielle organisée de façon identique avec oscillation rapide sur deux notes. Pour ceux qui dormiraient, c'est bien cette scène 5 qui clôt l'acte I. |
| | | Xavier Père fondateur
Nombre de messages : 91601 Age : 43 Date d'inscription : 08/06/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Ven 7 Aoû 2009 - 23:40 | |
| Quelques mots de Waltraud Meier sur le rôle de Marie: ici |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Dim 30 Aoû 2009 - 23:14 | |
| Pas tous à la fois quand même ! L'acte II ...se présente comme une symphonie en cinq mouvements au déroulement dramatique linéaire, la péripétie qui vient confirmer la perte de Marie, son infidélité, le triomphe du tambour-major, l'échec de Wozzeck. Cet acte se déroule en une journée du matin à la nuit. |
| | | Percy Bysshe Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9940 Date d'inscription : 06/04/2009
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Dim 30 Aoû 2009 - 23:26 | |
| J'ai lu le Woyzeck de Büchner, et j'ai pioché diverses analyses de cette oeuvre. Si ça en intéresse, je peux faire un petit topo à propos de ça. |
| | | Xavier Père fondateur
Nombre de messages : 91601 Age : 43 Date d'inscription : 08/06/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Dim 30 Aoû 2009 - 23:32 | |
| Il y a aussi le film d'Herzog... Mais on dépasse un peu le cadre du sujet du coup peut-être. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Dim 30 Aoû 2009 - 23:35 | |
| Acte II Scène 1C koul, lé gavé bi1 sèt sènAllegro de forme Sonate avec Exposition, Reprise, Développement et Réexposition. La chambre de Marie, par une matinée ensoleillée... Scène qui nous révèle une facette peu estimable de la personnalité de Marie. Si précédemment elle se montrait sous le jour d'une femme seule, vulnérable. Ici elle expose sa duplicité, son manque de tendresse à l'égard d'un enfant qu'elle cherche à faire dormir de force alors que le soleil est déjà haut dans le ciel. Elle veut surtout qu'il ne regarde pas ce qu'elle est en train de faire, s'admirer dans un morceau de miroir avec les belles boucles d'oreille que le T-M vient de lui offrir en échange de ses faveurs. De façon plus elliptique, elle l'interpelle sous forme de menace castratrice à l'égard de sa vue: "ferme les yeux ou il va venir te rendre aveugle" en utilisant la terreur que cet homme lui a sans doute inspiré alors qu'il venait courtiser sa mère. Puni par là où il pèche, la curiosité. Une façon de lui intimer l'ordre de ne pas regarder à quels transports elle se livre avec cet homme quand il est auprès d'elle. C'est glauque mais envisageable dans les conditions de pauvreté dans lesquelles Marie se trouve. "Wir arme Leut..." Pour le reste, elle accepte l'argent de Wozzeck comme elle avait accepté les bijoux de son amant. "Wir arme Leut..." vient répéter Wozzeck qui survient inopinément et force Marie au mensonge concernant l'origine des boucles d'oreille. La tendresse à l'égard de l'enfant, c'est Wozzeck qui la manifeste, il s'inquiète de son sommeil, il a trop chaud le pauvre. Comme les travailleurs. Le couplet misérabilistes est repris. Marie se sent coupable, d'autant plus que Wozzeck vient lui apporter sa solde et l'argent qu'il a péniblement gagné au prix de l'humiliation subie auprès du capitaine et du médecin. Pas de la pacotille comme le T-M, mais l'argent de la soupe et du pain qui la nourrit. C'est pitoyable. Marie se dégoûte se sent malhonnête et s'apostrophe elle-même "j'enverrais bien balader homme, femme et enfant !" Le choix par Berg d'une sonate autour de laquelle se construit cette scène semble interroger les commentateurs qui y voient un hommage à la forme musicale emblématique d'un XIX° siècle qui prendrait ici définitivement congé de la musique. Berg lui-même justifie son utilisation et présente son plan: "Le deuxième acte [...] nous offre tout d'abord en tant que forme musicale un mouvement de sonate. Ce n'est peut-être pas un hasard si les composantes thématiques de toute l'exposition (thème principal, thème secondaire et thème conclusif) sont dévolues aux trois personnages qui vont apparaître en scène: Marie, son enfant, Wozzeck. Cela permet de prime abord l'emploi d'une forme sonate stricte. En effet, tout le développement dramatique de cette scène des bijoux, le retour par deux fois de certaines situations, enfin le choc entre les deux personnages principaux, tout cela a permis la poursuite d'une construction musicale rigoureuse; nous avons donc après l'exposition, la reprise, le développement, enfin la réexposition.
Pour que vous saisissiez mieux tout cela:
L'exposition: * le thème principal: mesures 7 à 14 * le motif de transition [pont]: mesures 29 à 36 * le thème secondaire: mesures 43 à 46 * la coda: mesures 55 à 59
Vient ensuite, qui répète clairement l'exposition quoique sous forme variée et raccourcie:
La reprise: mesures 60 à 96
Le développement, cette partie de la scène précisément où se produit le conflit entre les deux figures principales, sur le plan humain aussi bien que sur le plan musical, mène à l'un des points culminants de cette sonate, c'est à dire à ce "motif-souvenir" rencontré précédemment, et qui circule à travers l'oeuvre toute entière: "Wie arme Leute". [mesures 97 à 121]
[...] La réexposition: mesures 122 à 1701- IntroductionAvant le début proprement dit de la sonate, on aura une courte introduction orchestrale [0'00 à 0'24] qui rappelle la fin de l'acte I: Une montée du violoncelle sur les cordes à vide (Do, Sol Ré, La) puis le fameux Si-Fa et Do#. La, Si, Fa, Do# qui sont repris par le célesta et les flûtes pour constituer la même harmonie cadentielle qui achevait la scène précédente sur le rythme de sextolets. Le tout est suivi de montées de cordes et de trompettes puis de leur balancement voluptueux qui n'est pas sans évoquer le souvenir érotique de la rencontre de Marie avec le T-M. 2- ExpositionLe premier thème de la sonate ( Thème 1) est énoncé au violon et alti, [0'24 à 0'30] mes 7 à 12: ...caractérisé par un alanguissement et une volupté bien marqués, il reste conforme au moment de séduction qui précède cette scène. Marie entonne l'air des bijoux ! On retrouve à l'orchestre, comme dans le chant de Marie sur "Steine" [0'36] (mes 15), la tierce mineure et la seconde mineure du thème de Marie: Cette tierce mineure descendante et seconde mineure reviennent à toutes les voix: des clarinettes et violons pour les tierces, clarinettes en si et cors pour les secondes. [0'47 à 0'56] mes 22 à 28 (Petite erreur là aussi, la note qui débute la phrase aux cors est un fa# et non un fa bécarre)...avant un brusque changement d'atmosphère, Marie abandonne ses rêveries et s'inquiète du sommeil de son fils, Bub'. C'est le Pont ou transition [0'57 à 1'12] (mes 29 à 36). Marie quitte ses tendres tierces mineures et durcit son ton sur des tierces majeures alors que l'orchestre fustige Bub' à l'aide d'un méchant xylophone et le pince avec les pizzicati de cordes sur des intervalles de sournoises secondes mineures. La ligne mélodique de Marie se distend, devient dissonante. Après une attente inquiète, Marie décide d'entonner une berceuse effrayante à son fils, celle du bohémien qui vient enlever les petites zenfants. Le parallèle avec la berceuse de la scène 3 de l'acte I me semble frappant, toutes deux débutant sur un "Mädel". La rencontre avec le T-M aura bouleversé la personnalité de Marie qui pour calmer son fils est passée d'une tendresse maternante, apaisante à un sadisme culpabilisant qui terrifie le pauvre petit chou. Ce qui constitue d'ailleurs le deuxième thème de cette sonate ( Thème 2) est une ligne mélodique calquée sur la Berceuse du I. [1'20 à 1'26]On retrouve en particuliers les intervalles de quarte fréquents de la berceuse dans le chant de Marie ainsi comme dans l'accompagnement du violon qui organise une danse macabre (le violon du tzigane ?) ...à comparer avec la Berceuse, mes 372 du I: Les arpèges chaotiques et cahotiques, ondulants sous le chant de Marie ainsi que les pizzicati violents des contrebasses, violoncelles et altos n'aident certainement pas Bub' à se calmer. Au mieux sera-t-il saisi d'effroi. Dès la fin de l'intervention de Marie apparaît le motif du malheur de Wozzeck qui interviendra dans le développement, martelé en doubles-croches par les hautbois et clarinettes [1'28] mes 49, [1'36] aux cors et bassons, mes 53. La Coda (mes 55 [1'39]) fait intervenir ce thème aux alti et violoncelles s'éteignant progressivement. 3- Reprise (reprise de l'exposition)Au lieu de reprendre textuellement l'exposition (thème 1 - pont - thème 2 - coda), Berg choisit de respecter la succession du plan mais il en transforme radicalement l'orchestration, cependant, le retour de chaque partie musicale est associé dans le livret aux même sens, aux même préoccupations. Le plan de la sonate s'applique aussi bien au matériel musical qu'au livret. Thème 1: mes 59 à 62 [1'48 à 2'02] Pas facile à reconnaître, perdu superbement entre célesta, violons flûtes, cors et trompettes. Transparence et rêverie. On retrouve les mêmes balancements en quarte du thème à l'orchestre séparés par l'intervention de Marie "'s ist gewiss Gold" (c'est sûrement de l'or) qui renvoie au sujet qui la préoccupait lors de l'énoncé du thème 1 dans l'exposition. Pont: mes 81 à 84 [2'44 à 2'51]On retrouve l'orchestre qui fustige Bub' aux bassons et cordes ici soutenant les mêmes injonction de Marie ("Schlaf Bub !" devient ici "Still Bub !") et le thème des yeux fermés. Thème 2: mes 85 à 92 [2'50 à 3'01]La berceuse du bohémien, amputée de son début, elle est très reconnaissable quand Marie la reprend de façon accélérée et de plus en plus menaçante (ou angoissée, c'est selon) mesure 90 [2'52 à 3'00].Coda: mes 92 à 96 [3'02 à 3'11]Le malheur de Wozzeck entonné en canon aux trombones. 4- DéveloppementMesures 96 à 122 [3'11 à 4'38]On retrouve le thème 1 aux cordes sous la première intervention de Wozzeck, [3'11 à 3'16] mais les intervalles sont augmentés d'une octave (13°, 11° pour les quartes), distendus ils confèrent une atmosphère douloureuse à cette fin de scène. Wozzeck a sous les yeux la preuve de l'infidélité de Marie. On retrouve alors le thème du malheur de Wozzeck mes 101 à 103 [3'22 à 3'26] qu'il chante: "Ich hab so was..." (Je n'ai jamais vu quelque chose de semblable) qu'il achève sur Fa-Si. ...soutenu lourdement aux altos et violoncelles. Marie réagit aux soupçons de Wozzeck: "Bin ich..." (suis-je quelqu'un de malhonnête ?) soutenue par le thème 1 en diminution rythmique (flûtes, clarinettes, clarinette basse et hautbois mes 105) [3'30 à 3'33] puis repris de façon rétrograde aux bois (balancement) alors que Wozzeck cherche à la calmer "'s ist gut, Marie" (c'est bon Marie.) [jusqu'à 3'39]Wozzeck s'adresse à Bub' qui dort, une belle et longue phrase accompagnée d'un orchestre superbe (relents du Thème 2 au célesta il me semble, comme du Pont aux flûtes) dont la marche inexorable, de plus en plus tendue par les flûtes et les hautbois qui grimpent chromatiquement dans l'aigu, culmine sur un nouveau "Wir arme Leut" aboutissant à un total chromatique et dramatique (les douze sons). [4'00 et suivantes]C'est Wozzeck qui prodigue ici toute la tendresse maternelle dont l'enfant semblait privé depuis le début de la scène. C'est lui qui s'inquiète de la fièvre qu'il a peut-être, qui plaint sa propre condition misérable qu'il projette sur l'enfant. Cette apogée atonale est brutalement suivie par un accord simple de do majeur mes 116 [tenu de 4'13 à 4'31] qui ouvre la coda. Do majeur qui contraste, symbole pour Berg de la question de l'argent, celle de la seule préoccupation autour de laquelle s'accordent Marie et Wozzeck. C'est après l'affrontement, l'entente: "Das ist wieder Geld, Marie" (Ça c'est encore de l'argent Marie). 5- RéexpositionSe déroule à cheval entre la fin de la scène et englobe l'interlude qui suit. Il débute par les remords de Marie qui en appelle à sa propre destruction "Si je suis quelqu'un de malhonnête, je pourrais me tuer". Marie a retrouvé son humanité au contact de Wozzeck. Comme elle s'était durcie au contact du Tambour-Major. Ce qui fait de Wozzeck un élément pas si impuissant et pitoyable que ça, tout compte fait. Progressivement le Do majeur s'effrite, des si bémols s'invitent aux cordes. Les intervalles de la ligne de chant se distendent, Marie se noie, est écartelée. Elle crie un Fa# sur "Ach !" [4'47], elle monte, un La sur "Welt !" (monde) [4'48], monte encore sur "Teufel" (diable) avec un Si bémol [4'53], monte une dernière fois paniquée sur le fameux Si bécarre sur "Kind" (enfant) [4'58]. Elle pressent l'horreur qui va les emporter: "Ah, quel monde, qu'ils aillent tous au Diable, homme, femme et enfant". Pendant ce temps, l'orchestre reprend le matériel thématique: - Thème 1 aux cordes et cors mes 127 à 131 [4'39 à 4'44]- Pont: rappelé (vaguement j'en conviens) par la montée des vents [4'44]- La fin de la scène intervient, l'interlude débute par une descente en do majeur de harpe qui attaque par un Si mes 140. [4'59]- Thème 2 aux cors altos et trombones, mes 150 à 161 [5'14 attaque du thème aux trombones entendue très nettement) à 5'27]- Coda en strette à tout l'orchestre sur le thème du malheur de Wozzeck mes 162 à 165, puis deux accords fustigateurs du pont (mesure 166) [5'28 à 5'34]...et trois mesures de silence ! mesures 167 à 169. - Spoiler:
------------------------ Cette première scène du II est poignante, centrée autour de l'infidélité de Marie, le relatif silence de Wozzeck, la culpabilité de Marie, l'énoncé de la catastrophe à venir, celui qui paira les pots cassés, Bub'. Tout se précipite dans cette scène, chacune des suivantes ne viendra que confirmer les craintes de Wozzeck et conforter la décision prise par un destin social et psychologique qui paraît inéluctable. La lecture de cette scène structurée en sonate a été très difficile, j'ai tenté de résumer ce que j'ai pu en saisir, mis de côté des intuitions, délaissant carrément des indication de la littérature qui montrent la complexité bien plus profonde du travail de Berg que je n'ai pu le montrer ici. Ce qui est frappant, c'est de voir combien la structure de la sonate ainsi que son matériel motivique sont respectés sans en rien troubler le déroulement dramatique et esthétique d'une scène pourtant très brève, moins de six minutes. C'est ahurissant.
Dernière édition par natrav le Mer 16 Sep 2009 - 12:24, édité 6 fois |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Dim 30 Aoû 2009 - 23:36 | |
| - Wolfgang a écrit:
- J'ai lu le Woyzeck de Büchner, et j'ai pioché diverses analyses de cette oeuvre. Si ça en intéresse, je peux faire un petit topo à propos de ça.
C'est une bonne idée, voir ce qu'a rejeté Berg, ce qu'il a modifié par exemple. |
| | | frere elustaphe Aurelia Aurita
Nombre de messages : 10071 Age : 64 Date d'inscription : 17/12/2006
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Dim 30 Aoû 2009 - 23:38 | |
| - Spoiler:
T'as un aquarium ?
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| | | Percy Bysshe Mélomane chevronné
Nombre de messages : 9940 Date d'inscription : 06/04/2009
| | | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97928 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Lun 31 Aoû 2009 - 7:24 | |
| C'est très volontiers, d'autant que pour ma part j'aime beaucoup le texte de Büchner et sa langue tranchante mais presque tendre. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 9 Sep 2009 - 9:15 | |
| Il semble, d'après le fac-similé de la main de Berg, que cette partition fut dédiée à Alma Maria Mahler.
Difficile de déchiffrer le terme exact qui suit son nom, ça ressemble à "zùgecignet" ?? |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97928 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 9 Sep 2009 - 9:41 | |
| Zugeeignet : dédié à.
Il existe un lied célèbre et mignonnet de Strauss intitulé Zueignung (dédicace).
L'orthographe bizarre a pu t'induire en erreur, parce que les allemands font un mot composé sans accommodements phonétiques à la française : - eignen, c'est convenir, être approrié ; - zu indique la direction (zueignen, c'est donc donner à quelqu'un ce qui est fait pour lui) ; - et avant la base verbale on introduit 'ge' puisque c'est une forme de participe passé.
D'où zu-ge-eignet, ce qui est visuellement étrange. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 9 Sep 2009 - 11:48 | |
| C'est tout d'abord ce que j'avais écrit (et recherché en vain sur le net) mais l'orthographe me paraissant trop étrange, j'ai transformé le e en c. Sinon, les spécialistes schindlérien (qu'on peut lire ici ou là) en savent un peu plus sur cette dédicace, c'est un sacré hommage ! |
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Jeu 10 Sep 2009 - 16:44 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- En tout état de cause, écoute d'abord la musique sur MusicMe (essaie Böhm, c'est le moins brutal), et jette un oeil sur les scènes de Büchner. Ca te dira très vite si ça te tente ou pas.
Perso, je suis très bien rentré dedans grâce au drame. En musique pure, j'aurais peut-être décroché. Je conseillerais donc de suivre principalement le texte, en laissant la musique illustrer la psychologie sans se forcer à la "comprendre". |
| | | Pinch Mélomane averti
Nombre de messages : 204 Age : 42 Date d'inscription : 28/01/2009
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mar 15 Sep 2009 - 12:47 | |
| - jerome a écrit:
- DavidLeMarrec a écrit:
- En tout état de cause, écoute d'abord la musique sur MusicMe (essaie Böhm, c'est le moins brutal), et jette un oeil sur les scènes de Büchner. Ca te dira très vite si ça te tente ou pas.
Perso, je suis très bien rentré dedans grâce au drame. En musique pure, j'aurais peut-être décroché. Je conseillerais donc de suivre principalement le texte, en laissant la musique illustrer la psychologie sans se forcer à la "comprendre". j'ai procédé de cette façon aussi! Au casque, l'oeuvre d'une traite avec le livret et le choc fut immense! En revanche, j'ai du mal à écouter des extraits ou la musique sans le livret! |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mar 15 Sep 2009 - 19:58 | |
| Je ne sais plus pour moi, ça remonte à la nuit des temps. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 1:55 | |
| Acte II scène 2Scène à l’atmosphère très expressionnistes de par la crudité des thèmes évoqués (mort, angoisse, sexualité) alors que les formes musicales choisies ici par Berg ont leur racines qui s’abreuvent aux derniers feux de la Renaissance: une Fantaisie et Fugue à trois sujets. On retrouve, dans la rue, les deux bourreaux de Wozzeck: Capitaine et Doktor. Couple de compères. Compère ours (Capitaine gras, lent et oligophrène) et compère loup (Doktor maigre et nerveux à l’intelligence intuitive et perverse). Laurel et Hardy, les deux juifs moqués dans les Tableaux d’une exposition. Capitaine pour qui le monde va trop vite ( «Langsam, Wozzeck, langsam») et qui invite Doktor à ralentir le pas («Prenez votre temps»). Celui-ci emporté par une révolution, mouvement circulaire qui évoque l’idée fixe, satellisé autour de son idée de gloire immortelle, il ne laisse échapper que des «Pressiert, pressiert !» onomatopéiques (Pressé, pressé !), une sorte de Lapin échappé d’Alice au pays des merveilles. Le duo semble comique et pourtant un bras de fer sadomasochiste va s’engager entre le militaire et la Faculté. Elle se développe au cours de la Fantaisie en trois parties: 1- La rencontre et l’opposition des caractères, lenteur de Capitaine et excitation du Doktor 2- L’agitation de Doktor épuise Capitaine qui donne des signes de fatigue. Le médecin y voit l’occasion ‘d’assurer une emprise sur le pauvre homme qu’il effraie en associant sa fatigue avec le souvenir d’une patiente (puis de dizaines de patientes) morte en quatre semaines seulement d’un cancer de l’utérus (détail sans doute scabreux pour l’époque) 3- Doktor précise son projet en fixant l’espérance de vie de l’apoplectique Capitaine à ces mêmes quatre semaines. Au fur et à mesure qu’il décrit avec précision les symptômes qui emporteront son interlocuteur, sa jouissance augmente. Il joue de la suggestibilité du Capitaine qui paraît tout de même bien soumis et complaisant avec les attaques du Doktor. Ce dernier lui promet d’effectuer des «expériences immortelles» sur son futur corps d’hémiplégique. On imagine sans peine les deux protagonistes sortir fouet et chaînes pour se livrer à une partie SM quand Wozzeck survient et interrompt l’entretien pervers. L’atmosphère se détendrait presque. La Transition permet aux deux hommes de s’unir pour malmener WozzeckCapitaine rappelle au soldat sa condition presque ancillaire, il est son barbier: «Vous courez à travers le monde comme un rasoir ouvert, on se coupe à côté de vous» prophétise-t-il, «comme si vous aviez à raser toutes les barbes de l’Université» désignant Herr Doktor. La Fugue commence et avec elle un nouveau jeu cruel et grossier dirigé contre Wozzeck. Les échangent fusent alors au-dessus de la tête de Wozzeck. Capitaine glisse de l’idée de rasage à celui de poil, celui que « Wozzeck retrouvera dans son écuelle», allusion des plus grivoises à l’infidélité de Marie. «Le poil de barbe, barbe d’un sapeur, d’un sous-officier, d’un tambour-major !» Wozeck est perdu: «Que voulez-vous dire ? Vous voulez blaguer ?». L’humiliation est insupportable et Capitaine se délecte du désarroi de son aide de camp: «Voulez-vous vous brûler la cervelle ?» Doktor, cramponné au poignet de Wozzeck, exulte de sentir le pouls de son cobaye témoigner de sa souffrance: «Le pouls est court, dur, arythmique... Muscles faciaux rigides, tendus, yeux fixes.» Comme tout pervers, il est ému par ce qui lui est si étranger, la simplicité de Wozzeck, son honnêteté, sa naïveté, « Wozzeck un homme honnête». Wozzeck est mortifié: «C’est à avoir envie de se pendre». Il s’enfuit, bouleversé. ---------------------------------------------------------------------- Telle la scène précédente se concluant juste après la dernière réplique de Marie par un longue descente de gamme de do majeur à la harpe (mes 140), cette deuxième scène débute par la même gamme mais ascendante, comme un lever de rideau. Quatre octaves (mes 170) [0’00]I - Fantaisie:1° partie: mesures 171 à 187[0 à 0’56, CD, plage 7]: D’emblée sont présentés les deux thèmes de la fantaisie que nous connaissons déjà, superposés. Celui du Capitaine (TC) qui ouvrait l’acte I et celui du Doktor (TD) qu’on avait entendu discrètement lors de la Passacaille. C’est le TD qui ouvre la marche, exposé au basson et repris en diminution rythmique, le TC est exposé de façon concomitante au violon. Les deux hommes sur scène peuvent alors engager la conversation. mes 178 le TD passe au hautbois en croche pendant qu’il est donné en noires au violoncelle [0’24 à 0’29]L’atmosphère se tend mes 182 [0’38] sur une montée chromatique aux clarinettes, violons, altos culminant sur le «Toddrein» du Capitaine (Tombeau) avec un Si bécarre. Le sens de ce Si (et de l’intervalle Si-Fa) se précise désormais, il est associé à la mort. Le TD est aux violoncelles et clarinette en Si, le TC à la clarinette basse et basson. [0’42] A noter l’intervention du Doktor qui, agité, lance des «Pressiert, pressiert» sur le thème de l’Idée fixe. (mangé dans la version Boulez par Doensch) La fin de la partie 1 est organisée autour de l’intervention du Capitaine qui brode sur des thèmes morbides et s’achemine sur Si bécarre-Si bémol pendant que les clarinettes accélèrent le rythme sur le TD avant la conclusion, structurée sur une large oscillation de l’orchestre sur deux notes comme on le rencontre dans tant de fins de scène. 2° partie: mesures 187 à 200[0’57 à 1’40]L’inquiétude croît. L’orchestre figure-t-il les battements cardiaques d’un Capitaine impressionnable ? C’est cette palpitation qui s’invite à tout l’orchestre sous la forme d’une scansion d’accords de trompettes et de cordes, répétés en groupes de doubles croches, puis triolets de croches, croches, s’apaisant progressivement. [0’56 à 1’06]Suit alors un très beau passage qui tranche par sa suavité. L’orchestre est songeur, comme Doktor songe à l’ascendant qu’il peut prendre sur le Capitaine. Celui-ci vient lui offrir sa reddition sur un plateau «Je suis malade». Cela débute par la combinaison des deux thèmes (flûte pour TD et cors pour TC), ce qui a pour intérêt de noter la proximité des lignes mélodiques des deux motifs. [1’08] mes 190 Mais l’inquiétude revient avec les trilles des cordes [1’17], ce sont des frissons de terreur. Les deux thèmes réapparaissent bien énoncés par différents solos (cor anglais, basson...) facilement identifiables. Les trombones redonnent en trémolo la tachycardie [1’29 à 1’34] sous les mots du Capitaine qui demande grâce: «ampuren hellen Schreck» (de peur pure et simple) 3° partie: mesures 201 à 271[1’40 à 4’27]Elle débute sur d’amusants glissandi de violons qui dessinent le TC (qui se liquéfie ?) et prend un tour de valse. On avait déjà rencontré une valse au cours de laquelle Doktor constatait la démence de Wozzeck dans la Passacaille. La valse et sa ronde ivre, c’est finalement l’idée fixe du médecin, sa folie diagnostique à disséquer ses contemporains. Berg va citer textuellement deux mesures de ce passage de la scène 4 du I. Variation 13 de la Passacaille mesure 565 [2’05 à 2’16]. La valse reprend de plus en plus large et avec elle le jeu sadique du médecin qui promet la paraplégie à sa victime. «Apoplektische Konstitution !» apostrophe-t-il le Capitaine. Le ton inquiétant transforme la danse en marche fatale. Le thème issu de la passacaille se fait encore discrètement entendre aux cordes [3’16]. Un joli moment où sont encore proposés de façon superposés les deux thèmes dans une instrumentation originale, piccolo, cor anglais et violoncelle. [4’09]Il reste au Capitaine à s’abîmer dans la pensée de sa propre fin, son enterrement, pensées de mort qui amènent la dernière syllabe sur un long si bécarre. «Mensch» II - Transition [4’28 à 5’20] Mesures 271 à 285 Elle prépare la fugue en amenant le troisième sujet de la fugue. Me semble un passage intéressant à regarder de près. a. mesure 272 [4’27]un petit motif cinglant et descendant aux trompettes que j’appellerais bien le thème cruel. Il accompagne Doktor qui interpelle : He ! Wozzeck !... b. mesure 273 [4’31]...aussitôt suivi de la reprise de la très belle descente chromatique de la scène 2 de l’acte I. Elle est reprise ici aux trombones divisés par 4 dans une harmonie bien moins séduisante, au rythme lent et pesant. On la reconnaît cependant, c’est le Thème du malheur de Wozzeck. c. mesure 275 [4’37]Le motif cruel revient soutenir Doktor qui vient encore appeler: « Wozzeck !» d. mesure 276 [4’41]Le malheur de Wozzeck revient dans une formulation différente, trombones et cordes e. mesure 277 [4’49]Le motif cruel, ascendant maintenant, aux hautbois puis il rebondit à tous les pupitres associé à l’image d’un wozzeck qui «court à travers le monde...» un beau figuralisme ici. Renforcé par un second, le sifflet coupant de l'extrême aigu de tous les pupitres sur «On se coupe sur vous» [4’55 à 5’00] mes 280. Image musicale que Bernard Herrmann saura réemployer presque littéralement dans la scène de la douche de Psychose f. mesure 280 [5’00]A nouveau le thème du malheur de Wozzeck à tous les pupitres mais de plus en plus déformé. g. mesure 283 à 285 [5’07 à 5’20]Le motif cruel en diminution rythmique accompagné de pizzicati acerbes, s’apaise, enfin satisfait, il ralentit jusqu’à la fin de cette transition. On voit bien dans ce bref passage toute la dynamique de la scène résumée musicalement. Le thème narquois et sautillant, c’est le sadisme des deux hommes appliqué à Wozzeck qui déclenche à chacune de ses intervention le Malheur de Wozzeck, jusqu’à le démolir, le déformer. La fugue peut commencer. III - FugueMesures 286 à 365 [5’21]Je ne vais pas vous infliger le découpage de cette longue plage de façon analytique, peut-être que j’y arriverais mais dans ce cas on ne me reverrait que dans 6 mois. On laissera de côté toute la complexité de cette forme, les canons de la fugue (désolé, fallait que je la fasse celle-là) que Berg semble respecter selon ce que je crois voir. On ne s’intéressera pas aux contre-sujets, aux réponses à la dominante, à tous les renversements rencontrés. Présentation du premier sujet (TC) au cor anglais, repris en canon par le chant du Capitaine et au basson, le violoncelle venant broder sur les trois premières notes du sujet. L’atmosphère change avec cette deuxième partie de la scène. Alla Bach, des notes bien détachées, une partition nette, peu de lignes mélodiques, peu d’intervention de voix qui n’ont pas de rôle contrapuntique dans ces premières mesures. Le deuxième sujet (TD) est présenté en pizzicati de blanches au violoncelle (mes. 292) [5’39] simultanément avec l’entrée du chant de Doktor «Ein Langer Bart...» (écorché à vif par Doensch avec Boulez). Le sujet est alors repris à tous les pupitres. Irruption assez incongrue du thème de la science chanté sur «Man muss ihn den Soldaten», introduit par un petit dessin rapide en triple-croches au violon, le TC. Les deux thèmes sont associés. mes 296 [5’49]Les deux thèmes s’entremêlent maintenant comme les deux hommes associent leur chant (et leur projet meurtrier). Le jeu est prenant de décortiquer les sujet qui reviennent maintenant inversus ou rectus e diminution ou augmentation. On n’entend pas toujours tous ces détails. Je vous en ferai grâce. ...non, n’insistez pas. Bon, vous l’aurez voulu - Spoiler:
Meu non ! J’plaisante
Changement de climat. Doktor chante son thème en arioso, soutenu par le violoncelle en blanche [6’05] mesure 302, suit un très beau moment orchestral [6’11] où se mêlent les deux sujets (rectus et inversus) et le thème diatonique de la science. Le chant du Doktor est réduit à de simples «Hummmmm». L’ambiance polyphonique et archaïsante qui se dégage de ce passage évoque les messes du moyen-âge, le choral luthérien, le duo des hommes armés de la Flûte enchantée. Mais ici le duo est effrayant, les deux hommes, enfin de concert, vont harceler Wozzeck. C’est ici que le Capitaine évoque les poils de barbe qui dénoncent l’infidélité de Marie. L’aspect contrapuntique de plus en plus serré renforce le caractère implacable de l’action psychologique sadique mise en oeuvre. La fugue n’est pa sgentille. Petite vengeance de Berg à l’égard d’un professeur de contrepoint, sorte de Doktor du temps de ses études musicales ? Les sujets se diluent progressivement, présents désormais par petits fragments ou de simples intervalles résumant les thèmes. Doktor interpelle Wozzeck [6’29] mes 310 et le troisième sujet, le thème du Malheur de Wozzeck, s’invite sous la forme d’entrées en canon, à la quinte diminuée et à la neuvième mineure aux trombones, pupitre divisé par quatre. La deuxième partie de la fugue débute avec la réponse du Capitaine à Wozzeck qui l’interroge sur les raisons pour lesquelles il cherche à l’inquiéter. Il chante son thème soutenu au piccolo par TC en rectus mes 317 [7’01] et suivi en inversus par le violoncelle mes 319 [7’04]. Les deux hommes échangent sur un contrepoint de plus en plus serré, les deux thèmes et contre-sujets envahissant tous les pupitres. La troisième partie de la fugue voit Doktor rejoindre la conversation, les trois hommes vont chanter de concert, les trois sujets sont sont donc développés ensemble. On voit bien comment ici l’organisation de la fugue, son développement suit pas à pas l’action dramatique. Comme pour la sonate, le drame justifie la forme choisie. Le Doktor s’impose donc mes 336 [8’02], violon et chant pour TD sur «Den puls, Wozzeck !» (Le pouls, Wozzeck !) Inutile de dire quel tricotage serré nous construit ici Berg, les sujets des deux tortionnaires envahissant tout l’espace orchestral, étouffant ! Mais au dessus de cette mêlée, le thème du malheur de Wozzeck aux trombones, simple et lourd, triste. mesure 339 [8’10] On retrouve l’idée proposée lors de la transition. Les bourreaux ne se calment pas pour autant, les trois thèmes continuent de se mêler de plus en plus étroitement. Wozzeck, désespéré, se met à hurler «Gott in Himmel» (Dieu du ciel) sur son thème. [8’17] L’orchestre n’est plus que pizzicati. TC et TD s’éteignent d’eux-même, leur forfait accompli. Pause, et la dernière phrase de Wozzeck: «Dann wüsste man, woran man ist !» [8’32] L’acmé de cette scène atteinte, Doktor et le Capitaine rajoutent quelques moqueries sur l’affolement de Wozzeck soutenus par un très bel orchestre, accelerando, d’abord par une sonnerie de l’ensemble des vents qui n’est autre que le thème cruel [8’38], puis s’apaisant progressivement ne laissant à nu que les thèmes qu’on entend distinctement, et la toute fin de scène qui voit réapparaître une large oscillation de l’orchestre [9’28] autour d’un intervalle de tierce mineure.
Dernière édition par natrav le Mer 16 Sep 2009 - 12:22, édité 1 fois |
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 7:35 | |
| - natrav a écrit:
- valse.
On avait déjà rencontré une valse au cours de laquelle Doktor constatait la démence de Wozzeck dans la Passacaille. La valse et sa ronde ivre Amusant que la valse soit utilisée pour illustrer la folie, la maladie. Pour un Viennois avant-gardiste, elle représente la décadence ? - Citation :
- mesure 272 [4’27]
un petit motif cinglant fait d’arpèges brisés descendants aux trompettes que j’appellerais bien le thème cruel. M'sieur, M'sieur, je ne vois pas les arpèges brisés... La trompette descend vraiment au do# 2 ? |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:07 | |
| Je ne savais pas vraiment comment donner une idée de ce motif qui est doublé à la tierce et à la quinte inférieures par les 3 autres trompettes. Pour le do#, la partition note un la bémol sous la portée trompette en fa ? |
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:11 | |
| Ben si en plus les autres trompettes sont plus graves, c'est forcément à transposer vers l'aigu. Enfin, je crois. A l'écoute, c'est hyper-grave, ou un registre normal ? |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:11 | |
| - jerome a écrit:
- Pour un Viennois avant-gardiste, elle représente la décadence ?
Peut-être l'idée qu'un rythme ternaire est plus "déséquilibré" qu'un rythme binaire ? |
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:15 | |
| Mais il fut un temps où le ternaire était la noblesse incarnée Tempus perfectum... |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:15 | |
| L'extrait en question (manque le premier groupe de notes page précédente). - Spoiler:
|
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:17 | |
| Le plus simple est de réécouter l'extrait. Tu sais ce que signifient ces "o. D." ?
"Ohne Dämpfer ?"
Dernière édition par jerome le Mer 16 Sep 2009 - 8:19, édité 1 fois |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:17 | |
| - jerome a écrit:
- Mais il fut un temps où le ternaire était la noblesse incarnée
Tempus perfectum... Ravel avait déjà écrit sa Valse. On a cette représentation inquiétante aussi avec le Baron Ochs (sa lubricité) dans le Chevalier à la rose. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:20 | |
| |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:24 | |
| A la réflexion ce n'est pas si grave que ça. Je me suis contenté de transcrire à la quinte inférieure, c'est que de la complication ces cuivres et ces bois. Si tu savais rétablir la phrase exacte... |
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:26 | |
| Eh bien, à la quarte supérieure |
| | | Mehdi Okr Mélomaniaque
Nombre de messages : 1703 Date d'inscription : 04/02/2009
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:29 | |
| - jerome a écrit:
- Le plus simple est de réécouter l'extrait. Tu sais ce que signifient ces "o. D." ?
"Ohne Dämpfer ?" Je l'ignore, mais ça paraîtrait logique à côté de m.D. et m.Dpf. qui doit alors être "mit Dämpfer". |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 16 Sep 2009 - 8:34 | |
| Bon, je rétablirai et pour la peine je me taperai les autres voix. Edit: c'est fait ! |
| | | jerome Fugueur intempéré
Nombre de messages : 8896 Date d'inscription : 10/03/2008
| | | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Jeu 17 Sep 2009 - 0:59 | |
| Génial ! Je cherche ça. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 0:02 | |
| On s'est interrogé sur la présence de huit contrebasses dans la fosse pour l'exécution de Wozzeck il y a quelques jours. Si Berg précise le nombre de chaque bois ou cuivre, il est évasif pour les cordes dont il semble laisser la répartition à la discrétion du chef: "Cordes: 50 à 60 au moins." |
| | | Octavian Glasse les fraises
Nombre de messages : 7333 Age : 41 Localisation : Près du Vieux Port Date d'inscription : 07/05/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 0:13 | |
| Natrav, je ne veux pas te mettre la pression, mais puisque tu te plaignais toi-même de ton manque de motivation à retranscrire tes notes : tu sais que j'attends la fin de ta présentation détaillée pour partir vraiment à la découverte de cet opéra?.... |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 0:17 | |
| J'ai achevé la très belle scène 3 du II ce soir. J'espère la poster demain. |
| | | Octavian Glasse les fraises
Nombre de messages : 7333 Age : 41 Localisation : Près du Vieux Port Date d'inscription : 07/05/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 0:22 | |
| |
| | | Passage De passage pour longtemps
Nombre de messages : 2134 Localisation : Paris Date d'inscription : 06/07/2007
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 0:29 | |
| - natrav a écrit:
- On s'est interrogé sur la présence de huit contrebasses dans la fosse pour l'exécution de Wozzeck il y a quelques jours. Si Berg précise le nombre de chaque bois ou cuivre, il est évasif pour les cordes dont il semble laisser la répartition à la discrétion du chef: "Cordes: 50 à 60 au moins."
C'est le nombre standard en disposition 16/14/12/10/8 pour les cordes, rien d'étonnant. C'est plus compliqué pour La Mer quand Debussy divise les violoncelles en quatre parties et en demande quatre pour chaque partie: aucun orchestre moderne ne réunit autant de cordes. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 0:32 | |
| En même temps, ce qui semblait surprenant, c'est que les cordes restantes ne semblaient pas si nombreuses que ça, mais difficile d'évaluer sans doute. |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97928 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| | | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Mer 23 Sep 2009 - 9:22 | |
| Rédigé, le résumé du livret et l'intro à la musique ce matin. Ce sont les galères ici ! |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Jeu 24 Sep 2009 - 0:18 | |
| Acte II scène 3Mesures 367 à 411 [9'34 piste 7 à 3'46 piste 8 ]Berg: Le mouvement lent de cet acte en forme de symphonie est un largo; en dehors des rapports thématiques habituels qui font de ce largo un mouvement bien délimité, on y trouve une autre particularité: l'instrumentation fait appel à un orchestre de chambre. Elle reprend exactement la formation instrumentale de la Symphonie de chambre de Schoenberg op 9. Je voulais ainsi rendre hommage à mon professeur et maître en cette scène centrale et déterminante pour le cours de mon opéra.------------------------------------------ Scène centrale de l'opéra, scène fatale de par ses implications pour le couple Wozzeck-Marie. Les mots qui fâchent sont prononcés, les aveux sont faits, les menaces et les provocations ne resteront pas sans conséquences. Chauffé à blanc par ses deux "mentors", Wozzeck débarque chez Marie qu'il accuse d'infidélité: "Un péché de cette taille devrait puer jusqu'à déloger les anges du ciel". Marie répond par la provocation quand il l'interroge sur la présence supposée du Tambour-Major: "Beaucoup de gens peuvent se trouver à un endroit l'un après l'autre !" Elle avoue: W: "Toi avec lui ?" M: "Et alors ?" W: "Salope !" Wozzeck veut la frapper et Marie lui propose presque un dénouement parfait à l'humiliation qu'il subit: "Plutôt un couteau dans le corps qu'une main sur moi" Si le Tambour-Major violente Marie pour la posséder, Wozzeck en est réduit à ne pouvoir que la suriner. La haine est à son paroxysme. Marie laisse échapper ce qui me semble être une des clés à la compréhension de son personnage et au destin auquel elle se livre passivement, la violence paternelle qu'elle a dû repousser dès son enfance. Dénégation: "Même mon père n'a pas osé quand j'avais dix ans". Violence et amour indissociables. Marie sort, laissant un Wozzeck hagard: "Plutôt un couteau" répète-t-il. "L'homme est un abîme, la tête nous tourne quand on regarde au fond". ------------------------------------------ Ce largo est organisé sous une forme de lied tripartite ABA (Largo - Agitato - Largo) avec un passage centrale rapide entouré de deux épisodes lents qui voient des éléments thématiques communs s'organiser sous forme antérograde dans la première partie et rétrograde dans la dernière. L'effectif instrumental recouvre très exactement celui de la Symphonie de chambre de Schoenberg (à 13 instruments en 1906, passée à 15 lors de sa révision en 1922). Pièce charnière dans l'oeuvre de Schoenberg du point de vue formel, avec une organisation complexe qui associe la symphonie et la sonate, et reste audacieuse de par les matériaux utilisés: construction de thèmes mélodiques reposant sur des séries de quartes et la gamme par tons, la tonalité en prend un coup, à noter aussi la raréfaction instrumentale, le gigantisme des pièces précédentes est abandonné. Cette oeuvre fit scandale à sa création. Pas facile à aborder, âpre mais très belle. Je vous la recommande. Flûte (alternée avec un piccolo) Hautbois Cor anglais Clarinette en mi bémol Clarinette Clarinette basse Basson Contrebasson Deux cors en Fa Un quintette à cordes Le chant est essentiellement du sprechstimme et l'échange entre les deux protagonistes est lapidaire, trois minutes tout au plus. ------------------------------------------ I - LargoMesures 367 à 387 Le rideau se lève et voit s'enchaîner en à peine 7 mesures, six thèmes fondamentaux qui vont structurer musicalement et dramatiquement toute la scène: - Thème de Marie - Frayeur de Wozzeck- Idée fixe - Fanfare militaire - Accord de la mort (Marie plongée dans ses pensées) - Thème de WozzeckTout est résumé en quelques secondes, la femme, le mari, l'amant, la peur, la folie, le meurtre. Le théâtre peut commencer, la musique a tout dit mais va continuer d'en dire plus que le livret. Pour plus de précisions: - Spoiler:
- Thème de Marie [Seconde mineure + Tierce mineure]dissimulé dans le solo de violoncelle: [9'34 à 9'39] Beau et inquiétant. (- petit thème à retenir, en contre-sujet du thème de Marie au violoncelle qui reviendra à la fin de la scène [9'42 à 9'46] ) - Frayeur de Wozzeck [9'56 à 10'03] scandé à la contrebasse, hautbois et cor anglais, le destin frappe à la porte. - Thème de l'Idée fixe rappelé par le chant du cor, étiré [9'54 à 10'06]
- Thème de la mort, Marie perdue dans ses pensées: [0'00 à 0'10] même harmonie qu'à la scène 3 de l'acte I, les cordes dans l'aigu sur balancement la-mi bémol à la contrebasse, mystère. - Thème de la fanfare militaire ascendant à la flûte [0'02 à 0'04], il est aussi le Tambour-Major, au-dessus des autres voix, hors champ. - Thème de Wozzeck au basson [0'08]
Tous ces éléments thématiques vont revenir soutenir les interventions des deux protagonistes, assez facilement repérables, la distribution de l'orchestre chambriste étant d'une grande clarté. Ils iront même jusqu'à contredire ce qui se dit sur scène, révélant les réelles motivation ou craintes de Marie notamment. La musique signifie plus que le livret, peut-être qu'on ne retrouve ça que chez Wolf dans ses lieder à ce niveau. Par exemple: ...dès le début de l'échange entre les deux personnages: [0'08 à 0'12]Marie salue Frantz, Wozzeck répond "Je ne vois rien" faisant allusion au péché de Marie. Pendant ce moment, presque tout l'orchestre instille une oscillation sur une tierce mineure (descente au cordes et balancement aux bois), citation du début de la scène 2 de l'acte II (dans les bois avec Andrès) où Wozzeck déclarait "L'endroit est maudit". C'est aussi ce qui symbolise de plus en plus précisément le couteau. ...Marie s'inquiète de l'agitation psychique de Wozzeck "Qu'as-tu Frantz" juste après l'intervention du motif de la frayeur [0'27] au basson et clarinette basse. ... Quand Wozzeck fait de lourdes allusions à la bouche rouge de Marie recouverte d'ampoules à force d'embrasser, on entend juste auparavant le motif du Doktor [0'58 à 1'01], celui-là même qui avait dénoncé l'infidélité de Marie à Wozzeck. ...Marie: "Tu es fou furieux Frantz" ----> Tierces mineures aux bois [1'08]Tout l'échange est ainsi éclairé par ces citations, ces menaces et ces peurs que Marie ou Wozzeck feignent de ne pas éprouver ou de proférer. La distance créée ainsi par Berg entre les paroles doucereuses dans un premier temps de Wozzeck alors qu'il bout ou les inquiétudes feintes de Marie pour Wozzeck, sa morgue alors qu'elle est morte de trouille apporte une grande profondeur psychologique à cette scène. II - Agitato[1'29 à 2'35]Mesure 387 à 397 Partie la plus courte, une grosse minute, au coeur de la scène du coeur de l'acte central. Le coeur de l'action, le conflit ouvert entre les deux conjoints. Deux orchestres en présence, celui qui accompagnait la première partie, seul, l'orchestre de chambre et qui soutient inconditionnellement Wozzeck, et le grand orchestre (réduit le plus souvent aux cordes trompettes, trombones) qui n'intervient que sur les paroles de Marie. Là également d'autres thèmes déjà rencontrés viennent ponctuer le discours "evident" Le tempo accélère jusqu'à atteindre le Molto agitato quand Wozzeck s'exprime et A tempo sur les paroles de Marie. Pour plus de précisions: - Spoiler:
On conserve la même structure orchestrale, chaque réponse de Wozzeck est accompagnée de l'orchestre de chambre, chaque réponse de Marie est soutenue par le grand orchestre.
- [1'29] Wozzeck est jaloux. Le thème du Malheur de Wozzeck est entendu aux contrebasses, ostinato, vrombissant, ce malheur est à son comble "Etait-il là ?" S'inquiète-t-il en parlant de son rival, et c'est l'irruption du thème du Tambour-Major au piccolo, clarinettes et violons.[1'33] L'association des deux thèmes est particulièrement frappante.
- [1'35] Marie répond avec le grand orchestre, calme, les cordes répétant le Thème érotique ascendant, aux cordes, qu'on avait rencontré dans la même instrumentation dans la scène avec le Tambour-Major. C'est l'aveu musical renforcé par la phrase: "Je ne peux pas interdire la rue aux gens", comme elle n'a pu interdire l'entrée du Tambour-Major chez elle !
- [1'40] Wozzeck répond avec son malheur toujours aux basques: "Etait-il là ?"
- [1'45] Marie répond avec le thème érotique , réponse plus longue, le Thème est plus développé, Marie s'affirme, fait mine de ne plus craindre Wozzeck. Elle avoue qu'un homme peut être là, "l'un après l'autre".
- [1'57] Wozzeck est bouleversé, écorché vif, le Thème du malheur se fait entendre précipité au vent: "Je l'ai vu ici !"
- [2'00] Marie moque Wozzeck et sa cécité tandis que l'orchestre (Trompette et timbales ) reprend la chanson de Marie qu'elle entonnait lors du défilé au début de la scène 3 du I: "Soldaten, soldaten..." La provocation enfle.
- [2'11] Wozzeck: "Toi avec lui !"
- [2'16] Et c'est là que Marie prononce les mots qui tuent: "Plutôt un couteau dans le corps qu'une main sur moi.". déclamé sur un glacis de cordes filées trémolo très évocateur du tranchant qui la tuera. Le tout en une descente chromatique qui préfigure celle qu'on entendra au bord du lac de sang dans lequel s'abîmera Wozzeck. La mort est là.
Les deux orchestres fusionnent, le tempo s'apaise. III - LargoMesures 398 à 411 Marie sort, Wozzeck se retrouve seul, halluciné. Il répète les derniers mots de Marie: "Lieber ein Messer" Je préférerais un couteau... [2'38]. Toujours cette descente chromatique inquiétante, des cuivres ricanant, l'orchestre semble patiner, comme la pensée de Wozzeck qui se fraie un chemin vers la prise de conscience de la solitude dans laquelle il se noie. Wozzeck lance un "Der Mensch ist ein Abgrund" (L'homme est un abîme) qui culmine sur un Si. [2'50]C'est alors que tout l'orchestre plonge dans ces abysses puis remonte tout aussi brusquement et replonge dans une harmonie très distendue, grotesque, aux timbres étranges. Wozzeck a le mal de mer, le chaos n'est pas loin. Une dernière succession de ces vagues et de ces creux [3'06] qui plongent et émergent sur des Si. Le désarroi, la dissociation psychique de notre homme sont entièrement exposés à l'orchestre. "La tête me tourne". Wozzeck se tait. L'orchestre reprend le thème qu'on avait entendu en contre-sujet au violoncelle au début, il ferme la scène et s'étage à tous les pupitres [3'10 à 3'33] avant de conclure sur une oscillation Sol# Mi bémol qui s'apaise pour nous conduire à la scène 4. |
| | | antrav Papa pingouin
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| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Lun 19 Oct 2009 - 1:03 | |
| Acte II, Scène 4Le quatrième mouvement de cette symphonie que constitue cet deuxième acte, respect de la tradition: Scherzo et Trio. Scène sans action qui croque la déliquescence sociale et morale du monde qui gravite autour de wozzeck. La valse, ou le ländler , de la même eau que celle de Ravel (dans l'esprit, hein ! pas dans la forme), folle et boiteuse. Toute la perception de cette scène semble déformée par la vision de Wozzeck. Berg délaisse le naturalisme cru des scènes précédentes pour un expressionnisme plus profond, plus proche de la souffrance de l'homme Wozzeck: orchestre désaccordé, danses bancales, joie artificielle, mouvements mécaniques de la foule et de sa danse. Vision picturale qui m'évoquent les déformations violentes ou écorchées d'un Soutine, d'un Otto Dix ou d'un Münch. Berg suspend l'action pour un instantané photographique d'une humanité plutôt pitoyable. Le cabaret, la guinguette c'est selon, mais on y danse et l'on y joue de la musique. Deux orchestre interviennent, le grand orchestre dans la fosse et celui de l'auberge: des violons accordés sur La, Mi, Si, Fa (au lieu de Sol, Ré, La, Mi), clarinette en ut, accordéon, guitare, bombardon, tuba basse et un piano. Des timbres crus, vulgaires, l'ambiance est au bastringue, elle est glauque, l'assemblée est déjà passablement ivre, de cette ivresse poisseuse qui fait virer l'humeur au dégoût, de soi et du monde, à l'apitoiement et à l'oubli. "mon âme pue l'eau-de-vie" , "Pourquoi le monde est-il si triste ?" , "Le monde entier est rose, l'eau-de-vie c'est ma vie" chantent les fêtards. Les trois protagonistes entrent en scène sur la valse. Marie et le Tambour-Major, grisés par leur étreinte scandent des "Immer zu" aux déhanchements sexuel des plus suggestifs. Wozzeck est là, les épiant, se brûlant le regard: "La femme est chaude, pourquoi Dieu n'éteint-il pas le soleil ?" [le texte de Büchner complète plus explicite: "...pour que tout se roule pèle-mêle dans la luxure, homme et femme, homme et bête ?" ] Le drame qui se joue en Wozzeck est à peine suggéré par quelques mots: "Verdammt. Ich...''. Il est vite englouti, méprisé par la foule animée d'une gaieté forcée. Les hommes entonnent autour du chant soliste d'Andres une chanson de chasse ou à boire. Ce dernier rejoint Wozzeck, s'étonne de son humeur sombre, celui-ci poursuis ses ruminations morbides "Je suis bien assis, là, et dans une tombe froide, je serai mieux encore."Un ivrogne vient justifier les laideurs du monde dans un monologue aviné: "De quoi auraient vécu le soldat et l'aubergiste si Dieu n'avait pas créé l'homme pourvu du besoin de tuer de de s'humecter le gosier ? Même l'argent tombe en putréfaction et mon âme pue l'eau-de-vie." Mouvement de foule. Après Andres, c'est au tour du Fou de s'approcher de Wozzeck. Nul besoin d'être grand clerc pour pouvoir lancer un: "Ça sent le sang". Wozzeck se brise à ce moment précis - la musique le dira ô combien - et plonge dans une nouvelle folie: "Tout devient rouge devant mes yeux." La vision du sang devient obsédante et ne s'éteindra qu'avec la vie de Wozzeck. ----------------------------------------------------------------------- Classique quatrième mouvement de la symphonie nous disions, le scherzo est construit sur une double forme A-B-A, Scherzo - Trio - Scherzo (avec reprise A-B-A), ces deux parties encadrant un Trio central. Traditionnellement pièce de danses, le menuet est remplacé par Berg par une valse et un ländler qui animent le bal de l'auberge. On reste dans des rythmes ternaires. Berg multiplie les plans de symétrie Scherzo et trios alternés, Trio central lui même organisé en trois parties, tonalité alternant avec atonalité, Grand orchestre alternant avec celui de la guinguette et pourtant l'ensemble reste très fluide. Scherzo I dans le détail: - Spoiler:
Principalement constitué de l'Interlude voit exposer le Ländler [piste 8: 3'48] dont le thème est constitué de secondes mineures. Ce ländler intervient à nouveau à la toute fin de cette partie avec l'orchestre de cabaret et l'intervention des deux apprentis [Piste 9: 0'00] Entre ces deux moments, la Valse. Beau passage chambriste comparativement aux ländler: violon solo, célesta, harpe et basson [4'18]Le deuxième ländler [piste 9: 0'00] voit exposer le thème de l'ébriété (Mon âme pue l'eau-de-vie) Trio I dans le détail: - Spoiler:
Le grand orchestre revient [0'10] mesure 447 avec un motif tonitruant: les pupitres de cors et de trombones se répondent en des ricanements gras qui figurent sans doute la foule bruyante du cabaret. Des montées et descentes constituant des harmonies changeantes qu'on retrouvera sous forme atténuée dans les autres trios.
Les deux ivrognes, le gai et le triste échangent sur le sens de la vie (sous influence) soutenus par des glissandos de cordes et le thème de l'ébriété aux trombones et harpes pour Tristus et des trémolos de l'orchestre pour Rigolus. C'est le triste qui l'emporte et s'apitoie sur son sort: "Traurig, traurig, tra..." fermant le trio et accompagné du début de la valse du Scherzo II. Berg utilise ce procédé de tuilage entre chacune des parties de cette scène évitant les transitions brutales.
Scherzo II dans le détail: - Spoiler:
Une valse et à nouveau l'orchestre de l'auberge. Le grand orchestre s'invite subrepticement [2'09] mesure 495 pour rappeler le thème de Wozzeck (cordes et bois) et signifier sa présence, épiant le couple excité qui chante des "Pour toujours, pour toujours !". Les thèmes vont s'enchaîner très rapidement aux différents pupitres, commentant les idées qui parcourent la psyché du héros, beau procédé plus psychologique que dramatique [2'28]
Idée fixe: violons, mesure 505 Tambour-major: clarinettes et violon, mesure 505 Thème érotique et de la séduction: clarinette et accordéon, mesure 510 Chanson de Marie aux soldats: bombardon, mesure 511
La coupe est pleine, Wozzeck exulte: " Pourquoi Dieu n'éteint-il pas le soleil ?" accompagné du grand orchestre qui s'invite [2'40] encore pour une belle citation de la scène de la forêt avec Andres (cf piste 2, 5'00). Le thème de la frayeur résonne alors à tous les pupitres.
La valse reprend jusqu'à la fin accompagnant les ahanements de Marie et le Tambour-major.
Une citation ébauchée de l'échange cors-trombones du début du trio I (montées et descentes) annonce le Trio II
Trio II dans le détail: - Spoiler:
De construction A-B-A: Grand choeur masculin a cappella 1 Chanson d'Andres accompagné à la guitare Grand choeur masculin a cappella 2 La symétrie est renforcée par les lignes mélodiques montantes dans le premier choeur et descendantes dans le second comme s'étaient construits les appels de cors et de trombones dans le trio I. La chanson d'Andres culmine sur un Si bécarre (huit mesures), le cri d'alarme. Si qui est au centre de ce trio lui même au centre de la scène. La phrase ascendante du choeur 1 utilise les notes naturelles Do, Ré, Mi, Fa, Sol et La, le refrain "Hali, Halo !" la complétant en utilisant les notes altérées en un accord: Réb, Mib, Solb et Lab. Dix notes de la gamme chromatique. Arrive Andres et sa chanson qui monte dans l'aigu, s'appuie sur un Sib et lance triomphalement le Si bécarre. Presque un total chromatique dans l'esprit tout du moins. la chanson d'Andres est issue du début du Thème d'Andres. Le Choeur 2 reprend les même éléments mais de façon rétrograde. Scherzo III dans le détail: - Spoiler:
Le grand orchestre revient pour accompagner le passage le plus intime. Sombre, douloureux, ramenant la tonalité de sol mineur, dominé par une pédale mélodique des cordes graves sur le thème du ländler (Sib, La, Mib, Ré). L'orchestre du cabaret reprend lui aussi le thème du Landler. Les cordes de l'orchestre amorcent des ondulations chromatiques dont le pathétique est renforcé par les pizzicati des violons du cabaret [4'55], c'est vraiment le désespoir de Wozzeck. Les cordes descendent progressivement pour accompagner Wozzeck au tombeau ("Dans la froide tombe") [5'10] On aura reconnu le thème de la dispute de Marie et Wozzeck (II, Scène 3) énoncé aux cors [5'05], Wozzeck reste toujours plongé dans l'affliction de cette dispute. Trio III dans le détail: - Spoiler:
Constitué d'un mélodrame, c'est à dire d'une pièce musicale sur lequel est déclamé un texte. En l'occurrence, l'ivrogne est tellement dysarthrique qu'il aurait bien du mal à chanter. Harmoniquement, toute cette partie repose sur le début du Trio I (dialogue cors-trombones). Pour commencer, le bombardon qui accompagne le chant de l'ivrogne, déroule un lent choral reposant sur les notes du "dialogue", enfin et plus nettement, lors de la conclusion de ce trio on retrouve les double-croches en motif ascendants massivement exprimés aux vents [7'06 à 7'23] (avec une intervention du choeur et d'Andres.) Puis suit une merveilleuse orchestration de ces éléments [7'23 à 7'35] où le célesta reprend le motif ascendant et descendant tel un mouvement perpétuel soutenu par les cordes en triolets, un roulement continu de caisse claire qui s'amplifie. Des ponctuations de bois associés à des doubles coups de grosse caisse. L'effet est saisissant, hallucinant. Toute cette machine subtile prépare le moment clé de cette scène, l'intervention du fou. Scherzo IV dans le détail: - Spoiler:
Constitué de la rencontre de Wozzeck et du Fou puis de l'interlude. Comme une pause, l'orchestre semble, en apparence, bien désoeuvré. Les violons s'accordent en miaulant, sur La, Mi, Si, Fa (Si-Fa fatidique intervalle de la Mort). D'ailleurs ils insistent sur ce Si [7'44 à 7'52]. La clarinette en ut égrène un motif descendant qui rappelle le motif de la Folie du docteur juste après l'intervention du Fou sur "Lustig" débutant sur un Si et chanté sur une seconde mineure. Tout fait sens chez Berg et on se rend compte, dans de tels passage qui semblent si simples, de l'importance qu'il accorde à ces détails chiffrés. Les intervalles sont ses mathématiques, on ne les entend pas toujours mais elles sont omniprésentes. Le silence se fait, juste un roulement de caisse claire. Le Fou, avec une délectation perverse, lentement, déroule les paroles qui vont tuer Marie et Wozzeck. - Ça sent ! - Quoi ? dit Wozzeck ? - Ça sent, ça sent le sang ! criaille le Fou en voix de fausset - Le sang ! Le sang" tressaille wozzeck en grimpant dans l'aigu [8'28]Du Ré au Mib, il grimpe d'une 9° mineure, extrapolation de son intervalle (seconde mineure + octave) Aussitôt l'orchestre de l'auberge entame la valse pendant que le grand orchestre fustige Wozzeck à tous les pupitres durant tout son cri sur "Blut" en rythme acerbe de triple-croche, croche doublement pointée. La valse est maintenant une danse macabre qui accélère pendant que Wozzeck hurle ses hallucinations sanglantes. L'interlude [8'55 à 10'31] mesures 685 à 736: Le raffinement orchestral y est d'une richesse incroyable et ceci est d'autant plus marquant que c'est au service d'un moment finalement très trivial. Il va reprendre beaucoup des éléments du scherzo mais pour composer une nouvelle valse, déjantée, agressive, de plus en plus complexe. On y entend passant souvent d'un pupitre à l'autre, les thèmes de la valse, le "Immer zu", le thème du Tambour-major ( le rythme qui s'échange passe hautbois et aux cordes en pizzicatos), tout se fond en une science qui laisse pantois malgré l'enflure qui rend cette valse grotesque. Toutes les voix se font entendre. Préfiguration du dernier interlude, véritable monument musical. Berg n'a pas dit son dernier mot ici. |
| | | Octavian Glasse les fraises
Nombre de messages : 7333 Age : 41 Localisation : Près du Vieux Port Date d'inscription : 07/05/2008
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Lun 19 Oct 2009 - 20:01 | |
| - Natrav a écrit:
- Berg n'a pas dit son dernier mot ici.
Ni toi non plus, bonne nouvelle. |
| | | antrav Papa pingouin
Nombre de messages : 37304 Date d'inscription : 08/12/2005
| Sujet: Re: Wozzeck - Berg Lun 19 Oct 2009 - 20:04 | |
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| Sujet: Re: Wozzeck - Berg | |
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| | | | Wozzeck - Berg | |
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