Respighi: Pins de Rome, Fontaines de Rome et Fêtes Romaines

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Marriner c'est certes dégraissé mais pas tiédasse. Et au moins on entend clairement la complexité polyphonique de Circenses et de la Befana... C'est aussi très expressif dans les volets centraux.

Ah oui Maazel à Cleveland, superbe dans les Fêtes romaines. Très grande version du Coq d'or aussi.

Toscanini c'est sec et raide, je ne pense pas que cette musique réclame ça.

Ne vaudrait-il pas mieux traiter séparément de chacun des volets de ce triptyque ?
Les fêtes romaines sont beaucoup moins enregistrées que Les pins de Rome et Les fontaines de Rome et chacun de ces volets mériterait un topic, à mon sens..

Ce nonobstant, si on s'en tient au triptyque, je mets en avant deux enregistrements :

Lorin Maazel à Pittsburgh, plutôt qu'à Cleveland

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et, surtout, Eugene Ormandy à Philadelphie, bien sur, l'enregistrement Sony (1958-1961) plutôt que l'enregistrement ultérieur RCA (1972-1973)

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Je possède les Pins et la Fontaine de Rome par Pedrotti et le Czech PO (version donc amputée des fêtes).
Vraiment à mes yeux une superbe version voire une référence.

PS: il s'agit d'un CD Supraphon Japon et couplé avec Le Sacre du Printemps Ancerl CPO !

Pour info, écoute comparée des "pins de Rome" prévue ce dimanche soir sur France Musique. Avis aux amateurs ! Pour moi ce sera l'occasion d'une découverte Smile

Gourou-leader Nombre de messages : 25256 Date d'inscription : 22/01/2010

Pour moi aussi ce sera une découverte. Smile

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Que dis-tu Arnaud ?

Tu connais au moins les Fontaines ou les Fêtes, non ?!

C'est carrément ton coeur de cible esthétique.

Gourou-leader Nombre de messages : 25256 Date d'inscription : 22/01/2010

L'oeuvre est dans mon coffret Bernstein mais je ne suis pas encore arrivé jusque là. Wink

Découverte dimanche, donc. bounce

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Bernstein n'a jamais enregistré les Fontaines, ça fait au moins une bonne raison d'investir dans le triptyque, sans attendre que tu sois arrivé à la lettre R de ton coffret -c'est pas les bonnes versions qui manquent Wink

Mélomaniac a écrit:: C'est carrément ton coeur de cible esthétique.

Oui, il n'y a pas plus vertigineusement contrapuntique et profondément subtil que les Pins de Rome.

Spoiler:

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Ah oui pardon Arnaud, les Pins de Rome (ne parlons même pas des Fêtes), c'est de la daube pour oreilles déformées et esprits simplets.

Surtout interdis-toi d'aimer le charme évocateur et l'orchestration chatoyante, nous valons mieux que ça.

Gourou-leader Nombre de messages : 25256 Date d'inscription : 22/01/2010

Bon, on verra dimanche.

Et faites vous des bisous.

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

arnaud bellemontagne a écrit:: Et faites vous des bisous.

Désolé, mal rasé je pique.

J'ai hâte de lire ton avis.

Peut-être seras-tu charmé et ébloui, peut-être trouveras-tu ça seulement clinquant et décoratif...

Je pronostique que la jactance des pins de la Villa Borghese et la déferlante martiale de la Via appia ne te laisseront pas indifférents.

Mélomane chevronné Nombre de messages : 5473 Date d'inscription : 04/02/2013

Souvenir d'adolescence... Il venait d'avoir 18 ans ... ~~il avait des lunettes et des broches plein les dents...~~.

Je montais les marches de la mezzanine (le Classique est toujours relégué dans un coin ou à l'étage) quand soudain...poum...poum...poum venant des haut-parleurs du commerce de disques. Je venais acheter un disque pour commencer mon répertoire, je fus donc longtemps suspendu entre ciel et terre sur cette mezzanine, et je n'arrivais pas à me décider: j'avais 15 $ à dépenser (toute mon allocation d'étudiant). Je m'attardais, écoutant la musique qui maintenant déferlait sur moi. Je ressortis avec le concerto de Brahms (nouvelle parution, Oistrakh-Szell-Angel) et l'Offrande musicale (Harnoncourt-Telefunken). De la musique in-dis-pen-sa-ble selon mes lectures savantes.

À la caisse je vis que le disquaire faisait jouer une musique que ne connaissais bien entendu pas: les Pins de Rome, version LSO Kertesz. POUM....POUM....POUM !! C'est comme ça que le goût se forme. Comme quoi faut pas attendre d'être savant pour se faire une idée de ce qui plait, et surtout ne pas bouder ses plaisirs. I love you

Gourou-leader Nombre de messages : 25256 Date d'inscription : 22/01/2010

Mélomaniac a écrit:

arnaud bellemontagne a écrit:: Et faites vous des bisous.

Désolé, mal rasé je pique.

J'ai hâte de lire ton avis.

Peut-être seras-tu charmé et ébloui, peut-être trouveras-tu ça seulement clinquant et décoratif...

Je pronostique que la jactance des pins de la Villa Borghese et la déferlante martiale de la Via appia ne te laisseront pas indifférents.

Je viens d'ecouter cette tribune

http://www.francemusique.fr/emission/la-tribune-des-critiques-de-disques/2014-2015/les-pins-de-rome-d-ottorino-respighi-11-16-2014-20-30

Et effectivement j'ai été ébloui par cette flamboyance orchestrale, on en à plein les mirettes. colors

Ca m'a fait penser à un mix entre Ravel, Rimsky et le Stravinski de l'Oiseau de feu/Petrouchka.C'est coloré, ultra-lyrique voire même carrément bariolé par endroits.J'ai passé un très bon moment. thumleft

Je pense que je vais me procurer la version Reiner. bounce

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

arnaud bellemontagne a écrit:: j'ai été ébloui par cette flamboyance orchestrale, on en à plein les mirettes.

Comment pourrait-il en aller autrement ?!

Excellente interprétation que celle de Reiner, mais tant qu'à faire opte pour un CD avec le triptyque (Pins + Fontaines + Fêtes).

En attendant, tu as écouté la version Bernstein de ton coffret ?

Melo, par exemple la version de la trilogie par Sinopoli avec le NYP ?

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Pipus a écrit:: Melo, par exemple la version de la trilogie par Sinopoli avec le NYP ?

Ah oui c'est une bonne adresse, en couleurs vives, avec du relief.
Sinon, voilà ce que j'avais écrit plus haut. J'ajouterais aussi Ormandy chez CBS (1960 pour Fêtes, 1968 pour Pins et Fontaines).
Comme ça a été dit en début de topic, Svetlanov c'est la grosse cavalerie qui ne fait pas dans le détail, mais la force épique en met plein la vue.

Mélomaniac, le 30 12 2012, a écrit:: Reiner fait des étincelles dans les Pins.

Pour la Trilogie complète, parmi mes versions préférées : Ozawa à Boston pour la force et la précision des images, Marriner pour une légéreté, une transparence vraiment inhabituelles, De Waart pour l'imagination, la finesse picturale et une superbe prise de son.

Mélomaniac a écrit:: En attendant, tu as écouté la version Bernstein de ton coffret ?

J'ai été plus qu'agréablement surpris par la version des Pins de Rome par Bernstein!

Flamboyante, colorée, mais très sobre, il n'en fait pas des tonnes!

Su le même CD du coffret, il y a un Sibelius à se damner (mais c'est un autre topic)

arnaud bellemontagne a écrit:: Et effectivement j'ai été ébloui par cette flamboyance orchestrale, on en à plein les mirettes.
Ca m'a fait penser à un mix entre Ravel, Rimsky et le Stravinski de l'Oiseau de feu/Petrouchka.

Bon, soit ton goût se ramollit sérieusement (Mozart aurait dû exciter mes soupçons), soit il faut vraiment que je réécoute ça. Surprised

Merci Melo. Je suis en train d'écouter l'écoute de France Musique de dimanche soir, et la version Ozawa est effectivement très belle. La version Silvestri est particulièrement intéressante sur le troisième mouvement. Le Chicago de Reiner est juste magnifique de sonorité, dommage vraiment que l'on ne retrouve pas la trilogie.

Gourou-leader Nombre de messages : 25256 Date d'inscription : 22/01/2010

Mélomaniac a écrit:

arnaud bellemontagne a écrit:: j'ai été ébloui par cette flamboyance orchestrale, on en à plein les mirettes.

Comment pourrait-il en aller autrement ?!

Excellente interprétation que celle de Reiner, mais tant qu'à faire opte pour un CD avec le triptyque (Pins + Fontaines + Fêtes).

En attendant, tu as écouté la version Bernstein de ton coffret ?

Non, pas encore. Smile

DavidLeMarrec a écrit:

arnaud bellemontagne a écrit:: Et effectivement j'ai été ébloui par cette flamboyance orchestrale, on en à plein les mirettes.
Ca m'a fait penser à un mix entre Ravel, Rimsky et le Stravinski de l'Oiseau de feu/Petrouchka.

Bon, soit ton goût se ramollit sérieusement (Mozart aurait dû exciter mes soupçons), soit il faut vraiment que je réécoute ça. Surprised

Tu sais bien que j'ai toujours aimé les choses chatoyantes aux coloris impressionnistes.
Et j'ai pas dit que ça valait Stravinsky, Debussy ou Ravel, hein. tutut

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

A paraître, réédition du légendaire enregistrement de la trilogie romaine par Antonio Pedrotti à Prague chez Supraphon, au sein d'un coffret de trois disques qui inclut aussi de la musique française, russe, Falla, Mendelssohn, Brahms...

https://www.amazon.fr/Antonio-Pedrotti-Prague-Ottorino-Respighi/dp/B01C4HDPT4
Respighi: Pins de Rome, Fontaines de Rome et Fêtes Romaines - Page 2 51zwvKOvskL

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Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Mélomaniac, in playlist, a écrit:: Ottorino Respighi (1879-1936) :

Fontaines de Rome

= Antonio Pedrotti, Orchestre philharmonique tchèque

(Supraphon, février 1961)

Les enregistrements respighiens de Pedrotti (il grava aussi les Pins et les Fêtes) jouissent d'une réputation quasi-légendaire, et on comprend pourquoi.
Alors que la plupart des interprétations versent dans l'imagerie sucrée, tout ici respire le naturel, la poésie à l'état natif, le tableau d'après nature.
Ou, pour reprendre le titre d'une oeuvre de Malipiero : Impressioni dal vero !

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Mélomaniac, in playlist, a écrit:: Ottorino Respighi (1879-1936) :

Fêtes romaines

= Eugène Goossens, Orchestre symphonique de Londres

(Everest, août 1958)

Le cas Goossens reste une énigme pour moi, à considérer ses enregistrements des grands blockbusters tels Le Sacre du Printemps, Schéhérazade, Symphonie Fantastique :
certains instants frôlent un marasme qu'aucun directeur artistique n'aurait accepté, et à côté de ça des passages de virtuosité remarquables, de nombreux moments bluffants
(cf sa version des Danses symphoniques de Rachmaninov que j'avais choisie pour un Mélomaniac d'Or !)...
Bref un chef capable du meilleur comme du pire au sein d'une même interprétation, ce qui est encore patent dans ce triptyque des Feste Romana : au début de Circenses,
les arènes prennent l'eau, s’embourbent en nautomachie, mais on apprécie ensuite comment Goossens suggère l'épisode lascif de la supplique des martyrs.
Le chef anglais déploie toute sa poésie dans les volets centraux, et mène les réjouissances conclusives à toute vapeur.
Hormis ses accès d'impérities, ce maestro reste un formidable conteur, capable de modifier le pouls des œuvres pour les présenter sous un aspect souvent inouï,
improbable, mais toujours révélateur.
A l'instar de Garcimore et ses tours de magie, les maladresses nous rendent le suspense un peu plus attachant,
on ne sait où et comment ça va nous mener, mais on est sûr de passer un bon moment de détente.
D'autant qu'en l'occurrence, la formidable captation des micros d'Everest concourt au spectacle.

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Une autre excellente version digne de mention.

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Mélomaniac, in playlist, a écrit:: Ottorino Respighi (1879-1936) :

Fontaines de Rome
Pins de Rome

= Malcolm Sargent, Orchestre symphonique de Londres

(Everest, octobre 1959)

Superbe interprétation, dans une prise de son Everest (rappelons que la notoriété de ce label provient de ses captations sur film 35mm)
qui restitue un relief, une dynamique toujours aussi édifiants soixante ans après

Comparaison du dernier mouvement des Fontaines avec Oramo, Ormandy et La Vecchia: Oramo est un peu terne, Ormandy trop rapide, La Vecchia très lent, très détaillé et magnifique.

Dans les versions récentes, il y a un très beau disque d'Eiji Oue avec Minnesota, qui donne les Pins de Rome avec la Danse des gnomes et la suite de Belkis.
Très belle prise de son.

Mélomane chevronné Nombre de messages : 28855 Date d'inscription : 21/09/2012

Mélomaniac, in playlist, a écrit:: Catégorie orchestrale -rang 095°/250

Fritz Reiner (1888-1963)

Ottorino Respighi (1879-1936) :

Pins de Rome

= Fritz Reiner, Orchestre symphonique de Chicago

(RCA, octobre 1959)

Quand on recense les grands orchestrateurs, on pense à Ravel, à Rimsky-Korsakov, mais moindrement à Respighi, alors qu'il possédait une pleine maîtrise de cet art. Sa trilogie romaine ne pouvait échapper à mes radars à un âge adolescent où j'étais féru de tapisseries symphoniques, et de musique pittoresque. Si elle ne figure pas plus haut dans le classement, c'est parce que justement la parure semble parfois une fin en soi : comme si la vitrine se suffisait, au détriment de la substance. Mais ne boudons pas le plaisir, la popularité de ces œuvres me disculpe. On retrouvera les Fontane et les Feste un peu plus bas dans le TOP 250, parce que je trouve les premières moins variées, et les secondes (un peu) trop racoleuses. Bref, je préfère les Pini di Roma, où les conifères sont prétexte à quatre descriptions paysagistes qui incarnent autant de caractères, presque allégoriques (la jeunesse, la sagesse, l'amour, la gloire), dans un parcours qui nous emmène de midi à l'aurore.
Ils jouissent d'une abondante discographie où se distinguèrent maintes baguettes : Arturo Toscanini (RCA), Antal Dorati (Mercury), Eugene Ormandy (Columbia), Seiji Ozawa (DG), Lorin Maazel (à Berlin chez DG, à Cleveland chez Decca), Riccardo Muti (Emi), Edo de Wart (Philips)... Parmi les grands chefs italiens, Claudio Abbado et Ricardo Chailly n'ont laissé aucun enregistrement respighien, à la différence de leurs cadets Daniele Gatti (RCA) et Antonio Pappano (Emi), tous deux à l'Académie Sainte Cécile. J'ai retenu une version qui passe pour une référence peu discutable, celle qu'avait d'ailleurs choisie le magazine Diapason pour ses Indispensables, et celle que recommande le Guide Fayard d'Hoffelé et Kaminski. Comment ne pas succomber à l'Orchestre de Chicago, sa puissance, sa virtuosité, ses cuivres de légende (dans une partition qui en exige l'excellence, tant en vélocité qu'en force) ? Même à l'aune de sa maestria coutumière, le chef hongrois livrait là un de ses suprêmes témoignages. Cent dix-sept musiciens étaient rassemblés en ce samedi 24 octobre matin, la session démarra à 9h30, avec l'appoint d'une douzaine de cuivres en surnombre. L'intraitable Reiner remarqua aussitôt qu'un des trombonistes manquait à l'appel, et attendit son arrivée pour enregistrer le Finale. Ayant surpris un malencontreux bruit d'estrade, le maestro menaça ses musiciens de leur retirer leurs chaises ! A 12h42, cette mémorable captation des Pini di Roma était achevée.

Un vibrant, éblouissant et grouillant vivace s'élance à 2/8, digne des Tuileries des Tableaux d'une Exposition : des enfants s'ébattent dans le parc de la Villa Borghese. Brève mais intense : une des scènes les plus ludiques, volatiles et coruscantes de tout le répertoire symphonique ! Quel éclat ! : trilles des violons et altos, scintillement du glockenspiel et du célesta, miroitements de harpe (rares sont les enregistrements où on les entend suffisamment, sauf avec Argeo Quadri à Vienne chez Westminster), espiègles diaprures des trompettes (en quadruples-croches !) La lumière inonde. Cors, bassons, violoncelles enrubannent un fringant refrain (0'07) illustrant la liesse collective. Après une digression des flûtes (0'19), trompettes et crécelle sonnent le ralliement pour une nouvelle réjouissance (0'26), que les cordes prolongent par des triolets excités (0'40). Le refrain revient au hautbois (0'54), les violons resserrent les rangs (1'06), les trois trompettes se font martiales (1'22), menaçantes, fortissimo. On joue aux soldats, on mime une guerre pour rire. Un piu vivo (1'38) scandé alternativement aux cors et trompettes libère le caquet des hautbois et clarinettes (1'44). Nouveau divertissement, délicatement tramé par le tambour de basque : les trompettes gloussent à leur tour (1'50), frétillantes mais tendres et diaphanes. Les gamins trépignent et se grisent. Le caquètement des cors (2'12) signale que les amusements dégénèrent : la trompette sévit (2'36), l'orchestre s'enraye, pérore, les garnements « s'échappent en essaim »...

Par un vertigineux contraste dynamique (la clameur s'effondre soudain jusqu'à l'inaudible), kinesthésique (la fluidité immatérielle devient empâtement), cinétique (on passe de l'allegro au lento), tonal (le brasillement s'échange contre l'ombre épaisse) et sémantique (la vie trépidante se fond dans des rémanences de mort) : nous voilà maintenant plongés dans l'inexorable obscurité des Catacombes. Comme si l'œil et l'oreille devaient s'acclimater à cette pénombre funèbre, les contrebasses (restées muettes durant tout le premier volet grillé par le soleil) esquissent une informe reptation, où émergent les cors en sourdine (0'25) puis les violons (1'19) tandis que le froid métal du tam-tam laisse résonner un glas d'outre-tombe. Flûte et basson instillent quelque douloureux souvenir (1'39). Changement d'éclairage (mi mineur), un peu plus animé (2'04) mais dolent : une trompette luit au lointain. Une lugubre psalmodie à 5/4 (3'17) introduit la litanie des trombones : elle enfle puis jaillit à toute force, épaulée par les abysses de l'orgue (4'18), tel un cortège qui passe et progressivement s'éteint. Flûte, clarinettes se recueillent en deuil (5'56) avant que les caveaux de pierre retrouvent peu à peu leur silence sépulcral...

... qui se résilie dans la candeur de si majeur, pour nous transporter au Janicule dans un climat essentiellement lyrique et impressionniste. Une gerbe du piano laisse affleurer une cantilène de clarinette (0'24) prolongée par la flûte (1'44), les violoncelles (1'53), un camaïeu de cordes divisées (2'09), dans un écheveau très ravélien. La clarinette soupire (2'36). Un miroitement de harpe fait écho à l'introduction pianistique (2'58) et amène la plainte du hautbois, en mi majeur auquel répond le violoncelle solo (3'20). Les violons s'emparent du chant (3'37) et le hissent vers l'aigu, que font frétiller les clarinettes. Les bois gonflent la mélodie (4'10) que diffractent les violons et divers effets de nitescence (piano, harpe, cymbale suspendue...) délicatement nacrés. On croirait qu'ainsi s'achève cette émouvante peinture de la « huitième colline », dans l'impalpable tintement du piano. Mais au for de ce crépuscule revient rêver la clarinette (5'19), et s'invite un rossignol (5'34) préenregistré (une innovation pour l'époque, le son était reproduit par un gramophone !) tandis que bruisse un trémolo des violons divisés puis s'étagent violoncelles et altos (6'03) pianissimo et en sourdine, évaporant par palier les derniers rayons du soir.

Dans la continuité de ce volet nocturne se met en branle l'ultime panneau de ce quadriptyque : dans l'aube, voilà une marche organisée en crescendo sur la Via Appia. Aux contrebasses et violoncelles s'active « indistinct, incessant, le rythme d'un pas innombrable ». La clarinette basse murmure (0'09), suivie par les cors bouchés (0'17, notés « aussi pianissimo que possible »). Les trois clarinettes (dont la basse) énoncent le thème principal (0'41). Le cor anglais (1'09) dévide une mélopée sinueuse (quintolet et triolet) et incantatoire. En cours de route, la tonalité se bémolise (1'20), le basson contrepointe (1'36), la clarinette basse induit une éclaircie tonale. Dans les profondeurs de sa pédale, l'orgue laisse gronder la tonique de si bémol (2'02), le thème principal s'avance au basson puis à la clarinette basse, chacun étoffé par deux cors. Les clairons soprano résonnent au loin, bouchés (2'18) puis ouverts (2'40), rejoints par les trombones (2'48), les clairons ténor (3'04), les clairons basse (3'19, après le clash de cymbale), au sein d'une rutilante et dense polyphonie majestueusement amplifiée. Impossible de décrire la suite en détail, tant le crescendo devient inextricable : martèlement de timbales et grosse caisse, déflagration du tam-tam, cuivres assourdissants et déferlant par vagues, tandis que les violons brillent jusqu'à incandescence. Dans ce magistral vacarme, orchestré avec science, jusqu'au tutti fortissimo, « l'armée consulaire fait irruption sur la Voie Sacrée pour monter en triomphe jusqu'au Capitole. »
Spectaculaire !, et cet enregistrement vire à la démonstration, tant pour l'interprétation que la qualité audiophile (optimisée par le report SACD).

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