Nombre de messages : 5748 Date d'inscription : 03/01/2007
Sujet: Hans Abrahamsen (1952) Lun 18 Avr 2016 - 16:09
Voilà un compositeur dont on parle pas mal ces derniers temps, en particulier grâce à let me tell you (2013) pour soprano et orchestre, créé par le Berliner Philharmoniker et Barbara Hannigan, qui ne cache pas son enthousiasme pour l’œuvre.
Un enregistrement très remarqué vient tout juste de sortir, fait plutôt rare pour une pièce aussi récente:
Au début de sa carrière dans les années 70, Abrahamsen était proche de la Neue Einfachheit, mouvement qui s'inscrivait dans une réaction à l'ultra-abstraction de Darmstadt, et cherchait a renouer avec "l'immédiateté" de l'acte créateur, loin des procédures complexes de l'avant-garde. En gros, un souci de développer un langage plus accessible mais sans que cela implique nécessairement quoi que ce soit de "néo-", notamment avec des triades tout à fait traditionnelles mais utilisées de façon non-tonale.
Après un quasi-silence d'une décennie dans les années 80, il développe un langage plus moderniste, parfois assez proche du dernier Ligeti dont il a orchestré quelques Études.
La neige joue un rôle important dans son imaginaire et certains passages de ses oeuvres l'évoquent, avec des sonorités tantôt ouatées, proches du silence ou cristallines. Plusieurs titres de ses pièces y font référence, directement ou indirectement: Winternacht pour ensemble (1978), Zwei Schneetänze pour flûte, clarinette, violon et violoncelle (1985), Schnee pour ensemble (2008), Schneebilder pour quatuor avec piano (2013).
Tharaud vient de créer Left, alone - un concerto pour piano (main gauche comme le titre l'indique).
Abrahamsen écrit actuellement un opéra sur La Reine des Neiges d'Andersen.
/ Mélomane chevronné
Nombre de messages : 20537 Date d'inscription : 25/11/2012
Neue Einfachheit dans les années 70, sans doute, mais dans son cas au moins, d’après ce que j’ai pu trouver de cette époque, ça passe quand même par beaucoup d’éléments “néo” et minimalistes. (Au passage si je parviens à écrire quelque chose sur les contemporains allemands, il serait évidemment question de Neue Einfachheit, et on pourra faire quelques distinctions.) La décennie de silence, ce sont les années 90 et non 80. À partir du Concerto pour piano, il recommence à composer, dans une esthétique très personnelle (pas forcément unique pour autant). C’est une sorte de minimalisme en fait, ou de « micro-minimalisme » : une grande économie de moyens, avec des éléments ténus, y compris bruitistes, des petites boucles, des mélodies un peu naïves, des éléments modernes aussi... Schnee est très caractéristique de ça, et je conseille vivement cette œuvre, dont un enregistrement par l’ensemble recherche a été publié chez Winter&Winter. Let me tell you ou le double concerto de 2011 reviennent peut-être à quelque chose de plus ample (est-ce la faute de l’orchestre ?), mais ça reste très caractéristique... une sorte de Sciarrino en plus tonal, en fait.
Cello Chtchello
Nombre de messages : 5748 Date d'inscription : 03/01/2007
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Mar 19 Avr 2016 - 8:57
Oui, tu as sans doute raison pour la décennie du silence - il y a en effet un gros vide dans son catalogue entre 1990 et 1999.
Cela dit, j'ai vérifié, et on ne peut pas dire qu'il ait été hyperactif dans les années 80 non plus: à peine une demi-douzaine d’œuvres originales, de dimensions modestes qui plus est (15-20 minutes, parfois nettement moins). En étant généreux, on pourrait ajouter à peu près autant de transcriptions et orchestrations (Ravel, Satie, Nielsen) mais bon, l'un dans l'autre, ce n'est quand même pas gras.
Pour résumer, il a pas mal composé dans les années 70 mais s'est fait de plus en plus rare dans la décennie suivante et est resté pratiquement silencieux entre 1990 et 1999. Les années 2000 marquent son retour avec une ardeur digne de ses débuts, la reconnaissance critique en plus.
tod Entre chien et loup
Nombre de messages : 1192 Date d'inscription : 18/12/2014
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Mar 3 Mai 2016 - 21:36
Reçu ce midi : Hans Abrahamsen : Let me tell you. .
Andris Nelsons/Barbara Hannigan/Simphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Juillet 2015.
Un grand merci à Cello pour cette découverte.
Une bien belle musique ; un monde homogène, très cohérent, entier. Un voyage finalement assez confortable (Britten) mais avec de splendides couleurs orchestrales. Et la voix de Barbara Hannigan !!!
Un peu court cependant, non ? Soupçonnant de lâcher une grosse faribole (mais je n'en suis pas à une près), cela m'a rappelé, dans la structure, le Chant de la Terre... ... et si quelqu'un sait de quoi ça cause, je suis toute ouïe !
Rubato Mélomane chevronné
Nombre de messages : 14470 Date d'inscription : 21/01/2007
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Jeu 23 Nov 2017 - 20:04
Du sujet "Sorties CD en musique du XXIè siècle"
Rubato a écrit:
Hans Abrahamsen Quatuors à cordes 1 à 4 Quatuor Arditti.
Spoiler:
J'ai écouté des extraits. Étonnant, intéressant...à approfondir !
Octavian a écrit:
Je ne connais que le 1er et le 4e, mais les quatuors ne sont franchement pas ce que je préfère chez Abrahmsen (là encore un cas de compositeur assez "versatile", même si c'est peut-être moins le grand écart que MacMillan). Ceci étant, si tu es sensible à ce style-là, tu pourrais aussi essayer Schnee.
Dans un registre assez différent de ceux-là, mais proche du Dream of a Song de Benjamin que tu citais plus haut, Let Me Tell You d'Abrahmsen (chanté au disque par Barbara Hannigan) est très beau.
J'avoue un faible particulier pour son double concerto pour violon, piano et orchestre de 2011. Pas disponible au disque, sauf erreur de ma part, mais on trouve sans trop de problème en ligne une captation de concert par Carolin Widmann, Tanja Zapolski, et Rattle à la baguette.
Octavian Glasse les fraises
Nombre de messages : 7333 Age : 40 Localisation : Près du Vieux Port Date d'inscription : 07/05/2008
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Jeu 23 Nov 2017 - 21:11
(Let Me Tell You)
tod a écrit:
Un peu court cependant, non ?
Dans l'absolu, rien de choquant (une demi-heure environ). Ensuite, que le CD commercialisé le soit au prix fort et sans complément de programme, c'est effectivement un bémol, mais c'est un autre problème...
tod a écrit:
... et si quelqu'un sait de quoi ça cause, je suis toute ouïe !
Si tu as le CD, tu as le livret, non ? Sauf erreur de ma part le texte est un "remontage" à partir des répliques d'Ophélie dans Hamlet, avec l'idée de présenter son propre point de vue sur cette histoire.
tod Entre chien et loup
Nombre de messages : 1192 Date d'inscription : 18/12/2014
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Ven 24 Nov 2017 - 21:48
Octavian a écrit:
(Let Me Tell You)
tod a écrit:
... et si quelqu'un sait de quoi ça cause, je suis toute ouïe !
Si tu as le CD, tu as le livret, non ? Sauf erreur de ma part le texte est un "remontage" à partir des répliques d'Ophélie dans Hamlet, avec l'idée de présenter son propre point de vue sur cette histoire.
Oui ! J'ai le cd et son livret. En anglais et en allemand ; mais n'étant familier ni de l'une ni de l'autre, j'ai cru pertinent de demander une traduction à d'autres bons entendeurs de ces langues.
Sauf qu'entre temps, j'ai assez réécouté "Let Me Tell You" comme on vide un os de sa moelle. "Let Me Tell You" est un de mes tubes : Pas trop long, creux, agréables tunnels où l'on ne pense à rien comme certains mantras d'Arvo Pärt ...
La traduction n'aurait pas retardé l'usure ; alors, Merci quand même.
Benedictus Mélomane chevronné
Nombre de messages : 15565 Age : 49 Date d'inscription : 02/03/2014
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Dim 26 Nov 2017 - 1:11
• Schnee(2006-08), dix canons pour neuf instruments ensemble recherche: Melise Mellinger (violon), Barbara Maurer (alto), Åsa Åkerberg (violoncelle), Klaus Steffes-Holländer, Jean-Pierre Collot (pianos), Christian Dierstein (percussion), Martin Fahlenbock (piccolo, flûte, flûte alto), Shizuyo Oka (clarinette, clarinette basse), Jaime González (hautbois, cor anglais) Cologne, I.2009 Winter & Winter Après avoir lu ce que lulu en disait dans le fil Le 21ᵉ siècle en CDs, conseils pour le profane
Citation :
Abrahamsen (1952), danois. L’Abrahamsen post-2000, c’est un univers intimiste, poétique et un peu bruitiste, avec beaucoup de consonances. Schnee est sous-titré « dix canons pour neuf instruments ». On y trouve beaucoup d’éléments (post)minimalistes, y compris des boucles.
je l’avais écouté, mais je n’en avais pas parlé; en lisant vos échanges ici, je m’y suis remis et ma première impression se confirme: j’aime beaucoup ce cycle. Certes, beaucoup de consonances et des boucles, mais ça n’en fait pas pour autant une œuvre franchement «néo»: outre l’aspect bruitiste (avec de beaux effets de textures), les timbres instrumentaux frottent beaucoup, et il y a dans le côté archaïsant de l’écriture quelque chose d’un peu sec, d’un peu austère et de presque grinçant qui m’a vraiment séduit - j’ai trouvé qu’on n’était pas toujours si éloigné que ça d’un univers à la Kurtág, ne serait-ce que dans cette dimension d’«univers intimiste, poétique.»
Et puis j’ai écouté:
• Let me tell you (2012-13) pour soprano et orchestre Barbara Hannigan (soprano), Andris Nelsons / Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks En public, Munich, VII.2015 Winter & Winter ... qui m’a laissé sur ma faim (et pas à cause de la durée du disque): le passage à l’orchestre et à la voix tend malheureusement à minimiser tout ce qui m’avait plu dans Schnee: même si les frottements, les micro-événements bruitistes n’ont pas disparu, ils sont comme noyés dans le flux orchestral, lequel exalte à l’inverse tous les éléments néo de ce langage - les boucles deviennent parfois envahissantes, la consonance semble se généraliser... Quant à l’écriture vocale, elle est très (trop?) confortable. Et oui, comme dit tod, il y a vraiment des tunnels. Certes, c’est beau, mais ça me touche assez peu.
Peut-être aimerai-je davantage les quatuors dont parlaient Rubato et Octavian?
Bruno Luong Mélomaniaque
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Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Dim 26 Nov 2017 - 9:07
J'avais bien aimé les quatuors de Abrahamsen, je crois c'est son style de prédilection. Actuellement difficile de cerner son style car ils sont assez divers de je dirais même un peu disparate. Désolé difficile d'être plus précis, mon écoute remonte à 2 mois, mais oui il faut tenter.
Rubato Mélomane chevronné
Nombre de messages : 14470 Date d'inscription : 21/01/2007
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Ven 1 Déc 2017 - 11:20
Reçu ce matin, écoute prévue dans la journée, et petit commentaire ensuite.
Rubato Mélomane chevronné
Nombre de messages : 14470 Date d'inscription : 21/01/2007
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Ven 1 Déc 2017 - 15:17
Quatuor n°4 2012 Arditti string quartet
4 mouvements 1/ Light and airy (high in the sky singing) 2 / With motion (dance of light) 3 / Dark, heavy and earthy (with a heavy groove) 4 / Gently "rocking" (with utmost densitivityu, babbling)
-Le premier mouvement porte bien son sous-titre; des notes très aiguës jouées lentement en pizzicato...ça surprend ! Des notes haut perchées, comme un oiseau chantant dans le ciel (pourquoi pas ?). 6.23 -Le deuxième mouvement qui débute sur quelques notes identiques au premier, prend vite une tournure "folklorique", dansante, avec un petit côté troubadour; j'ai bien aimé. 3.48 -Le troisième mouvement reprend la structure du premier, mais sur des notes graves également en pizzicato (Dark, heavy and earthy). 6.18 -Et avec le quatrième et dernier mouvement, c'est l'ambiance du deuxième que l'on retrouve, avec toujours ce côté "traditionnel", très dansant. 3.58
Deux styles très différents donc, avec quelque chose de très dépouillé et d'inhabituel pour les 1 et 3, (peut-on parler de quatuor dans ce cas?) et un style traditionnel voire "folk" pour les 2 et 4.
à suivre...
Rubato Mélomane chevronné
Nombre de messages : 14470 Date d'inscription : 21/01/2007
1/ Calmo, con tenerezza e simplicita- 0.59 2/ ...............................................- 5.14 3/ ...............................................- 0.51 4/ Molto tranquillo et lontano e legato- 4.20
Bon, ce quatuor ne m'a franchement pas emballé. Il suffit de lire les titres des mouvements 1 & 4 pour avoir une idée de l'ambiance générale: calme, tranquille, simple...et je rajouterai ennuyeux.
Il ne se passe rien.
En plus la respiration bruyante des interprètes ne vient pas arranger les choses ! Le bon côté, c'est qu'il est court ! Déçu.
xoph Mélomane chevronné
Nombre de messages : 5970 Age : 66 Localisation : là Date d'inscription : 12/10/2011
Sujet: Re: Hans Abrahamsen (1952) Ven 2 Juin 2023 - 21:59
tod a écrit:
Reçu ce midi : Hans Abrahamsen : Let me tell you. […] Une bien belle musique ; un monde homogène, très cohérent, entier. Un voyage finalement assez confortable (Britten) mais avec de splendides couleurs orchestrales. Et la voix de Barbara Hannigan !!! […] Soupçonnant de lâcher une grosse faribole (mais je n'en suis pas à une près), cela m'a rappelé, dans la structure, le Chant de la Terre...
Faribolons ! Les évocations orchestrales "chinoises" (dans la partie centrale - Now I Do Not Mind), aussi m'y font penser. Beaucoup aimé, quant à moi