Sir Jeffrey Tate est mort ce vendredi 2 juin, à l’âge de 74 ans. Le chef d’orchestre britannique a succombé à une crise cardiaque, alors qu’il visitait l’Accademia Carrara - musée d’art et Ecole des Beaux-Arts à Bergame, en Italie.
Né le 28 avril 1943 à Salisbury, le jeune Jeffrey Tate s’était engagé dans le début d’une carrière médicale (à l’Universite de Cambridge, puis à l’Hôpital Saint-Thomas de Londres), avant d’y renoncer et de se vouer entièrement à la musique. Son parcours le mène tout d’abord à assister quelques grands chefs : au Covent Garden (en qualité de chef de chant et chef-assistant), il travaille aux côtés notamment de Sir Georg Solti, Colin Davis, Rudolf Kempe et Carlos Kleiber. Jeffrey Tate collabore également avec Herbert von Karajan à Berlin. Et surtout, il est dans les années 1970 l’assistant de Pierre Boulez pour deux événements musicaux majeurs : la Tétralogie de Wagner à Bayreuth, et la création mondiale, en 1979, à l’Opéra de Paris, de la version en trois actes de Lulu, d’Alban Berg.
La carrière de Jeffrey Tate prend alors son essor : après ses débuts dans la fosse du Metropolitan Opera de New York, en 1979, Tate est nommé premier chef principal de l’English Chamber Orchestra en 1985. L’année suivante, il devient chef principal au Royal Opera House (le premier à porter ce titre dans l’histoire de la maison d’opéra londonienne) ; l’Orchestre national de France le nomme premier chef invité entre 1989 et 1998. De 1991 à 1995, Jeffrey Tate prend les rênes de l’Orchestre philharmonique de Rotterdam et de 2005 à 2010, il est directeur musical du Teatro San Carlo, à Naples. Les dernières fonctions officielles du chef britannique étaient à la tête de l’Orchestre symphonique de Hambourg, où son contrat venait d’être prolongé jusqu’en 2019.
Invité par un grand nombre de phalanges symphoniques internationales, et par toutes les grandes maisons d’opéra dans le monde (le Met, Vienne, la Scala etc.), on se rappelle notamment qu’il dirigea à Paris l’intégrale du Ring de Wagner et Lulu, de Berg (au Théâtre du Châtelet) ; Billy Budd, de Britten, et The Rake’s progress de Stravinsky à l’Opéra de Paris. La palette extrêmement large du chef britannique lui permettait de diriger le répertoire classique comme les grandes œuvres contemporaines. Sa discographie abondante en témoigne, d’où émergent des concertos de Mozart avec Mitsuko Uchida au piano, et Lulu, enregistrée lors des représentations du Châtelet avec l’Orchestre national de France.
Jeffrey Tate était né avec une spina bifida, une malformation invalidante qui le fit souffrir tout au long de sa vie, sans qu’elle l’empêche de mener sa carrière au plus haut niveau. Chef aimé et respecté par tous les musiciens - et par les très nombreux chanteurs qu’il accompagna - Jeffrey Tate partageait sa vie avec un scientifique allemand. Il avait été anobli commandeur dans l’ordre de l’Empire britannique par le prince William, au mois d’avril 2017.
RIP