Symbolisme et Musique (et dans les Arts)

En ce moment je retrouve deux vieux compagnons, parmi les premiers amours qui ont fait mes débuts dans la musique, comme mes premières émotions de jeune lecteur : Richard Strauss, Salomé, évidemment la Salomé d'Oscar Wilde.

J'y reviens, parce qu'il s'agit du Symbolisme en art, qui me hante depuis toujours, est peut–être le courant que j'aime le plus, qui est sans doute ma langue intime, mon goût le plus sûr, là où je suis toujours chez moi.

J'ouvre un sujet pour parler de ça si vous le voulez bien . Profiter de vos savoirs, avis, découvertes et conseils dans la fange symboliste de la musique surtout (même si j'aurai voulu qu'on ne s'y limite pas). J'avoue, justement, que je distingue assez mal ces oeuvres musicales. Le symbolisme me semble difficile à appréhender en musique, et je me suis d'ailleurs, au final, quasi–jamais posé la question (paradoxalement...).

J'écoutais hier ce cycle que j'adore, les Chansons de Maurice Maeterlinck de Alexander von Zemlinsky, mais c'est facile, l'auteur est là ! L'on pourrait donc prolonger le principe avec la liste de toutes les compositions musicales d'après son oeuvre (?).

On pense évidemment à Claude Debussy, dont l’oeuvre en général et les sujets qu’il choisit sont bien plus symbolistes qu’impressionnistes, comme on se trompe souvent de le dire. De là, Paul Dukas apparaît. Le lien avec le Château de Barbe–Bleue de Bela Bartok est fait. Est–ce de la musique symboliste ? Je suis souvent tenté d'y inclure ce qui relève de l'Expressionnisme germanique : Wozzeck d'Alban Berg par exemple. Etc.

Bref. 

Super sujet !

C'est probablement l'esthétique avec laquelle j'ai le plus d'affinités également, en littérature et en peinture. En musique, par contre, elle me semble plus difficile à circonscrire. Comme toi, j'y mets instinctivement Debussy. Schmitt aussi. En ce qui concerne Ravel, ça dépend vraiment des oeuvres. Les dernières me semblent aller chercher d'autres horizons, écartelées en un retour à un certain classicisme modernisé (mais pas néo-), la distillation d'un langage personnel et l'appel du jazz.

Le Château de Barbe–Bleue de Béla Bartók en procède certainement mais lui aussi va ailleurs, peut-être sous l'influence de courants plus folklorisants.

Par contre, je verrais l’expressionnisme comme un phénomène séparé, presque aux antipodes même. Flou, pastel et intemporel pour l'un; net, bariolé et vif pour l'autre.

Cello a écrit:

Par contre, je verrais l’expressionnisme comme un phénomène séparé, presque aux antipodes même. Flou, pastel et intemporel pour l'un; net, bariolé et vif pour l'autre.

Ça va dans le sens de ce que j'ai dis et que tu rappelles, la difficulté pour identifier de la particularité du courant symboliste dans une oeuvre musicale, dans des agencements de sons. Pourquoi est–ce que je pense à Wozzeck ? Parce que je réfléchis spontanément au livret, pas à la musique... l'idée, très premier degré, sur le principe du symbole dans le symbolisme : rien que tout le développement autour de la couleur rouge. Et ce climat, tout de même musical là (toute la fin), immatériel, qui rappelle celui des scènes de Maurice Maeterlinck.

Cello a écrit:

En ce qui concerne Ravel, ça dépend vraiment des oeuvres. Les dernières me semblent aller chercher d'autres horizons, écartelées en un retour à un certain classicisme modernisé (mais pas néo-), la distillation d'un langage personnel et l'appel du jazz.

Jamais je n'aurai pensé à Ravel ! Justement pour les raisons que tu évoques : une musique de la netteté, vive et brillante, trop mécanique.

Si je devais aller dans ton sens, je dirais alors peut–être dans les Miroirs, Gaspard de la Nuit peut–être aussi... Je serais surtout convaincu par le mystérieux Indifférent ; où évidemment en passant chez Mallarmé... Mais sincèrement je n'y crois pas trop, j'ai du mal :–/ . Ce n'est pas pour Ravel cette histoire là ^^ .

Juste pour bien définir le symbolisme en peinture on parle bien ici d'un sujet qui pose de facon théatrale, un thème qui flirte avec le mysticisme, peint dans un style impressioniste. C'est bien cela, grosso modo? Et ca n'a rien à voir avec la définition du symbole dans le language courant, qui peut être le logo d'une marque, un signe de peace, bref une forme abstraite représentant un truc connu?

Pour moi, c’est cette manière de ne pas s’intéresser au réel lui–même mais d’aller chercher son arrière–monde, l’au–delà, pour ouvrir des fenêtres sur sa vérité dévoilée. Les symboles sont un moyen, qui suggèrent sans révéler, qui dévoilent tout en conservant l’intimité de ces puissances. C'est une manière de dire le réel en brouillard, de le masquer par le jeu de figures affirmées, composant son image au miroir. C'est une manière riche, mais complexe (hermétique), de fertiliser l'imagination poétique et sensible.

Alors on va dans le mystique, oui, dans les visions, le surnaturel ou l'irrationnel, etc.

Il y a quelque chose aussi de fantasmé. On va recomposer le réel pour qu'il se pare et se plie à telle nouvelle allure qui le dépasse, le surpasse, le remplace, etc.

En cela, par exemple, Maurice Ravel dit tout, pour moi, ne peut être symboliste. Claude Debussy ne dit rien, ce pourquoi il me paraît peut–être le plus évidemment symboliste.

Ah d'accord. Et pour mes archives peux-tu m'indiquer quelle forme d'oreille tu as?

Rav-phaël a écrit:

Jamais je n'aurai pensé à Ravel ! Justement pour les raisons que tu évoques : une musique de la netteté, vive et brillante, trop mécanique.

Si je devais aller dans ton sens, je dirais alors peut–être dans les Miroirs, Gaspard de la Nuit peut–être aussi... Je serais surtout convaincu par le mystérieux Indifférent ; où évidemment en passant chez Mallarmé... Mais sincèrement je n'y crois pas trop, j'ai du mal :–/ . Ce n'est pas pour Ravel cette histoire là ^^ .

Oui, ce sont précisément à ces œuvres que je pensais : les grands cycles pour piano et les mélodies.

Cela dit, je suis d'accord pour dire que dans l'ensemble, la musique de Ravel a quelque chose de trop précis, de trop direct pour être réellement symboliste, certainement en comparaison avec celle de Debussy. C'est sans doute aussi pour cela qu'elle me parle beaucoup moins, malgré les efforts que j'ai fait au fil des ans pour me l'approprier...