PP - Berlin/Petrenko - 4,5/9/21 - Schubert et al

Samedi 4 septembre    20h30
Carl Maria von Weber Ouverture d'Oberon
Paul Hindemith Métamorphoses symphoniques sur des thèmes de Carl Maria von Weber
Franz Schubert Symphonie n° 9 "La Grande"

Dimanche 5 septembre    16h30
Piotr Ilitch Tchaïkovski Roméo et Juliette (Ouverture-fantaisie)
Sergueï Prokofiev  Concerto pour piano n° 1      Anna Vinnitskaya, piano
Josef Suk  Un conte d'été

Philharmonique de Berlin, dir Petrenko

Je serai au concert de ce samedi soir. Curieux d'entendre Petrenko dans le répertoire symphonique, apres deux opéras parisiens (Ariadne, Rosenkavalier). Premier concert de cette nouvelle saison post-cataclysme....

Il reste des places à partir de 35 Euros aux deux dates (faut dire que les tarifs sont toujours élevés pour Berlin).

Et voila, Berlin est venu! Pass sanitaire et tout et tout....

Superbe performance orchestrale, sans surprise, belle direction de Petrenko, qui devait diriger pour la 1ere fois à la Philharmonie. Du coup, 1ers fortissimi de Oberon un peu agités, mais ensuite il gere vraiment bien les volumes. Je n'aime pas trop ces morceaux tres virtuoses d'emblée en concert, j'ai plutot besoin d'une transition pour me mettre un peu en route, mais bon, concours de vitesse impressionant aux cordes et gros succes. Hindemith vraiment intéressant par contre, explosif et spectaculaire mais avec une grande clarté et sans esbrouffe. Pas joli mais ca prend aux tripes... Tres beau Schubert, plus musclé et tragique que mes habitudes mais là encore, belle clarté, beaucoup de tendresse, climax forts mais naturels, et puis tout l'orchestre superlatif. Emmanuel Pahud spécialement visible dans le solo de flute dément de Hindemith..... grosse ovation pour lui. Salle tres remplie. Quasi concerto de téléphones portables à 21h précises, on se demande ce que les gens ont en tete parfois. Heureusement, Hindemith supporte bien cette improvisation rajoutée (meme si on est surs qu'il n'a pas pu composer le morceau en prévoyant et incorporant cette impro, anachronique...).

J'aurais aimé entendre le Suk aujourd'hui, mais les tarifs Berlinois me font aller ailleurs....

Patzak a écrit:

concours de vitesse impressionant aux cordes et gros succes.

Après une introduction particulièrement lente. Contraste impressionnant.

Citation :

J'aurais aimé entendre le Suk aujourd'hui, mais les tarifs Berlinois me font aller ailleurs....

Il restait des places dans les 30€ hier encore, pourtant.


J'entendais l'orchestre pour la première fois dans des conditions correctes (debout au fond d'Orsay ça compte pas vraiment), et j'ai été impressionné par les vents, tous miraculeux, il y a peu d'orchestres de ce niveau en effet. Les cordes ont, étrangement, quand même conservé quelque chose de l'aspect vaporeux de l'ère Karajan, très enveloppantes et douces (j'aime moins, comme on s'en doute, moi j'aime davantage l'esthétique pointe-de-diamant façon Pittsburgh).

Les Métamorphoses de Hindemith, j'étais toujours passé à côté au disque (agréable sans plus), en concert c'est une pièce de démonstration assez extraordinaire !

DavidLeMarrec a écrit:

Les cordes ont, étrangement, quand même conservé quelque chose de l'aspect vaporeux de l'ère Karajan, très enveloppantes et douces

À la place de «quand même conservé», je dirais plutôt «de nouveau»; moi qui suis pas mal les sorties de leur label autoproduit, j'avais en effet eu l'impression que c'était la «Petrenko touch», ces cordes berlinoises redevenues plus enveloppantes / douces / vaporeuses, par contraste avec leur sonorité effilée simili-baroqueuse sous Rattle (c'est frappant quand on compare leurs 6ᵉ de Mahler - concert d'adieu de Rattle en juin 2018, concert de janvier 2020 avec Petrenko.)

DavidLeMarrec a écrit:

moi j'aime davantage l'esthétique pointe-de-diamant

Tiens, on dirait que c'est ton nouveau vocable-fétiche, «pointe-de-diamant.»
(Mais comme toujours très éloquent.)

Désolé, j'ai passé 3h dans 50 m² du Museum de Minéralogie à regarder et comprendre des cailloux la semaine dernière, mes perceptions sont altérées.

Ça m'a beaucoup étonné justement, puisque je faisais la remarque tout récemment des cordes droites et presque baroqueuses, en effet, dans Sibelius !

(Mais Petrenko est russe, il a peut-être envie d'autre chose…)

En tout cas j'ai été frappé par la fait que ça ressemblait vraiment, côté cordes, aux disques du Karajan des années 70 (l'épaisseur floutée en moins).

DavidLeMarrec a écrit:

Patzak a écrit:

J'aurais aimé entendre le Suk aujourd'hui, mais les tarifs Berlinois me font aller ailleurs....

Il restait des places dans les 30€ hier encore, pourtant.

Oui, mais 2e balcon, dernier rang, 3/4 c'est... 49 Euros....

Premier concert de la saison, et premier concert en pleine jauge depuis le début de l'épidémie. Un très beau concert, très classique dans sa structure et dans son exécution.

Etonnamment, seul le parterre semblait très bien rempli, voire complet. Beaucoup de trous dans les balcons, notamment le premier, où j'ai pu me replacer après l'ouverture (passer d'une place à 10 € à une place à 130 €, youpi !). On redécouvre la joie d'avoir des voisins : le gars qui cherche un stylo au fond de son sac pendant 1/4 d'heure, celle qui balance son bras juste sous mon nez, ceux qui passent et qui repassent des dizaines de fois entre les morceaux, ceux qui feuillettent le programme comme on feuillette un mode d'emploi, en faisant bien sonner toutes les pages, celui dont le tic consiste à se racler la gorge toutes les dix secondes, la sonnerie de téléphone qui sonne comme une moto qui démarre…

Tchaïkovski : passages lents bien soyeux et délicats, passages rapides dynamités. Très belle ouverture, grande maîtrise du chef dans une belle connivence avec l'orchestre (on sent qu'ils ont l'habitude de travailler ensemble). C'était très réussi, même si j'étais plus concentré sur ma stratégie de replacement que sur le morceau.

Prokofiev : replacé au premier balcon, j'avais une vue directe sur les mains de la pianiste. Ce morceau est une vraie épreuve de force, j'imagine l'immense difficulté à le réussir et à l'apprendre ! Touché à la fois délicat et brutal lorsqu'il le fallait. Piano parfois couvert par l'orchestre, c'est dommage. Cette pianiste était globalement une belle découverte, même si je suis moins dithyrambique que le programme.

Pas de rappel.

Suk : c'est ce morceau qui m'a motivé. Visiblement, cet orchestre et ce chef ont enregistré une somme de 3 CD de ce compositeur, dont je ne connaissais rien jusqu'à la réception de la brochure de la PP au printemps dernier. Ecouté un peu par hasard, j'ai adoré découvrir ce morceau. En live, mêmes remarques que pour l'ouverture : cordes soyeuses, gestion intelligente des tempi, sans excès, mais sans aucun ennui. Près d'une heure de musique qui passe, avec l'impression que cela n'a duré que quelques courtes minutes. Romantique ou post-romantique à souhait, foisonnant de thèmes. On pense à Dvorak bien sûr, mais je ne peux m'empêcher de penser aux symphonies "oubliées" que David évoquaient ici en fin de saison (Kallinnikov, Dopper…), qui méritent totalement leur premier rang par les meilleurs orchestres dans les meilleures salles.

Ravi d'avoir débuté ma saison avec ce concert !

J'ai moi aussi découvert l'oeuvre de Suk à cette occasion, très belle découverte.
J'y ai trouvé quelques échos d'harmonies scriabiniennes par moments, j'ai parfois trouvé quelque chose d'anglais (le 3è mouvement m'a fait penser à Vaughan Williams) et aussi pensé à l'orchestration de Respighi assez souvent.

Les deux concerts étaient fabuleux, ce n'étaient que des oeuvres que j'aime bien (mais que je n'adore pas) mais qui m'ont toutes franchement enthousiasmé, aussi bien Hindemith, Schubert, que Tchaïkovsky...
La 9è de Schubert était d'une vitalité exceptionnelle, pas une once d'ennui à part un tout petit peu dans le scherzo quand même peut-être.

Lors du 1er concert en particulier K.Petrenko arborait un sourire permanent, du début à la fin du concert. (il est vrai qu'il s'agissait d'oeuvres très majoritairement optimistes, positives et ludiques)

J'ai trouvé tous les pupitres fabuleux.

(au passage, j'ai été surpris du faible pourcentages de femmes dans l'orchestre, moins de 20%)

Patzak a écrit:

DavidLeMarrec a écrit:

Patzak a écrit:

J'aurais aimé entendre le Suk aujourd'hui, mais les tarifs Berlinois me font aller ailleurs....

Il restait des places dans les 30€ hier encore, pourtant.

Oui, mais 2e balcon, dernier rang, 3/4 c'est... 49 Euros....

C'était pas bien rempli dimanche, tu aurais pu demander gentiment à être replacé, ça a marché pour plusieurs copains.

Rocktambule a écrit:

Pas de rappel.

C'est même plus spectaculaire que ça : ils se sont levés avant que la pianiste ne puisse revenir saluer ! On m'a dit que c'était habituel chez eux en tournée. Trois saluts, dont deux pour le soliste, et c'est tout.

Citation :

Visiblement, cet orchestre et ce chef ont enregistré une somme de 3 CD de ce compositeur, dont je ne connaissais rien jusqu'à la réception de la brochure de la PP au printemps dernier.

Ce n'est pas le même orchestre, mais celui de la Komische Oper, que dirigeait alors K. Petrenko, dans ces disques (CPO ) ! Je recommande tout particulièrement Zrani, encore plus d'aspects innovants et de rémanences debussysantes. Ce devaient être ses premiers disques, et je les trouve extrêmement réussis !

Citation :

Romantique ou post-romantique à souhait, foisonnant de thèmes. On pense à Dvorak bien sûr, mais je ne peux m'empêcher de penser aux symphonies "oubliées" que David évoquaient ici en fin de saison (Kallinnikov, Dopper…), qui méritent totalement leur premier rang par les meilleurs orchestres dans les meilleures salles.

J'ai trouvé ça ambitieux à vrai dire : plein de trouvailles, mais la veine mélodique n'est pas très évidente, le premier mouvement assez complexe… Ensuite, bien sûr, les figuralismes de Midi (quelle orchestration !) ou des musiciens aveugles sont immédiatement marquants.

Kalinnikov, Dopper ou Atterberg, ça flatte plus immédiatement l'écoute purement mélodique, plus grand public, à mon sens. C'est d'autant plus courageux d'avoir osé ça ! (À part Roméo, vraiment aucun tube dans le programme… )

Xavier a écrit:

Lors du 1er concert en particulier K.Petrenko arborait un sourire permanent, du début à la fin du concert. (il est vrai qu'il s'agissait d'oeuvres très majoritairement optimistes, positives et ludiques)

À voir ses vidéos de concerts, j'ai l'impression que c'est quelqu'un qui sourit beaucoup.

Au demeurant, à part ce qu'on disait un peu plus haut sur la sonorité des cordes, j'ai l'impression qu'une de ses caractéristiques interprétatives fortes, c'est de donner des lectures étonnamment «souriantes» (sonorité orchestrale très lumineuse, direction cursive et élancée, phrasés chaleureux) des œuvres les plus déprimées du répertoire postromantique: sa 6ᵉ de Mahler, sa 4ᵉ de Schmidt sont vraiment très singulières (mais réussies.)

Tout à fait d'accord : il joue vraiment tout comme ça, très élancé, pas du tout tourmenté. (Et ça fonctionne très bien en général. Pour les vertiges métaphysiques, en revanche, c'est clairement pas la bonne crèmerie.)

Exact, je l'avais aussi noté à propos de la 5ᵉ de Tchaikovsky (ici.) Et, contre toute attente (c'est vraiment tout le contraire du sale et méchant), j'aime généralement beaucoup.