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| Schumann - Fantaisie op.17 | |
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Auteur | Message |
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Invité Invité
| Sujet: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 20:46 | |
| J'ai un peu plus exploré la discographie de cette œuvre que pour les Etudes Symphoniques. J'ai entendu beaucoup de choses excellentes, bien que le II. soit toujours assez mal négocié. J'ai une préférence pour la version Fiorentino. Plutôt retenue mais avec une qualité de son exceptionnelle et un III. splendide. Richter (Decca (anciennement Philips) n'est pour moi pas prioritaire, comme souvent dans Schumann il passe à côté de l'esprit. Les deux live de Kempff que j'ai entendu sont clairement à éviter (technique très faible, pas de tension). Le Sage est très bon, c'est détaillé et précis, il manque quand même quelque-chose pour être transcendant. Pollini est assez bien tenu, même si dans le III. on aimerait un peu plus d'abandon. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 20:50 | |
| Tiré du fil disco Schumann / piano - alexandreg a écrit:
Sinon je voulais revenir sur une version de l'op.17 que tu avais cité plus haut : celle de Fiorentino. C'est vraiment parmi mes préférées : la construction globale est magnifique, le jeu est romantique mais jamais maniéré. Le toucher et les nuances sont incroyables. Il négocie très bien le II. (qui est un écueil terrible). Et le finale est vraiment magnifique, assez décanté mais d'une grâce et d'une classe incomparables.
- Scherzian a écrit:
Je ne peux qu'acquiescer à tout ce que tu dis de très beau à propos de Sergio Fiorentino et notamment de sa Fantaisie en ut majeur. Comme il est heureux que le crépuscule de ce pianiste ait été si beau, si long (sauf erreur de ma part, ses versions de la Fantaisie opus 17 de Schumann datent de la fin de sa carrière ; quoi qu'il en soit, elles sont aussi dans le toituyau si quelqu'un est intrigué par nos dithyrambes).
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| | | KID A Mélomane chevronné
Nombre de messages : 2912 Date d'inscription : 04/05/2007
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 20:55 | |
| - alexandreg a écrit:
- J'ai entendu beaucoup de choses excellentes, bien que le II. soit toujours assez mal négocié.
Pour ce deuxième mouvement, je n'ai pour l'instant pas trouvé mieux qu'Andsnes (qui est admirable d'engagement dans le I également). Cela avance implacablement, à un tempo vraiment risqué, jusqu'à cette fameuse péroraison C'est dans le III qu'il manque à mon goût un peu de mystère. |
| | | Mohirei Mélomaniaque
Nombre de messages : 542 Date d'inscription : 06/04/2007
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 22:15 | |
| Bonsoir, la Fantaisie est un des morceaux que je préfère chez Schumann. A chaque fois que je lance un CD, je ne peux m'empêcher de me dire que je l'ai déjà écouté tellement de fois mais dès les premières notes, le charme opère Parmi mes versions préférées, il y a Arrau (j'entends déjà les grincements de dents ). Surtout les enregistrements de concert. La manière dont il négocie, par exemple, la fin du deuxième mouvement dans ces conditions est quand même assez magnifique. Sinon, les propositions d'interprétations de Freire ou Nat sont aussi extrêmement intéressantes. Un grand regret (pour ma part) : ne pas avoir assisté à ce fameux concert où Alicia de Larrocha a donné cette Fantaisie. Il paraît qu'elle a été absolument prodigieuse ce soir. p.s. : pour Edwin Fischer, est ce que le seul enregistrement disponible est celui du coffret Andante ou bien il y en a un autre ? |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 22:23 | |
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 22:38 | |
| - alexandreg a écrit:
- [...] J'ai entendu beaucoup de choses excellentes, bien que le II. soit toujours assez mal négocié. [...]
Richter (Decca (anciennement Philips) n'est pour moi pas prioritaire, comme souvent dans Schumann il passe à côté de l'esprit. Entièrement d'accord avec toi. Pour le II, soit il n'est pas correctement négocié (cas de presque tous les pianistes que j'ai entendus jusqu'ici, notamment ceux pour lesquels on dispose d'un enregistrement en direct), soit il l'est (et c'est surtout le cas de Richter en studio chez EMI, qui donne l'impression que les sauts et sauts contraires n'en sont pas tant c'est fabuleux de contrôle). Mais lorsque le II est bien contrôlé (cas de Richter en studio, donc, même si sa version à Prague reste très impressionnante aussi), il me manque toujours l'impression d'une lutte sauvage, d'un Everest à surmonter, d'une condition humaine et matérielle à transcender. Et le III de Richter me déçoit de plus en plus au fil de mes réécoutes de ses versions ; où donc sont le renoncement et la sublimation, l'effort pour trouver dans les cendres de l'amour le terreau pour créer et composer ? |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 22:43 | |
| - Mohirei a écrit:
- [...] p.s. : pour Edwin Fischer, est ce que le seul enregistrement disponible est celui du coffret Andante ou bien il y en a un autre ?
Il y a aussi le CD Toshiba-Shinseido SGR 7115. Plus incunable japonais que ça, c'est pas possible. Le désintérêt d'EMI pour les enregistrements d'Edwin Fischer est un scandale. |
| | | Mohirei Mélomaniaque
Nombre de messages : 542 Date d'inscription : 06/04/2007
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 22:50 | |
| - Scherzian a écrit:
- Il y a aussi le CD Toshiba-Shinseido SGR 7115.
Alors là, je dis chapeau ! - Scherzian a écrit:
- Le désintérêt d'EMI pour les enregistrements d'Edwin Fischer est un scandale.
Malheureusement, tu n'as que trop raison Et il n'est pas le seul artiste dans ce cas. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 23:30 | |
| Pour la Fantaisie opus 17, les interprètes que j'aime le plus sont Sergio Fiorentino, Edwin Fischer, Dmitry Bashkirov, Grigory Sokolov (je dois la découverte de son interprétation, certes assez idiosyncrasique mais fascinante notamment dans le III, à la générosité d'un membre du forum) et surtout Vladimir Sofronitsky. On dispose de trois interprétations différentes (je veux dire qu'elles sont vraiment différentes au niveau poétique) de la Fantaisie par Sofronitsky, toutes les trois en direct : le 26 novembre 1951 à Moscou (Moscow State Conservatoire SMC CD 0019), le 28 janvier 1952 à Leningrad (Vista Vera VVCD-00164) et le 18 novembre 1959 à nouveau à Moscou (Denon COCQ-83673/4, le double CD qui contient aussi notamment les Études symphoniques opus 13 du même récital). Le pianiste est seulement un être humain en 1952. Il est un génie en 1959 et un dieu en 1951. La vétusté de la prise de son de 1951 (Mariefran confirmera peut-être) peut faire pencher la balance en faveur de 1959, d'autant que le III de 1951 n'est pas supérieur à celui de 1959 (mais rien n'égale le I de 1951 à mon avis, et le II y est aussi un peu mieux contrôlé du point de vue technique). Sous spoiler, les photographies des pochettes. - Spoiler:
(1951-11-26) (1952-01-28) (1959-11-18)
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| | | adriaticoboy Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7173 Date d'inscription : 17/08/2005
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 23:50 | |
| - Scherzian a écrit:
- Mohirei a écrit:
- [...] p.s. : pour Edwin Fischer, est ce que le seul enregistrement disponible est celui du coffret Andante ou bien il y en a un autre ?
Il y a aussi le CD Toshiba-Shinseido SGR 7115. Apparemment il s'agit bien du même enregistrement que celui du coffret Andante. http://fischer.hosting.paran.com/music/Fischer/Discography_Fischer.htm#Schumann - Citation :
- Le désintérêt d'EMI pour les enregistrements d'Edwin Fischer est un scandale.
EMI vient quand même de lui consacrer un coffret de 12 CDs dans la série Icon. Certes, les transferts ne sont pas les meilleurs, et il manque quelques trucs importants qu'EMI n'a jamais elle-même ressortis en CD, dont cette Fantaisie op. 17, c'est vraiment bête, mais ils ont eu la bonne idée de reprendre dans ce coffret le disque Testament (normalement hors de prix) avec le 2e de Brahms en 1942 avec Furtwängler (enregistrement de guerre qui d'ailleurs ne provient pas du catalogue EMI) et l'adagio du concerto symphonique du même Furt. C'est déjà ça. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 16 Sep 2010 - 23:59 | |
| Oui, c'est un peu ce que je voulais dire : ils ressortent à plusieurs reprises les mêmes (géniales) bandes et laissent dormir le reste. C'était le cas jusqu'il y a peu pour les Concertos de Mozart des années 1930 (heureusement que Appian était là), et c'est toujours le cas, sauf erreur de ma part, pour les Impromptus de Schubert et les quelques Sonates de Beethoven de la même époque (un bel opus 13, un fabuleux opus 57 et un opus 110 qui est l'interprétation que j'aime le plus de cette œuvre). Mais j'avoue avoir laissé un peu tomber EMI depuis que j'ai pu comparer leur édition CD (Références) du WTK à celle de Seth B. Winner pour Pearl. - Adriaticoboy a écrit:
- Apparemment il s'agit bien du même enregistrement que celui du coffret Andante.
http://fischer.hosting.paran.com/music/Fischer/Discography_Fischer.htm#Schumann Tu fais bien de préciser, car j'avais plutôt compris la question comme se rapportant aux différentes incarnations d'une même interprétation (et non à des interprétations différentes de la Fantaisie opus 17 par Edwin Fischer). |
| | | adriaticoboy Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7173 Date d'inscription : 17/08/2005
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 0:57 | |
| - Scherzian a écrit:
- Mais j'avoue avoir laissé un peu tomber EMI depuis que j'ai pu comparer leur édition CD (Références) du WTK à celle de Seth B. Winner pour Pearl.
En effet, le repiquage de Pearl est superbe. Le pire, c'est que les éditions EMI Références (1989 puis 2000) de ce WTK de Fischer n'étaient pas si mauvaises que ça, mais ces gougnafiers d'EMI n'ont pas pu s'empêcher de le massacrer pour de bon en 2007 lors de la parution – complètement redondante – dans la série GROC. |
| | | Invité Invité
| | | | adriaticoboy Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7173 Date d'inscription : 17/08/2005
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 1:15 | |
| Tu n'as pas à rougir, l'édition Pearl est bien supérieure à la première édition Références. Je voulais juste signaler qu'EMI a quand même réussi à produire un transfert encore plus mauvais par la suite. Mais ce n'est pas une surprise. |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 9:03 | |
| C'est une des oeuvres pour lesquelles j'ai dû comparer le plus d'enregistrements... peut-être une quarantaine.
Je suis bien d'accord que Fiorentino est une des priorités : en tout cas, son premier mouvement est vraiment un des plus beaux et surtout des mieux tenus dans la section centrale (im legendenton), où beaucoup se perdent ou perdent la tension.
Je n'arriverais pas à dégager une seule version, sinon. Le II est en effet très discriminant, mais vous n'avez pas évoqué la raison principale ! C'est que ça commence toujours trop fort... alors que le début est indiqué piano, et qu'ensuite il faut réussir à tenir une progression constante... Une seule interprétation rend justice, en tout cas, à ce qui est écrit, et dieu sait que je ne suis pas un grand fan : Argerich! Et du reste, toute sa Fantaisie est magnifique, je pense que c'est certainement, et de loin, son plus grand enregistrement. A noter que les ignorants de France Musique qui ont commis la tribune des critiques consacrée à la Fantaisie ont éliminé Argerich au bout de 30 secondes dans le II... parce que l'esprit de la partition n'était pas rendu!!
Bon, disons que sur 40 versions, je pourrais donner un quatuor majeur : Argerich et Fiorentino, donc, Virsaladze, Horowitz.
Et six compléments excellents pour faire 10 : Gieseking, A. Fischer/EMI, A. Fischer/BBC, Moiseiwitsch, Curzon, Pletnev. |
| | | Mandryka Mélomaniaque
Nombre de messages : 928 Date d'inscription : 03/04/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 10:07 | |
| La Fantaisie la plus iconoclaste que je connais est Michel Pletnev – j'adore sa douceur, est sa lenteur.
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| | | Richard Mélomaniaque
Nombre de messages : 1279 Age : 51 Date d'inscription : 23/01/2007
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 10:12 | |
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| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 12:47 | |
| - Théo a écrit:
- [...] Je n'arriverais pas à dégager une seule version, sinon. Le II est en effet très discriminant, mais vous n'avez pas évoqué la raison principale ! C'est que ça commence toujours trop fort... alors que le début est indiqué piano, et qu'ensuite il faut réussir à tenir une progression constante... Une seule interprétation rend justice, en tout cas, à ce qui est écrit, et dieu sait que je ne suis pas un grand fan : Argerich! Et du reste, toute sa Fantaisie est magnifique, je pense que c'est certainement, et de loin, son plus grand enregistrement. A noter que les ignorants de France Musique qui ont commis la tribune des critiques consacrée à la Fantaisie ont éliminé Argerich au bout de 30 secondes dans le II... parce que l'esprit de la partition n'était pas rendu!! [...]
Je suis d'accord pour ton quatuor majeur et pour certaines interprétations de ton sextuor suivant, mais je dirais volontiers pour Annie Fischer et surtout pour Clifford Curzon ce qu'Alexandre a indiqué pour les versions de Wilhelm Kempff. Je suis d'accord aussi pour ta critique de la tribune des critiques : surtout pour le principe en lui-même, dont Hippolyte avait souligné ce qu'il a intrinsèquement de biaisé, de faux et même de malveillant pour les interprétations qu'il faut entendre en entier pour se faire une idée de chaque instant, de chaque décision du musicien (parce que ces interprétations justifient, par la vision globale qu'elles déploient, chaque moment individuel qui peut perdre toute pertinence lorsqu'il est extrait), mais aussi pour le fait qu'à vaincre sans péril, etc. Mais je voulais surtout réagir au paragraphe que j'ai cité. Je ne suis pas sûr que le II soit très discriminant, à moins de juger surtout la compétence technique à un instant donné. Pour moi, il n'est pas plus discriminant que les deux autres mouvements (pas moins non plus, bien sûr). De plus, le début du II n'est pas du tout marqué piano, mais bien mezzo forte, un mässig assorti de l'indication de caractère durchaus energisch qui indique que sa modération doit cependant toujours être énergique. Pour en rester aux indications de nuances du début, le mezzo forte de départ est amplifié d'un crescendo dès la mesure n°5, d'un forte en fin de mesure n°7, ensuite de nombreux accents agogiques en mesures n°9 et n°10, puis encore d'un double crescendo (MD en mesure n°11, MG en mesure n°12), etc. Je pense donc que les interprètes ont toute latitude pour décider de l'intensité et surtout des rapports d'intensité de leur jeu, même dans ces deux premières lignes du deuxième mouvement. Dans l'architecture de l'œuvre considérée dans son ensemble, je trouve que ce qui est surtout frappant, c'est que le II est une forme de miroir inversé du III. On trouve, au cœur du II, un épisode central, noté Etwas bewegter et piano, délicieusement ombré, merveilleuse cantilène confiée d'abord à la voix médiane, ensuite à celle de soprano, et qui représente, je pense, une sorte d'œil du cyclone à mettre en rapport inversé avec les deux surrections passionnées du III. Sofronitsky est souverain dans cet épisode central ( Etwas bewegter du II), auquel il donne un tempo assez retenu et une grande intériorité. C'est une des raisons pour lesquelles je ne suis pas non plus d'accord pour dire qu'il faut « réussir à tenir [dans le II] une progression constante ». En dehors de l' Etwas bewegter, il faut en effet aussi magnifier les superbes phrases ombrées et méditatives (la première à partir de la mesure n°22, la deuxième à partir de la mesure n°40, etc.) qui, par leur rythme toujours pointé, s'écoulent progressivement dans le tissu héroïque du mouvement lorsque Schumann leur donne plus de vigueur avec ces soufflets crescendo alternés MG et MD. Toutes ces petites phrases sont bien marquées pianissimo pour le rythme pointé qui assure leur cohésion au sein du mouvement et piano pour les lignes mélodiques qui me semblent quand même très difficilement compatibles avec l'idée d'une progression constante à travers tout le mouvement. À nouveau, Sofronitsky y est admirable de relief, de concentration, de chant et surtout de diction (d'éloquence). Pour ma part, je ne ressens de progression constante, dans le II, que lors de la coda du Viel bewegter et des six mesures qui le précèdent. D'où l'importance, à mon avis, de jouer le II de manière très contrastée (et non pas selon une courbe énergétique croissante), afin qu'à chaque cataclysme du II réponde la sublimation résignée ou méditative du III, et qu'à chaque fois qu'« Eusebius prend la parole » dans le II il y ait une réponse enflammée et passionnée dans les deux grands épisodes en crescendo du III. Sokolov est fascinant de ce point de vue : lors de chaque embrasement du III, il maintient le tempo très retenu, impose impitoyablement les rythmes pointés (il les joue presque doublement pointés, ce que je trouve proprement génial) et construit un fortissimo constant tel que l'univers entier semble résonner de la volonté de Schumann de surmonter le deuil de son amour. |
| | | keane Mélomaniaque
Nombre de messages : 553 Date d'inscription : 10/02/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 13:43 | |
| - Théo a écrit:
- C'est une des oeuvres pour lesquelles j'ai dû comparer le plus d'enregistrements... peut-être une quarantaine.
Je suis bien d'accord que Fiorentino est une des priorités : en tout cas, son premier mouvement est vraiment un des plus beaux et surtout des mieux tenus dans la section centrale (im legendenton), où beaucoup se perdent ou perdent la tension.
Je n'arriverais pas à dégager une seule version, sinon. Le II est en effet très discriminant, mais vous n'avez pas évoqué la raison principale ! C'est que ça commence toujours trop fort... alors que le début est indiqué piano, et qu'ensuite il faut réussir à tenir une progression constante... Une seule interprétation rend justice, en tout cas, à ce qui est écrit, et dieu sait que je ne suis pas un grand fan : Argerich! Et du reste, toute sa Fantaisie est magnifique, je pense que c'est certainement, et de loin, son plus grand enregistrement. A noter que les ignorants de France Musique qui ont commis la tribune des critiques consacrée à la Fantaisie ont éliminé Argerich au bout de 30 secondes dans le II... parce que l'esprit de la partition n'était pas rendu!!
Bon, disons que sur 40 versions, je pourrais donner un quatuor majeur : Argerich et Fiorentino, donc, Virsaladze, Horowitz.
Et six compléments excellents pour faire 10 : Gieseking, A. Fischer/EMI, A. Fischer/BBC, Moiseiwitsch, Curzon, Pletnev. C'est amusant, Théo, de te voir revenir sur l'émission de France-musique que tu avais déjà critiquée avec les mêmes arguments sur MQCD. Comme tu le sais, mon sentiment est un peu partagé sur la question : d'un côté je regrette l'élimination hative de Martha Argerich qui a signé une magnifique version, emportée et passionnée comme à son habitude. Et en même temps la victoire surprise de Catherine Collard dans sa première gravure pour Erato (à ne pas confondre avec son remake chez Lyrinx) me paraissait amplement justifiée : on y entendait la profondeur d'Arrau avec un jeu très au fond du clavier mais sans les lenteurs, à mon gout excessives, qui peuvent géner chez le pianiste chilien. Alors pour une élimination rapide d'Argerich, cette émission m'a néanmoins fait découvrir une magnifique version...sur laquelle je n'aurais pas parié un kopeck. |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 14:08 | |
| - Scherzian a écrit:
De plus, le début du II n'est pas du tout marqué piano, mais bien mezzo forte, un mässig assorti de l'indication de caractère durchaus energisch qui indique que sa modération doit cependant toujours être énergique. Pour en rester aux indications de nuances du début, le mezzo forte de départ est amplifié d'un crescendo dès la mesure n°5, d'un forte en fin de mesure n°7, ensuite de nombreux accents agogiques en mesures n°9 et n°10, puis encore d'un double crescendo (MD en mesure n°11, MG en mesure n°12), etc. Je pense donc que les interprètes ont toute latitude pour décider de l'intensité et surtout des rapports d'intensité de leur jeu, même dans ces deux premières lignes du deuxième mouvement.
Oui, pardon, je me suis emmêlé le pinceaux parce que, souvent, j'ai demandé à des pianistes ou des amateurs quelle indication dynamique ils pensaient attribuée au début du II : tout le monde répond forte ou ff, puisque c'est ce qu'on entend plus de 9 fois sur 10. Sauf une fois, une pianiste m'a répondu "piano, non?", parce que c'est comme ça qu'elle l'entendait, elle ne se souvenait plus du tout de la partition quoique l'ayant jouée. Je lui ai répondu que j'aimerais bien l'entendre la jouer! Plus sérieusement, en effet l'enjeu essentiel n'est pas la dynamique absolue (même si j'ai plus envie d'entendre un mf plus proche du p que du f, comme Argerich), mais la progression et le respect de la logique de paliers dans l'exposé que tu as rappelée. C'est ça qui est très rare, hélas, et c'est ça "l'esprit" de cette entame dont les journalistes de FM ont cru malin de se prévaaloir pour virer Argerich... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 14:28 | |
| Oui, je suis tout à fait d'accord. Ce n'est pas moi qui défendrai coûte que coûte le mezzo forte initial de Sofronitsky, plus proche dans l'absolu du forte que du piano. En revanche, dans les rapports (d'intensités sonores, de tempos, de textures, etc.), il est fabuleux. Dans son interprétation à Prague, Richter me semble bien jouer mezzo forte au début, mais ce n'est pas étonnant : je trouve que ce pianiste est toujours remarquable dans les demi-nuances, les demi-teintes (c'est frappant dans la musique de Schubert).
Pour ce qui est de la Tribune, rien ne peut justifier que l'on procède par extraits. Même pas le temps qui leur est imparti : ils sont maîtres de la programmation, pourquoi ne pas consacrer une demi-journée à l'écoute en aveugle ou alors réduire le nombre d'interprétations écoutées ? Qu'une grande interprétation soit finalement mise en exergue au terme de leur procédure n'est pas un argument qui plaide en faveur du mode opératoire. Pour tout problème, il existe une solution qui est à la fois simple, convaincante... et fausse ! |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97900 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 19:20 | |
| - Scherzian a écrit:
- Pour ce qui est de la Tribune, rien ne peut justifier que l'on procède par extraits. Même pas le temps qui leur est imparti : ils sont maîtres de la programmation, pourquoi ne pas consacrer une demi-journée à l'écoute en aveugle ou alors réduire le nombre d'interprétations écoutées ? Qu'une grande interprétation soit finalement mise en exergue au terme de leur procédure n'est pas un argument qui plaide en faveur du mode opératoire. Pour tout problème, il existe une solution qui est à la fois simple, convaincante... et fausse !
Le problème réside quand même d'abord, indépendamment du mode opératoire (une interprétation s'apprécie par rapport à l'oeuvre et pas par rapport à d'autres interprétations), le ton généralement adopté, où l'on contemple des bêtes de somme à qui l'on cherche des défauts. Je déteste ça. Non, j'ai rien à dire sur le sujet. |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 19:37 | |
| Dans la mesure où le concert comme le disque sont des faits physiques, ont apprécie des interprétations, du moins de ce genre d'oeuvre, par rapport à celles qui les ont précédées dans notre oreille, ça, on n'y peut rien.
Je ne pense pas que le principal défaut de cette émission réside en cela, mais plutôt dans le caractère insupportablement psychologisant et du coup vainement pédant des critères d'écoute. En l'espèce, c'était : voilà la bio de Schumann (histoire de vendre le bouquin de Sappey, qui du reste a collaboré avec Le Sage pour sa pochette de présentation, ce qui discrédite totalement sa participation), est-ce que ce que "raconte" les interprètes colle avec ce qu'on imagine que Schumann devait ressentir à ce moment là en composant? Plus puéril et superficiel, comme écoute, tu meurs!
Et c'est bien pour ça qu'ils ont viré Argerich au début du II, vu qu'ils avaient décidé que c'était un triomphal retour à la vie, il ne fallait surtout pas respecter le mezzo forte et la progression dramatique qui s'ensuit comme elle... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 19:44 | |
| - DavidLeMarrec a écrit:
- Le problème réside quand même d'abord, indépendamment du mode opératoire (une interprétation s'apprécie par rapport à l'oeuvre et pas par rapport à d'autres interprétations), le ton généralement adopté, où l'on contemple des bêtes de somme à qui l'on cherche des défauts. Je déteste ça.
Non, j'ai rien à dire sur le sujet. Ah, mais je suis d'accord ! C'est pour cela que je plaide pour l'écoute isolée et en aveugle. L'isolement confronte l'interprétation à l'œuvre et, du moins en partie et pour ce qui concerne le piano solo, l'aspect aveugle permet de tenir à distance les contrats mentaux. Même pour une écoute comparée, on peut toujours écouter plusieurs fois une interprétation donnée à l'exclusion de toutes les autres, avant de passer à une autre. Cela transforme l'écoute comparée en une séquence d'écoutes en aveugle indépendantes. (Oui, cela demande beaucoup de temps...) Sinon, l'expérience est en effet ce que les participants en font. Dommage, c'est parce que tu aimes moins l'œuvre que l'opus 13 ou parce que tu n'as pas de découvertes particulières à évoquer ? |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 19:54 | |
| La version d'Argerich dont vous parlez c'est bien celle d'EMI, n'est-ce pas ? Savez-vous si elle a été rééditée ? J'ai vu aussi qu'il y en avait une autre chez RCA, vous la connaissez ? |
| | | DavidLeMarrec Mélomane inépuisable
Nombre de messages : 97900 Localisation : tête de chiot Date d'inscription : 30/12/2005
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 19:56 | |
| @ Scherzian : Tout à fait d'accord avec toi, mais pour éviter de se contraindre aussi lourdement, le plus simple reste d'écouter comme on veut. J'ai remarqué aussi qu'en ce qui me concerne, je pouvais porter des jugements diamétralement opposés dans les écoutes comparées selon que je dispose ou non de la partition... Je ne suis pas sensible aux mêmes choses selon la configuration d'écoute. (C'est juste que j'ai beaucoup moins écouté l'opus 17...) |
| | | Mohirei Mélomaniaque
Nombre de messages : 542 Date d'inscription : 06/04/2007
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Sep 2010 - 20:22 | |
| - Hippolyte a écrit:
- La version d'Argerich dont vous parlez c'est bien celle d'EMI, n'est-ce pas ? Savez-vous si elle a été rééditée ?
J'ai vu aussi qu'il y en avait une autre chez RCA, vous la connaissez ? Il me semble que ce sont les mêmes La réédition RCA aurait un léger avantage au niveau de la qualité sonore. De plus, il y a en complément les sonates avec Gitlis (son précaire pour ces enregistrements). |
| | | keane Mélomaniaque
Nombre de messages : 553 Date d'inscription : 10/02/2010
| | | | Mandryka Mélomaniaque
Nombre de messages : 928 Date d'inscription : 03/04/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Sam 18 Sep 2010 - 12:44 | |
| - keane a écrit:
- Et en même temps la victoire surprise de Catherine Collard dans sa première gravure pour Erato (à ne pas confondre avec son remake chez Lyrinx) me paraissait amplement justifiée : on y entendait la profondeur d'Arrau avec un jeu très au fond du clavier mais sans les lenteurs, à mon gout excessives, qui peuvent géner chez le pianiste chilien. Alors pour une élimination rapide d'Argerich, cette émission m'a néanmoins fait découvrir une magnifique version...sur laquelle je n'aurais pas parié un kopeck.
Dis moi, le DBT dans le même disque, est –il une interprétation réussie et intéressante? |
| | | Hippolyte Mélomane chevronné
Nombre de messages : 3084 Localisation : Paris Date d'inscription : 28/12/2008
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Sam 18 Sep 2010 - 12:58 | |
| - keane a écrit:
- Et en même temps la victoire surprise de Catherine Collard dans sa première gravure pour Erato (à ne pas confondre avec son remake chez Lyrinx) me paraissait amplement justifiée
Il ne me semble pas qu'elle ait réenregistré la Fantaisie pour Lyrinx, je crois que c'est bien là son unique enregistrement. En tout cas, les enregistrements schumanniens de Catherine Collard valent plus qu'un simple détour, que ce soit ceux d'Erato ou ceux ultérieurs de Lyrinx. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Sam 18 Sep 2010 - 18:43 | |
| J'ai écouté Nat et Horowitz, et pour moi ça n'égale pas Fiorentino.
Nat est pas mal dans le I. mais j'ai n'aime pas son II., c'est pris sabre au clair, ça tape allègrement à côté et je ne perçois pas de tension. Trop brutal à mon goût.
Horowitz ne me plaisait pas aux premières écoutes mais j'aime de plus en plus. Ses I. et II. me semblent presque hoquetant par moment et ça me gêne, j'attends un flux plus direct (malgré tout il y a de superbes fulgurances). Son III. est splendide, anti-spectaculaire et avec un contrôle des aigus magnifique. |
| | | keane Mélomaniaque
Nombre de messages : 553 Date d'inscription : 10/02/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Dim 19 Sep 2010 - 9:39 | |
| - Mandryka a écrit:
- keane a écrit:
- Et en même temps la victoire surprise de Catherine Collard dans sa première gravure pour Erato (à ne pas confondre avec son remake chez Lyrinx) me paraissait amplement justifiée : on y entendait la profondeur d'Arrau avec un jeu très au fond du clavier mais sans les lenteurs, à mon gout excessives, qui peuvent géner chez le pianiste chilien. Alors pour une élimination rapide d'Argerich, cette émission m'a néanmoins fait découvrir une magnifique version...sur laquelle je n'aurais pas parié un kopeck.
Dis moi, le DBT dans le même disque, est –il une interprétation réussie et intéressante?
- Hippolyte a écrit:
- keane a écrit:
- Et en même temps la victoire surprise de Catherine Collard dans sa première gravure pour Erato (à ne pas confondre avec son remake chez Lyrinx) me paraissait amplement justifiée
Il ne me semble pas qu'elle ait réenregistré la Fantaisie pour Lyrinx, je crois que c'est bien là son unique enregistrement.
En tout cas, les enregistrements schumanniens de Catherine Collard valent plus qu'un simple détour, que ce soit ceux d'Erato ou ceux ultérieurs de Lyrinx. Effectivement, Hippolyte, tu as raison : la Fantaisie n'a été enregistrée qu'une fois chez Erato. Sinon, pour répondre à Mandryka, les Davidsbündlertänze de Collard sont un peu décevantes car elles manquent un peu de flamboyance dans les passages enjoués. C'est pourquoi, dans cette oeuvre, j'ai une préfèrence pour le surprenant Eric le Sage qui varie mieux les climats et surtout pour Walter Gieseking (coffret Andante), assez fantasque et génial là dedans et dont l'enregistrement était l'un des disques de chevet d'Arrau (ça, c'est pour pousser Hippolyte à la dépense...). Sinon, il faut noter qu'une nouvelle gravure consacrée aux deux oeuvres qui nous occupent sortira la semaine prochaine en Angleterre : celle de Mitsuko Uchida, malheureusement commercialisée au prix du caviar (plus de 25 euros hors frais de port) sous pretexte qu'un second CD comprenant une interview de l'artiste y est adjoint. Après il ne faudra pas se plaindre de le crise du marché du disque... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Dim 26 Sep 2010 - 21:10 | |
| Je me permets de recopier quelques notes que j'avais écrites, dans le fil du piano de Schumann, à propos de l'interprétation de la Fantaisie opus 17 par Sokolov. - Citation :
- Écouté hier soir Grigory Sokolov dans la Fantaisie en ut majeur de Schumann, opus 17. Une interprétation en concert, aux tempos amples (14'55 dans le I, 8'07 dans le II, 13'47 dans le III), mais par l'énergie et le lyrisme déployés les tempos ne semblent pas du tout inhabituels.
Le I est aussi enfiévré (le premier thème clamé fortissimo avec sa quinte déclinante) que maîtrisé (l'attention portée aux détails, aux accents, aux nuances). Les phrasés qui entourent les épanchements lyriques sont délicieux, le rubato et l'agogique audacieux sont très convaincants. Le second thème (dit de Clara, « es-tu ce second thème, je suis bien près de le penser » disait Schumann) est chanté de façon très intérieure, presque modeste. Le phrasé y est impeccable. L'adagio est très recueilli, Sokolov faire preuve d'une maîtrise incroyable de la flexibilité du temps (les silences, les phrasés immenses). Quelle prise de risques dans Im lebhaften Tempo (les rythmes pointés impitoyables, les accents innombrables à la main gauche, quatre par mesure, puis le trille dévorant prolongé immensément dans le point d'orgue) ! Im Legendenton est énoncé tel un choral rustique très intérieur, avec un phrasé admirable. À son retour, le thème de Clara se fait encore plus irréel, impalpable et hiératique (ce n'est ici qu'une suite de noires dépouillées de leur rythme), le sens du temps est confondant dans ce phrasé de quatorze mesures. Dans les quinze dernières mesures adagio, évocation de la ferne geliebte, on ne retrouve pas la magie sonore envoûtante de Sofronitsky 1951, mais l'allusion à Beethoven est profondément belle, très apaisée. Incroyable que ce premier mouvement dure quinze minutes, il est si dense et fouillé dans la fièvre, si soutenu dans le lyrisme qu'on ne se rend jamais compte du temps métrique.
Dans le II, la marche est triomphale, dès le départ très énergique, faisant fi de l'indication mezzo forte qui vaut pour les premières mesures. Tout ce que j'aime. Les angles sont soulignés impitoyablement mais le lyrisme conserve tous ses droits (les petits passages pianissimo où le lyrisme se cache sous la scansion obsessionnelle des rythmes pointés, mais surtout bien sûr l'épisode Etwas bewegter central, sorte d'œil du cyclone). La rigueur de mise en place donne le tournis dans la coda Viel bewegter.
Pour la sublimation du III, Sokolov offre à nouveau son sens du chant, ses phrasés provoquent la dissolution des barres de mesures. Le timbre se fait plus fin, ciselé. Les nuances sont très amples, profondes. Je trouve que le plus original est peut-être les deux poussées de fièvre (après l'Etwas bewegter puis juste avant la fin). Elles sont amenées avec détermination mais aussi avec beaucoup de patience et leur sommet (les mesures fortissimo), dans un tempo devenu immense, quasi cosmique, résonne et se grave comme un instant d'éternité. Le sens de la tension puis de la détente y est également fabuleux, en particulier par la gradation des nuances. C'est bouleversant. Une découverte inoubliable. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 1 Oct 2010 - 19:41 | |
| Sofronitsky (en direct à la grande salle du conservatoire de Moscou, le 26 novembre 1951, édité par Moscow State Conservatoire, SMC CD 0019)
Remarque préliminaire. Une fois n'est pas coutume, le travail d'édition, effectué par le conservatoire de Moscou lui-même, n'est pas en cause : la bande d'origine est en mauvais état, vétuste et d'une lisibilité compromise. Mais les timbres sont assez bien respectés, grâce à un spectre complet jusqu'à ses deux extrémités et à un travail éditorial respectueux de la bande. Le seul aspect gênant, ce sont les nombreux changements de perspective sonore et de couleur dans le troisième mouvement. Ces changements accompagnent souvent les étapes de la partition, ce qui n'arrange rien et constitue un obstacle qu'il faudra surmonter lors de l'écoute.
De toutes les interprétations que j'ai entendues jusqu'ici de cette œuvre, celle-ci est la plus personnelle (avec celle de Sokolov), la plus fiévreuse, la plus tragique et désespérée, mais aussi la plus éperdue et une des plus tendres (avec celle de Fiorentino). On ne trouvera ici aucun triomphe nulle part, mais une âme qui vibre et résonne avec feu à tous les aspects de l'œuvre, dans un expressionnisme intense et envoûtant. Sofronitsky avait dit que l'art véritable est comme la lave en fusion incandescente, tenue en respect par sept plaques de blindage. Ici, à peu près toutes les plaques de blindage craquent et brûlent de toutes parts. Dans d'autres mains, une telle vision poétique pourrait s'apparenter au chaos. Rien de tel avec Sofronitsky : la volonté de l'instrumentiste et la concentration du poète, toutes deux immaculées, tiennent l'œuvre avec fermeté et permettent au musicien d'en sonder sans faillir les abîmes autant que les cimes.
À l'entame du premier mouvement, la quinte déclinante du premier thème est clamée avec une passion dévorante, dans la nuance fortissimo, mais sans excès. Le decrescendo puis le piano des mesures n°9 et n°10, pourtant bien audibles, sont interprétés avec liberté. Il s'agit plutôt d'un vaste decrescendo sur les mesures n°10 à n°14, comme une main qui passe sur un front brûlant : dans un premier temps, avant l'apaisement de la caresse, c'est le front qui embrase la main, ce que confirme l'intense crescendo de la fin de la mesure n°14. Dans les mesures ritardando (n°17 et n°18), la tendresse apporte la promesse d'un adret à cette passion qui écrase le cœur. Le maniement agogique du temps musical y est fabuleux. Mais aux mesures n°19 à n°28, de manière progressive, c'est la passion et la douleur qui brisent toutes les digues, d'abord crescendo puis par les trilles que Sofronitsky joue dévorants. Pour le retour de la quinte déclinante, mesure n°29 et suivantes, avec son rythme devenu beaucoup plus impérieux (cette noire doublement pointée et sa double croche), Sofronitsky se fait plus intense que jamais encore, avec un sforzando mordant, un fortissimo implacable (mesure n°33 et suivantes) et les immenses accents (non notés, mesures n°34 à n°40) de sa main gauche. En procédant ainsi, le pianiste offre un contraste saisissant, à partir de la mesure n°41, au thème dit « de Clara ». Les phrasés se font immenses, le temps musical soumis à chaque instant de la poésie. Outre la tendresse qu'elle exprime, la sonorité du pianiste semble tendue avec douceur, tournée vers ailleurs, cherchant à dépasser sa nature matérielle pour se faire esprit (mesures n°41-43, n°45-47, n°62-68). Le temps se fige avec presque un ritardando par mesure. Le bref adagio de cinq mesures (n°77 à n°81), pourtant toujours très expressif, s'évanouit sur un fa aigu à la limite de l'audible (tout à l'heure, à la fin de l'avant-dernière page de ce mouvement, le mi bémol aigu du second adagio, à la mesure n°273, ne sera plus entendu que comme un timbre sans attaque, fondu dans la résonance). La foudre Im Tempo (mesure n°82) introduit la transition vers l'épisode Im lebhaften Tempo (mesure n°105 et suivantes). Ce dernier témoigne d'une prise de risque presque effrayante. Le crescendo double (mesures n°106 et n°108), les rythmes pointés staccato (mesures n°107, n°109, n°111, n°113, n°115 et n°116), l'accentuation agogique de la ligne de basse (mesures n°105 à n°118), le dernier crescendo élargi d'un ritardando (mesures n°115 à n°118), l'accentuation de la ligne de quinte déclinante clamée fortissimo (mesure n°119 et suivantes) : c'est quasi démiurgique, toutes ces indications de la partition sont observées avec rigueur, mais par le prisme d'une inspiration de possédé, dans un tempo panique. C'est le comble de la démesure dans le contrôle émotionnel.
L'Im Legendenton à 2/4 (mesures n°129 et suivantes) est joué de manière recueillie, comme en 1959, mais aussi avec une certaine rusticité voire rugosité des phrasés. Cet Im Legendenton ne sera donc pas aussi intérieur, effacé ou intemporel que celui de 1959 (quelques exemples : l'accentuation non écrite sur la noire de la mesure n°130, l'urgence du rubato aux mesures n°134 et n°135, la poussée de fièvre aux mesures n°154 à n°156 qui commande un accelerando vertigineux avant le ritardando prescrit), mais c'est qu'il s'inscrit dans une vision poétique beaucoup plus fiévreuse du premier mouvement. L'Im Tempo de la mesure n°165 intervient de manière progressive, d'abord virevoltant (mesures n°165-172) puis tempétueux (mesures n°173-180, sur le thème du Legendenton), et inscrit le retour du thème dit « de Clara » au cœur du Legendenton. La qualité de phrasé de Sofronitsky fait ici merveille, car ce thème, devenu étale et intemporel, chanté en noires et donc dépouillé de son rythme, se déploie sur presque quatorze mesures (mesures n°181 à n°194) et il faut ici un certain délire lyrique. Le second Im Tempo (mesure n°195) est impérieux et aérien, et, si le triple forte de la mesure n°204 n'est à mon avis pas assez puissant, la main gauche trouve, dans les huit mesures qui suivent (mesures n°204 à n°211), des couleurs ténébreuses et des textures rugueuses qui offrent le meilleur contraste possible pour la cataracte de lumière des mesures n°212-214, accentuées avec scintillement et jouées fortissimo sans jamais faiblir (même et surtout dans le ritardando où tant de pianistes se montrent frustrants : le decrescendo n'intervient qu'en mesure n°215).
On retrouve le tempo initial du premier mouvement à la mesure n°225. C'est le thème de quinte déclinante dans son expression la plus tragique et désespérée, paroxystique même. Le thème dit « de Clara » lui fait cependant suite dès la mesure n°233, dans sa version de départ rendue au temps et au rythme. On passe ainsi de la fièvre sèche à la tendresse éperdue en l'espace d'une dizaine de mesures. Sofronitsky se montre aussi souverain dans la déclaration de guerre (mesures n°225-232) que dans celle d'amour (mesures n°233-240). Comme dans la première partie, le temps se fige sur un nouvel adagio de cinq mesures (n°269 à n°273). Un dernier Im Tempo (mesure n°274), au fortissimo exténué (mesures n°274 à n°285), éveille une dernière fois la quinte déclinante (mesure n°286 et suivantes) avant l'adagio final de quatorze mesures. Schumann avait confié à Beethoven, par une évocation très distante de sa Bien-aimée lointaine, le soin de dire à Clara son amour pour elle par-delà l'infranchissable. Pour cette dernière minute de musique, je trouve l'inspiration et le jeu de Sofronitsky miraculeux. Tout serait à méditer seconde par seconde. Même s'il parvient à injecter quelques débris de fièvre dans certaines notes, son phrasé et le temps musical que celui-ci impose ne sont plus qu'un abandon murmuré (mesures n°295 à n°298), une perte d'équilibre (mesures n°299-300), un furtif retour de la sève (mesures n°300-301), un évanouissement (mesure n°302) et une stase onirique (pianissimo, mesures n°303 à n°309). Après six accords aigus suspendus comme par magie, Sofronitsky donne néanmoins à l'avant-dernier accord dans le grave (mesure n°308) une qualité réflexive ou semi-consciente que le dernier accord (mesure n°309) efface d'un souffle.
Dans le deuxième mouvement, on ne trouvera aucun triomphe, juste une volonté qui refuse l'anéantissement et sertit de nombreux moments de lyrisme (en particulier l'Etwas bewegter central) qui sont comme les images inversées, en miroir, des élans passionnés du troisième mouvement. La nuance initiale est à mi-chemin entre mezzo forte et forte (l'interprétation de 1959 adoptera un vrai mezzo forte) et l'accentuation agogique du ré (mesure n°9) et du sol (mesure n°10) (etc.) sera bien plus tranchante en 1959, mais je trouve que l'énergie est très bien dosée en ce début de mouvement. La mesure n°22 et les suivantes révèlent un lyrisme secret (joué piano avec beaucoup d'expressivité, sous les rythmes pointés pianissimo) que je n'ai pas entendu ainsi chez d'autres pianistes. De manière progressive, les rythmes pointés finissent par tout dévorer jusqu'au retour, à la mesure n°40, des petites phrases d'un lyrisme souterrain qui innerve cette fois tout le discours, par-delà un deuxième retour (mesure n°58) et même un troisième (mesure n°66). En fait, ce n'est qu'à partir de la mesure n°74 (mezzo forte) que l'énergie se déploie par vagues successives, en crescendo et même accelerando vertigineux, pour conduire au premier fortissimo du mouvement (mesure n°92 et suivantes, hérissées en sforzando). Parmi les interprètes que je connais, seul Sofronitsky offre de l'Etwas bewegter central (mesure n°114 et suivantes) une vision poétique si proche de l'étreinte, par le tempo devenu très ample, les contre-chants, les phrasés et la lumière du timbre dans l'aigu, puis l'énergie contenue des rythmes pointés (dès la mesure n°131) et enfin l'enjouement virevoltant du scherzando (mesure n°141 et suivantes). À nouveau, les seize mesures (n°177 à n°192) qui précèdent le phénoménal triple forte (avec ritardando immense) de la mesure n°193 sont jouées avec une fièvre dont l'intensité progresse, par vagues successives, dans un temps musical de plus en plus dense et qui répond ainsi (stringendo) aux nombreuses indications crescendo de la partition. La coda Viel bewegter (mesures n°232 à n°259) me semble mieux maîtrisée et peut-être un peu plus véhémente que celle de 1959. Mais il s'agit ici de volonté bien plus que de contrôle : une volonté ferme, résolue, un poing fermé contre l'anéantissement. Les cinq dernières indications sforzando (mesures n°251-257) sont implacables et les trois dernières mesures (fortissimo) sont prises dans un tempo devenu ex abrupto gigantesque.
Le troisième mouvement de 1951 est sans doute moins intégré que celui de 1959, même si la prise de son, avec ses nombreux changements de perspective et de couleur (qui tombent parfois au mauvais moment), n'est pas pour rien dans cette impression. La fabuleuse vision de 1959 sera plus unifiée, plus « unique » dans son identité sonore (par rapport à celle des deux autres mouvements) et aussi plus distanciée. En écoutant l'interprétation de 1951, on sent bien que seul un fin ménisque protège de la passion et de la douleur sous-jacentes l'accomplissement ou le dépassement. Plus encore peut-être que dans le premier mouvement, dans celui-ci règnent la fluide plasticité du temps musical, la liberté des phrasés, la découverte des contre-chants, l'éloquence de la diction. Il n'y a presque pas d'attaques (de marteaux) dans les longues phrases du début ; tout se passe comme si chaque note s'écoulait par amour dans la suivante. La douleur menace tout l'édifice au crescendo et decrescendo des mesures n°28 et n°29. D'ailleurs, la main gauche du pianiste trouve, pour la ligne de chant à l'extrême grave, aux mesures n°30-33, une morbidité sensuelle et noire impressionnante. L'Etwas bewegter (mesure n°34) est joué en plein dans la nuance mezzo forte mais reste très surprenant. Ce ne sont pourtant que des prémices, car le vrai feu de passion ne brûle qu'à partir de la mesure n°52, en trois vagues successives et autant de reflux, pour conduire au point culminant des mesures n°68-69 et à son apaisement des deux mesures suivantes (n°70-71). Le second chemin de passion vers son point culminant, qui survient aux mesures n°119-120, est bien sûr homologue, mais il est cette fois plus sauvage : une immense courbe croissante dépourvue de reflux, sans cesse brassée et poussée vers l'avant, avec des gestes pianistiques parfois très abrupts (la main gauche !) et dans un temps musical stringendo. L'apaisement de cette douleur (aux mesures n°121-122) est d'ailleurs bien plus difficile, plus lent et, pour tout dire, plus ambigu. L'indication nach und nach bewegter und schneller à partir de la mesure n°127 ne reste pas lettre morte, et d'ailleurs l'intensité sonore forte atteinte au moment du ritardando de la mesure n°137 perdure bien au-delà de celui-ci, jusques et y compris la demi-mesure adagio de la fin (mesure n°139). Les deux accords piano de la mesure n°141 sont encore saturés d'angoisse et le second fait longuement attendre le serein accord final. |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Ven 17 Déc 2010 - 19:39 | |
| - Scherzian a écrit:
- Mohirei a écrit:
- [...] p.s. : pour Edwin Fischer, est ce que le seul enregistrement disponible est celui du coffret Andante ou bien il y en a un autre ?
Il y a aussi le CD Toshiba-Shinseido SGR 7115. Plus incunable japonais que ça, c'est pas possible. Le désintérêt d'EMI pour les enregistrements d'Edwin Fischer est un scandale. Tiens, j'ai un autre disque : couplée avec l'opus 5 de Brahms et la K.331 de Mozart. |
| | | Mohirei Mélomaniaque
Nombre de messages : 542 Date d'inscription : 06/04/2007
| | | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Sam 18 Déc 2010 - 17:41 | |
| Le disque de Mariefran est un complet inconnu pour moi également. Dans la discographie de Roger Smithson et Youngrok Lee, on parle bien d'un disque compact PTC 2003 vendu avec l'édition d'octobre 1992 de la revue italienne Piano Time, mais pas de trace du PTC 2023 de Mariefran. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Mer 18 Mai 2011 - 22:44 | |
| J'ai écouté la version Argerich, qui vient d'être republiée par Sony sous ce visuel (ça coûte 7€) : La prise de son n'est pas super agréable (c'est très clair mais c'est métallique, assez typique de Columbia). Par contre c'est une superbe version, peut-être celle qui joue le plus sur les contrastes de toutes celles que j'ai entendu. Le I. est extrêmement passionné, les élans sont fougueux, les ruptures extrêmement surprenantes (et magnifiquement amenées sur le plan rhétorique, on n'a pas pour autant une succession absurde d'événements contraires). La caractérisation de chaque épisode est extrêmement forte. Les dynamiques sont utilisées dans toute leur ampleur, ce qui donne un I. très combattif. Le II. est splendide, avec des rythmes parfaitement sentis, une main gauche très incisive dans les contrechants. Et là aussi excellente caractérisation des épisodes, qui retranscrit très fortement la structure du mouvement et permet, comme souligné plus haut, une gradation quasi parfaite du mouvement. Par rapport à certaines versions où ce mouvement prend presque un caractère martial, ici on garde une atmosphère passionnée, et à la fin vient l'apothéose attendue. Le III. est assez rapide, mais tout aussi magnifique que les mouvements précédents. Pas de contemplation, peu d'affliction, on reste ici toujours combattif. J'ai aussi réécouté plusieurs fois la version Horowitz et elle me plaît de plus en plus. Tout d'abord le remastering des Original Jacket est meilleur, et donne à entendre un piano beaucoup plus rond et moins métallique. Je trouve que cette version est très sombre, sans aucune concession. C'est même quasi morbide à côté d'Argerich, ici il n'y a qu'assez peu de passion, c'est tragique de bout en bout. Et j'adhère désormais totalement à tous ses choix, sauf la légende que je ne comprend toujours pas. Le III est même devenu mon préféré juste derrière celui d'A Fischer en live (totalement bouleversant). |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Mer 18 Mai 2011 - 23:23 | |
| Virsaladze (live Grange de Meslay - 1994) : Probablement la version la plus impressionnante sur le plan pianistique, le piano paraît infiniment large, et dense aux niveau des harmoniques. C'est du piano orchestral, ici ça fonctionne superbement. Peut-être le piano le plus beau de la discographie, mais cette version ne peut pas se réduire à ça. Devant Fiorentino, c'est la version qui me semble la plus puissamment architecturée. Tout est tendu, il n'y aucune rupture de flux, aucune perte dans le contrôle et la progression harmonique (à un niveau proprement hallucinant pour un live). On a pas l'imagination parfois débridée d'Argerich ou Horowitz, mais c'est d'une autorité remarquable , la légende est superbe, d'une justesse de ton incroyable. Virsaladze ne ménage aucun répit pour l'auditeur, même les moments les plus tendres de la partition sont sombres et tendus, il n'y a pas d'alanguissement (ce qui n'empêche pas une superbe douceur de touché). Et puis c'est couplé avec des choses tout aussi géniales, un indispensable de toute discographie schumannienne. |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 19 Mai 2011 - 0:15 | |
| Oui, on peut préférer 3-4 autres versions de la Fantaisie (Horowitz, Argerich, Fiorentino, bien sûr), mais c'est effectivement surtout son op. 11 qui écrabouille sauvagement la concurrence sur ce disque. |
| | | Mandryka Mélomaniaque
Nombre de messages : 928 Date d'inscription : 03/04/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 19 Mai 2011 - 7:37 | |
| - alexandre. a écrit:
- Virsaladze (live Grange de Meslay - 1994) :
Probablement la version la plus impressionnante sur le plan pianistique, le piano paraît infiniment large, et dense aux niveau des harmoniques. C'est du piano orchestral, ici ça fonctionne superbement. Peut-être le piano le plus beau de la discographie, mais cette version ne peut pas se réduire à ça.
Devant Fiorentino, c'est la version qui me semble la plus puissamment architecturée. Tout est tendu, il n'y aucune rupture de flux, aucune perte dans le contrôle et la progression harmonique (à un niveau proprement hallucinant pour un live). On a pas l'imagination parfois débridée d'Argerich ou Horowitz, mais c'est d'une autorité remarquable , la légende est superbe, d'une justesse de ton incroyable. Virsaladze ne ménage aucun répit pour l'auditeur, même les moments les plus tendres de la partition sont sombres et tendus, il n'y a pas d'alanguissement (ce qui n'empêche pas une superbe douceur de touché).
Et puis c'est couplé avec des choses tout aussi géniales, un indispensable de toute discographie schumannienne. D'accord. L'opus 11 dans ce disque est pas mal. A part Gieseking et Sofronitsky, qui la joue mieux? C'est une bonne chose que le son du piano soit meilleure dans ses derniers disques que dans ses premiers enregistrements. Pour moi la dureté du ton du piano gâte le disque avec la sonate de Chopin. C’est pas sa faute je pense. Ce du à la prise de son. Elle est pianiste de génie, ça se voit.
Dernière édition par Mandryka le Jeu 19 Mai 2011 - 8:06, édité 1 fois |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 19 Mai 2011 - 8:00 | |
| - Théo a écrit:
- Oui, on peut préférer 3-4 autres versions de la Fantaisie (Horowitz, Argerich, Fiorentino, bien sûr), mais c'est effectivement surtout son op. 11 qui écrabouille sauvagement la concurrence sur ce disque.
J'ai l'impression que la Fantaisie est l'oeuvre pianistique de Schumann la mieux servie au disque, il y a beaucoup de versions dont pas mal d'excellentes (et une très grosse poignée d'exceptionnelles). Alors que pour les sonates (surtout l'op.14), il faut vraiment chercher pour trouver les versions et en plus il y en a peu de très bonnes. |
| | | Mandryka Mélomaniaque
Nombre de messages : 928 Date d'inscription : 03/04/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 19 Mai 2011 - 17:43 | |
| - alexandre. a écrit:
- Théo a écrit:
- Oui, on peut préférer 3-4 autres versions de la Fantaisie (Horowitz, Argerich, Fiorentino, bien sûr), mais c'est effectivement surtout son op. 11 qui écrabouille sauvagement la concurrence sur ce disque.
J'ai l'impression que la Fantaisie est l'oeuvre pianistique de Schumann la mieux servie au disque, il y a beaucoup de versions dont pas mal d'excellentes (et une très grosse poignée d'exceptionnelles). Alors que pour les sonates (surtout l'op.14), il faut vraiment chercher pour trouver les versions et en plus il y en a peu de très bonnes. Il y a des enregistrements d'op 11 de > Sofronitsky > Gieseking > Cherkassky > Guilels studio > Guilels live BBC > Guilels live Moscou > Berman live Italie > Berman live Japon > Brumberg > Pollini > Virsaladze live Moscou > Virsaladze live Tours > Demidenko > Grimaud > Andsnes > Popovic Virsaladze (Tours) est mon préféré
Dernière édition par Mandryka le Jeu 19 Mai 2011 - 17:56, édité 2 fois |
| | | Théo B Mélomane averti
Nombre de messages : 446 Age : 40 Date d'inscription : 06/09/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 19 Mai 2011 - 17:45 | |
| On a les mêmes sauf que je ne connais pas Berman au Japon ! Enfin, à moins que tu ne parles de la vidéo, auquel cas, si, je connais. |
| | | Mariefran Mélomane nécrophile
Nombre de messages : 14259 Age : 63 Localisation : Lille Date d'inscription : 25/02/2008
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Jeu 19 Mai 2011 - 18:19 | |
| Il y a aussi Leonskaja et Collard. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Dim 22 Mai 2011 - 17:03 | |
| Nat en live au Théâtre des Champs-Elysées : Je ne suis pas un grand fan de Nat en général, et ce n'est pas cet enregistrement qui me fera changer radicalement d'avis. Le I. est vraiment de très bonne tenue, bien que je ne comprenne pas vraiment ses changements brusques de caractère, ça manque parfois d'un peu de transition. Le II. est très bordélique, il tape à côté joyeusement, mais ça ne le perturbe pas plus que ça (l'habitude sans doute ). Je n'aime pas ce qu'il fait dans ce II., c'est pris sabre au clair, beaucoup trop univoque je trouve. Le III. est par contre assez beau, recueilli au départ. Par contre il fait des petites accélérations qui semble hors de propos, dommage, parce-que les gradations vers les climax sont bien amenées. Mais globalement il y a toujours une certaine lourdeur, que je n'arrive pas à prendre pour un climat, et qui me déplaît. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Dim 22 Mai 2011 - 18:55 | |
| Brendel (1966) : C'est je crois la seule fois qu'il a enregistré cette pièce et bien lui en a pris. Le credo de cette interprétation est de faire l'inverse de tout ce que recommandent les indications gentiment données par Schumann aux pianistes. Le I. est pris lentement et timidement, alors que Schumann écrit "Durchaus phantastisch und leidenschaftlich vorzutragen". Tout est joué dans des dynamiques très faibles, on est au degré 0 de l'emportement, il n'y a aucune passion. L'étonnement initial laisse vite place à l'ennui, Brendel sollicite le texte dans un sens totalement contraire, et plus rien n'a de logique dans la construction de ce mouvement (les transitions sont d'une faiblesse de tension effroyable). Le II. commence plutôt bien, on a pas une marche brutale ou désaxée. Mais le problème est que ça ne s'anime jamais, on reste toujours dans ces dynamiques faibles, avec ce piano tout sec refusant toute passion. L'indication de caractère est pourtant "durchaus energisch". Le III. est du même tonneau, mou et sans âme. C'est je crois la version la pire que j'ai entendu, la première qui ne rende pas justice à l’œuvre. Kempff, même s'il est laborieux, essaye de donner un peu de caractère à la partition. C'est rare que j'ai la sensation d'une projection aussi biaisée. La seule réussite ici est sur le plan du refus de l'émotion : pas d'émotion chez le pianiste, pas d'émotion chez l'auditeur. |
| | | adriaticoboy Mélomane chevronné
Nombre de messages : 7173 Date d'inscription : 17/08/2005
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Dim 8 Jan 2012 - 18:59 | |
| Qui a écouté le disque de Schiff paru fin 2011 chez ECM ? - Spoiler:
http://www.musicme.com/Andras-Schiff/albums/Robert-Schumann:-Geistervariationen-0028947639091-02.html
Apparemment il serait le premier à proposer la version originale du III. (la version finale est inclus en complément). J'ai écouté ça hier soir, mais faute de documentation, j'ai eu du mal à identifier les différences, même si j'ai ressenti ici ou là des choses qui semblaient sonner de manière inhabituelle. A part ça, c'est plutôt une très belle lecture d'un point de vue "plastique", mais je n'y ai pas trouvé les brisures et l'engagement désespéré qui font les versions ultimes. |
| | | Oudread Mélomane averti
Nombre de messages : 158 Localisation : Bourgogne Date d'inscription : 18/05/2010
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Dim 8 Jan 2012 - 20:04 | |
| "Ma" Fantaisie op. 17 préférée au disque: celle de Pollini chez DG (magnifique 1er mvt, en particulier), couplée avec une très belle Sonate op. 11; et la prise de son est superlative. A mon sens, un grand disque Schumann . |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Schumann - Fantaisie op.17 Mar 31 Juil 2012 - 15:49 | |
| [Tiré du fil « Comprendre les émotions que veut faire passer le compositeur » (page 2), en rubrique générale.] - Mariefran a écrit:
- Pour la Fantaisie de Schumann, je ne suis pas tout à fait d'accord
Avec quoi es-tu en désaccord ? Avec le fait que c'est une œuvre très forte sur le plan formel, ce dont on a discuté là-haut ? (Je suppose bien que ce n'est pas ça. ) Avec le fait que je suis moins enthousiaste que d'autres membres à propos de l'interprétation d'Elisso Virssaladze de cette œuvre ? Avec le fait que Sofronitsky en 1951, en dépit d'une prise de son affreuse, expédie tout le monde en orbite autour de Pluton ? (Mais ça revient à contester que le soleil se lève à l'est. ) |
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