Salle pleine bien sûr pour cette date unique. En ouverture Shéhérazade, l’œuvre d’un Ravel encore étudiant, une de ses premières pour orchestre : l’inspiration mélodique n’est pas très marquante, mais ça s’écoute agréablement, on entend les influences de Debussy, Rimski-Korsakov, et aussi Saint-Saëns. Certains moments annoncent les œuvres futures, comme ce crescendo orchestral sur un rythme obstiné et sourd, qui préfigure le Boléro. La nomenclature assez particulière annonce aussi les recherches de Ravel dans ce domaine.
Entrée en scène de Kantorow pour un concerto de très bonne facture mais qui, à part le 3e mouvement virevoltant et hyper-vif, ne m’a pas entièrement convaincu : si les différents climats du 2e mouvement étaient bien rendus par la recherche de timbres différenciés, à la fois au piano (Kantorow tintinnabule comme personne) et dans les sonorités orchestrales, le rythme et l’atmosphère d’ensemble sont restés un peu trop placides. Joli accompagnement de Mäkelä et de l’OP, qui se sont appliqués à bien suivre le pianiste, brillamment dans le Finale.
Deux bis, Mompou (Cancion y Danza n° 6) et Liszt (Sonetto del Petrarca n° 104), joués dans un esprit de grande liberté, on aurait pu croire à des interprétations de jazz. (bis tout de suite reconnus par Rocktambule, si si je vous assure il est encore vivant.)
Enchaînement intelligent prévu par Mäkelä en 2e partie, entre les quelques minutes des Lachrimæ Antiquæ de Dowland, interprétées par les solistes des cordes, au jeu non vibré d’une belle émotion, et la symphonie de Schumann, dans laquelle Mäkelä a privilégié la transparence, la mise en valeur de la polyphonie, l’équilibre entre les pupitres. Ça a surtout fonctionné dans les deux premiers mouvements, aux différents épisodes bien variés, Mäkelä faisant ressortir avec bonheur tel ou tel groupe d'instruments (altos par exemple). L’Adagio et le Finale ont filé assez droit et la fébrilité schumanienne leur faisait quelque peu défaut.
Pas mal de musiciens invités à l’orchestre : Valeria Kafelnikov de l’Ensemble intercontemporain et des Siècles à la harpe, le cor solo de l’ONDIF, le hautbois du Philharmonique de Strasbourg.
Dans l’ensemble une belle soirée. En présence du roi du Cambodge et de Bruno Monsaingeon.