PP – Schubert 8, Bruckner 9 – Jordan, OP – 29-30/11/23

MERCREDI 29 et JEUDI 30 NOVEMBRE 2023 – 20 H
Grande salle Pierre Boulez, Philharmonie de Paris

Franz Schubert — Symphonie n° 8 « Inachevée »

Anton Bruckner — Symphonie n° 9

Orchestre de Paris
Philippe Jordan, direction
Mohamed Hiber, violon solo (invité)


Concert du mercredi à écouter : https://www.radiofrance.fr/francemusique/podcasts/le-concert-du-soir/symphonie-inachevee-de-schubert-symphonie-n09-de-bruckner-orchestre-de-paris-philippe-jordan-7407085

Magnifique concert hier. Le ton est donné dès les premières mesures de Schubert : équilibre, transparence, cohérence de la sonorité. Attention portée au travail des motifs d’accompagnement (frémissement ostinato des cordes au début de Schubert), aux ruptures et aux transitions, à la différenciation entre les épisodes (sobriété douce et classique du chant puis passage tempétueux beethovénien). De l’élégance, de la fluidité, du mouvement.

Dans Schubert c’était peut-être un chouïa sage pour moi, par contre la symphonie de Bruckner était exemplaire : une lecture maîtrisée, architecturée, aux mille nuances. Jordan exploite la résonance de la salle, ici marquant une longue pause pour obtenir un véritable silence, là reprenant le discours plus rapidement. Grâce au travail sur la différenciation et l’équilibre entre pupitres (pupitres de cordes tous individualisés), les contrechants d’accompagnement se muent insensiblement en motif principal et vice-versa. Les montées en puissance, les climax s’agencent naturellement, les nouveaux thèmes et motifs sont comme suggérés avant d'être déployés. Le trio du Scherzo offre un contraste particulièrement frappant avec le premier thème rageur. Beaucoup de luminosité et de mouvement dans l’Adagio. La coda m’a semblé passer trop vite — je ne suis pas si pressé de rejoindre le bon Dieu —, mais l’accord tenu final de cuivres (cors, tuben wagnériens, trombones, tuba) était sublime.

Ce n’est pas tout à fait la première fois que Jordan se produisait à la tête de l’OP, puisqu’il l’avait dirigé dans Hänsel und Gretel au Châtelet en 2000 (mise en scène de Yannis Kokkos). Ce qu’il a obtenu cette semaine était remarquable et il a montré la chaleur qu’on lui connaît aux saluts, allant serrer la main d’à peu près tout le monde. Mohamed Hiber, natif de Pantin, konzertmeister de l’orchestre du Divan de Barenboim, était invité en violon solo.

Rien de plus à dire, sinon, que le jeudi, après l'accord vers la fin de la symphonie, quelqu'un, sans doute secoué par la dissonance, a fait tomber un objet : le silence n'en était plus un hélas.
Formidable chef d'orchestre qui, en plus de toutes les qualités dont parle Mickt, réussit à donner à l'Orchestre de Paris un son d'une beauté confondante,
après avoir réussi la même chose avec l'Orchestre de l'Opéra.
Si Mâkelä file bientôt à Amsterdam, son remplaçant est tout trouvé. Et en plus Jordan sait dompter les orchestres français !

Les petits mystères de la presse quotidienne : Christian Merlin, qui se fait bien rare dans les pages du Figaro, consacre en retard un article à ce seul concert. Clarté, équilibre, transparence, il a entendu comme nous.

https://www.lefigaro.fr/musique/philippe-jordan-le-chef-d-orchestre-qui-met-de-la-clarte-dans-les-tenebres-20231220