Verdi - Don Carlos

Otello a écrit:

Je note tout de même que depuis près de 50 ans, tous ceux qui, de part et d'autre de la planète, se sont officiellement intéressés à cette discographie convergent à peu près tous dans cette direction.

Ah, c'est sûr qu'il y a cinquante ans, ceux qui cherchaient le meilleur studio devaient globalement converger vers Solti et Giulini, je te l'accorde très volontiers.

Je ne sais pas ce que c'est que s'intéresser officiellement… des critiques ? (Quand on sait comment ils sont recrutés…) Mais ce pourraient bien être les meilleurs profs de chant et musicologues de la planète, ce genre d'argument d'autorité me défrise peu : on parle d'interprétation, alors que des gens décident que Machin a plus la vraie émotion du rôle, ça me fait doucement rigoler. (J'en connais qui se marrent en lisant les pages les plus poignantes de Victor Hugo, d'autres qui sont effrayés par le Sacre du Printemps ou considèrent ça comme de la musique de bal, les mêmes choses n'ont pas le même effet sur tous…)

Même des choses plus objectives comme le volume sonore ou la justesse, le disque rend parfois trompeur ce qu'on entend, et on est obligé de se fonder sur des témoignages pas toujours fiables, ou émis dans des conditions spécifiques (écouter un chanteur au parterre d'un théâtre début XXe, c'est pas comme le faire du fond d'une boîte à chaussures XXIe).

Stefano P a écrit:

Cette histoire de la roture ou de la noblesse d'une interprétation à l'opéra, ça reste quelque chose de très mystérieux pour moi ; je me demande bien sur quels critères on peut se baser pour évaluer les quartiers de noblesse dont seraient chargés ou délestés la voix d'une chanteuse. Par exemple, pour Callas, je conçois que l'on trouve le timbre ingrat, les aigus instables et criards, mais percevoir le côté "roturière" de son Elisabetta, là, ça m'échappe complètement. Il y a chez Callas un grand sens du tragique qu'on ressent dans sa manière de faire vivre le personnage verdien, une façon vraiment poignante d'exprimer la douleur et le désespoir à nu ; Tebaldi s'arrache aussi pas mal dans ce rôle-là, elle va au-delà d'une certaine placidité (ou d'une réserve naturelle si l'on veut être plus positif) qui lui est un peu consubstantielle ; je trouve la Grecque plus intense, mais ça s'arrête là...

Je répondais précisément au caractère profondément subjectif et insaisissable de la chose : à choisir, Callas me paraît plus « sale », plus emphatique, dans le choix du son, des ports de voix… Mais ça n'a pas réellement de sens pour moi non plus (sauf quand Fleming joue les aristocrates déclassées straussiennes, où là, vraiment, je bloque, entendant tout l'inverse – une fille simple qui est montée dans la société).

Cololi a écrit:

Je ne connais pas avec Herrmann …

Herrmann, c'est froid, tranchant : sans appel et sans rémission.

DavidLeMarrec a écrit:

Otello a écrit:

Je note tout de même que depuis près de 50 ans, tous ceux qui, de part et d'autre de la planète, se sont officiellement intéressés à cette discographie convergent à peu près tous dans cette direction.

Ah, c'est sûr qu'il y a cinquante ans, ceux qui cherchaient le meilleur studio devaient globalement converger vers Solti et Giulini, je te l'accorde très volontiers.

Sauf que je n'ai pas dit "il y a 50 ans" mais "depuis près de 50 ans", ce qui est tout à fait différent! Ce qui signifie que tout en étoffant une discographie officielle de plus en plus riche, les versions qui s'y sont ajoutées ces dernières décennies ont été incontestablement passionnantes mais pas au point de bouleverser fondamentalement la tête de peloton!

Ce n'était pas une remarque totalement sérieuse.

Cela dit, on connaît l'effet « première version », donc il n'est pas surprenant que ceux ont vu l'empilement de nouvelles versions en soient restés à celle qu'ils avaient acquis à seize ans avec leurs premières économies…

(Et au demeurant, ce sont deux versions avec de grandes qualités, donc il n'est pas surprenant non plus qu'elles restent bien en cour, mais sont-elles les meilleures, ça n'a pas grand sens en soi.)

Ah ben dès lors que, version Levine mise à part et qui est globalement d'un niveau équivalent, l'ensemble des versions qui les ont précédées (les 2 versions Santini) et suivies (Karajan, Muti, Haitink, Hold-Garrido, Oren), bien que toutes passionnantes, sont nettement moins bonnes, évidemment que oui qu'elles restent en tête de discographie officielle de la version italienne et donc oui ça a du sens.

Pour la version française, le choix est nettement plus réduit et les versions Abbado et de Billy ne sont pas en mesure de détrôner les versions Matheson puis Pappano.