Julius Caesar, Symphonic Epilogue after Shakespeare, Op. 28 ; Symphony No. 2 ; Op. 24, Music for Orchestra, Op. 11 ; Serenade for Small Orchestra, Op. 25 (1954) (
Carlos Kalmar)Voilà 3 jours que je me repasse cet album en boucle (après avoir réussi à me sevrer de la symphonie No. 1 de
Barber), et je trouve cette musique absolument fascinante. Plus je l'écoute et plus elle me plaît et me saisit par sa puissante originalité (malgré le jeu des références auquel je me livre).
Julius Caesar est cinématique en diable. Jamais de dissonances franches mais toujours à la limite, je pense beaucoup à
Alwyn,
Shostakovich (
Hamlet) et
Prokofiev (
Roméo et Juliette) pour les passages tendres. Beaucoup de drame, peu de sourire, quelques instants de magie, voilà un très persuasif poème orchestral.
Music for Orchestra est une pièce beaucoup plus abstraite et sombre. Les inquiétantes percussions qui ouvrent et ponctuent tout le morceau donnent le la. Le degré de dissonances est plus élevé que précédemment sans jamais franchir de limites. On est à mi-chemin entre
Hindemith pour le caractère très abstrait et des tentations
stravinskiennes. Une pièce de ma connaissance aux couleurs similaires serait
Shadows de
Sallinen (rafales de cuivres, atmosphère assombrie), sans les motifs séduisants.
La
Serenade est un bijou absolu ! Allegro initial souriant pas complètement franc, du néo-classicisme façon
Prokofiev. L'Adagio recueilli et d'abord très cordé explore l'inquiétude avant de virer à la marche funèbre. Très beau dans cette ambiance de crépuscule dérangeant. Le Presto constitue mon mouvement favori, roulements de timbales qui accumulent l'énergie avant de jaillir en marche dégingandée, dont la mélodie ne sort pas de la tête. Le thème de
L'Amour des Trois Oranges tout aussi déjanté et étrangement orchestré (folle échappée des bois), en plus obstiné et sombre. L'Allegro final revient à des choses plus héroiques et positives, le fantôme de
Roméo et Juliette mais américain (les appels des cuivres en conclusion !).
Enfin, la symphonie No. 2. Trois mouvements seulement, ouverture très dramatique encore une fois (Kurka saisit l'auditeur par le collet dès les premières notes). L'Andante central, comme l'adagio de la sérénade, commence dans le silence avant de virer à la marche funèbre (ou plutôt, une sorte de cortège qui s'éloigne rapidement). Mais c'est vraiment le Presto final qui déborde de joie de vivre qu'il ne faut pas rater. Américain en diable, je pense à
Copland,
Bernstein et
John Williams.
Réduire Kurka à un épigone de Prokofiev ou du Shosta filmique serait injuste, mais il y a définitivement ce genre de saveurs, américanisées. On pense ici et là à
Hanson (notamment la No. 6) ou
Harris (la No. 3), voire des confrères plus connus cités au cours de cette recension. Je ne saurais trop recommander ce disque qui, par la variété des pièces, pourrait trouver un public large.
J'ai hâte de passer à
The Good Soldier Schweik. Apparemment très influencé par
Kurt Weill, la suite tirée de cet opéra est multi-enregistrée (et très prometteuse). Les problèmes de droits ayant empêché la création ayant pu être réglés, Kurka pu finaliser la rédaction de sa pièce peu de temps avant son décès (à l'âge de 36 ans !) et nous disposons d'un enregistrement par Cédille.