Scriabine/Nemtin: L'Acte préalable

jerome a écrit:

Selon le témoignage de proches de Scriabine, en particulier Leonid Sabaneyev, le compositeur avait initialement prévu de mettre le texte en musique sous forme de mélodrame (récitant accompagné par l'orchestre), de chant choral et d'arias solistes. A un moment il songea même à impliquer Fyodor Chialapin dans l'entreprise, mais renonça rapidement à l'emploi de chanteurs solistes et à la mise en musique de son propre texte.
Les trois parties du cycle réalisé par Alexandr Nemtin sont écrites pour grand orchestre symphonique, choeur mixte (sans paroles), piano soliste, orgue, soprano soliste (2e et 3e parties) et "clavier à lumières". Les forces réunies pour l'interprétation de La Préparation forment un seul organisme, qui vit et respire, comme un océan.

Très intéressant! Scriabine n'était donc pas désintéressé par la voix comme on le dit trop souvent.

Sa seule oeuvre vocale reste le final de la 1ère symphonie en tout cas, il a souvent écrit des textes pour sa musique mais jamais, à cette exception-là, il ne les a mis en musique.

jerome a écrit:

C'est avec ces restes qu'Alexander Nemtin débuta. Il recopia soigneusement toutes les esquisses de Scriabine, les classa par tonalités

Au fait, c'est pas un peu bizarre ça? Dans les derniers opus, il n'y a jamais d'armures, et ce n'est pas parce qu'il n'écrivait qu'en Do M et en en La m. Cela me paraît contradictoire.

C'est pas parce qu'il n'y a pas d'armure qu'une mélodie donnée n'implique pas une certaine tonalité

jerome a écrit:

C'est pas parce qu'il n'y a pas d'armure qu'une mélodie donnée n'implique pas une certaine tonalité

Donc Scriabine n'a jamais cessé de se baser sur la tonalité (dans une certaine mesure)?

C'est une bonne question à poser à Xavier ça : harmoniquement, l'Acte Préalable ça se situe où ?
Une tonalité très élargie ?

Les couleurs atonales ou "cluster" m'ont plutôt l'air d'être dûes à des effets d'orchestration.
Et les plages douces et mystérieuses paraissent parfois construites sur des sortes de longs V altérés.

Globalement c'est bel et bien atonal, je crois qu'il n'y a pas de doutes là-dessus.

Pour les histoires de tonalités, c'est peut-être une maladresse de langage dans le livret du CD. (si ça se trouve par tonalités ils entendent "thème sombre", "thème de feu", etc...)

jerome a écrit:

Et les plages douces et mystérieuses paraissent parfois construites sur des sortes de longs V altérés.

Oui ça ce n'est pas faux, parce que de toute façon même les accords de quarte façon Prométhée découlent d'une dominante "améliorée".

Xavier a écrit:

Globalement c'est bel et bien atonal, je crois qu'il n'y a pas de doutes là-dessus.

Pour les histoires de tonalités, c'est peut-être une maladresse de langage dans le livret du CD. (si ça se trouve par tonalités ils entendent "thème sombre", "thème de feu", etc...)

Oui, c'est bien ce qui me semblait.

J'ai réécouté la version Kondrachine (de la seule 1ère partie, les autres n'étaient pas encore écrites à l'époque) sortie chez Russian disc, il y a un écho bizarre sur le piano (on a l'impression de l'entendre deux fois dès qu'on est forte), c'est moins parfait et moins lisse qu'Ashkenazy, mais c'est assez chouette à écouter, ça sonne vraiment "création" de l'oeuvre, je ne sais pas comme dire ça autrement, ça sonne plus nouveau qu'avec Ashkenazy, le 1er accord (avec les 12 sons!) sonne davantage comme un big bang, une claque orchestrale, alors que chez Ashkenazy ça sonne comme une harmonie somptueuse.
Les tempi sont un peu plus allants. (40 minutes tout juste)
A écouter au moins une fois.
Il y a deux raretés sur le disque, le poème symphonique en ré mineur (1896) et une fantaisie de jeunesse pour piano et orchestre (1888) dont je n'ai pas souvenir.
J'en parlerai peut-être dans le sujet général si ça en vaut la peine.

jerome a écrit:

*Niko a écrit:

La seule oeuvre de Scriabine que je n'ai pas encore écouté...

Franchement les esquisses de Scriabine sont assez succintes, et quand tu vois le machin à l'arrivée... c'est limite du "Nemtine sur une idée de Scriabine", je trouve.

Tu as raison mais le résultat sonne quand même, certes plus post-Scriabine que Scriabine, mais quand même dans une filiation plus que proche!

Et il y a beaucoup de morceaux de vrai Scriabine dedans, ne serait-ce que les pièces opus 69, 71 et 73 notamment qui y sont reprises et orchestrées.

Et dans l'esprit, c'est complètement scriabinien. (en plus du langage)

En cherchant des infos sur Nemtin, je suis tombé là-dessus :
http://www.musica-ukrainica.odessa.ua/a-rovner-nemtin.html

C'est fascinant, on a une bio de Nemtin et une description de l'Acte.
C'est dommage qu'on ne trouve aucune des compositions de Nemtin par chez nous...