De la musique dans la tête

Je voudrais témoigner de ce qui m'arrive de plus en plus et savoir si d'autres sont atteints du même mal.

Depuis que je suis enfant, j'ai de la musique qui me tourne dans la tête. Je pense avoir une bonne mémoire musicale (pas exceptionnelle non plus, je filtre) et, si je suis un pianiste à peu près nul, j'ai la chance d'entendre facilement la partition que je lis.
Là où ça devient grave, c'est qu'en permanence ou presque, je subis un flot musical intérieur, que rien ne peut arrêter. Je ne maîtrise guère le choix de l'oeuvre qui va s'imposer, ça vient comme ça et l'affaire se poursuit, soit sur une boucle assez brève (j'appelle ça le syndrome Boléro), soit dans un continuum qui peut atteindre une très longue durée dans le cas des merveilles que je vénère. C'est ainsi que ne me suis retrouvé, lors d'une randonnée, à écouter dans ma tête la totalité d'un acte de Wagner.
L'affaire se complique encore du fait que désormais, le flux sonore continue, même lorsque je suis en conversation. Je parviens à discuter (même si c'est pour dire des bêtises, comme souvent), tout en suivant avec délectation un quatuor ou un requiem.
L'étape suivante - sans doute le prélude à mon enfermement - commence de poindre : j'écoute un CD à volume normal et en même temps, je suis obligé de subir une autre musique, montant des profondeurs. Et le pire est que ça ne me dérange pas ! Je me suis surpris tout à l'heure, alors que je repassais mes chemises, à gérer sans le moindre problème la superposition de motets de Charpentier (lecteur CD) et la quatrième de Brahms. C'est fort quand même ! Mon cerveau recomposait les choses je ne sais pas comment, mais c'était dense, étrange, à défaut d'être cacophonique.
Je crains le pire si demain, désireux de me plonger dans Schönberg, monte dans mon cerveau dérangé quelque réminiscence de Glass (car, hélas, la non-musique de ce dernier s'est aussi gravée dans mon esprit, du moins quelques fragments ayant eu le tort de tomber sur moi pendant que j'épluchais des pommes de terre).
Voilà donc le tableau clinique, dont je jure qu'il n'est pas forcé. A tout le moins ai-je, aussi souvent que cela est possible, de la musique dans la tête, ce dont je ne me plains nullement. Je rêve en musique, je mange en musique, je pense en musique, je dépense pour la musique, mais là c'est une autre pathologie.
Je mourrai naturellement en musique (l'oeuvre est choisie, c'est un choral de Bach) et, si cela est possible, c'est moi-même qui chanterai le cantus firmus le jour de mes obsèques.
Afin, bien entendu, que d'autres malades comme moi puissent l'entendre... dans leur tête.

Et vous, ça donne quoi ?

Zeno a écrit:

Et vous, ça donne quoi ?

A une époque, je ne pouvais pas dormir, parce que j'avais en permanence de la musique dans la tête, sauf que c'était ma musique, enfin une musique qui n'existait pas encore.
Oh, pas des chefs d'oeuvre perdus, pas d'inquiétude, le plus souvent, des tournures qui revenaient, des enchaînements d'accords, etc...
Surtout quand j'étais enfant et ado en fait.
Parfois il y avait quand même des thèmes notables et j'en faisais des petites compositions.
Bizarrement, à partir du moment où j'ai entamé mes études d'écriture plus sérieuses, ce flot de musique à 90% inintéressante s'est tari...

Une autre chose qui dévie un peu de ta question mais qui correspond toutefois à l'intitulé du sujet: quand j'écoute quelque chose, j'entends immédiatement les notes, les harmonies, etc... même sans le vouloir.
A une époque, c'était aussi une prise de tête, parce que je ne pouvais pas écouter de musique sans entendre la partition défiler et même l'analyser en temps réel.
Je ne sais pas comment ça s'est fait, mais j'ai réussi à prendre du recul par rapport à ça.
J'entends toujours les notes, les harmonies... mais elles ne s'imposent plus à moi de façon agressive, je peux les mettre de côté pour profiter pleinement de la musique.

Ah oui, j'ai connu ça aussi, j'analysais comme un malade. Ca m'a passé (relativement). Au réveil, parfois, "ça" compose tout seul dans ma tête (et c'est plutôt joli ma foi) mais je perds tout très vite.
Non, ce dont je parlais, c'est vraiment des oeuvres existantes qui s'imposent et, le cas échéant, ne me lâchent plus. Avoir un Impromptu de Schubert en soi du matin au soir, comme ça m'est déjà arrivé, je ne sais plus si c'est de l'amour ou l'avatar esthétisé d'une gravissime névrose obsessionnelle.

Ou les deux.

Xavier a écrit:

Une autre chose qui dévie un peu de ta question mais qui correspond toutefois à l'intitulé du sujet: quand j'écoute quelque chose, j'entends immédiatement les notes, les harmonies, etc... même sans le vouloir.
A une époque, c'était aussi une prise de tête, parce que je ne pouvais pas écouter de musique sans entendre la partition défiler et même l'analyser en temps réel.
Je ne sais pas comment ça s'est fait, mais j'ai réussi à prendre du recul par rapport à ça.
J'entends toujours les notes, les harmonies... mais elles ne s'imposent plus à moi de façon agressive, je peux les mettre de côté pour profiter pleinement de la musique.

Impressionnant !

Pour répondre à Zeno, j'ai souvent de la musique qui tourne dans ma tête aussi, sans le vouloir, sans choisir le programme (hélas ). Mais ça ne m'arrive jamais pendant que j'écoute autre chose, ni pendant une discussion d'ailleurs.

Ophanin a écrit:

Impressionnant !

Je précise que ça ne s'applique pas à du Boulez (à part des passages vraiment simples) ou du Stockhausen, hein.

Après, ça dépend du degré, mais je crois que tout le monde, plus ou moins, subisse ce genre de choses.
Quand on siffle une musique, c'est que, consciemment ou non, une musique nous trotte dans la tête.
Et nombre de fois j'entends des gens de mon entourage : tu m'as mis cette musique dans ma tête !
C'est merveilleux cette internalisation de la musique dans le cerveau, non ?

Je crois humblement que lorsqu'on est réceptif à la musique, on a cette faculté à écouter de la musique sans en écouter vraiment. La chose la plus amusante c'est qu'on ne choisit pas vraiment. Si bien qu'on subit des petites folies : "Il faut que j'écoute cette musique !". Un peu comme si vous deviez l'écouter pour en être guéri.

Donc, comme je le disais au début de mon message, tout dépend de la quantité. Quoique... qu'importe ?! Au fond, c'est pareil que de vivre avec la chaîne allumée toute la journée (et au moins, c'est écolo ).
Par contre, oui, quand c'est vraiment obsédant, s'endormir peut être une chose mal aisée.

Justement, quand je me couche, là tout s'arrête. Sans effort. Il faut dire que je m'endors toujours en deux minutes, voire moins. Alors, forcément, à moins de taper dans Webern, je risque d'interrompre l'oeuvre en plein sur une modulation !

Zeno a écrit:

je risque d'interrompre l'oeuvre en plein sur une modulation !

Pense à Donizetti. Tu as le temps de prendre la douche, de te brosser les dents, te raser, te couper les ongles et lire une petite demie-heure au lit avant qu'une modulation ne t'ait troublé.

Perspective vertigineuse : se couper les ongles en écoutant Donizetti.
La vacuité bouddhiste, à côté, c'est Dubaï.

Ca m'arrive très souvent... Il n'y a pas très longtemps en sortant de la piscine c'était l'air d'Aréthuse "Vaine fierté, faible rigueur" du Proserpine de Lully... allez savoir pourquoi Et quand ça arrive en général je me mets à chanter - pas trop fort si je suis dans la rue.

Après l'épisode d'Aréthuse, comme j'étais persuadé de ne pas être le seul dans ce cas, j'avais l'intention d'ouvrir un fil intitulé "ces airs qui vous trottent dans la tête" où chacun aurait pu déposer telle une playlist les airs remontés à la surface au cours de la journée écoulée.

Le pire ce sont les airs qui tournent en boucle. Ca me le fait très souvent avec mes compositeurs préférés. Si j'écoute certaines oeuvres je sais par avance que je vais en avoir pour la journée

Mais le plus amusant ce sont des bribes d'oeuvres qui remontent à la surface sans crier gare et sans qu'on sache très bien pourquoi. D'abord indistinctes en les fredonnant ou en les sifflant elles deviennent de plus en plus précises et on parvient enfin à les identifier. Etrange chose que la mémoire... L'autre jour en remontant le boulevard Richard Lenoir je commence à entendre et à fredonner une mélodie, laquelle devient de plus en plus entêtante et précise, "mais bon sang c'est quoi déjà ce truc ?", finalement j'ai reconnu les danses polovtsiennes de Borodine.

Moi c'est tout les jours ... tout le temps que j'ai de la musique dans la tête ... souvent de l'opéra ...
Ce matin c'était le duo Rigoletto / Sparafucile (ah que j'aurais aimé être basse ...) ... Puis allez savoir pourquoi ... les Ave Maria de Caccini et Gounod ...
C'est finalement très pénible car j'ai tendance à chanter toute la journée - mon grand désespoir étant de ne pas avoir la possibilité de chanter toutes les tessitures.
Il m'arrive aussi que ce soit des symphonies ... Mahler repasse très très souvent en boucle, la Nuit de Schoenberg aussi ... du Bruckner aussi beaucoup.

Quand ça devient vraiment trop obscedant, je fini par écouter.

moi aussi c'est tous les jours... J'ai les notes dans la tête, souvent, sauf quand la musique est vraiment complexe et quand elle mise beaucoup plus sur les harmonies que sur la mélodie. Mais bon la plupart du temps je pense "la do ré sol" et je me prends à imaginer une voix qui n'existe pas, à la tierce par exemple, mais ça peut aussi partir en improvisation totale dans la tonalité.
Aussi, quand j'entends quelqu'un chanter, même dans la rue, je ne peux pas m'empêcher de chanter une tierce au-dessus ou de vouloir compléter ce qu'il chante par une autre voix, même si elle n'existe pas dans la version originale de la chanson. Ce qui m'énerve le plus c'est quand le fait de chanter par-dessus ma copine, par exemple, la perturbe et fait qu'elle se met à vouloir chanter la même voix que moi alors que j'étais si content d'entendre l'harmonie de nos deux voix

Ah, ça j'en connais pas mal comme ça qui ont le tic de vouloir absolument créer des voix complémentaires

Bon, moi aussi j'ai souvent des choses dans la tête. Je ne les ai pas particulièrement analysées, mais en tout cas, c'est très rarement ce que travaille à l'instrument.

Très souvent j'ai L'home de l'aristo des Suburbis de Mompou dans la tête, et c'est affreux, je dois l'écouter au moins cind fois de suite pour être satisfait.

Vous avez des méthodes pour vous débarrasser d'une musique dans la tête ?
Il m'arrive aussi constamment d'avoir de la musique dans la tête. Seulement il m'arrive aussi quelques fois dans avoir une qui ne me lâche plus du levé au couché !
Il y a bien des moments de pause, quelques autres oeuvres qui viennent se glisser dans mon esprit l'histoire d'un moment, mais qui finissent toujours par repartir. Il m'arrive même de me réveiller le lendemain matin et de constater que ça recommence, ou plutôt que ça continu !! (j'ai eu une période comme ça avec Carmen, impossible de m'en défaire pendant des jours !).
Alors que faire !? Ne me dites pas qu'il faut chanter à voix haute, ça ne fait qu'empirer ! Ne me dites pas non plus qu'il faut que j'écoute autre chose, ça ne marche pas souvent !
Il y a t'il vraiment une solution ! Et puis après tout est-ce vraiment grave ?

Bonjour.

Ben moi ce que je fais dans ces cas là, c'est jutement d'ecouter le dit morceau de musique a plein les ballons genre sur la chaine assez fort.

Bon ça m'arrive assez rarement, et c'est notemment quand je suis fatiguéou stressé). et je trouve ça plutot désagréable surtout que je n'ai visblement pas la capacité mémorielle de me passer une mouvement symphonique en entier (comme quelqu'un le mentionne plus haut) du coup je boucle sur quelque mesure seulement.(ça m'arrive souvent avec des morceaux tres melodique (quatuor 14 de schubert, un morceau de symphonie de mahler...). la dernière fois que cela m'a fait ça c'est avec le finale de la septième sonate de prokofiev.

Bon des fois c'est aussi avec de la variété que ça me le fait. et pas la meilleurs, genre les tubes top 50 des années 80/90...

Citation :

Vous avez des méthodes pour vous débarrasser d'une musique dans la tête ?

Il a des jours où j'ai le concerto pour violon No.1 de Prokofiev, la 7ème de Bruckner ou bien d'autre dans la tête, d'une manière obsédante. Pour l'enlever, soit je l'écoute, ou si j'en ai pas la possibilité, je m’intéresse ardemment à ce qui m'entoure, je fais en sorte que ce qui se passe autour de moi devienne intéressant ( par exemple je m'amuse à draguer la fille à côté de moi ) afin de me sortir de ma torpeur... Se débarrasser de sa pensée en s'accrochant au monde extérieur ça a toujours été un bon moyen, du moins pour moi

Blestheme a écrit:

( par exemple je m'amuse à draguer la fille à côté de moi ) afin de me sortir de ma torpeur...

Ha oui, tout simplement.

Blestheme a écrit:

( par exemple je m'amuse à draguer la fille à côté de moi ) afin de me sortir de ma torpeur...

Et si tu n'es entouré que de garçon ?

Il cause gonzesses.

Citation :

Et si tu n'es entouré que de garçon ? Surprised

J'essayerai d'avoir des conversations intéressantes ( qui portent sur autre chose que sur les " gonzesses " )

Visiblement, l'humour ne passe pas. Tu tends pourtant bien la perche ^^

Citation :

Visiblement, l'humour ne passe pas

Sinon pour revenir plus dans le thème, en général je chante ce que j'ai dans la tête. Du coup, beaucoup de personnes autour de moi commencent à connaître LULLY.

Cleme a écrit:

Sinon pour revenir plus dans le thème, en général je chante ce que j'ai dans la tête. Du coup, beaucoup de personnes autour de moi commencent à connaître LULLY.

C'est terrible, pour moi ça ne marche absolument pas ! Au contraire le fait de m'entendre chanter va encrer plus précisément la musique dans ma tête

Ah mais je n'ai pas dit que ça marchait, mais je ne peux pas m'en empêcher, c'est plus fort que moi

Rav-phaël a écrit:

Cleme a écrit:

Sinon pour revenir plus dans le thème, en général je chante ce que j'ai dans la tête. Du coup, beaucoup de personnes autour de moi commencent à connaître LULLY.

C'est terrible, pour moi ça ne marche absolument pas ! Au contraire le fait de m'entendre chanter va encrer plus précisément la musique dans ma tête

Pour essayer d'échapper au thème obsessionnel qui tourne en boucle dans la tête, tu peux peut-être essayer d'écouter ... le Boléro (facile, je sais, mais trop tentant).